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10/09/2014 | FRANCE | N°13-17436

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 septembre 2014, 13-17436


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 27 septembre 2012), que la Caisse d'épargne de Lorraine Champagne-Ardenne a consenti deux prêts à M. X... ; que celui-ci a adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par le prêteur auprès de la société Caisse nationale de prévoyance assurances afin de garantir divers risques dont celui d'une incapacité totale de travail ; qu'il a bénéficié de la couverture du risque précité du 12 juin 2007 au 29 juin 2009, l'assureur ayant ens

uite refusé d'accorder sa garantie au motif que les conditions de celle-ci n...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 27 septembre 2012), que la Caisse d'épargne de Lorraine Champagne-Ardenne a consenti deux prêts à M. X... ; que celui-ci a adhéré au contrat d'assurance de groupe souscrit par le prêteur auprès de la société Caisse nationale de prévoyance assurances afin de garantir divers risques dont celui d'une incapacité totale de travail ; qu'il a bénéficié de la couverture du risque précité du 12 juin 2007 au 29 juin 2009, l'assureur ayant ensuite refusé d'accorder sa garantie au motif que les conditions de celle-ci n'étaient plus réunies ; que, le 9 mars 2010, M. X... a assigné l'assureur en rétablissement de la couverture du risque ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit interpréter le contrat en se référant à l'ensemble de ses stipulations ; qu'une clause imposant à l'assuré de communiquer à l'assureur la décision de l'organisme social relative à son invalidité doit être prise en compte car elle peut laisser croire à l'assuré que ladite décision a une incidence sur la notion contractuelle d'incapacité temporaire de travail, surtout si cette notion est comparable à celle du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, la garantie incapacité totale de travail du contrat d'assurance de M.
X...
prévoyait que l'assuré est en état d'incapacité totale de travail lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de quatre-vingt-dix jours, il se trouve dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle ; que le contrat ne précisait pas que la garantie incapacité totale de travail était distincte de la notion d'invalidité au sens du code de la sécurité sociale, pourtant comparable ; que de surcroît, son article 9 précisait qu'en cas d'incapacité totale de travail, les assurés assujettis au régime général de la sécurité sociale devaient produire « le titre de deuxième ou troisième catégorie d'une pension de l'assurance invalidité définie à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale », pouvant ainsi laisser penser que la décision de l'organisme social était une condition de la garantie ; qu'en retenant que la clause relative à l'incapacité totale de travail était claire et dénuée de toute ambiguïté, après avoir refusé d'interpréter le contrat en se référant à son article 9, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1135 du code civil ;
2°/ que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels s'interprètent, en cas de doute, dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non-professionnel ; que pour débouter M. X... de sa demande de prise en charge, par l'assureur, des échéances du prêt au titre de la garantie incapacité totale de travail après le 30 juin 2009, la cour d'appel a considéré que M. X... n'était plus en incapacité totale de travail à compter de cette date car selon les deux médecins, il pouvait exercer une activité professionnelle quand bien même il ne pouvait exercer sa profession d'avant le sinistre, et alors même qu'il avait été classé en invalidité de 2e catégorie par la caisse primaire d'assurance maladie ; qu'en interprétant ainsi une clause ambiguë au regard de l'incertitude pesant sur le terme incapacité totale de travail en un sens qui n'était pas le plus favorable pour le bénéficiaire de l'assurance, la cour d'appel a violé l'article L. 133-2 du code de la consommation ;
3°/ que les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; que la cour d'appel a décidé que M. X... n'était plus en incapacité totale de travail au-delà du 29 juin 2009 car selon les conclusions de deux experts médicaux, il pouvait exercer une activité professionnelle autre que celle qu'il exerçait à la date du sinistre ; que pourtant, comme l'avaient retenu les premiers juges, M. X... était un homme âgé de presque 55 ans qui exerçait avant l'arrêt de travail la profession de vitrier, poseur de fenêtres et de portes, et auparavant celle d'ouvrier en usine, de sorte qu'il n'apparaissait pas possible en pratique, compte tenu de son âge et de son parcours professionnel, de retrouver un emploi compatible avec les capacités limitées dont il disposait au regard de son état de santé ; qu'en refusant de condamner la société Caisse nationale de prévoyance assurances à prendre en charge les échéances des prêts de M. X... au titre de la garantie incapacité totale de travail, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1135 du code civil ;
Mais attendu qu'en raison de leur différence d'objet, le premier définissant le risque couvert et le second les formalités requises après sa réalisation, aucune ambiguïté relative aux conditions d'octroi de la garantie litigieuse ne pouvait naître du rapprochement des articles 2 et 9 du contrat d'assurance dont l'interprétation n'était dès lors pas nécessaire et que l'assureur a exécuté de bonne foi au regard de la définition fonctionnelle du risque ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Pierre X... de sa demande de condamnation de la CNP ASSURANCES à prendre en charge les échéances des prêts contractés auprès de la Caisse d'Epargne de Lorraine Champagne-Ardennes, à compter du 30 juin 2009 au titre de la garantie Incapacité Totale de Travail ;
Aux motifs que « la garantie Incapacité Totale de Travail est définie de la façon suivante à l'article 2 du contrat liant les parties : « l'assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours (dite délai de carence) il se trouve, sur prescription médicale, à la suite d'une maladie ou d'un accident dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle (ou s'il n'exerce pas ou n'exerce plus d'activité professionnelle, d'observer un repos complet le contraignant à interrompre ses activités habituelles) » ;qu'il est précisé à l'article 8 de ce contrat que la garantie Incapacité Totale de Travail « cesse de plein droit lorsque l'assuré a la capacité d'exercer une activité, même partielle », cette précision étant apportée en caractère gras ;que la clause est parfaitement claire, et dénuée de toute ambiguïté, de sorte qu'il n'y a pas matière à l'interpréter comme entend le faire l'intimé ; que cette clause doit recevoir application, sous peine de dénaturation de la convention ;Qu'il s'ensuit que l'état de santé de M. Pierre X... doit être apprécié au regard de cette définition contractuelle, étant rappelé que le juge n'est pas lié par la décision de la sécurité sociale classant l'intéressé dans l'une des catégories d'invalides, dès lors qu'une telle décision répond à des critères propres au droit social et au droit du travail et distincts de ceux retenus par les parties aux termes du contrat ;Attendu qu'en l'espèce, la CNP ASSURANCES a mis fin à la prise en charge au titre de la garantie ITT à compter du 29 juin 2009 au vu des conclusion du docteur Y..., médecin contrôleur ;qu'en effet ce médecin a conclu que M. Pierre X... n'est pas capable du fait de son état de santé global d'exercer la profession exercée au jour du sinistre, mais est capable d'exercer totalement une autre activité professionnelle ainsi que des activités privées non professionnelles, estimant à 35 % le taux d'incapacité fonctionnelle ; que cet expert, après avoir rappelé que l'intéressé présente une bronchopneumopathie chronique obstructive avec emphysème, a précisé que M. X... pouvait effectuer des travaux légers sans efforts physiques importants ni port de charges, sans exposition aux intempéries ;Qu'un deuxième expert est intervenu sur conciliation, le Dr Z..., dont le rapport est produit en cours de délibéré sur autorisation donnée par la cour lors des débats ; que les conclusions du Dr Z... concordent avec celles du Dr Y... ; qu'en effet même si le second expert note une aggravation du déficit respiratoire, l'amenant ainsi à évaluer à 40% le déficit fonctionnel en droit commun, pour autant le Dr Z... conclut également que M. X... est en état clinique d'exercer une activité non physique, sédentaire, sans port ou soulèvement de charges et sans exposition aux intempéries ;Attendu qu'il ressort de ces éléments médicaux que M. Pierre X... est apte à reprendre une activité même s'il n'est plus en mesure d'exercer les fonctions qu'il exerçait antérieurement ; qu'au vu de ces éléments, les premiers juges ne pouvaient en se livrant à une estimation des possibilités de reconversion professionnelle, sans ajouter une condition non prévue au contrat et dès lors dénaturer la convention liant les parties, considérer que l'état de santé de M. X... répondait toujours à la définition contractuelle de l'incapacité totale de travail ;Attendu que pour remettre en cause les conclusions convergentes des deux experts, l'intimé ne produit aucun certificat de son médecin traitant ni pièce médicale justifiant de son état de santé ;Qu'il se prévaut exclusivement de son classement en invalide 2ème catégorie à compter du 1er avril 2008 par la CPAM de SARREGUEMINES, et du taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 % qui lui a été reconnu, étant souligné que la carte d'invalidité qu'il produit précise bien que ce taux est « apprécié selon le guide barème figurant à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles » ;Or, attendu qu'il a déjà été rappelé que le juge n'est pas lié quant à l'état de santé par la décision de la sécurité sociale ; que les développements de l'intimé, quant à l'inopposabilité de ces décisions de sécurité sociale non spécifiée au contrat, sont dès lors inopérants ;Qu'il ne peut utilement se prévaloir de la décision du Conseil d'Etat du 17 mai 1999 qui traite de la définition de l'invalidité au regard des dispositions du code du travail et des conditions d'attribution de l'allocation de solidarité spécifique, dès lors que les critères de l'invalidité en matière de sécurité sociale et d'incapacité selon la définition contractuelle ne se confondent pas ;Qu'il ne peut davantage invoquer une absence ou une disparition de la cause du contrat d'assurance ;Qu'enfin, s'il fait remarquer que l'article 9 du contrat précise les pièces justificatives à produire parmi lesquelles l'attestation de 2ème catégorie conditionne la prise en charge, il faut observer que cet article 9 traite des formalités à remplir pour bénéficier des prestations, globalement pour les garanties décès, invalidité permanente et absolue ainsi qu'incapacité totale de travail, et qu'il est simplement indiqué que « doivent être produits en outre, pour les assurés assujettis au régime général de la Sécurité Sociale..dès réception : le titre de deuxième ou troisième catégorie d'une pension d'invalidité définie à l'article L 341-4 du code de la sécurité sociale, ou le titre de rente pour incapacité en cas d'accident du travail ou maladie professionnelle », sans pour autant que la justification d'une pension d'invalidité de 2ème ou 3ème catégorie ne soit exigée comme condition spécifique d'obtention de la garantie incapacité totale de travail ;Attendu que dans ces conditions M. Pierre X... ne justifie pas se trouver, au-delà du 29 juin 2009, en incapacité totale de travail au sens de la définition contractuelle, de sorte qu'il ne peut prétendre à une prise en charge à ce titre par la CNP ASSURANCES du remboursement des emprunts souscrits, et ce contrairement à ce qui a été décidé par les premiers juges ; que le jugement entrepris doit en conséquence être réformé en toutes ses dispositions, et M. Pierre X... débouté de l'ensemble de ses demandes » (arrêt p 4 à 6) ;
1- Alors que le juge doit interpréter le contrat en se référant à l'ensemble de ses stipulations ; qu'une clause imposant à l'assuré de communiquer à l'assureur la décision de l'organisme social relative à son invalidité doit être prise en compte car elle peut laisser croire à l'assuré que ladite décision a une incidence sur la notion contractuelle d'Incapacité Temporaire de Travail, surtout si cette notion est comparable à celle du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, la garantie ITT du contrat d'assurance de M.
X...
prévoyait que l'assuré est en état d'ITT lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours, il se trouve dans l'obligation d'interrompre totalement toute activité professionnelle ; que le contrat ne précisait pas que la garantie ITT était distincte de la notion d'invalidité au sens du code de la sécurité sociale, pourtant comparable ; que de surcroît, son article 9 précisait qu'en cas d'ITT, les assurés assujettis au régime général de la sécurité sociale devaient produire « le titre de deuxième ou troisième catégorie d'une pension de l'assurance invalidité définie à l'article L 341-4 du code de la sécurité sociale », pouvant ainsi laisser penser que la décision de l'organisme social était une condition de la garantie ; qu'en retenant que la clause relative à l'ITT était claire et dénuée de toute ambiguïté, après avoir refusé d'interpréter le contrat en se référant à son article 9, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1135 du code civil ;
2 - Alors que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs ou aux non-professionnels s'interprètent, en cas de doute, dans le sens le plus favorable au consommateur ou au nonprofessionnel ; que pour débouter M. X... de sa demande de prise en charge, par l'assureur, des échéances du prêt au titre de la garantie ITT après le 30 juin 2009, la cour d'appel a considéré que M. X... n'était plus en ITT à compter de cette date car selon les deux médecins, il pouvait exercer une activité professionnelle quand bien même il ne pouvait exercer sa profession d'avant le sinistre, et alors même qu'il avait été classé en invalidité de 2ème catégorie par la CPAM ; qu'en interprétant ainsi une clause ambiguë au regard de l'incertitude pesant sur le terme ITT en un sens qui n'était pas le plus favorable pour le bénéficiaire de l'assurance, la cour d'appel a violé l'article L 133-2 du code de la consommation ;
3 ¿ Alors subsidiairement que les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; que la Cour d'appel a décidé que M. X... n'était plus en ITT au-delà du 29 juin 2009 car selon les conclusions de deux experts médicaux, il pouvait exercer une activité professionnelle autre que celle qu'il exerçait à la date du sinistre ; que pourtant, comme l'avaient retenu les premiers juges, M. Pierre X... était un homme âgé de presque 55 ans qui exerçait avant l'arrêt de travail la profession de vitrier, poseur de fenêtres et de portes, et auparavant celle d'ouvrier en usine, de sorte qu'il n'apparaissait pas possible en pratique, compte tenu de son âge et de son parcours professionnel, de retrouver un emploi compatible avec les capacités limitées dont il disposait au regard de son état de santé ; qu'en refusant de condamner la CNP à prendre en charge les échéances des prêts de M.RAMM au titre de la garantie ITT, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1135 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-17436
Date de la décision : 10/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 27 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 sep. 2014, pourvoi n°13-17436


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.17436
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