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02/12/2014 | FRANCE | N°12-29916

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 décembre 2014, 12-29916


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Les Hauts de Saint-Raphaël que sur le pourvoi incident relevé par la société BDP promotion ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 septembre 2012, rectifié par arrêt du 16 octobre 2012) et les productions, que la société BDP promotion, qui avait acquis un tènement immobilier en vue d'y réaliser un ensemble de bâtiments, a été mise en liquidation judiciaire le 25 mars 2010 ; que par ordonnance du 5 décembre 2011, le juge-commi

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Les Hauts de Saint-Raphaël que sur le pourvoi incident relevé par la société BDP promotion ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 septembre 2012, rectifié par arrêt du 16 octobre 2012) et les productions, que la société BDP promotion, qui avait acquis un tènement immobilier en vue d'y réaliser un ensemble de bâtiments, a été mise en liquidation judiciaire le 25 mars 2010 ; que par ordonnance du 5 décembre 2011, le juge-commissaire a autorisé la vente de gré à gré, au profit de la société Cap miroirs, filiale de la Société générale, de droits immobiliers dont la société BDP promotion était titulaire ; que cette dernière et la société Les Hauts de Saint-Raphaël, candidat acquéreur évincé, ont relevé appel de cette décision ;
Sur la recevabilité du pourvoi principal, contestée par la Société générale et la société Cap miroirs :
Attendu qu'il est soutenu que le candidat acquéreur évincé n'a aucune prétention à faire valoir ;
Mais attendu que la société Les Hauts de Saint-Raphaël, qui demande la cassation du chef de dispositif de l'arrêt ayant déclaré son appel irrecevable, a un intérêt légitime à invoquer l'éventuelle méconnaissance par la cour d'appel des dispositions relatives à l'exercice des voies de recours ; que son pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique de ce pourvoi :
Attendu que la société Les Hauts de Saint-Raphaël fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article R. 642-37-1 du code de commerce, le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l'article L. 642-18 est formé devant la cour d'appel ; que cette disposition ne pose aucune limite au droit de former appel à l'encontre des ordonnances du juge-commissaire ; que l'appel de l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un actif d'un débiteur en liquidation judiciaire à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente au profit de l'auteur d'une offre concurrente n'est donc pas irrecevable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;
2°/ que l'article 6 paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit à chacun le droit à ce qu'un tribunal connaisse de toute contestation relative à ses droits et obligations de caractère civil et consacre de la sorte le droit d'accès à un tribunal ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé par la société Les Hauts de Saint-Raphaël à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire qui n'a pas retenu son offre d'acquisition, ce qui suffisait à caractériser son intérêt à agir, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;
Mais attendu qu'ayant énoncé que l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un actif d'un débiteur en liquidation judiciaire, n'ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, n'était pas recevable à exercer un recours contre la décision du juge-commissaire autorisant ou ordonnant la vente au profit de l'auteur d'une offre concurrente et que, n'ayant pas la qualité de partie, il ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour d'appel en a exactement déduit que l'appel de la société Les Hauts de Saint-Raphaël n'était pas recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur la recevabilité du pourvoi incident, contestée par la Société générale et la société Cap miroirs :
Attendu qu'il est soutenu que formé hors du délai pour agir à titre principal, le pourvoi incident est irrecevable au double motif qu'il ne découle pas du pourvoi principal et que ce dernier recours n'est pas lui-même recevable ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant été visée par le pourvoi principal, la société BDP promotion était recevable à former un pourvoi incident en application des dispositions de l'article 548 du code de procédure civile, auquel renvoie l'article 614 du même code ;
Et attendu, d'autre part, que le pourvoi principal étant recevable, la seconde cause d'irrecevabilité invoquée est sans objet ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique de ce pourvoi :
Attendu que la société BDP promotion fait grief à l'arrêt d'autoriser la vente de gré de gré de droits immobiliers dont elle était titulaire à la société Cap miroirs alors, selon le moyen :
1°/ que le dirigeant de fait de la personne morale en liquidation judiciaire n'est pas admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre ; que, a la qualité de dirigeant de fait, celui qui exerce en toute indépendance une activité positive de direction dans la société ; que la société BDP promotion faisait valoir que le fait, pour la Société générale, d'avoir fait entrave au paiement par ses soins de l'impôt sur les sociétés qu'elle devait, caractérisait une mainmise totale sur la société, caractéristique d'une gestion de fait, de sorte que la Société générale n'était pas en droit de présenter une offre d'acquisition des actifs immobiliers, par l'intermédiaire de sa filiale, la société Cap miroirs ; qu'en se bornant à affirmer que la gestion de fait de la société BDP promotion par la Société générale n'était pas caractérisée, sans répondre à ces conclusions, selon lesquelles la décision de faire obstacle au paiement de l'impôt suffisait à caractériser une gestion de fait, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le dirigeant de fait de la personne morale en liquidation judiciaire n'est pas admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre ; que, a la qualité de dirigeant de fait, celui qui exerce en toute indépendance une activité positive de direction dans la société ; qu'en se bornant à affirmer que la présence de la Société générale aux audiences du juge-commissaire était justifiée par sa qualité de créancier inscrit sur l'immeuble, de sorte qu'elle ne traduisait pas l'existence d'une direction de fait de sa part, sans rechercher, comme elle y était invitée, si à cette occasion, la Société générale avait fait obstacle à toute offre d'acquisition qui était présentée, ou à tout le moins, était intervenue de manière constante dans l'examen des offres, ce qui suffisait à caractériser une gestion de fait et ce qui faisait obstacle à ce que la Société générale présente une offre d'acquisition des actifs, par l'intermédiaire de sa filiale, la société Cap miroirs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 642-3 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'en vertu des stipulations de l'ouverture de crédit, d'un montant de 7 000 000 euros, consentie par la Société générale à la société BDP promotion, tous les mouvements de fonds afférents à l'opération immobilière financée devaient transiter par la banque qui recevait les paiements, effectuait les règlements, pouvait différer ou refuser de régler une dépense non exigible ou non justifiée par l'objet du crédit et avait la possibilité de surveiller la marche des travaux, l'arrêt retient que ni ces mesures de surveillance stricte, justifiées par l'ampleur des fonds prêtés, ni la présence de la Société générale aux audiences du juge-commissaire en sa qualité de créancière inscrite sur l'immeuble ne caractérisent une direction de fait ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre la société BDP promotion dans le détail de son argumentation, ni d'effectuer la recherche, inopérante, invoquée par la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Condamne les sociétés Les Hauts de Saint-Raphaël et BDP promotion aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Les Hauts de Saint-Raphaël.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit irrecevable l'appel de la société Les Hauts de Saint-Raphael SCCV ;
AUX MOTIFS QUE « l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un actif d'un débiteur en liquidation judiciaire, n'ayant aucune prétention à soutenir au sens des articles 4 et 31 du code de procédure civile, n'est pas recevable à exercer un recours contre la décision du juge commissaire autorisant ou ordonnant la vente au profit de l'auteur d'une offre concurrente ; qu'ainsi, l'appel diligenté par la Les Hauts de Saint-Raphael SCCV, candidat évincé, est irrecevable, sans que cette société, qui n'a pas et n'a jamais eu la qualité de partie, puisse valablement se prévaloir des dispositions de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l'homme ; que, compte tenu de cette irrecevabilité, il n'y a pas lieu d'examiner l'argumentaire de fond de la SCCV Les Hauts de Saint-Raphael SCCV » ;
1°/ ALORS, d'une part, QU'aux termes de l'article R. 642-37-1 du code de commerce, le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l'article L. 642-18 est formé devant la cour d'appel ; que cette disposition ne pose aucune limite au droit de former appel à l'encontre des ordonnances du juge-commissaire ; que l'appel de l'auteur d'une offre d'acquisition de gré à gré d'un actif d'un débiteur en liquidation judiciaire à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente au profit de l'auteur d'une offre concurrente n'est donc pas irrecevable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;
2°/ ALORS, d'autre part et en toute hypothèse, QUE l'article 6 par. 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantit à chacun le droit à ce qu'un tribunal connaisse de toute contestation relative à ses droits et obligations de caractère civil et consacre de la sorte le droit d'accès à un tribunal ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé par la société Les Hauts de Saint-Raphael SCCV à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissionnaire qui n'a pas retenu son offre d'acquisition, ce qui suffisait à caractériser son intérêt à agir, la cour d'appel a violé la disposition susvisée.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société BDP promotion.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'attaqué d'avoir autorisé la SELARL GOMIS, en sa qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la Société BDP PROMOTION, à vendre de gré de gré à la Société CAP MIROIRS, au prix de 5.382.000 euros TTC, l'intégralité des droits immobiliers et droits à construire dont la Société BDP PROMOTION reste titulaire sur le tènement immobilier sis à Saint-Raphaël, 2 rue de la Placetaz, cadastré section A n° 1279, 2893, 2895, 8196, tel que décrit au rapport d'expertise de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS QUE la Société BDP PROMOTION conclut à l'infirmation de l'ordonnance entreprise au motif que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE se serait comportée comme son dirigeant de fait et qu'elle ne pourrait donc, sauf a violer l'interdiction posée par l'article L 642-3 du Code de commerce, présenter une offre d'acquisition via sa filiale la Société CAP MIROIRS ; que cette disposition, qui concerne la cession d'entreprise, a été étendue aux cessions d'actifs par l'article L 642-20 du Code de commerce ; que la qualité de dirigeant de fait d'une personne morale implique une activité positive et indépendante d'administration générale, l'accomplissement en toute indépendance d'actes positifs de direction et de gestion ; que, certes, l'ouverture de crédit consentie par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE à la Société BDP PROMOTION, d'un montant de 7.000.000 euros, était assortie de dispositions contraignantes, tous les mouvements de fonds afférents à l'opération immobilière financée devant transiter par la banque qui recevait les paiements et effectuait les règlements après vérification de l'exactitude des justificatifs fournis à cet effet, pouvait différer ou refuser de régler une dépense non exigible ou non justifiée par l'objet du crédit et avait la possibilité de surveiller, en se rendant sur le chantier, la marche des travaux ; que, toutefois, ces mesures de conseil et de surveillance stricte, justifiées par l'ampleur des fonds prêtés, ne constituent pas une activité positive et indépendante d'administration générale caractérisant une direction de fait ; qu'aucun justificatif n'est produit, de ce que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE aurait empêché la Société HAUSSMANNIA de financer l'offre qu'elle avait présentée ; que la présence de la SOCIÉTE GENERALE aux audiences du juge-commissaire, alors qu'elle avait la qualité de créancière inscrite sur l'immeuble, ne traduit pas l'existence d'une direction de fait de sa part ; que le moyen soulevé par la Société BDP PROMOTION ne peut donc être retenu ; que l'offre de la Société CAP MIROIRS, entérinée par le premier juge, présente toute garantie financière, ce qui n'est pas le cas de celle formulée par la Société LOCATION GESTION PARTICIPATION CONSTRUCTION et de celle présentée par la Société SP3I, qui ne produisent strictement aucun justificatif de leur capacité à régler les prix qu'elles proposent ; qu'en définitive, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise ;
1°) ALORS QUE le dirigeant de fait de la personne morale en liquidation judiciaire n'est pas admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre ; que, a la qualité de dirigeant de fait, celui qui exerce en toute indépendance une activité positive de direction dans la société ; que la Société BDP PROMOTION faisait valoir que le fait, pour la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, d'avoir fait entrave au paiement par ses soins de l'impôt sur les sociétés qu'elle devait, caractérisait une mainmise totale sur la société, caractéristique d'une gestion de fait, de sorte que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE n'était pas en droit de présenter une offre d'acquisition des actifs immobiliers, par l'intermédiaire de sa filiale, la Société CAP MIROIRS ; qu'en se bornant à affirmer que la gestion de fait de la Société BDP PROMOTION par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE n'était pas caractérisée, sans répondre à ces conclusions, selon lesquelles la décision de faire obstacle au paiement de l'impôt suffisait à caractériser une gestion de fait, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le dirigeant de fait de la personne morale en liquidation judiciaire n'est pas admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre ; que, a la qualité de dirigeant de fait, celui qui exerce en toute indépendance une activité positive de direction dans la société ; qu'en se bornant à affirmer que la présence de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE aux audiences du Juge-commissaire était justifiée par sa qualité de créancier inscrit sur l'immeuble, de sorte qu'elle ne traduisait pas l'existence d'une direction de fait de sa part, sans rechercher, comme elle y était invitée, si à cette occasion, la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE avait fait obstacle à toute offre d'acquisition qui était présentée, ou à tout le moins, était intervenue de manière constante dans l'examen des offres, ce qui suffisait à caractériser une gestion de fait et ce qui faisait obstacle à ce que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE présente une offre d'acquisition des actifs, par l'intermédiaire de sa filiale, la Société CAP MIROIRS, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 642-3 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-29916
Date de la décision : 02/12/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 16 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 déc. 2014, pourvoi n°12-29916


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29916
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