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16/04/2015 | FRANCE | N°13-28452

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 avril 2015, 13-28452


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 5 novembre 2013), que M. X..., engagé à compter du 30 juin 2004 en qualité de chef de service par l'association Oeuvre hospitalière de nuit, aux droits de laquelle est venue l'association Emergence(s), a été mis à pied du 14 au 16 avril 2010 pour avoir exercé pendant son temps de travail une activité d'auto-entrepreneur ; qu'il a été placé en arrêt de travail pour maladie du 3 au 11 avril 2010, du 3 au 14 septembre 2010, puis à compter du 17 septembre 2010 au 8 mars

2011, et enfin du 28 novembre 2011 au 31 mai 2012 ; que, déclaré inap...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 5 novembre 2013), que M. X..., engagé à compter du 30 juin 2004 en qualité de chef de service par l'association Oeuvre hospitalière de nuit, aux droits de laquelle est venue l'association Emergence(s), a été mis à pied du 14 au 16 avril 2010 pour avoir exercé pendant son temps de travail une activité d'auto-entrepreneur ; qu'il a été placé en arrêt de travail pour maladie du 3 au 11 avril 2010, du 3 au 14 septembre 2010, puis à compter du 17 septembre 2010 au 8 mars 2011, et enfin du 28 novembre 2011 au 31 mai 2012 ; que, déclaré inapte à reprendre son poste par le médecin du travail le 14 juin 2012, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 20 août 2012 ; que, demandant l'annulation de la sanction et soutenant avoir été victime de harcèlement moral, il a saisi la juridiction prud'homale le 18 mars 2010 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler la mise à pied prononcée le 5 mars 2010, de le condamner au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire, des congés payés et de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier la proportionnalité de la sanction au regard des fautes imputées au salarié en considération tant de l'atteinte portée aux intérêts de l'entreprise que des responsabilités attribuées au salarié ; qu'en décidant que la faute commise par M. X... ne justifiait pas de prononcer une mise à pied en raison de son caractère unique, d'autant qu'il y avait mis fin le 23 février 2010, soit la veille de l'entretien préalable, après avoir constaté qu'il avait commis une faute disciplinaire pour avoir exercé une activité professionnelle durant ses horaires de travail en mentionnant sur le site internet ouvert pour l'exploitation de son entreprise qu'il était joignable sur son téléphone portable pendant ses heures de travail et sur son lieu de travail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la défense des intérêts de l'employeur ne nécessitait pas de prononcer la sanction d'une mise à pied pendant trois jours dès lors que l'exercice par M. X... d'une activité individuelle pour son propre compte compromettait l'exercice des fonctions de direction dont il était investi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-2 du code du travail, ensemble le principe de proportionnalité ;
2°/ qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions par lesquelles l'association Emergence(s) a soutenu que l'exécution par M. X... pour son propre compte d'une activité proportionnelle sur son lieu de travail justifiait d'autant plus le prononcé d'une mise à pied qu'elle était incompatible avec son niveau de responsabilité et ses fonctions de direction qui le conduisaient à surveiller 82 salariés, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. lequel, l'a, par jugement du 3 juillet 2012, débouté de l'ensemble de ses demandes ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, constatant que le salarié avait commis un fait unique limité dans le temps auquel, sur observation de l'employeur, il avait immédiatement mis fin, a estimé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail, que la sanction disciplinaire prononcée par l'employeur était manifestement disproportionnée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral subi, de prononcer la nullité du licenciement et de le condamner au paiement de diverses sommes au titre de dommages-intérêts, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à venir sur le premier moyen de cassation emportera l'annulation des dispositions critiquées dans le second moyen de cassation, en application de l'article 624 du code de procédure civile, dès lors que la juridiction du second degré s'est déterminée, pour retenir l'existence d'un harcèlement moral, en considération du prononcé d'une sanction disciplinaire injustifiée consistant dans une mise à pied prétendument injustifiée dont elle a prononcé l'annulation ;
2°/ si tel n'est pas le cas, qu' il ressort de l'avis d'inaptitude du 14 juin 2012 que M. X... avait été déclaré inapte en une seule visite pour danger immédiat, mais qu'il était apte au même poste dans un contexte organisationnel et/ou relationnel différent ; qu'en déduisant de cet avis que le licenciement de M. X... trouvait sa cause dans l'inaptitude dont il avait été victime, la cour d'appel de Rouen en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ plus subsidiairement encore, qu'à la supposer établie, l'existence du harcèlement moral justifie d'annuler le licenciement pour inaptitude physique du salarié pour autant qu'il existe un lien certain entre la dégradation de l'état de santé du salarié et le harcèlement moral subi ; qu'en se déterminant sur la seule considération de l'avis d'inaptitude médical du 14 juin 2012 pour en déduire que le licenciement de M. X... était la conséquence du harcèlement moral dont il aurait été victime, quand il en ressort seulement que le médecin du travail l'avait déclaré inapte en une seule visite pour danger immédiat et qu'il était apte au même poste dans un contexte organisationnel et/ou relationnel différent, la cour d'appel, qui n'a pas expliqué en quoi les termes précités de l'avis d'inaptitude permettrait d'imputer l'origine de la rupture au harcèlement dont M. X... se prétendait la victime, a déduit un motif inopérant ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen rend sans objet la première branche de ce moyen ;
Attendu ensuite, que la cour d'appel qui, ayant retenu que le harcèlement moral subi par le salarié était établi, a constaté, sans encourir le grief de dénaturation, que celui-ci avait été licencié pour inaptitude à la suite de l'avis du médecin du travail l'ayant déclaré, après une seule visite en raison du danger immédiat, inapte à son poste, sauf si celui-ci évoluait dans un environnement organisationnel et relationnel différent, a caractérisé le lien entre le harcèlement moral et le licenciement, et a ainsi légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Emergence(s) aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association Emergence(s) et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour l'association Emergence(s)
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR annulé la mise à pied prononcée le 5 mars 2010 par l'association EMERGENCE(S) et D'AVOIR condamné l'association EMERGENCE(S), prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. X... la somme de 468,28 € à titre de rappel de salaire, celle de 46,30 € à titre de congés payés y afférents et celle de 500 € à titre de dommages et intérêts,
AUX MOTIFS QUE le salarié estime que les faits objets de la sanction sont prescrits puisque l'employeur était informé en novembre 2009 de l'exercice de son activité en qualité d'auto-entrepreneur, qu'en tout état de cause, les faits reprochés sont hypothétiques, et la sanction est injustifiée à tout le moins disproportionnée ; que l'employeur réplique que c'est bien la consultation du site internet qui a permis de déterminer que le salarié exerçait son activité d'auto-entrepreneur pendant ses heures de travail, et compte tenu des fonctions occupées par le salarié et de ses responsabilités, la sanction est parfaitement justifiée ; qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits ; qu'en l'espèce, le salarié qui exerce depuis le 10 septembre 2009 une activité de vente à distance par l'intermédiaire d'un site hébergé en mono-licence installée sur son ordinateur personnel ne justifie pas en avoir informé son employeur en novembre 2009 ; que dès lors, aucun élément ne permet d'établir que l'employeur ait consulté ce site avant le 7 janvier, à tout le moins avant le 12 décembre 2009, la convocation à l'entretien préalable datant du 12 février 2010 ; que les faits reprochés ne sont donc pas prescrits ; que sur le fond, si aucune clause du contrat de travail du salarié ne lui interdit l'exercice d'une autre activité professionnelle, encore faut-il que cet exercice ne nuise pas aux obligations inhérentes à son contrat de travail ; qu'en l'occurrence, la lecture du site internet permet de vérifier que le salarié peut être joint à un numéro qui correspond à son téléphone portable personnel du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h, ce qui correspond à ses horaires de travail ; que Mme Y... atteste avoir appelé ce numéro le 29 janvier 2010 à 9h15 « pour prendre des renseignements sur la société S-SENS d'ENCENS » et avoir «discuté avec son interlocuteur sur la gamme des produits, cela pendant environ cinq minutes » ; que si l'exercice de cette activité durant ces horaires de travail constitue une faute, force est toutefois de constater que cet événement unique ne permet pas de justifier la sanction d'une mise à pied de trois jours avec perte de salaire, qui apparaît manifestement disproportionnée ; que ce d'autant que le salarié a retiré le numéro de téléphone du site dès le 23 février 2010 ; qu'elle sera en conséquence annulée et le jugement infirmé sur ce point ;
1. ALORS QU'il appartient aux juges du fond d'apprécier la proportionnalité de la sanction au regard des fautes imputées au salarié en considération tant de l'atteinte portée aux intérêts de l'entreprise que des responsabilités attribuées au salarié ; qu'en décidant que la faute commise par M. X... ne justifiait pas de prononcer une mise à pied en raison de son caractère unique, d'autant qu'il y avait mis fin le 23 février 2010, soit la veille de l'entretien préalable, après avoir constaté qu'il avait commis une faute disciplinaire pour avoir exercé une activité professionnelle durant ses horaires de travail en mentionnant sur le site internet ouvert pour l'exploitation de son entreprise qu'il était joignable sur son téléphone portable pendant ses heures de travail et sur son lieu de travail, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la défense des intérêts de l'employeur ne nécessitait pas de prononcer la sanction d'une mise à pied pendant trois jours dès lors que l'exercice par M. X... d'une activité individuelle pour son propre compte compromettait l'exercice des fonctions de direction dont il était investi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1333-2 du Code du travail, ensemble le principe de proportionnalité ;
2. ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions par lesquelles l'association EMERGENCE(S) a soutenu que l'exécution par M. X... pour son propre compte d'une activité proportionnelle sur son lieu de travail justifiait d'autant plus le prononcé d'une mise à pied qu'elle était incompatible avec son niveau de responsabilité et ses fonctions de direction qui le conduisaient à surveiller 82 salariés (conclusions, p. 12), la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné l'association EMERGENCE(S) à payer à M. X... la somme de 6.000 € à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi, D'AVOIR dit que l'association EMERGENCE(S) devrait remettre au salarié le bulletin de salaire d'avril 2010 rectifié dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt et, à défaut, sous astreinte provisoire de 20 € par jour pendant une durée de trois mois, D'AVOIR prononcé la nullité du licenciement du 20 août 2012 et D'AVOIR condamné l'association EMERGENCE(S) à payer à M. X... les sommes suivantes de 30.000 € à titre de dommages et intérêts, de 9.262,86 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 926,30 € à titre de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QU'en application de l'article L 1154-1 du Code du travail, il appartient au salarié d'établir la matérialité des faits qu'il invoque, puis au juge d'appréhender ces faits dans leur ensemble pour rechercher s'ils permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, l'employeur devant établir que ces faits ne caractérisent pas une situation de harcèlement ; que le salarié qui estime que les relations avec son employeur se sont détériorées depuis qu'il a indiqué exercer une activité en qualité d'auto-entrepreneur, invoque les faits suivants : 1) intrusions à plusieurs reprises dans son bureau et vol d'effets personnels et absence de mesures par l'employeur ; qu'il produit la copie d'une lettre qu'il a adressé à son employeur le 10 février 2010 l'informant de la disparition d'effets personnels qui se trouvaient dans son bureau et avoir été alerté par deux collègues d'intrusion répétée dans son bureau à des moments où il était absent et lui demandant de prendre des mesures ; qu'il produit également la copie de la plainte déposée auprès des services de police le 12 février 2010 pour le vol dans son bureau de son PDA, d'un dossier médical d'un collègue de travail et d'une clé USB contenant des informations professionnelles ; 2) des sanctions injustifiées, deux mises à pied de trois jours prononcées le 5 mars 2010 et le 10 février 2012 et une procédure de licenciement engagée en juin 2012 alors qu'il était en arrêt pour maladie et à laquelle il ne sera donné aucune suite ; 3) des propos méprisants et menaçants de M. Z..., le dénigrement de son travail et des ordres contradictoires le mettant en situation de faute professionnelle ; que le salarié produit un courriel de M. Z... dont il n'est pas destinataire du 9 avril 2010 sur une consigne de la direction en matière de contrats aidés, alors que la matière relève de ses fonctions ; qu'il produit une lettre adressée le 10 février 2010 à M. A..., directeur général, concernant une instruction faite par M. Z... de ne pas appliquer le protocole 152 pour les contrats aidés, entraînant ainsi une diminution du salaire de base et d'avoir donné l'instruction contraire à sa secrétaire ; qu'il produit également deux échanges de courriels des 9 et 10 mai 2012 où son supérieur hiérarchique, M. Z..., le premier lui demandant le rapport d'activité 2011 des chantiers, « pour vendredi dernier délai. Dans le cas contraire, je me verrais obligé d'en informer la direction générale et le président », et le second lui disant « je ne suis pas satisfait de ta réponse qui n'apporte aucune solution à la question »; qu'il produit par ailleurs : - une attestation de M. B..., animateur au sein de l'association, qui évoque ses propres difficultés avec M. Z... à l'occasion de la pose de congés ; - une attestation de M. C..., aide cuisinier au sein de l'association, qui indique avoir constaté à plusieurs reprises « que M. X... Jacky a été interpellé par M. Z... Jean-Pierre de manière excessive par des propos désagréables » ; - une attestation de Mme D..., déléguée du personnel, indiquant avoir constaté que M. X... était replié sur lui même et présentait un état de déprime constant alors qu'il était de nature joviale dans nos relations au quotidien ; 4) des pressions de son employeur pour qu'il renonce à la procédure engagée devant le conseil de prud'hommes le 18 mars 2010 ; qu'il produit une attestation du 30 juin 2010 de M. E..., encadrant technique, aux termes de laquelle : « le jour du rendez-vous de conciliation au prud'hommes, avant notre départ avec M. X... que j'accompagnais, M. Z... a stipulé à M. X... qu'il était encore temps pour lui de changer d'avis, de ne pas aller au dit RDV et que leurs relations de ce fait allaient sérieusement se dégrader. Tout ceci en ma présence et sur un ton plutôt agressif » ; 5) un certificat du 7 mars 2011 du Docteur F..., psychiatre, indiquant que M. X... est régulièrement suivi depuis octobre 2010 ; qu'il évoque une situation tendue et conflictuelle dans son entreprise et son état de santé a nécessité un arrêt de travail jusqu'à ce jour ; qu'il résulte des pièces et documents concordants du dossier que le salarié a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire injustifiée le 5 mars 2010, que la contestation en mars 2010 de celle-ci devant le conseil de prud'hommes a donné lieu, avant la tenue de l'audience de conciliation, à des pressions de l'employeur et des menaces sur ses relations futures avec son salarié, parfaitement établies par l'attestation de M. E... rappelée ci-dessus; que le ton des courriels de M. Z... et sa manière de s'adresser au salarié, l'interpellant de manière excessive par des propos désagréables, l'absence de communication, d'instruction importante au salarié, alors que ce dernier se repliait sur lui-même et était régulièrement suivi par un médecin psychiatre ; qu'appréciés dans leur ensemble, les éléments ci-dessus exposés et considérés comme établis permettent de présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral de nature à entraîner une dégradation des conditions de travail du salarié et à altérer sa santé physique ou mentale, ainsi qu'il ressort des documents médicaux produits et de l'avis d'inaptitude à son poste pour danger immédiat en une seule visite, sauf si ce poste évolue dans un contexte organisationnel et/ou relationnel différent ; que les autres éléments invoqués par le salarié ne sont pas considérés comme faisant présumer un harcèlement moral, ainsi le vol dans l'entreprise et l'absence de réaction de l'employeur, la mise à pied de trois jours prononcée le 10 février 2012 pour mauvaise exécution de ses tâches par le salarié qui a fait l'objet d'une transaction lors de l'audience de conciliation du conseil de prud'hommes le 6 juin 2012 sans que les éléments permettent d'établir si elle était ou non justifiée, la procédure de licenciement pour faute engagée le 4 juin 2012, certes pendant la suspension du contrat de travail pour maladie - ce qui n'est pas illégal - mais avant la déclaration d'inaptitude et qui a été abandonnée par ce motif par l'employeur ; qu'il sera en revanche souligné qu'à compter du 24 juin 2010, le CHSCT informait les salariés de la mise en place d'un protocole d'intervention de la psychologue du travail pour identifier les situations de souffrance au travail dont font état certains salariés et y remédier ; que pour établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, l'employeur fait valoir que : - le courriel du 9 avril 2010 n'a pas été communiqué à M. X... car celui-ci était en arrêt pour maladie, que toutefois, compte tenu de l'importance des termes de ce message au vu des fonctions exercées par le salarié, et alors même que l'arrêt pour maladie prenait fin le 11 avril suivant et que l'employeur ne justifie pas avoir transmis ce courriel ultérieurement ; - l'attestation de M. E... révèle des propos tenus par M. Z... qui sont différents de ceux allégués par le salarié dans un courrier adressé à l'employeur ; que, par lettre du 15 avril 2010 adressée à M. Z..., le salarié fait état des propos suivants : « pour toi et dans ton intérêt il est encore temps de changer d'avis et de prendre la décision de ne pas y aller» ; que ces termes ne sont toutefois pas fondamentalement différents de ceux rappelés par M. E..., étant au demeurant précisé que dans une nouvelle lettre du 14 avril 2010 adressée à M. Z... (et postérieure à l'audience de conciliation qui s'est tenue le 13 avril 2010), le salarié faisait état de propos de ce dernier à la perspective de cette audience : «dorénavant nos relations seraient différentes et compliqués en raison de ma détermination à contester les faits que l'on me reproche » ; qu'ainsi, ces éléments ne sont pas susceptibles de remettre en cause l'attestation de M. E... ; - l'attestation de M. C... fait état de propos imprécis et n'a pas de valeur probante ; que toutefois, la cour estime qu'elle s'inscrit dans la ligne des propos tenus par M. Z... indiquant au salarié que leurs relations allaient se dégrader, qu'il en est de même de l'attestation de Mme D... qui ne fait pas de constatation médicale contrairement à ce que soutient l'employeur mais qui atteste seulement que le comportement du salarié a changé ; qu'ainsi, l'employeur n'établissant pas que les faits relevés ci-avant ne caractérisent pas une situation de harcèlement moral, il convient de dire que le harcèlement moral est établi et d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il en a écarté l'existence ; que, sur la nullité du licenciement, eu égard aux éléments rappelés ci-dessus et à la motivation de l'avis d'inaptitude, le harcèlement moral doit être retenu comme étant directement à l'origine de l'inaptitude physique de M. X... ayant abouti à son licenciement, lequel doit par conséquent être déclaré nul ; que le salarié est en droit d'obtenir, outre l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, à raison du licenciement nul, dont le montant n'est pas autrement contesté, des dommages et intérêts d'un montant au moins égal à l'indemnité minimum prévue par l'article L 1235-3 du Code du travail à raison de la nullité du licenciement, quels que soient son ancienneté et l'effectif de l'entreprise ; qu'en considération notamment de son âge, de sa formation, de ses capacités à retrouver un nouvel emploi, de son ancienneté, des circonstances du licenciement, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer les dommages et intérêts à ce titre à la somme de 30.000 ¿ ; qu'il convient également de lui allouer la somme de 6.000 € en réparation du préjudice subi compte tenu du harcèlement moral ;
1. ALORS QUE la cassation à venir sur le premier moyen de cassation emportera l'annulation des dispositions critiquées dans le second moyen de cassation, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, dès lors que la juridiction du second degré s'est déterminée, pour retenir l'existence d'un harcèlement moral, en considération du prononcé d'une sanction disciplinaire injustifiée consistant dans une mise à pied prétendument injustifiée dont elle a prononcé l'annulation ;
2. ALORS, si tel n'est pas le cas, QU' il ressort de l'avis d'inaptitude du 14 juin 2012 que M. X... avait été déclaré inapte en une seule visite pour danger immédiat, mais qu'il était apte au même poste dans un contexte organisationnel et/ou relationnel différent ; qu'en déduisant de cet avis que le licenciement de M. X... trouvait sa cause dans l'inaptitude dont il avait été victime, la Cour d'appel de Rouen en a dénaturé les termes clairs et précis en violation de l'article 1134 du Code civil.
3. ALORS, plus subsidiairement encore, QU'à la supposer établie, l'existence du harcèlement moral justifie d'annuler le licenciement pour inaptitude physique du salarié pour autant qu'il existe un lien certain entre la dégradation de l'état de santé du salarié et le harcèlement moral subi ; qu'en se déterminant sur la seule considération de l'avis d'inaptitude médical du 14 juin 2012 pour en déduire que le licenciement de M. X... était la conséquence du harcèlement moral dont il aurait été victime, quand il en ressort seulement que le médecin du travail l'avait déclaré inapte en une seule visite pour danger immédiat et qu'il était apte au même poste dans un contexte organisationnel et/ou relationnel différent, la cour d'appel, qui n'a pas expliqué en quoi les termes précités de l'avis d'inaptitude permettrait d'imputer l'origine de la rupture au harcèlement dont M. X... se prétendait la victime, a déduit un motif inopérant ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1152-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28452
Date de la décision : 16/04/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 05 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 avr. 2015, pourvoi n°13-28452


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28452
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