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10/11/2015 | FRANCE | N°14-11479

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 novembre 2015, 14-11479


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 novembre 2013), que la société Converse Inc (la société Converse), titulaire des marques internationales désignant l'Union européenne « Converse All Star » n° 924 653 et « All Star » n° 929 078, respectivement enregistrées le 16 et le 15 mai 2007 pour désigner des articles chaussants, et de la marque française « Converse All Star Chuck Taylor » n° 1 356 944, déposée le 30 mai 1986 et renouvelée le 22 mars 2006 pour désigner les ch

aussures, ayant fait procéder à un constat d'achat de paires de chaussures rev...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 novembre 2013), que la société Converse Inc (la société Converse), titulaire des marques internationales désignant l'Union européenne « Converse All Star » n° 924 653 et « All Star » n° 929 078, respectivement enregistrées le 16 et le 15 mai 2007 pour désigner des articles chaussants, et de la marque française « Converse All Star Chuck Taylor » n° 1 356 944, déposée le 30 mai 1986 et renouvelée le 22 mars 2006 pour désigner les chaussures, ayant fait procéder à un constat d'achat de paires de chaussures revêtues de ces marques dans les magasins exploités par les sociétés Atlanta et Le Garage, et informée du placement en retenue douanière de chaussures provenant de ces sociétés, les a assignées en contrefaçon de marque ; que la société Sport négoce international (la société SNI), se présentant comme propriétaire des produits, est intervenue volontairement à la procédure et a assigné en intervention forcée son fournisseur, la société Dieseel AG (la société Dieseel) ; qu'à la suite de l'inscription au registre national des marques de la cession à son profit de la marque française, la société All Star CV (la société All Star) est intervenue volontairement à la procédure ; que les sociétés Atlanta, Le Garage, SNI et Dieseel ont invoqué l'épuisement des droits des sociétés Converse et All Star sur les marques susvisées pour les produits en cause ;
Attendu que les sociétés Converse et All Star font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à interdire aux sociétés Atlanta, Le Garage, SNI et Dieseel de poursuivre la détention, l'offre à la vente et la vente, sur le territoire de l'Union européenne, de tout produit portant atteinte aux marques « Converse All Star » n° 924 653 et « All Star » n° 929 078, et en France, à la marque « Converse All Star Chuck Taylor » n° 1 356 944, et à voir condamner ces sociétés à les indemniser de l'ensemble de leurs chefs de préjudices alors, selon le moyen :
1°/ que le titulaire d'une marque ne peut interdire l'usage de celle-ci sans son autorisation pour des produits qu'il a mis dans le commerce ou qui ont été mis dans le commerce avec son consentement sous cette marque en dehors de l'Espace économique européen, la preuve préalable de l'épuisement du droit de marque incombant à celui qui l'allègue ; que si l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux fait toutefois obstacle à ce que le tiers poursuivi par le titulaire de la marque supporte la charge de la preuve, il demeure qu'il appartient préalablement à celui qui entend se prévaloir d'un tel renversement de la charge de la preuve d'établir que les produits en cause sont authentiques ; qu'en affirmant néanmoins qu'il appartenait à la société Converse et à la société All Star, qui entendaient priver les défendeurs à l'action en contrefaçon du renversement de la charge de la preuve résultant d'un risque de cloisonnement des marchés, de démontrer que les produits litigieux n'étaient pas authentiques, bien qu'il ait appartenu aux défendeurs à l'action en contrefaçon, qui prétendaient bénéficier d'une présomption d'épuisement du droit de marque résultant d'un risque réel de cloisonnement des marchés, d'établir préalablement que les produits étaient authentiques, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 713-2, L. 713-4 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que le titulaire d'une marque ne peut interdire l'usage de celle-ci sans son autorisation pour des produits qu'il a mis dans le commerce ou qui ont été mis dans le commerce avec son consentement sous cette marque en dehors de l'Espace économique européen, la preuve préalable de l'épuisement du droit de marque incombant à celui qui l'allègue ; que si l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux fait toutefois obstacle à ce que le tiers poursuivi par le titulaire de la marque supporte la charge de la preuve, cette présomption ne joue qu'à la condition que les produits litigieux soient authentiques ; qu'en décidant néanmoins qu'en l'état d'un risque de cloisonnement des marchés, il appartenait à la société Converse et à la société All Star de démontrer que les produits avaient été initialement mis dans le commerce par elles-mêmes ou avec leur consentement en dehors de l'Espace économique européen, sans avoir préalablement constaté que l'authenticité des produits litigieux était établie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 713-2, L. 713-4 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle ;
3°/ qu'un salarié ou un collaborateur d'une entreprise remplit les conditions pour être entendu comme témoin et, partant, pour établir une attestation ; qu'en décidant néanmoins que les attestations délivrées par M. X..., vice-président de la société Converse, et de Mme Y..., directrice de la protection des marques de la société, ne constituaient pas des éléments de preuve recevables, la cour d'appel a violé l'article 201 du code de procédure civile ;
4°/ que le principe selon lequel nul ne peut se préconstituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve d'un fait juridique ; qu'en décidant néanmoins qu'en vertu de cette règle, la société Converse et la société All Star ne pouvaient se prévaloir de l'attestation du vice-président de la société Converse et de celle de la directrice de la protection des marques de cette même société, afin d'établir le défaut d'authenticité des produits, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
5°/ qu'un salarié ou un collaborateur d'une entreprise remplit les conditions pour être entendu comme témoin et, partant, pour établir une attestation ; qu'en décidant néanmoins que l'attestation de M. Z..., directeur juridique commercial Europe de la société Nike European Operations Netherlands, filiale de la société Nike Inc, dont la société Converse est une filiale indirecte, ne constituait pas un élément de preuve recevable, la cour d'appel a violé l'article 201 du code de procédure civile ;
6°/ que le principe selon lequel nul ne peut se préconstituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve d'un fait juridique ; qu'en décidant néanmoins qu'en vertu de cette règle, la société Converse et la société All Star ne pouvaient se prévaloir de l'attestation du directeur juridique commercial Europe de la société Nike European Operations Netherlands, filiale de la société Nike Inc, dont la société Converse est une filiale indirecte, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que, l'épuisement des droits conférés par la marque supposant la mise en circulation des produits en cause pour la première fois sur le territoire de l'Espace économique européen par le titulaire de la marque, ou avec son consentement, ce qui en garantit l'origine, le tiers poursuivi n'a pas d'autre preuve à rapporter que celle de l'épuisement des droits qu'il invoque comme moyen de défense ; qu'ayant souverainement retenu, au vu des pièces versées aux débats, que la connaissance par les sociétés Converse et All Star de la source d'approvisionnement de la société Dieseel leur permettrait de faire obstacle à la libre circulation des produits sur le territoire de l'Espace économique européen en tarissant cette source, c'est à bon droit et sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel en a déduit qu'il appartenait à ces sociétés d'établir que les produits avaient été initialement mis dans le commerce par elles-mêmes, ou avec leur consentement, en dehors de l'Espace économique européen, sans avoir à exiger que la société Dieseel identifie la source de son approvisionnement, et qu'elle a recherché si, comme le prétendaient ces sociétés, leur absence de consentement s'expliquait par le défaut d'authenticité des produits litigieux ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt relève d'abord, par motifs propres et adoptés, que l'attestation de M. X..., vice-président de la société Converse, qui se borne à affirmer que « la construction des produits n'est pas conforme avec celle des produits authentiques », et celle de Mme Y..., directrice de la protection des marques de ladite société, qui indique pourquoi les paires de chaussures ne sont pas authentiques, ne reposent sur aucun élément objectif et ne peuvent valoir, à elles seules, preuves à soi-même, dans la mesure où leur contenu ne peut être vérifié, en l'absence de preuve d'une procédure stricte de contrôle qualité clairement définie portant sur les caractéristiques précises et invariables de points de vérification objectifs des chaussures qui sortent des usines de fabrication des produits Converse ; qu'il relève ensuite que l'attestation de M. Z..., directeur juridique commercial Europe de la société Converse, selon laquelle les contrats de distribution ne contiennent aucune disposition susceptible de limiter la possibilité pour les licenciés et distributeurs de procéder à des ventes passives, constitue une preuve à soi-même, contredite par des tiers, notamment par les distributeurs des produits Converse en Suisse et dans différents pays de l'Union européenne ; que la cour d'appel, qui a souverainement apprécié la valeur et la portée de ces attestations parmi l'ensemble des éléments de fait et de preuve fournis par les sociétés Converse et All Star pour justifier du défaut d'authenticité des produits incriminés et de l'absence de risque réel de cloisonnement des marchés nationaux, et n'a pas dit que ces attestations n'étaient pas recevables, a pu statuer comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Converse Inc et All Star CV aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer aux sociétés Atlanta, Le Garage et Sport négoce international la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Converse Inc et autre
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Société CONVERSE INC et la Société ALL STAR CV de leurs demandes tendant à interdire aux sociétés ATLANTA, LE GARAGE, SPORT NEGOCE INTERNATIONAL et DIESEEL AG de poursuivre la détention, l'offre à la vente et la vente, sur le territoire de l'union européenne, de tout produit portant atteinte aux marques communautaires CONVERSE ALL STAR n° 924653 et ALL STAR n° 929078, et en France, à la marque CONVERSE ALL STAR CHUCK TAYLOR n° 1356944, et à voir condamner ces dernières à les indemniser de l'ensemble de leurs chefs de préjudices ;
AUX MOTIFS QU'aux termes des articles L 716-1 et L 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur, et notamment, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction ou l'usage d'une marque reproduite, pour les produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ; qu'en application de l'article 9 du Règlement CE 207/ 2009 du conseil du 26 février 2009 ayant abrogé le Règlement CE 40/ 94 du conseil du 20 décembre 1993, le titulaire de la marque communautaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, à faire usage dans la vie des affaires : a) d'un signe identique à la marque communautaire pour des produits et services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée ; qu'en application de l'article L 713-4 du code de la propriété intellectuelle, " le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour les produits qui ont été mis dans le commerce dans la communauté économique européenne ou de l'Espace économique européen sous cette marque par le titulaire de la marque ou avec son consentement " ; que l'article 13 du Règlement CE n° 207/ 2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire contient des dispositions similaires ; qu'il n'est pas contesté par les sociétés intimées que les produits litigieux reproduisent à l'identique les marques internationales désignant l'union européenne, Converse All Star n° 924 653 et All Star n° 929 078 dont est titulaire la Société Converse Inc et la marque Converse All Star Chuck Taylor n° 1 356 944 dont est présentement titulaire la Société All Star CV ; que selon les sociétés appelantes, seule la preuve du défaut d'autorisation de la commercialisation des produits reproduisant leurs marques, est requise et elles soutiennent que les nombreuses et convergentes anomalies présentées par les marchandises litigieuses par rapport aux marchandises originales sont de nature à susciter un doute légitime jointes au fait que les sociétés intimées n'auraient pu contracter directement ou indirectement avec la Société Converse, suffisent à rendre inconcevable la possibilité d'une autorisation d'usage de la marque ; que cependant la Cour de Justice des Communautés Européennes a dit pour droit dans l'arrêt Van Doren du 8 avril 2003 (C54-244/ 00) que " dans l'hypothèse où le tiers poursuivi par le titulaire de la marque parvient à démontrer qu'il existe un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux, si lui-même supporte la charge de cette preuve, en particulier lorsque le titulaire de la marque commercialise ses produits dans l'espace économique européen au moyen d'un système de distribution exclusive, il appartient au titulaire de la marque d'établir que les produits ont été initialement mis dans le commerce par lui-même ou avec son consentement en dehors de l'espace économique européen " ; que si cette preuve est rapportée il incombe alors au tiers poursuivi d'établir l'existence d'un consentement du titulaire à la commercialisation ultérieure des produits dans l'Espace Economique Européen ; qu'en l'espèce, les sociétés appelantes contestent l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux et exposent que les produits litigieux ont été mis sur le marché en dehors de l'Espace Economique Européen sans leur consentement et qu'ils ne sont donc pas authentiques ; que toutefois, il ressort par les pièces issues du site internet de la société Converse, www. converse. com que son réseau de distribution est sectorisé, car il est octroyé à une entreprise un territoire sur un ou plusieurs pays sur lequel elle bénéficie d'une distribution exclusive, ce que la Société Converse Inc ne conteste pas ; que le distributeur exclusif en France étant la Société Royer Sport ; qu'il résulte des réponses faites par les distributeurs des produits Converse, en Allemagne, Autriche, Suisse, Italie, Scandinavie, Hongrie, Espagne, Portugal, Slovenie, Pologne et France, que ces derniers, identifiés par des courriers électroniques datés et portant leur nom et adresse e-mail dont la réalité et la véracité n'est pas contestée par les attestations communiquées par les appelantes, et donc probantes, sollicités par des acheteurs tiers à leur territoire, ont tous indiqué qu'il leur était interdit de vendre et livrer des produits Converse dans d'autres pays à des acheteurs autres que des consommateurs, qu'il en est de même entre revendeurs sur un même territoire, et ce, sans être contredits par des éléments pertinents contraires ; qu'en effet, l'attestation versée par la société Converse de l'un de ses préposés monsieur Z..., directeur juridique commercial Europe qui indique que les contrats de distribution de la Société Converse ne contiennent aucune disposition susceptible de limiter " la possibilité pour les licenciés et distributeurs de procéder à des ventes passives " constitue une preuve à soi-même contredite par des tiers ; que les sociétés Converse ne justifient par ailleurs d'aucune vente passive manifestant l'existence de ventes inter-secteurs, et de flux inter-secteurs, réalisées notamment par la Société Royer Sport distributeur de produits Converse en France ; que la possibilité de vente passive constatée par un tribunal de Dusseldorf, à défaut de la preuve réelle de ventes de ce type, ne saurait à elle seule établir une absence de cloisonnement entre ces distributeurs exclusifs, pas plus que l'attestation d'un des subordonnés de la société Converse Inc, monsieur Z..., sans justifier par des factures et autres documents de ventes réelles à des tiers hors du territoire concédé ; qu'il s'en évince que des différences de prix sur les mêmes produits peuvent exister entre les Etats membres et que la connaissance par les sociétés Converse de la source d'approvisionnement de la société Dieseel AG lui permettrait de faire obstacle à la libre circulation des produits sur le territoire de l'Espace Economique Européen en tarissant cette source ; qu'il appartient en conséquence aux sociétés appelantes d'établir que les produits ont été initialement mis dans le commerce par la société Converse Inc ou avec son consentement dans l'Espace Economique Européen sans avoir à exiger que la Société Dieseel AG identifie la source de son approvisionnement ; que les sociétés appelantes prétendent établir le caractère contrefaisant des produits mis sur le marché sans leur consentement en faisant valoir qu'ils ne présentent pas les caractéristiques des produits authentiques ; qu'elles indiquent à cet effet que l'étiquette thermocollée apposée sur la langue intérieure n'est pas conforme aux produits authentiques car elle ne réagit pas à un marqueur d'authenticité situé dans l'étoile positionnée à gauche du nom Converse, le passage du laser sur cette étoile faisant apparaître habituellement un point vert ; que les sociétés intimées justifient que contrairement aux termes de l'attestation de monsieur C..., directeur en chef de l'intégrité des produits au sein de la Société Converse Inc, le test du laser n'est pas toujours fiable dès lors que les chaussures authentiques peuvent présenter des défauts de fabrication résultant de la température inapropriée lors de la pose de l'étiquette, de la nature de l'encre ou des manipulations, ce dont il est justifié et ce qui a été constaté par le tribunal de ce siège dans une autre affaire ; que les sociétés intimées ont d'ailleurs acquis à Paris le 12 mai 2011 par l'intermédiaire d'un huissier de justice, des chaussures commercialisées dans le réseau officiel Converse dont les étiquettes ne réagissent pas au stylo laser, les sociétés appelantes déclarant alors que ce revendeur est un contrefacteur ; que les sociétés appelantes incriminent également le positionnement de l'étiquette sur la languette garnissant la chaussure et versent à cet effet le constat d'un huissier de justice à qui a été communiqué un document qualifié de Charte de fabrication qui est restée confidentielle ; que si l'authenticité des constations personnelles de l'huissier ne peuvent être contestées en revanche le document qui lui a été remis et dont il n'a pu déterminer s'il correspondait aux documents adressés aux usines, ni permis de déterminer s'il correspondait aux périodes de validité des prescriptions de chaque document et aux périodes de fabrication, ne peut servir de référence, alors que les sociétés appelantes n'établissent pas que dans tous les modèles de produits les étiquettes sont placées de façon identique alors que les sociétés intimées justifient que les sociétés appelantes, qui ne les contredisent pas, mettent volontairement sur le marché des produits non homogènes voire défectueux ; que la société Dieseel AG a d'ailleurs acquis des chaussures auprès d'un revendeur Converse présentant une étiquette positionnée de la même manière que celles garnissant les produits saisis ; que les comptes rendus de contrôle d'authenticité des chaussures Converse communiqués aux débats par les sociétés appelantes ne donnent aucune indication sur le positionnement des étiquettes présentement contesté ; que le positionnement de l'étiquette ne peut donc servir comme " marqueur " d'authenticité ; que les sociétés appelantes communiquent également des attestations de : Monsieur X... vice-président de la Société Converse et de Madame Y..., directrice de la protection des marques de la société, qui ne peuvent valoir, à elles seules, preuve à soi-même, et des attestations émanant de représentants de quatre usines situées en Chine et au Vietnam selon lesquelles les produits litigieux n'auraient pas été fabriqués aux dates mentionnées sur les étiquettes et n'émaneraient pas de ces usines ; que cependant ces dernières attestations, non conformes en la forme, établies par des personnes sous la dépendance économique des sociétés Converse, ne rapportent pas des faits constatés par leurs auteurs, et apparaissent peu pertinentes puisque le même témoin Madame D...
D...
E... se présente dans une attestation du 9 septembre 2011 comme directrice de l'usine située en Chine, puis, dans une attestation du 25 janvier 2011 comme responsable d'activités dans une usine située au Vietnam de sorte qu'en l'absence d'autres éléments venant corroborer leurs déclarations, en regard du très grand nombre de produits fabriqués, elles ne peuvent établir que les chaussures litigieuses ne sont pas authentiques ; que les sociétés appelantes ne permettent pas de procéder à des comparaisons dès lors que les règles de fabrication ne sont pas communiquées, que les produits sont fabriqués dans plusieurs usines différentes dans le monde et qu'il n'est donc pas communiqué " d'échantillons étalons " issus des mêmes séries de fabrication, du même modèle, de la même usine ; que les sociétés intimées demandent que les pièces leur permettant d'établir que la fabrication des produits n'est pas uniforme ne soit pas écartées des débats en regard des graves griefs qui leur sont reprochés et l'absence d'expertise permettant d'apprécier l'authenticité des produits ; que c'est à bon droit que le tribunal a écarté ces documents internes, confidentiels (pièces 1 à 15 communiquées par Dieseel AG et (4, 9, 22 à 29 des autres sociétés intimées), propriété de la Société Converse, soumises de par leur contenu au secret des affaires, dont la léicéité de leur obtention n'est pas établie, alors que l'absence de ces documents ne portent pas atteinte aux droits de la défense des sociétés intimées à qui la preuve de l'authenticité des produits n'incombe plus à titre principal ; que la Société Dieseel AG verse aux débats des constats d'huissier détaillés établissant l'existence d'une chaîne de factures cohérentes dont la première est celle d'un distributeur exclusif de la Société Converse Inc établi dans l'Espace Economique Européen sans que son identité soit révélée mais dont l'authenticité est confirmée par une attestation de son expert comptable ; que par ailleurs, les intimées justifient que sur des chaussures présentées comme authentiques que celles-ci ne sont pas homogènes : différence de police dans les inscriptions, colle du patch qui s'étend, inscription " R " différente, les patchs situés à l'arrière diffèrent en ce que certains comportent la lettre " R ", présence de colle ; que les sociétés appelantes soutiennent également que la distribution hors réseau constitue en elle-même un acte d'usage illicite de la marque ; qu'à défaut néanmoins d'établir que les produits ne sont pas authentiques et qu'ils n'ont pas été acquis de façon licite alors que leurs droits n'étaient pas épuisés, elles ne sont pas fondées en leur demande à ce titre, alors que la Société Dieseel AG comme précisé ci-dessus justifie d'une chaîne de factures cohérente corroborée ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que c'est à bon droit que le tribunal a débouté, nonobstant la commercialisation, établie par les pièces pertinentes versées aux débats par les appelantes, de produits sur lesquels sont apposées les marques litigieuses, la Société Converse Inc de ses demandes formées au titre des actes de contrefaçon de ses marques, dès lors qu'elle ne rapporte pas suffisamment la preuve de l'usage non autorisé de celle-ci ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Société Converse Inc de l'ensemble de ses demandes et de débouter la Société All Star CV venant aux droits de cette dernière, du chef de la marque française Converse All Star Chuck Taylor n° 1 356 944 ;
1°) ALORS QUE le titulaire d'une marque ne peut interdire l'usage de celle-ci sans son autorisation pour des produits qu'il a mis dans le commerce ou qui ont été mis dans le commerce avec son consentement sous cette marque en dehors de l'Espace Economique Européen, la preuve préalable de l'épuisement du droit de marque incombant à celui qui l'allègue ; que si l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux fait toutefois obstacle à ce que le tiers poursuivi par le titulaire de la marque supporte la charge de la preuve, il demeure qu'il appartient préalablement à celui qui entend se prévaloir d'un tel renversement de la charge de la preuve d'établir que les produits en cause sont authentiques ; qu'en affirmant néanmoins qu'il appartenait à la Société CONVERSE INC et à la Société ALL STAR CV, qui entendaient priver les défendeurs à l'action en contrefaçon du renversement de la charge de la preuve résultant d'un risque de cloisonnement des marchés, de démontrer que les produits litigieux n'étaient pas authentiques, bien qu'il ait appartenu aux défendeurs à l'action en contrefaçon, qui prétendaient bénéficier d'une présomption d'épuisement du droit de marque résultant d'un risque réel de cloisonnement des marchés, d'établir préalablement que les produits étaient authentiques, la Cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du Code civil, ensemble les articles L. 713-2, L. 713-4 et L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
2°) ALORS QUE le titulaire d'une marque ne peut interdire l'usage de celle-ci sans son autorisation pour des produits qu'il a mis dans le commerce ou qui ont été mis dans le commerce avec son consentement sous cette marque en dehors de l'Espace Economique Européen, la preuve préalable de l'épuisement du droit de marque incombant à celui qui l'allègue ; que si l'existence d'un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux fait toutefois obstacle à ce que le tiers poursuivi par le titulaire de la marque supporte la charge de la preuve, cette présomption ne joue qu'à la condition que les produits litigieux soient authentiques ; qu'en décidant néanmoins qu'en l'état d'un risque de cloisonnement des marchés, il appartenait à la Société CONVERSE INC et à la Société ALL STAR CV de démontrer que les produits avaient été initialement mis dans le commerce par elle-même ou avec leur consentement en dehors de l'Espace Economique Européen, sans avoir préalablement constaté que l'authenticité des produits litigieux était établie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 713-2, L. 713-4 et L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement, un salarié ou un collaborateur d'une entreprise remplit les conditions pour être entendu comme témoin et, partant, pour établir une attestation ; qu'en décidant néanmoins que les attestations délivrées par Monsieur X..., vice-président de la Société CONVERSE INC, et de Madame Y..., directrice de la protection des marques de la société, ne constituaient pas des éléments de preuve recevables, la Cour d'appel a violé l'article 201 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE, très subsidiairement, le principe selon lequel nul ne peut se préconstituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve d'un fait juridique ; qu'en décidant néanmoins qu'en vertu de cette règle, la Société CONVERSE INC, et la Société ALL STAR CV ne pouvaient se prévaloir de l'attestation du vice-président de la Société CONVERSE et de celle de la directrice de la protection des marques de cette même société, afin d'établir le défaut d'authenticité des produits, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
5°) ALORS QU'un salarié ou un collaborateur d'une entreprise remplit les conditions pour être entendu comme témoin et, partant, pour établir une attestation ; qu'en décidant néanmoins que l'attestation de Monsieur Z..., directeur juridique commercial Europe de la Société NIKE EUROPEAN OPERATIONS NETHERLANDS, filiale de la Société NIKE INC, dont la Société CONVERSE INC est une filiale indirecte, ne constituait pas un élément de preuve recevable, la Cour d'appel a violé l'article 201 du Code de procédure civile ;
6°) ALORS QUE, subsidiairement, le principe selon lequel nul ne peut se préconstituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve d'un fait juridique ; qu'en décidant néanmoins qu'en vertu de cette règle, la Société CONVERSE INC, et la Société ALL STAR CV ne pouvaient se prévaloir de l'attestation du directeur juridique commercial Europe de la Société NIKE EUROPEAN OPERATIONS NETHERLANDS, filiale de la Société NIKE INC, dont la Société CONVERSE INC est une filiale indirecte, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-11479
Date de la décision : 10/11/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROPRIETE INDUSTRIELLE - Marques - Protection - Contrefaçon - Contrefaçon par usage - Exclusion - Conditions - Tiers poursuivi - Epuisement du droit - Preuve - Caractère suffisant

L'épuisement des droits conférés par la marque supposant la mise en circulation des produits en cause pour la première fois sur le territoire de l'Espace économique européen par le titulaire de la marque, ou avec son consentement, ce qui en garantit l'origine, le tiers poursuivi en contrefaçon n'a pas d'autre preuve à rapporter que celle de l'épuisement des droits qu'il invoque comme moyen de défense. Ayant souverainement retenu que la connaissance par les titulaires de marques de la source d'approvisionnement du tiers poursuivi leur permettrait de faire obstacle à la libre circulation des produits sur le territoire de l'Espace économique européen en tarissant cette source, c'est, à bon droit, et sans inverser la charge de la preuve, qu'une cour d'appel en a déduit qu'il leur appartenait d'établir que les produits avaient été initialement mis dans le commerce par eux-mêmes, ou avec leur consentement, en dehors de l'Espace économique européen, sans avoir à exiger que le tiers poursuivi identifie la source de son approvisionnement, et qu'elle a recherché si, comme ils le prétendaient, leur absence de consentement s'expliquait par le défaut d'authenticité des produits litigieux


Références :

articles L. 713-2, L. 713-4 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 novembre 2013

A rapprocher : Sur la charge de la preuve de l'origine de la mise en circulation d'un produit :CJCE, arrêt du 20 novembre 2001, Zino Davidoff et Levi Strauss, C-414/99 ;CJCE, arrêt di 8 avril 2003, Van Doren + Q., n° C-244/00 ;Com., 9 avril 2002, pourvoi n° 99-15428, Bull. 2002, IV, n° 70 (2) (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 nov. 2015, pourvoi n°14-11479, Bull. civ. 2016, n° 839, Com., n° 458
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 839, Com., n° 458

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: Mme Darbois
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11479
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