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10/11/2015 | FRANCE | N°14-86701

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 novembre 2015, 14-86701


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Nouraddine X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 9 septembre 2014, qui, pour blessures involontaires aggravées, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, à une suspension du permis de conduire, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 septembre 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Pers, conseiller rapp

orteur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme R...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Nouraddine X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 9 septembre 2014, qui, pour blessures involontaires aggravées, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, à une suspension du permis de conduire, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 septembre 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Pers, conseiller rapporteur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller PERS, les observations de Me BLONDEL, de la société civile professionnelle FABIANI, LUC-THALER et PINATEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-19, 222-20-1, 222-44, 222-46 du code pénal, ensemble violation des articles L. 224-12 et L. 232-2 du code de la route, violation de l'article préliminaire, des articles 459 et 593 du code de procédure pénale, méconnaissance des exigences de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" en ce que l'arrêt attaqué a retenu le prévenu dans les liens de la prévention et en répression l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et à une peine complémentaire de suspension du permis de conduire ;
" aux motifs propres qu'il résulte des éléments objectifs recueillis et notamment le témoignage du passager qui suivait le véhicule Renault Twingo que le camion conduit par M. X...a accroché sur le côté gauche la Renault Twingo au moment où il la dépassait, laquelle a alors chassé de l'arrière vers la gauche pour venir taper la rampe centrale en béton séparant les voies de circulation, puis fait un tonneau en finissant sa course sur le toit ; qu'il résulte du croquis établi après l'accident par les policiers que le point de choc présumé se situe bien sur la voie de droite occupée par la Renault Twingo ; qu'ainsi, M. X...est bien à l'origine de l'accident survenu le 30 octobre 2009 ; qu'à l'évidence, les conséquences de cet accrochage provoqué par le dépassement de la Twingo par le camion étaient suffisamment spectaculaires et impressionnantes pour que M. X...s'en rende compte ; que la mauvaise foi du prévenu est d'autant plus grande qu'il admet avoir été rattrapé par le conducteur d'une fourgonnette blanche qu'il a averti de l'accident, ce qui ne l'a nullement incité à revenir en arrière et que l'employeur du prévenu a, lui aussi, estimé qu'il était impliqué dans cet accident grave de la circulation en le mettant à pied ; qu'au regard de ces éléments, les éléments apparaissent caractérisés et comme l'a retenu le tribunal M. X...doit être déclaré coupable des faits reprochés ;
" aux motifs encore que les premiers juges n'ont pas suffisamment pris en compte la gravité des faits qui auraient pu avoir des conséquences encore plus graves quant aux blessures des victimes ; que la cour aggravera en conséquence la peine en infligeant à M. X...une peine de six mois d'emprisonnement assorti d'un sursis simple tout en confirmant la peine complémentaire de suspension de son permis de conduire ;
" et aux motifs à les supposer adoptés des premiers juges qu'il résulte de la procédure et des débats à l'audience du 27 juin 2013 que les faits reprochés se sont produits de la façon suivante : « le 30 octobre 2009, circule sur la voie de droite de la départementale 986 au niveau de la commune de Lattes une Renault Twingo verte immatriculée ... ; à son bord se trouvent Mme Y...Cécile, épouse Z..., en tant que conductrice, ainsi que son fils, M. Z...Hervé sur le siège passager avant ; alors que le véhicule roule sur la voie de droite, il est doublé par un camion qui lors de cette manoeuvre de dépassement le percute à l'arrière ; que le véhicule chasse par l'arrière, fait un tête-à-queue, percute la rampe centrale en béton et fait plusieurs tonneaux pour se retrouver finalement sur le toit en travers de la voie de circulation ; que le véhicule Twingo accidenté est détruit ; que des témoins de l'accident viennent porter secours aux deux passagers du véhicule alors que le véhicule responsable de l'accrochage a pris la fuite ; que Mme Y...Cécile, épouse Z..., présentera des blessures justifiant trois jours d'ITT et M. Z...Hervé présentera des blessures justifiant 0 jour d'ITT ; qu'un témoin transmet aux services de police, transporté sur les lieux, la plaque d'immatriculation du camion impliqué à savoir le numéro ...; que le véhicule est identifié, c'est un camion frigorifique blanc Volvo appartenant à la société EARL Bonnefond et Fils, conduit ce jour-là par M. X...; qu'un témoin, passager d'un véhicule roulant derrière le véhicule Twingo, confirme qu'un camion blanc double la Twingo et l'accroche lors de cette manoeuvre, à l'arrière gauche provoquant ainsi l'accident, le camion ayant continué sa route et ne s'est pas arrêté ; que les passagers de la Twingo confirment avoir été percutés violemment par l'arrière ; que M. Hervé Z...indique avoir vu passer à côté d'eux, au moment où la voiture a été projetée, une masse blanche correspondant à un camion blanc avec une caisse blanche » ;
" aux motifs encore des premiers juges que M. X...précise qu'il se trouvait bien sur cette route au moment de l'accident et se souvient avoir doublé un véhicule vert de marque Renault Twingo ; qu'il déclare ne pas avoir senti de choc et ne pas avoir vu le véhicule faire des tonneaux ; qu'il précise, à environ 500 mètres de l'accident, avoir été rattrapé par une fourgonnette insistant par des signes pour qu'il s'arrête, ce qu'il a fait qu'après s'être arrêté sur le bas-côté et avoir constaté l'absence d'impact sur son camion et est reparti jusqu'au dépôt de l'entreprise et a alerté son employeur de ces faits ; que ce dernier confirme l'absence d'impact sur le véhicule, mais précise que M. X...a déclaré avoir vu le véhicule faire un écart et touché le muret de séparation tout en niant toute implication dans cet accident ; qu'il précise que M. X...ne lui avait pas évoqué la gravité de cet accident ; qu'informé également par d'autres professionnels du transport de la survenue dudit accident, il décidera de prendre contact avec les services de police et qu'eu égard à ces faits, il mit à pied M. X...;
" aux motifs aussi que, compte tenu du gabarit important du camion utilisé par M. X...et de celui-ci très léger conduit par Mme Y...Cécile, épouse Z..., il est vraisemblable que M. X...n'ait pas senti l'accrochage du véhicule Twingo lors de son dépassement ; que l'impact ressenti par les passagers du véhicules Twingo peut, à juste titre, avoir été ressenti comme un grand choc sans pour autant que cela ait entraîné la survenance de marques visibles sur le camion ; que cet accrochage a été la cause directe de l'accident en ce que consécutivement et immédiatement après le déplacement du camion conduit par M. X..., le véhicule Twingo a quitté la voie de droite pour heurter le muret de séparation et ensuite ayant effectué plusieurs tonneaux avant de terminer sur le toit ;
" aux motifs encore des premiers juges que deux témoins, ne se trouvant pas dans le véhicule accidenté, ont vu le déroulement des faits mettant en cause le camion conduit par M. X...et corroborant les déclarations des deux passagers accidentés ; que M. X...ne pouvait ignorer que ce véhicule, qui circulait juste derrière lui, pour l'avoir dépassé dans un temps très proche, s'était déplacé brutalement sur la voie de gauche et avait tapé le muret central avant de faire plusieurs tonneaux ; que les premières déclarations de M. X...auprès de son employeur le jour de l'accident faisaient d'ailleurs état de ce qu'il avait vu ce véhicule faire cet écart et toucher ledit muret ; qu'au surplus, M. X...rattrapé à 500 mètres de l'accident par un automobiliste qualifié d'insistant, s'est contenté de s'arrêter pour constater l'absence de choc sur son véhicule, qu'il n'a pas alors jugé utile de se transporter sur les lieux pour vérifier son implication éventuelle dans cet accident ; que la démarche d'informer son employeur tout en minimisant les faits était insuffisante ; qu'il y a lieu de le retenir dans les liens de la prévention et en répression, au regard du casier judiciaire de M. X...ne portant aucune condamnation de le condamner à une peine d'emprisonnement de trois mois assortie de sursis ;
" 1°) alors que la cour ni ne vise ni se réfère aux conclusions d'appel de l'appelant prévenu, d'où une violation des textes cités au moyen ;
" 2°) alors que, en tout état de cause, dans ses conclusions d'appel, le prévenu insistait sur les données objectives suivantes : « le seul témoin désignant M. X...est M. C..., lequel était lui-même au volant d'une fourgonnette blanche et lequel affirmait lors de sa première audition : « je n'ai pas vu le camion blanc, je n'ai pas relevé l'immatriculation ; je n'ai pas de détails à vous donner concernant ce camion » » ; que ce faisant poursuivait l'appelant « c'est donc à tort que le jugement reconnut que deux témoins ne se trouvant pas dans le véhicule accidenté avaient vu le déroulement des faits, lesquels mettaient en cause le camion conduit par M. X...» alors « qu'en réalité, aucun témoin n'a pu formellement identifier le camion du prévenu » et « que curieusement, M. C..., l'un des témoins entendu dans le cadre de cette affaire affirme au début de son audition qu'au moment de l'accident il se trouvait dans un véhicule en tant que passager ¿ que cela signifie donc forcément que ce véhicule était conduit par une autre personne ; que pourtant, aucune autre personne n'était entendue en qualité de témoin dans le cadre de cette affaire » ; qu'en ne s'exprimant absolument pas sur cette charnière essentielle des écritures pour retenir cependant le prévenu dans les liens de la prévention, la cour méconnaît ouvertement les exigences de l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble celles de l'article préliminaire du même code et de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme par rapport à un procès à armes égales où un juge ne peut délaisser un aspect central de la démonstration d'un prévenu qui sollicite sa relaxe ;
" 3°) alors que, en toute hypothèse, la cour confirme le jugement déféré sur la culpabilité sur la peine complémentaire de suspension du permis de conduire cependant qu'il ne résulte nullement du dispositif du jugement du 5 juillet 2013 qui a mis à néant le jugement prononcé le 15 février 2012 sur l'opposition exercée par M. X...une quelconque condamnation à une peine complémentaire de suspension du permis de conduire dont on ne sait d'ailleurs pas davantage pour quelle période ; qu'ainsi l'arrêt attaqué sur la peine complémentaire, n'est pas légalement justifié au regard des textes cités au moyen " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-19, 222-20-1, 222-44, 222-46 du code pénal, violation des articles L. 224-12 et L. 232-2 du code de la route, violation de l'article 1382 du code civil et de l'article 2 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu au paiement de diverses sommes au bénéfice de parties civiles ;
" alors que la cassation qui ne manquera pas d'être prononcée sur le fondement de la première branche du premier moyen aura pour inéluctable conséquence d'entraîner l'annulation, pour perte de fondement juridique, du dispositif de l'arrêt relatif à l'action civile " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X...a formé opposition à un jugement rendu par défaut, qui, sur l'action pénale du chef de blessures involontaires aggravées, l'avait condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis et six mois de suspension du permis de conduire ; que, le tribunal correctionnel, par jugement contradictoire, l'a déclaré coupable, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ; que le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches et sur le second moyen :
Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qui concerne la culpabilité et les intérêts civils, l'aggraver quant à la peine principale, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle a été saisie, a justifié sa décision ; D'où il suit que les griefs doivent être écartés ;

Mais, sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que doivent être déclarés nuls les jugements ou arrêts dont le dispositif contient des décisions contradictoires ;
Attendu que dans son dispositif la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris sur la peine complémentaire de suspension du permis de conduire ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le tribunal, statuant sur opposition, n'avait prononcé aucune peine complémentaire, la cour d'appel a méconnu l'article susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Montpellier, en date du 9 septembre 2014, mais en ses seules dispositions relatives à la peine complémentaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix novembre deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-86701
Date de la décision : 10/11/2015
Sens de l'arrêt : Cas. part. par voie de retranch. sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 09 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 nov. 2015, pourvoi n°14-86701


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.86701
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