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18/05/2016 | FRANCE | N°14-15988

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 mai 2016, 14-15988


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. et Mme X... que sur le pourvoi incident relevé par la société BNP Paribas Personal Finance ;
Donne acte à M. et Mme X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Cabinet de conseil Herios finance, la Selarl Bauland et Martinez, en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Cabinet de conseil Herios finance, la Selarl MDP mandataires judiciaires associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de la sociét

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. et Mme X... que sur le pourvoi incident relevé par la société BNP Paribas Personal Finance ;
Donne acte à M. et Mme X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Cabinet de conseil Herios finance, la Selarl Bauland et Martinez, en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Cabinet de conseil Herios finance, la Selarl MDP mandataires judiciaires associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Cabinet de conseil Herios finance, et la SCP Delphine Raymond, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Royal partenaire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 20 décembre 2013), que M. et Mme X... ont, par acte authentique reçu par M. Y..., notaire, acquis de la SCI La Vallée d'Aulnes (la SCI), en l'état futur d'achèvement, un lot de copropriété en vue de le donner en location sous le statut de loueur en meublé non professionnel ; que, pour financer l'intégralité du coût de cette acquisition, ils ont souscrit un emprunt auprès de la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) ; que l'opération ne leur permettant pas d'obtenir les avantages fiscaux qu'ils recherchaient, M. et Mme X... ont assigné la SCI, le notaire et la banque en annulation et, subsidiairement, en résolution de la vente et du prêt, ainsi qu'en remboursement de frais engagés et paiement de dommages-intérêts ; que la cour d'appel, par l'arrêt attaqué, a annulé le contrat de vente pour dol et, par voie de conséquence, celui de prêt ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes envers M. Y... et la SCP de notaires au sein de laquelle il exerce son activité tendant à les voir condamner à leur payer, à titre de dommages-intérêts, le prix d'acquisition de l'appartement alors, selon le moyen, que le notaire engage sa responsabilité par la faute qu'il commet à l'origine du préjudice subi par son client ; qu'en ayant, après avoir condamné in solidum la SCI venderesse et le notaire à l'égard de M. et Mme X..., refusé de condamner le notaire à des dommages-intérêts en réparation du coût d'acquisition de l'immeuble, au motif inopérant que le notaire n'était pas cocontractant et ne pouvait, en tout état de cause, rembourser un prix de vente qu'il n'a pas perçu, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que les restitutions réciproques consécutives à l'annulation de la convention à laquelle le notaire a prêté son concours, ne constituant pas, en elles-mêmes, un préjudice indemnisable que l'officier ministériel peut être tenu de réparer, sauf si elles s'avèrent impossibles à obtenir, notamment en raison de l'insolvabilité du contractant qui en est débiteur, c'est à bon droit que la cour d'appel, devant laquelle M. et Mme X..., par des conclusions ambiguës, demandaient, sous le couvert de l'indemnisation d'un préjudice, la condamnation du notaire à leur verser le montant du prix de la vente annulée et n'établissaient pas, ni même n'alléguaient, que la SCI était totalement ou partiellement insolvable, a retenu qu'ils ne pouvaient solliciter ce paiement qu'à l'encontre du vendeur et non du notaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du même pourvoi :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes de paiement de dommages-intérêts formées contre la banque alors, selon le moyen :
1°/ que c'est au banquier qui est tenu d'un devoir d'information et de conseil envers un emprunteur non averti de faire la preuve qu'il a correctement rempli ses obligations ; qu'en ayant décidé du contraire, au regard de M. et Mme X..., emprunteurs non avertis, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
2°/ que M. et Mme X..., emprunteurs non avertis, faisaient valoir que la banque avait manqué à son devoir d'information et de conseil car ne leur ayant pas permis d'évaluer, en toute connaissance de cause, l'adéquation de l'opération proposée à leur situation et à leur attente ; qu'en ayant rejeté toute faute de la banque au motif inopérant que le prêt accordé était sans lien avec les manoeuvres dolosives retenues à l'encontre de la SCI, ce qui laissait entière la question de savoir si la banque avait correctement rempli son obligation de conseil et d'information, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, n'est tenue, en cette seule qualité, non d'une obligation de conseil envers les emprunteurs, sauf si elle en a pris l'engagement, mais seulement d'une obligation d'information sur les caractéristiques du prêt qu'elle leur propose de souscrire afin de leur permettre de s'engager en toute connaissance de cause et, sous certaines conditions, non invoquées en l'espèce, d'une obligation de mise en garde ; que l'arrêt retient que le prêt avait été accordé sans lien avec les manoeuvres dolosives établies contre la SCI, faisant ainsi ressortir que la banque n'avait pas à alerter M. et Mme X... sur le fait que l'opération immobilière envisagée ne leur permettait pas de prétendre aux avantages fiscaux recherchés ; que par ces constatations et appréciations, qui écartent tout manquement de la banque à son obligation d'information, la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement formée à l'encontre de la SCI au titre de l'indemnité de remboursement anticipé alors, selon le moyen :
1°/ que le préjudice doit être déterminé par la comparaison entre la situation dans laquelle se serait trouvé le prêteur en l'absence d'annulation du contrat de prêt par suite de l'annulation du contrat de vente pour dol et celle dans laquelle il est placé par suite de l'effet de l'annulation de ce contrat de vente ; qu'en refusant d'accorder à la banque, à titre de dommages-intérêts, l'indemnité de remboursement anticipé au motif inopérant que cette indemnité ne constitue pas une rémunération attendue du prêt, mais une pénalité contractuelle devenue inexistante du fait de l'annulation rétroactive du prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
2°/ que l'indemnité de remboursement anticipé n'est pas une pénalité contractuelle mais une indemnité ayant pour objet de compenser l'écart entre le taux du prêt et celui du remploi par le prêteur des fonds remboursés au cas où ce dernier serait inférieur au premier ; qu'en affirmant qu'une telle indemnité constituait une pénalité contractuelle devenue inexistante du fait de l'annulation rétroactive du prêt, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1152 du code civil, ensemble l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que, du fait de l'annulation du contrat de prêt, consécutive à celle du contrat de vente, les parties devaient être remises en l'état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du prêt et que la restitution à la banque, avant le terme prévu, des fonds en raison de cette annulation ne pouvait être assimilée à un remboursement anticipé en application d'une clause ne pouvant produire effet qu'en cas d'exécution du contrat, la cour d'appel, par ce seul motif, abstraction faite de celui, erroné mais surabondant, tiré de la qualification de l'indemnité de remboursement anticipé en pénalité contractuelle, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est ait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande des époux X... envers Maître A. Y... et la SCP Alain Y... et Isabelle DECRON-LAFAYE tendant à les voir condamner à leur payer à titre de dommages et intérêts le prix d'acquisition de l'appartement.
AUX MOTIFS QUE « M. et Mme X... ne peuvent solliciter le paiement du coût de l'acquisition par suite de la nullité de la vente prononcée qu'à l'encontre du vendeur à savoir la société VALLEE D'AULNES et non à l'encontre du Notaire, qui n'est pas cocontractant et ne peut en tout état de cause rembourser un prix de vente qu'il n'a pas reçu ».
ALORS QUE le notaire engage sa responsabilité par la faute qu'il commet à l'origine du préjudice subi par son client ; qu'en ayant, après avoir condamné in solidum la société VALLEE D'AUGES venderesse et le notaire à l'égard des époux X..., refusé de condamner le notaire à des dommages et intérêts en réparation du coût d'acquisition de l'immeuble, au motif inopérant que le notaire n'était pas cocontractant et ne pouvait, en tout état de cause, rembourser un prix de vente qu'il n'a pas perçu, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de dommages-intérêts des époux X... formées contre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.
AUX MOTIFS QUE « Monsieur et Madame X... ne démontrent nullement l'existence d'une faute pouvant être opposée à la société BNP, le fait que le prêt ait été accordé étant sans lien avec les manoeuvres dolosives retenues à l'encontre de la société LA VALLEE D'AULNES. Ils ne peuvent en outre lui reprocher de leur avoir proposés un prêt à taux variable non capé alors que sur ce point, les époux X..., étaient parfaitement en mesure d'apprécier la signification exacte de l'offre de prêt effectué, eu égard en particulier à la profession bancaire exercée par Mme X.... En conséquence, les époux X... ne justifient pas d'une faute commise par la société BNP et ne peuvent solliciter la condamnation in solidum de la société BNP avec la SCI LA VALLEE D‘AULNES » (arrêt p. 21-22).
1° ALORS QUE c'est au banquier qui est tenu d'un devoir d'information et de conseil envers un emprunteur non averti de faire la preuve qu'il a correctement rempli ses obligations ; qu'en ayant décidé du contraire, au regard des époux X... emprunteurs non avertis, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil.
2° (SUBSIDIAIRE) ALORS QUE M. et Mme X..., emprunteurs non avertis, faisaient valoir que la société BNP PARIBAS avait manqué à son devoir d'information et de conseil car ne leur ayant pas permis d'évaluer, en toute connaissance de cause, l'adéquation de l'opération proposée à leur situation et à leur attente ; qu'en ayant rejeté toute faute de la banque au motif inopérant que le prêt accordé était sans lien avec les manoeuvres dolosives retenues à l'encontre de la société LA VALLEE D'AULNES, ce qui laissait entière la question de savoir si la banque avait correctement rempli son obligation de conseil et d'information, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en violation de l'article 1147 du code civil.Moyen produit au pourvoi provoqué par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas Personal Finance
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté BNP Paribas Personal Finance de sa demande de paiement présentée à l'encontre de la société La Vallée d'Aulnes au titre de l'indemnité de remboursement anticipé ;
AUX MOTIFS QUE « la BNP ne peut pas solliciter le montant de l'indemnité de remboursement anticipé soit un semestre d'intérêts au taux actuel de 2,40 % sur le capital restant dû de 357.285,26 € (357.285,26 x 2,40/100/2) soit 4.287,73 € ; qu'en effet, une telle indemnité ne constitue pas une rémunération attendue du prêt, mais une pénalité contractuelle devenue inexistante du fait de l'annulation rétroactive du prêt ; que le fait que les parties soient remises en l'état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du prêt ne peut être assimilé à un remboursement anticipé pour un contrat en cours de validité ; »
1/ ALORS QUE le préjudice doit être déterminé par la comparaison entre la situation dans laquelle se serait trouvé le prêteur en l'absence d'annulation du contrat de prêt par suite de l'annulation du contrat de vente pour dol et celle dans laquelle il est placé par suite de l'effet de l'annulation de ce contrat de vente ; qu'en refusant d'accorder à BNP Paribas Personal Finance, à titre de dommages et intérêts, l'indemnité de remboursement anticipé au motif inopérant que cette indemnité ne constitue pas une rémunération attendue du prêt, mais une pénalité contractuelle devenue inexistante du fait de l'annulation rétroactive du prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
2/ ALORS QUE l'indemnité de remboursement anticipé n'est pas une pénalité contractuelle mais une indemnité ayant pour objet de compenser l'écart entre le taux du prêt et celui du remploi par le prêteur des fonds remboursés au cas où ce dernier serait inférieur au premier ; qu'en affirmant qu'une telle indemnité constituait une pénalité contractuelle devenue inexistante du fait de l'annulation rétroactive du prêt, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1152 du code civil, ensemble l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-15988
Date de la décision : 18/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 20 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 mai. 2016, pourvoi n°14-15988


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.15988
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