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04/10/2016 | FRANCE | N°15-12294

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 octobre 2016, 15-12294


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 septembre 2014), que la société LPG Systems a assigné MM. X..., Y... et Z... en nullité de la partie française du brevet européen n° 1 023 111 dont ils sont copropriétaires ;
Attendu que MM. X... et Y... font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen :
1°/ que la société LPG Systems et M. Z... n'ont jamais prétendu que le brevet européen n° 1 023 111 revendiquerait un réglage de la vitesse et de l'

amplitude de l'oscillation et de la rotation effectué sans l'intervention du patient,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 septembre 2014), que la société LPG Systems a assigné MM. X..., Y... et Z... en nullité de la partie française du brevet européen n° 1 023 111 dont ils sont copropriétaires ;
Attendu que MM. X... et Y... font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen :
1°/ que la société LPG Systems et M. Z... n'ont jamais prétendu que le brevet européen n° 1 023 111 revendiquerait un réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation et de la rotation effectué sans l'intervention du patient, ni que la proposition faite dans la consultation de M. A... aurait été contraire aux enseignements du brevet en ce qu'elle prévoit qu'un tel réglage était effectué avec l'intervention du patient ; qu'en retenant, pour écarter la proposition contenue dans la consultation de M. A... produite en cause d'appel, que celle-ci serait « contraire aux enseignements du brevet qui revendique (…) l'absence de toute intervention du sujet à traiter », la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que le paragraphe 26 de la description du brevet européen n° 1 023 111, comme le texte de la revendication 1, indique uniquement que le mouvement de rotation alterné est obtenu « par l'intermédiaire d'un moteur unique relié à des moyens de transmission et sans intervention du patient » et que « l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation étant réglables et pouvant varier en cours d'utilisation », mais ne prévoit nullement que l'amplitude et la vitesse de l'oscillation et de la rotation seraient réglables sans l'intervention du patient ; qu'en retenant que le paragraphe 26 de la description prévoirait que « l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation sont réglables sans l'intervention du patient » et que le brevet revendiquerait ainsi l'absence de toute intervention du sujet à traiter, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen n° 1 023 111, en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ que l'étendue de la protection conférée par un brevet européen est déterminée par la teneur de la revendication, interprétée, au besoin, à la lumière des revendications et des dessins ; qu'en l'espèce, la revendication 1 du brevet européen n° 1 023 111 indique uniquement que la plate-forme reçoit son mouvement d'oscillation combiné avec un mouvement de rotation par l'intermédiaire d'un « moteur unique », mais non que le réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée se ferait grâce à ce même moteur unique ; que la description n'indique pas davantage que ce réglage devrait intervenir par l'intermédiaire de ce même moteur ; qu'en affirmant, pour écarter les deux consultations produites par MM. X... et Y... en cause d'appel, que celles-ci seraient contraires aux enseignements du brevet européen n° 1 023 111, en ce qu'elles prévoient un « organe moteur supplémentaire » et en partant ainsi du principe que l'appareil couvert par ce brevet ne pourrait comporter, en tout et pour tout, qu'un seul moteur et que le réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée devrait se faire par le « moteur unique », la cour d'appel a méconnu la teneur de la revendication 1 de ce brevet, en violation de l'article 69 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
5°/ qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen n° 1 023 111, en violation de l'article 1134 du code civil ;
6°/ que dans leurs conclusions d'appel, MM. X... et Y... faisaient valoir que la revendication 1 indique uniquement que la plate-forme reçoit son mouvement d'oscillation combiné avec un mouvement de rotation par l'intermédiaire d'un moteur unique, mais non que le réglage de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée se ferait grâce à ce moteur unique ; qu'ils soulignaient, en outre, que le paragraphe 48 de la description distingue bien l'entraînement de l'excentrique, servant à obtenir le mouvement de rotation alternée, qui est « obtenu par exemple par l'intermédiaire du moteur », et le réglage de l'excentration, pour lequel il n'est fait aucune référence à l'action de ce moteur ; qu'ils relevaient, enfin, que le paragraphe 45 de la description prévoit que le réglage de l'amplitude de l'oscillation se fait par l'intermédiaire du vérin, lequel constitue un élément distinct du « moteur unique » ; qu'en affirmant, sans autre explication, pour écarter les deux consultations produites par MM. X... et Y... en cause d'appel, que celles-ci seraient contraires aux enseignements du brevet européen n° 1 023 111, en ce qu'elles prévoient un « organe moteur supplémentaire » et en partant ainsi du principe que l'appareil couvert par ce brevet ne pourrait comporter, en tout et pour tout, qu'un seul moteur, sans s'expliquer sur les différents éléments précités, qui montraient que le brevet revendiquait simplement la présence d'un moteur unique pour l'obtention de l'oscillation et de la rotation, et n'interdisait donc pas la présence, sur l'appareil, d'un autre moteur pour exercer d'autres fonctions que celle-ci, telles que le réglage de l'amplitude et de la vitesse de l'oscillation et de la rotation, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ qu'en se bornant à affirmer que les modes de réalisation de l'invention proposés dans les deux consultations produites en cause d'appel requerraient « nécessairement » de l'homme du métier désireux de mettre en oeuvre les enseignements du brevet qu'il « fasse preuve sinon d'activité inventive, à tout le moins de dépasser les limites d'une simple mesure d'exécution », sans autre explication, et notamment sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur les avis de MM. A... et C..., qui soulignaient, en se référant notamment à des documents de l'art antérieur, qu'il entrait dans les connaissances de l'homme du métier de faire varier l'excentricité, et donc l'amplitude de la rotation, grâce à un vérin, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que la revendication 1 décrivant le principe de fonctionnement d'un appareil « sans l'intervention du patient », la cour d'appel n'a relevé nul moyen d'office, ni dénaturé les termes du litige en constatant que le patient n'intervenait pas dans le fonctionnement du dispositif décrit par le brevet, pour en déduire qu'une telle intervention était contraire aux enseignements de ce dernier ;
Attendu, en deuxième lieu, que le brevet décrivait une invention constituée essentiellement par une plate-forme circulaire mobile destinée à supporter le sujet à traiter et pouvant recevoir un mouvement d'oscillation combiné à un mouvement de rotation alterné « par l'intermédiaire d'un moteur unique, l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation étant réglables et pouvant varier en cours d'utilisation » ; que cette description n'étant pas claire et précise, puisqu'elle ne disait, ni que ce moteur unique n'assurait pas le réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée, ni qu'il y avait lieu de recourir, pour ce faire, à quelque autre moyen, c'est par une interprétation que l'ambiguïté de cette description rendait nécessaire que la cour d'appel a retenu, motivant ainsi sa décision, que l'adjonction d'un organe moteur supplémentaire était contraire aux enseignements de ce brevet ;

Et attendu, enfin, qu'ayant relevé qu'en l'espèce, l'homme du métier est un mécanicien disposant de connaissances générales en matière de mécanique, spécialisé dans le domaine biomédical et connaissant les mécanismes de réglage, à l'arrêt, de l'amplitude des mouvements d'oscillation et de rotation alternée, c'est par une décision motivée, tirant les conséquences de cette définition, que la cour d'appel, après avoir relevé que l'homme du métier ne trouve ni dans la description du brevet ni dans les figures, la moindre indication technique propre à lui enseigner les moyens de réaliser sur une plate-forme à moteur unique le réglage des mouvements d'oscillation et de rotation alternée quand l'appareil est en cours d'utilisation et que ces deux mouvements fonctionnent en combinaison, a retenu que les consultations en cause, puisqu'elles supposaient le recours à un organe moteur supplémentaire, requéraient que cet homme du métier ne se limite pas à mettre en oeuvre une mesure d'exécution afin de parvenir à un tel réglage, en mouvement ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. Z... la somme globale de 3 000 euros et à la société LPG Systems la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour M. X... et M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité de la partie française du brevet européen no 1 023 111 pour insuffisance de description ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société LPG demande que soit prononcée pour insuffisance de description la nullité de la partie française du brevet européen EP 1 023 111 se substituant au brevet français FR 9713071 ; qu'elle fait valoir à cet égard que les moyens permettant de faire varier l'amplitude tant de l'oscillation que de la rotation en cours d'utilisation ne sont pas décrits ni ne se déduisent des figures annexées au brevet et fait observer qu'il n'appartient pas à l'homme du métier, sauf à ce qu'il se substitue à l'inventeur et fasse preuve lui-même d'activité inventive, de procéder à des expériences et à des recherches complémentaires afin de déterminer les caractéristiques nécessaires à la réalisation de l'invention et à l'obtention du résultat recherché ; qu'elle ajoute que la caractéristique selon laquelle l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation sont réglables et susceptibles de varier en cours d'utilisation est intégrée à la revendication principale du brevet ce dont il résulte qu'elle constitue une caractéristique essentielle de l'invention et que l'absence d'indication permettant à l'homme du métier de la mettre en oeuvre n'en est que plus grave au regard de l'exigence d'une description suffisamment claire et complète prévue sous peine de nullité du brevet par la Convention de Munich sur le brevet européen ; que selon l'article L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle, la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l'un quelconque des motifs visés à l'article 138 paragraphe 1 de la Convention de Munich ; et qu'il est prévu à l'article L. 138. 1 b) de la Convention de Munich sur le brevet européen (CBE), que le brevet européen est déclaré nul s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ; qu'il est constant en l'espèce que l'appareil de rééquilibrage du corps humain agit par les mouvements mécaniques d'une plate-forme mobile supportant Je patient à traiter et que l'homme du métier est un mécanicien, disposant comme tel des connaissances générales en matière de mécanique, spécialisé dans Je domaine biomédical ; que, ceci ayant été posé, la cour relève à l'instar du tribunal que la revendication 1, ni davantage les revendications dépendantes 2 à 9 relatives à des moyens d'appuis ou de traction du sujet sur la plate-forme n'enseignent les moyens de régler en cours d'utilisation les amplitudes et les vitesses des mouvements combinés d'oscillation et de rotation alternée ; que le paragraphe 26 de la partie descriptive du brevet, précédemment cité, se borne à énoncer, sans plus de précision, que les mouvements combinés d'oscillation et de rotation alternée sont transmis à la plate-forme par un moteur unique relié à des moyens de transmission, que l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation sont réglables sans intervention du patient et peuvent varier en cours d'utilisation, le paragraphe 27 ajoutant que la possibilité de réglage permet d'adapter l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation en fonction du traitement à réaliser et que ces facteurs peuvent varier de façon programmée en cours d'utilisation en fonction du traitement à réaliser ; qu'il est rappelé au paragraphe 41 de la description que la plate-forme est motorisée, et exposé aux paragraphes suivants 43 à 49, d'une part, que le mouvement d'oscillation, dont l'amplitude peut être réglable, est obtenu en montant la plate-forme (2) à l'extrémité d'un axe d'appui central (6) par l'intermédiaire d'un ensemble formant rotule, lequel axe d'appui central (6) est situé à l'extrémité de la tige (8) d'un vérin (9), que, d'autre part, le mouvement de rotation alternée est provoqué par un excentrique (22) commandant une tige de liaison (23), le réglage de l'excentration permettant de faire varier l'amplitude de la rotation alternée de la plate-forme ; mais que les développements qui précèdent ne traitent à l'évidence que des mécanismes de réglage de l'amplitude des mouvements d'oscillation (par déplacement d'une tige de vérin) et de rotation alternée (par asservissement de l'excentration de l'excentrique) sur la plate-forme à l'arrêt et il est au demeurant constant que les mécanismes de réglage de l'amplitude des mouvements d'oscillation et de rotation alternée, à l'arrêt, sont connus de l'homme du métier ; qu'en revanche, l'homme du métier ne trouve ni dans la description du brevet ni dans les figures, la moindre indication technique propre à lui enseigner les moyens de réaliser sur une plate-forme à moteur unique le réglage des mouvements d'oscillation et de rotation alternée quand l'appareil est en cours d'utilisation et que ces deux mouvements fonctionnent en combinaison ainsi qu'il est revendiqué par le brevet ; que les consultations nouvellement versées aux débats par les appelants (pièces 13 et 14) proposent pour la première, de réaliser l'excentrique 22 (après avoir admis que le brevet n'indique pas tous les détails du réglage de l'excentricité) sous la forme d'un piston ou d'un vérin dont la longueur est par conséquent variable (ce qui fait varier l'excentricité) et dont la commande peut être assurée classiquement de manière électrique et/ ou hydraulique et est, de manière classique déportée, sur l'appareil à proximité du patient pour qu'il puisse l'actionner en cours d'utilisation, pour la seconde, de faire varier l'excentration en montant sur l'excentrique un vérin électrique ou hydraulique qui commanderait Je mouvement de l'excentrique et tournerait avec lui ; mais que ces propositions prévoient, s'agissant de la première, l'intervention du patient, et les deux, un organe moteur supplémentaire, et sont ainsi contraires aux enseignements du brevet qui revendique, ainsi qu'il a été précédemment exposé, l'absence de toute intervention du sujet à traiter et une plate-forme à moteur unique ; qu'en outre, elles requièrent nécessairement de l'homme du métier désireux de mettre en oeuvre les enseignements du brevet qu'il fasse preuve sinon d'activité inventive à tout le moins de dépasser les limites d'une simple mesure d'exécution ; qu'il s'infère de ces éléments que la revendication 1 du brevet ne répond pas à l'exigence d'une description suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier, à l'aide de ses connaissances générales et sans effort excessif, puisse la mettre en oeuvre ; que le jugement déféré doit être en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu le grief d'insuffisance de description et annulé la revendication 1 ainsi que les revendications dépendantes 2 à 9 du brevet » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société LPG invoque les dispositions du code de la propriété intellectuelle combinées avec celles de la convention sur le brevet européen (CBE) alors que s'agissant d'un titre européen, seule la CBE est applicable ; que l'article 83 de la CBE prévoit que l'invention doit être exposée dans la demande de brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ; que l'article 84 dispose quant à lui que les revendications définissent l'objet de la protection demandée ; qu'elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description ; qu'aux termes de l'article 138. 1 b) de la CBE, le brevet européen peut être déclaré nul s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse J'exécuter ; qu'en J'espèce, J'appareil est destiné au rééquilibrage du squelette par des mouvements mécaniques d'une plate-forme sur laquelle se trouve le patient ; que l'homme du métier est donc un mécanicien ayant des connaissances biomédicales ; que la société LPG soulève la nullité du brevet européen n° 1 023 111 pour insuffisance de description aux motifs que l'usage de l'appareil pour rééquilibrer le corps humain et donc son application pour obtenir la fonction thérapeutique attendue ne sont pas décrits ; qu'elle estime par ailleurs que le brevet n'indique pas les risques évidents induits pour le patient lors de l'utilisation de l'appareil, notamment les risques de déstabilisation et d'éjection et se prévaut à ce titre de l'avis de Monsieur B..., kinésithérapeute et spécialiste en génie biomédical ; que Messieurs X... et Y... soutiennent que le brevet prévoit de nombreux exemples d'applications thérapeutiques ; qu'en effet, différentes applications thérapeutiques sont envisagées par la description du brevet (paragraphes 0023 à 0025) et diverses hypothèses d'utilisation y sont décrites (0070 à 0082) ; que les défendeurs rappellent également à juste titre que le brevet divulgue uniquement un appareil permettant de réaliser un rééquilibrage du corps humain, par la mise en oeuvre de moyens mécaniques en vue de traitements thérapeutiques adaptés à la pathologie du patient et préalablement définis par le professionnel, sans qu'il soit nécessaire pour réaliser l'invention que l'homme du métier, en l'espèce un mécanicien, connaisse les applications thérapeutiques possibles, alors que les modalités d'application ne sont pas revendiquées ; que le moyen tiré du défaut de description des dangers potentiels lors de la mise en oeuvre de l'appareil est inopérant dès lors qu'il n'a pas trait à la réalisation technique de l'invention et ne fait pas obstacle à son application industrielle ; que les éventuelles restrictions ou précautions d'usage devant accompagner le cas échéant l'utilisation du matériel ne ressortent pas du domaine de l'invention mais de sa mise en oeuvre par des professionnels, en l'espèce des kinésithérapeutes, qui choisiront ou non d'utiliser l'appareil reproduisant l'invention, en fonction de leur avis sur sa dangerosité prétendue, étant rappelé que selon la description, la vitesse et l'amplitude des mouvements peuvent être adaptés par ledit professionnel au cas par cas ; que par ailleurs, la demanderesse soutient que les moyens permettant de faire varier l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation en cours d'utilisation ne sont pas décrits, ni ne se déduisent des figures annexées à ce brevet et qu'il n'appartient pas à l'homme du métier de se substituer à l'inventeur pour procéder à des expériences et des recherches complémentaires afin de déterminer les caractéristiques nécessaires à la réalisation de l'invention et à l'obtention du résultat ; que les défendeurs estiment que leur brevet porte sur la combinaison de l'ensemble des caractéristiques essentielles de la revendication 1 mais ne protège pas une forme de réalisation de ces caractéristiques ; qu'ils en déduisent que la description de l'asservissement du vérin pour l'oscillation et de l'excentration de l'excentrique pour le mouvement de rotation en cours d'utilisation ne rentrent pas dans l'objet du brevet alors que selon eux, l'homme du métier, un ingénieur-mécanicien, aura les connaissances générales pour comprendre et mettre en oeuvre l'invention, notamment l'automatisation des réglages d'amplitude et de vitesse ; que sur ce, il est constant que l'homme du métier, en l'espèce un mécanicien spécialisé en biomédecine, peut compléter les informations données dans le brevet en faisant appel à ses connaissance générales, à savoir, ses connaissances élémentaires en mécanique ; que la revendication no 1 est ainsi rédigée : « Appareil permettant de réaliser un rééquilibrage du corps humain, constitué essentiellement par une plate-forme circulaire mobile, destinée à supporter le sujet à traiter et qui peut recevoir un mouvement d'oscillation, et dans lequel ladite plate-forme reçoit son mouvement d'oscillation autour d'un point d'appui central, mouvement combiné à un mouvement de rotation alterné, par l'intermédiaire d'un moteur unique relié à des moyens de transmission et sans intervention du patient, et ce dans le plan de la plateforme supportant le sujet autour de l'axe géométrique perpendiculaire à ladite plate-forme et passant par son centre, l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation étant réglables et pouvant varier en cours d'utilisation, des moyens étant associés audit appareil pour que le sujet puisse être maintenu sur la plate-forme aussi bien en position debout qu'en position accroupie ou assise)) ; qu'il est constant que ni cette revendication ni aucune des revendication dépendantes 2 à 9, relatives à des moyens d'appuis ou de traction ou de maintien du sujet sur la plate-forme n'enseignent les moyens de régler en cours d'utilisation les amplitudes et les vitesses des mouvements d'oscillations et de rotation ; que les paragraphes 43 à 49 de la description expliquent d'une part que la plate-forme est motorisée et que le mouvement d'oscillation est obtenu en montant ce plateau à l'extrémité d'un axe d'appui central situé au bout de la tige d'un vérin ; d'autre part que le mouvement de rotation alternée est généré par un excentrique motorisé et que pour adapter l'amplitude de la rotation, il convient de régler l'excentration, le tout grâce au moteur, qui pourra être programmé pour varier au cours d'un traitement ; que si les mécanismes de réglage de l'amplitude des mouvements d'oscillation et de rotation alternée à l'arrêt sont connus de l'homme du métier et rappelés dans le brevet, aucun moyen de réglage en cours d'utilisation n'est cependant décrit ; qu'effectivement, le paragraphe 26 se contente de rappeler que les mouvements combinés d'oscillation et de rotation alternée sont transmis à la plate-forme par un moteur unique, relié à des moyens de transmission, l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation étant réglables sans intervention du patient et pouvant varier en cours d'utilisation grâce à la possibilité de réglage qui permet d'adapter l'amplitude et la vitesse des deux mouvements au traitement à réaliser, ces facteurs pouvant varier de façon programmée en cours d'utilisation en fonction du traitement à réaliser ; que certes, à la lecture du brevet, l'homme du métier comprend que l'invention porte sur un dispositif dans lequel les variations d'amplitude et de vitesse des mouvements sont réglables en cours de fonctionnement de l'appareil, sans intervention du patient, mais aucune indication sur les moyens de réglage n'est donnée par le brevet, ni dans ses revendications, ni dans la description, ni dans les dessins, pouvant le cas échéant compléter les revendications ; qu'en particulier, aucune indication technique ne permet à l'homme du métier de déterminer le moyen de contrôler, par un moteur unique, le réglage des mouvements d'oscillation et de rotation alternée, pendant le fonctionnement simultané de ces mouvements, lesquels se combinent aux termes de l'invention ; que Messieurs X... et Y... admettent que le pilotage du déplacement de la tige du vérin permettant de régler l'amplitude de l'oscillation pendant le fonctionnement n'est pas explicitement mentionné mais considèrent que l'homme du métier dispose de toutes les connaissances utiles pour réaliser cet asservissement, ce dont ils ne justifient pourtant aucunement ; que par ailleurs, Messieurs X... et Y... estiment que pour faire varier l'amplitude de la rotation alternée en cours d'utilisation, l'homme du métier doit asservir l'excentration de l'excentrique par l'application de moyens basiques qu'il connaît, lesquels ne sont cependant pas décrits dans le brevet ni identifiés parmi les connaissances générales que le biomécanicien pourrait avoir ; qu'au contraire, la demanderesse produit un rapport d'étude du cabinet Beau de Loménie rédigé le 30 novembre 2011 d'après lequel si le réglage de l'excentration peut être effectué lorsque l'appareil est à l'arrêt, il apparaît techniquement inconcevable qu'en cours d'utilisation, l'excentration de l'excentrique puisse être réglée, ni la description, ni les figures ne donnant d'indications suffisantes à l'homme du métier pour régler l'amplitude de la rotation alternée en cours de fonctionnement ; que la société LPG rapporte donc la preuve qu'un homme du métier ne dispose pas des informations nécessaires à la lecture du brevet pour mettre en oeuvre l'invention, en particulier l'une de ses caractéristiques essentielles et nouvelles à savoir la possibilité de régler J'amplitude et la vitesse des mouvements combinés en cours d'utilisation ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le brevet EP 1 023 111 décrit seulement les moyens mécaniques pour régler J'amplitude des mouvements d'oscillation et de rotation alternée de la plate-forme à l'arrêt mais dès lors que le réglage en cours d'utilisation constitue une des caractéristiques essentielles du brevet, Je titre doit préciser les moyens permettant à J'homme du métier de mettre en oeuvre techniquement cette idée, qui, sinon, ne peut constituer une invention protégeable, faute d'enseigner les éléments techniques permettant sa réalisation, la seule mention d'une motorisation ne répondant pas à l'exigence d'une description suffisamment claire et complète pour que J'homme du métier puisse J'exécuter ; que dès lors que la demanderesse rapporte la preuve que le brevet ne divulgue pas l'ensemble des moyens permettant de le mettre en oeuvre et que les défendeurs succombent à démontrer que J'homme du métier pourra compléter utilement les enseignements du brevet par des connaissances générales pertinentes sans efforts excessifs, Je grief d'insuffisance de description est établi ; qu'en conséquence, la nullité de la revendication 1 du brevet européen 1 023 111 et des revendications 2 à 9 qui en dépendent directement ou indirectement, doit être prononcée de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les défauts allégués de nouveauté et d'activité inventive » ;
1°) ALORS QUE la société LPG Systèmes et M. Z... n'ont jamais prétendu que le brevet européen no 1 023 111 revendiquerait un réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation et de la rotation effectué sans l'intervention du patient, ni que la proposition faite dans la consultation de M. A... aurait été contraire aux enseignements du brevet en ce qu'elle prévoit qu'un tel réglage était effectué avec l'intervention du patient ; qu'en retenant, pour écarter la proposition contenue dans la consultation de M. A... produite en cause d'appel, que celle-ci serait « contraire aux enseignements du brevet qui revendique (...) l'absence de toute intervention du sujet à traiter », la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le paragraphe 26 de la description du brevet européen no 1 023 111, comme le texte de la revendication 1, indique uniquement que le mouvement de rotation alterné est obtenu « par l'intermédiaire d'un moteur unique relié à des moyens de transmission et sans intervention du patient » et que « l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation étant réglables et pouvant varier en cours d'utilisation », mais ne prévoit nullement que l'amplitude et la vitesse de l'oscillation et de la rotation seraient réglables sans l'intervention du patient ; qu'en retenant que le paragraphe 26 de la description prévoirait que « l'amplitude et la vitesse tant de l'oscillation que de la rotation sont réglables sans l'intervention du patient » et que le brevet revendiquerait ainsi l'absence de toute intervention du sujet à traiter, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen no 1 023 111, en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°) ALORS QUE l'étendue de la protection conférée par un brevet européen est déterminée par la teneur de la revendication, interprétée, au besoin, à la lumière des revendications et des dessins ; qu'en l'espèce, la revendication 1 du brevet européen no 1 023 111 indique uniquement que la plate-forme reçoit son mouvement d'oscillation combiné avec un mouvement de rotation par l'intermédiaire d'un « moteur unique », mais non que le réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée se ferait grâce à ce même moteur unique ; que la description n'indique pas davantage que ce réglage devrait intervenir par l'intermédiaire de ce même moteur ; qu'en affirmant, pour écarter les deux consultations produites par MM. X... et Y... en cause d'appel, que celles-ci seraient contraires aux enseignements du brevet européen no 1 023 111, en ce qu'elles prévoient un « organe moteur supplémentaire » et en partant ainsi du principe que l'appareil couvert par ce brevet ne pourrait comporter, en tout et pour tout, qu'un seul moteur et que le réglage de la vitesse et de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée devrait se faire par le « moteur unique », la cour d'appel a méconnu la teneur de la revendication 1 de ce brevet, en violation de l'article 69 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
5°) ALORS QU'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen no 1 023 111, en violation de l'article 1134 du code civil ;
6°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE dans leurs conclusions d'appel (pp. 31 et 32), MM. X... et Y... faisaient valoir que la revendication 1 indique uniquement que la plate-forme reçoit son mouvement d'oscillation combiné avec un mouvement de rotation par l'intermédiaire d'un moteur unique, mais non que le réglage de l'amplitude de l'oscillation ou de la rotation alternée se ferait grâce à ce moteur unique ; qu'ils soulignaient, en outre, que le paragraphe 48 de la description distingue bien l'entraînement de l'excentrique, servant à obtenir le mouvement de rotation alternée, qui est « obtenu par exemple par l'intermédiaire du moteur », et le réglage de l'excentration, pour lequel il n'est fait aucune référence à l'action de ce moteur ; qu'ils relevaient, enfin, que le paragraphe 45 de la description prévoit que le réglage de l'amplitude de l'oscillation se fait par l'intermédiaire du vérin, lequel constitue un élément distinct du « moteur unique » ; qu'en affirmant, sans autre explication, pour écarter les deux consultations produites par MM. X... et Y... en cause d'appel, que celles-ci seraient contraires aux enseignements du brevet européen no 1 023 111, en ce qu'elles prévoient un « organe moteur supplémentaire » et en partant ainsi du principe que l'appareil couvert par ce brevet ne pourrait comporter, en tout et pour tout, qu'un seul moteur, sans s'expliquer sur les différents éléments précités, qui montraient que le brevet revendiquait simplement la présence d'un moteur unique pour l'obtention de l'oscillation et de la rotation, et n'interdisait donc pas la présence, sur l'appareil, d'un autre moteur pour exercer d'autres fonctions que celle-ci, telles que le réglage de l'amplitude et de la vitesse de l'oscillation et de la rotation, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
7°) ALORS QU'en se bornant à affirmer que les modes de réalisation de l'invention proposés dans les deux consultations produites en cause d'appel requerraient « nécessairement » de l'homme du métier désireux de mettre en oeuvre les enseignements du brevet qu'il « fasse preuve sinon d'activité inventive, à tout le moins de dépasser les limites d'une simple mesure d'exécution », sans autre explication, et notamment sans s'expliquer, comme elle y était invitée (cf. conclusions d'appel, pp. 27 à 29), sur les avis de MM. A... et C..., qui soulignaient, en se référant notamment à des documents de l'art antérieur, qu'il entrait dans les connaissances de l'homme du métier de faire varier l'excentricité, et donc l'amplitude de la rotation, grâce à vérin, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-12294
Date de la décision : 04/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 oct. 2016, pourvoi n°15-12294


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.12294
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