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23/11/2016 | FRANCE | N°15-21192

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 novembre 2016, 15-21192


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 20 février 2013, pourvois n° 11-21.486 et 11-21.755), que le 24 avril 1987, la Société des garages de Vendée a donné en location-gérance à M. X... une station-service dans le cadre d'un protocole d'accord passé avec la société Elf France pour la distribution de carburant ; qu'un contrat de commission a été signé entre Elf France et M. X... le 7 mai 1987, puis un second le 28 novembre 1994, avec la société Elf Antar France, devenue

Total Fina Elf, puis Total Marketing services (la société), résilié d'un...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 20 février 2013, pourvois n° 11-21.486 et 11-21.755), que le 24 avril 1987, la Société des garages de Vendée a donné en location-gérance à M. X... une station-service dans le cadre d'un protocole d'accord passé avec la société Elf France pour la distribution de carburant ; qu'un contrat de commission a été signé entre Elf France et M. X... le 7 mai 1987, puis un second le 28 novembre 1994, avec la société Elf Antar France, devenue Total Fina Elf, puis Total Marketing services (la société), résilié d'un commun accord le 21 septembre 2001 ; que le 22 juillet 2002, M. X... a saisi la juridiction prud'homale de demandes sur le fondement de l'article L. 781-1 du code du travail, alors applicable, et présenté diverses demandes à ce titre ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais, sur le second moyen du même pourvoi :

Vu les articles L. 7321-1 et suivants du code du travail, ensemble l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, l'article 3 de l'accord ARRCO du 8 décembre 1961 et l'article 4 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 ;

Attendu que pour condamner la société à verser au gérant des dommages-intérêts en réparation de son préjudice pour perte de retraite consécutif au défaut de paiement des cotisations pour la période allant du 7 mai 1987 au 31 juillet 1997, l'arrêt retient qu'il appartient au gérant de rapporter la preuve d'une faute de la société à l'origine de son dommage, qu'il ne peut être discuté que pour la seule période concernée par le présent arrêt -soit 1987 à 1997- l'absence d'affiliation et de paiement des cotisations correspondantes, tant au régime général qu'aux régimes complémentaires induit une perte avérée de droits à retraite pour le gérant, que dans la mesure où la société était informée de longue date de la problématique des exploitants de station service qui avait donné lieu à des décisions judiciaires reconnaissant à ses cocontractants l'application de l'article L. 781-1 du code du travail ayant vocation à contrecarrer l'abus de position du fournisseur de carburants, il doit être admis qu'elle s'est délibérément et volontairement pour des raisons essentiellement financières soustraite à ses obligations susvisées et que sa faute est ainsi caractérisée, que dans ces conditions elle ne peut, a posteriori, s'exonérer des conséquences de sa faute originelle en soutenant que l'absence d'exigibilité de ces cotisations résulte de la loi et que l'absence de régularisation ultérieure de la situation du gérant ne peut lui être imputée ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que les gérants de succursales, qui bénéficient des dispositions du code du travail visant les apprentis, ouvriers, employés, ne sont pas des salariés, la cour d'appel, qui n'a pas vérifié, comme elle y était invitée, si le gérant remplissait les conditions d'affiliation aux régimes de retraite complémentaires AGIRC et ARRCO, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident du gérant :

Vu les articles L. 7321-1, L. 7321-3, L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;

Attendu que pour déclarer le gérant irrecevable en sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt retient que si l'article L. 7321-3 du code du travail prévoit que certaines dispositions de ce code du travail sont applicables lorsque le statut en découlant a été accordé au gérant de succursale, il est patent que tel n'est pas le cas de l'article L. 8221-5 du même code qui figure dans la section 3 chapitre 1 titre 2 livre 2 de la 8eme partie du code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le gérant ne se trouvait placé dans aucune des situations excluant l'application des dispositions relatives à l'indemnisation pour travail dissimulé, la cour d'appel, qui a constaté la rupture des relations contractuelles, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Total Marketing services à payer à M. X... la somme de 69 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice pour perte de retraite et déboute M. X... de sa demande en paiement d'indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 5 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Total Marketing services

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Total marketing services à verser à M. X... la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de sécurité dans l'exposition de ce dernier à des substances dangereuses ;

AUX MOTIFS QUE pour solliciter une indemnisation au titre de son exposition à des substances dangereuses, M. X..., vise tant les articles 330, 601 et 604 de la convention collective nationale de l'industrie du pétrole que les articles R.461-3 du code de la sécurité sociale et L.320-2, R.241-8 et R.241-49 anciens du code du travail, que les décisions du conseil constitutionnel, du Sénat, de l'OIT et des instances européennes, et fait valoir que l'inhalation par lui de benzène pendant 15 ans, alors qu'aucun système de protection ni visite médicale régulière n'avaient été mises en place, justifie sa demande ; que pour s'opposer à cette demande faute de préjudice avéré, la société Total fait essentiellement valoir, d'une part que le fonds de commerce de station-service était supposé conforme aux normes en matière d'exposition aux vapeurs de benzène, d'autre part que les opérations de remplissage des cuves étaient faites par des tiers et non par M. X..., en troisième lieu que, s'agissant d'un libre-service, M. X... n'était que très rarement en contact avec les pompes et enfin que l'absence de réglementation plus astreignante atteste de l'absence de risque ; qu'il n'est pas contestable que, pendant toute sa durée d'exploitation de la station-service, M. X... a été exposé aux vapeurs de benzène qui est une substance dangereuse et ce, sans surveillance médicale ni protection ; qu'il en résulte que la société Total a commis un manquement à son obligation de sécurité résultat ressortant des dispositions des articles L.4121-1 du code du travail et 330, 601 et 604 de la convention collective des industries du pétrole du 3 septembre 1985 applicables à la relation de travail entre les parties causant nécessairement un préjudice à M. X... et ce alors même qu'il ne justifie pas présenter une quelconque pathologie en lien avec cette exposition ; que ce préjudice sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 10 000 euros ;

ALORS QUE ne méconnaît pas son obligation de sécurité l'employeur qui assure la conformité des locaux et des conditions de travail aux normes en vigueur ; que la société Total marketing services avait fait valoir dans ses conclusions d'appel non seulement que des systèmes actifs de récupération des vapeurs permettaient le retour d'au moins 80% des composés organiques volatils dans les réservoirs fixes des stations-services mais encore que les spécificités des conditions d'exploitation devaient être prises en considération ; qu'en énonçant que la société Total avait commis un manquement à son obligation de sécurité sans vérifier si elle avait respecté les normes de sécurité en vigueur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.4121-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné sur le fondement de l'article 1382 du code civil la société Total marketing services à verser à M. X... la somme de 69 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice pour perte de retraite consécutif au défaut de paiement des cotisations pour la période allant du 7 mai 1987 au 31 juillet 1997 ;

AUX MOTIFS QUE le dommage dont M. X... demande réparation est caractérisé par une perte de droits à retraite consécutive au fait de ne pas pouvoir bénéficier des avantages des régimes de retraite des salariés de la société Total pour la période de 1987 à 1997 ; qu'à cet égard, et contrairement à ce que soutient la société Total, la demande de M. X... ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers : - qui n'a statué que sur la demande de M. X... en paiement de dommages et intérêts fondée sur « le préjudice qui résulterait de la faute de la société Total consistant à détourner la protection résultant de l'application du code du travail par un montage contractuel contraire aux intérêts du responsable de la station-service » : - qui a considéré que, s'il était constant qu'une demande de dommages et intérêts n'avait pas vocation à compenser de sommes qui ne pouvaient être obtenues en raison de la prescription, il n'en demeurait pas moins que la société Total était informée de longue date de la problématique des exploitants de station-service qui avait donné lieu à des décisions judiciaires reconnaissant l'application de l'article L.781-1 du code du travail ; que précisément le texte invoqué et appliqué avait vocation à contrecarrer l'abus de position du fournisseur de carburants ; que la situation avait duré 14 ans, qu'un nouveau contrat avait été signé en 1994 et que la fin des relations contractuelles, si elle avait pris la forme d'un accord, résultait de l'initiative de la société Total ; que ce comportement apparaissait fautif et générateur d'un préjudice en ce qu'il avait causé à M. X... la perte du statut protecteur de salarié, dans un rythme de travail indigne et cela de manière parfaitement assumée et choisie ainsi qu'il résultait de la déclaration de M. Y..., directeur juridique de Total en 1996 « la station appartient au pétrolier qui ne l'a fait pas exploiter par des salariés parce que, si l'on devait appliquer la convention collective de 1953, on aboutirait à des résultats totalement désastreux » ; qu'en l'espèce les contrats de commission prévoyaient outre les jours d'ouvertures, de nombreuses modalités d'exécution (inventaire, livraisons, prix, contrôles, remise de fonds, mise à disposition du matériel) dont le non-respect pouvait fonder la résiliation de plein droit sans préavis ni procédure judiciaire par le fournisseur, notamment s'agissant de la fermeture de la station pendant plusieurs jours consécutifs, de sorte que la société Total devait être considérée comme redevable de dommages et intérêts pour impossibilité pour M. X... au cours de la période considérée de prendre des congés payés, un repos hebdomadaire et d'avoir eu des journées de travail d'amplitude normale alors qu'en outre il avait eu la responsabilité morale et financière de la gestion d'un fonds de commerce plus préoccupante qu'une activité salariée et avec une autonomie virtuelle au regard des contraintes imposées, - et qui a fait droit, en application de l'article 1382 du code civil, à sa demande en paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 110 000 euros en le déboutant de sa demande en paiement d'indemnité de repos compensateurs et autres indemnisations liées à ses conditions de travail au motif qu'elle lui allouait cette somme ;
Que la chose alors ainsi jugée n'est pas la même que celle présentée aujourd'hui à la présente cour ; […] ; que s'agissant de M. X..., le dommage dont il sollicite l'indemnisation est celui né de la perte de droits à retraite consécutivement, en définitive, à l'impossibilité de son affiliation au régime général de sécurité sociale du fait de la faute de la société Total caractérisée par le fait que, dès 1987, elle aurait dû l'affiler à ce régime en qualité de gérant salarié ; […] ; qu'il appartient à M. X... de rapporter la preuve d'une faute de la société Total à l'origine de son dommage ; qu'il ne peut être discuté que pour la seule période concernée par le présent arrêt - soit 1987 à 1997 - l'absence d'affiliation et de paiement des cotisations correspondantes, tant au régime général qu'aux régimes complémentaires induit une perte avérée de droits à retraite pour M. X... ; qu'or dans la mesure où la société Total était informée de longue date de la problématique des exploitants de station-service qui avait donné lieu à des décisions judiciaires reconnaissant à ses cocontractants, tel que M. X..., l'application de l'article L.781-1 du code du travail ayant vocation à contrecarrer l'abus de position du fournisseur de carburants, il doit être admis qu'elle s'est délibérément et volontairement pour des raisons essentiellement financières soustraite à ses obligations sus visées et que sa faute est ainsi caractérisée ; que dans ces conditions elle ne peut, a posteriori, s'exonérer des conséquences de sa faute originelle en soutenant que l'absence d'exigibilité de ces cotisations résulte de la loi et que l'absence de régularisation ultérieure de la situation de M. X... ne peut lui être imputée ; que dans ses calculs effectués dans ses conclusions avant réouverture des débats ; que M. X... évalue sa perte de retraite pour défaut d'affiliation et de paiement de cotisations au régime général, pour toute la période de 1987 à 2001, à la somme de 4 563,18 euros par an et sa perte totale, en fonction de son espérance de vie, - et donc son préjudice de ce chef - à la somme de 103 584,18 euros ; qu'il y a lieu en conséquence, en considération de l'arrêt définitif de la cour d'appel de Poitiers concernant la période 1997-2001 et donc du fait que le seul préjudice indemnisable par la cour en terme de perte de retraite concerne les conséquences de l'absence de toutes cotisations versables pour la période limitée de 1987 à 1997, de condamner la société Total à verser à M. X..., de ce chef de préjudice, la somme de 69 000 euros ;

1) ALORS QUE dans son arrêt en date du 24 mai 2011, la cour d'appel de Poitiers avait statué sur « le préjudice qui résulterait de la faute de la société Total consistant à détourner la protection résultant de l'application du code du travail par un montage contractuel contraire aux intérêts du responsable de la station-service » cette même cour ayant considéré qu'un comportement fautif de la société Total était à l'origine du préjudice qu'elle réparait, « en ce qu'il avait causé à M. X... la perte du statut protecteur de salarié […] » ; que la cour d'appel a constaté que le dommage dont M. X... demande réparation était caractérisé par une perte de droits à retraite consécutive au fait de ne pas pouvoir bénéficier des avantages des régimes de retraite des salariés de la société Total pour la période de 1987 à 1997 ; que la société Total Marketing Services avait à cet égard fait valoir que le préjudice dont la réparation avait été réclamée dans le cadre du litige présenté à la cour d'appel de Poitiers et ayant donné lieu au prononcé de l'arrêt du 24 mai 2011, concernait une demande indemnitaire qui portait sans distinction, ni restriction, sur toutes les conséquences résultant de la non application du code du travail, la somme de 110 000 euros accordée en 2011 l'ayant été, selon l'arrêt rendu en 2011, en réparation du préjudice résultant, d'une façon générale et globale, de la perte du statut protecteur de salarié, ce dont la société Total avait justement déduit que tout préjudice se rattachant à la perte du statut protecteur de salarié avait déjà été définitivement indemnisé par l'arrêt du 24 mai 2011 ; qu'en retenant que la chose jugée en 2011 n'est pas la même que celle présentée devant la cour d'appel de renvoi et que l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers n'avait pas été méconnue, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1351 du code civil ;

2) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer par la voie d'une motivation générale relevant d'une simple affirmation ; qu'en déduisant une faute de l'affirmation d'ordre général que la société Total était informée de longue date de la problématique des exploitants de station-service qui avait donné lieu à des décisions judiciaires reconnaissant à ses cocontractants, tel que M. X..., l'application de l'article L.781-1 du code du travail ayant vocation à contrecarrer l'abus de position du fournisseur de carburants, pour retenir qu'il doit être admis que la société Total s'était délibérément et volontairement pour des raisons essentiellement financières soustraite à ses obligations et que sa faute était ainsi caractérisée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS, en toute hypothèse, QUE le statut de gérant de succursale ne relève pas de ceux imposant une affiliation automatique aux régimes de retraite Arrco et/ou Agirc ; que l'affiliation à la sécurité sociale n'emporte pas automatiquement adhésion à l'Agirc ; que l'affiliation à l'Agirc et/ou à l'Arrco ne se déduit pas de la seule assimilation de l'activité exercée à une activité salariée pour l'application de la législation de la sécurité sociale ; que l'article 3 de l'accord Arrco du 8 décembre 1961 prévoit l'affiliation, des personnes cadres et non-cadres exerçant une activité ayant un caractère salarié au sens de la législation de la sécurité sociale, sous réserve d'examen des situations nouvelles ; que l'article 4 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 prévoit que sont notamment bénéficiaires du régime Agirc, les personnes exerçant des fonctions de direction non visées par les arrêtés de mise en ordre des salaires, lorsqu'elles sont considérées comme des salariés pour l'application de la législation de la sécurité sociale ; que les gérants de succursales sont rattachés au régime général de la sécurité sociale par des législations spécifiques, en l'occurrence, l'article L.311-3 26° du code de la sécurité sociale ; que ces situations spécifiques ouvrent droit à une affiliation à l'Arrco et/ou à l'Agirc, sous condition de l'existence d'une délibération spécifique des commissions paritaires, appelées à se prononcer sur ces situations spécifiques ; que la société Total Marketing Services avait fait valoir qu'une telle décision n'existait pas et que la situation des gérants de succursale s'analysait en une situation nouvelle qui n'avait encore fait l'objet d'aucune décision imposant l'affiliation des bénéficiaires des articles L.7321-1 et suivants du code du travail, aux régimes Arcco et /ou Agirc ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier si, ainsi que la société Total Marketing Services l'avait fait valoir dans ses conclusions d'appel, M. X... aurait pu relever des régimes litigieux s'il avait été affilié au régime général de la sécurité sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.7321-1 et suivants du code du travail, ensemble l'article L.311-3 du code de la sécurité sociale, l'article 3 de l'accord Arrco du 8 décembre 1961 et l'article 4 de la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947.
Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé Monsieur Jean-Bernard X... irrecevable en sa demande de condamnation de la Société Total Marketing Services au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE " Pour solliciter une indemnisation à ce titre sur le fondement de l'article L.8221-5 du code du travail, Monsieur X... fait valoir qu'il est incontestable que la société Total l'a sciemment et en connaissance de cause dissimulé en omettant de déclarer son embauche en violation de l'article L.320 du code du travail de sorte qu'il a droit à une indemnité égale à six mois de la rémunération qui lui sera reconnue ; que pour s'opposer à cette demande, la société Total fait essentiellement valoir :
- que cette demande est irrecevable en ce que les dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail, qui figure dans la septième partie du code du travail, ne sont pas applicables en l'espèce, les dispositions de l'article L.781-1 alinéas 4 et 5 - comme celles de l'article L 7321-3 du même code aujourd'hui applicables - énonçant de façon limitative les dispositions dont les bénéficiaires du statut peuvent se prévaloir, l'article susvisé n'en faisant pas partie ;
-que cette demande est en toute hypothèse mal fondée, le seul fait pour elle d'avoir conclu des contrats de gérance mandat ne pouvant caractériser son intention de se soustraire délibérément à ses obligations d'employeur, le statut de gérant de succursale de l'article susvisé résultant nécessairement d'une appréciation a posteriori et in concreto des conditions légales de sorte que son intention de se soustraire délibérément à ses obligations n'est pas établie ;

QUE si l'article L.7321-3 du code du travail prévoit que certaines dispositions du code du travail sont applicables lorsque le statut en découlant a été accordé au gérant de succursale, il est patent que tel n'est pas le cas de l'article L.8221-5 du même code qui figure dans section 3 chapitre 1 titre 2 livre 2 de la 8ème partie du code du travail ; qu'il s'ensuit que le droit à invoquer un travail dissimulé n'est pas ouvert à Monsieur X... de sorte que sa demande à ce titre est irrecevable" ;

ALORS QU'il résulte des dispositions de l'article L.7321-1 du Code du travail, issues d'une codification à droit constant, que les gérants de succursales bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation du travail sous réserve des aménagements expressément prévus par les dispositions particulières les concernant ; qu'ils bénéficient ainsi des droits reconnus, en cas de rupture de la relation de travail, aux salariés auxquels un employeur a eu recours dans des conditions relevant de l'infraction de travail dissimulé ; qu'en déclarant irrecevable la demande de Monsieur X... au motif que "…si l'article L.7321-3 du code du travail prévoit que certaines dispositions du code du travail sont applicables lorsque le statut en découlant a été accordé au gérant de succursale, il est patent que tel n'est pas le cas de l'article L.8221-5 du même code (…)", la Cour d'appel a violé les textes ainsi visés, ensemble l'article L.8223-1 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-21192
Date de la décision : 23/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 - Régime complémentaire AGIRC - Gérant de succursale - Affiliation - Affiliation soumise à condition - Portée

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Accords particuliers - Accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961 - Régime complémentaire ARRCO - Droits à retaite - Privation - Préjudice - Réparation - Demande - Demande du gérant de succursale - Conditions - Appréciation - Office du juge STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Gérant de succursale - Travailleur visé à l'article L. 7321-2 du code du travail - Bénéfice des avantages de la législation sociale - Etendue - Portée

Les gérants de succursales, qui bénéficient des dispositions du code du travail visant les apprentis, ouvriers, employés, n'étant pas des salariés, prive sa décision de base légale la cour d'appel qui alloue des dommages-intérêts pour privation des droits à retraite complémentaire sans vérifier si le gérant remplissait les conditions d'affiliation aux régimes complémentaires AGIRC et ARRCO


Références :

articles L. 7321-1 et suivants du code du travail

article L. 311-3 du code de la sécurité sociale

article 3 de l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961

article 4 de la convention collective nationale de retra
ite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 05 mai 2015

Sur l'exclusion d'un mandataire gérant du bénéfice du régime complémentaire de retraite prévu pour les cadres, à rapprocher :Soc., 12 janvier 2011, pourvoi n° 09-70156, Bull. 2011, V, n° 20 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 nov. 2016, pourvoi n°15-21192, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : M. Richard de la Tour
Rapporteur ?: M. Flores
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 07/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21192
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