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14/12/2016 | FRANCE | N°15-25205

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 décembre 2016, 15-25205


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 11 décembre 2000 par la société Centre de formation en informatique langues et communication en qualité de professeur d'espagnol ; qu'après avoir saisi le 15 novembre 2010 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, l'intéressé a été licencié pour insuffisance professionnelle par let

tre du 11 mars 2011 ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes relat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 11 décembre 2000 par la société Centre de formation en informatique langues et communication en qualité de professeur d'espagnol ; qu'après avoir saisi le 15 novembre 2010 la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, l'intéressé a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettre du 11 mars 2011 ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail, l'arrêt retient que dans la mesure où ce dernier a refusé d'être déchargé de ses tâches administratives et où l'employeur lui avait rappelé l'ensemble de ses missions lors de l'entretien du 3 septembre puis par courrier du 16 septembre 2010, il y a lieu de constater qu'en continuant à ne pas exécuter correctement ses tâches administratives et commerciales, l'intéressé a manqué à ses obligations contractuelles, qu'en conséquence le salarié ne rapporte pas la preuve du bien fondé de sa demande de résiliation judiciaire et qu'il résulte des éléments visés ci-dessus que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et qu'il s'ensuit qu'il doit être débouté de toutes ses demandes ;
Qu'en statuant ainsi, alors que par conclusions reprises oralement à l'audience, l'employeur sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il déboutait le salarié de sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d'appel qui était tenue d'examiner au préalable le bien-fondé de cette demande, a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande en résiliation et de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail, l'arrêt rendu le 3 juillet 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Centre de formation en informatique langues et communication aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Centre de formation en informatique langues et communication à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmer le jugement entrepris et D'AVOIR en conséquence débouté l'exposant de ses demandes de résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur et de condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 60. 000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre le paiement de la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le licenciement
Selon l'article L1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. En l'espèce, la lettre de licenciement, du 11 mars 2011, rappelle à M. X... que ses missions sont réparties ainsi : «-16 heures par semaine d'enseignement et de préparation des cours d'espagnol,-12 heures par semaine de missions commerciales pour le département d'espagnol ; 7 heures par semaine de missions administratives pour le département d'espagnol ; » et que ses fonctions sont les suivantes : «- l'enseignement de l'espagnol en cours collectifs et particuliers ;- gestion du planning des cours d'espagnol ;- réponses aux appels téléphoniques des clients potentiels des cours d'espagnol ;- corrections des tests en ligne d'espagnol ;- suivi commercial des clients des cours d'espagnol ; Vous avez parfaitement conscience que vos missions administratives et commerciales exigent dynamisme, implication et transparence sur les actions à réaliser, notamment sur vos activités commerciales. Dans cette optique, je vous ai fait part à plusieurs reprises depuis 2008 de la nécessité d'un suivi et d'une information sur vos missions commerciales par la transmission régulière d'un reporting précis de vos activités. Malgré mes nombreuses demandes en ce sens, j'ai été contrainte de constater votre passivité grandissante dans l'organisation de votre activité commerciale, se traduisant notamment par une totale négligence dans la communication de vos rapports d'activité et un non-respect des process mis en place. Votre implication était pourtant un élément important comte tenu d'une baisse importante des inscriptions pour le département d'espagnol constatée au cours de l'année 2009/ 2010. Vous avez une attitude de contestation ou d'évitement systématique des actions qui vous sont demandées. A titre d'illustrations : malgré les nombreuses demandes écrites, vous persistez à refuser, de communiquer régulièrement vos comptes-rendus d'activité ;- Vous n'utilisez pas correctement l'outil informatique CRM et ce malgré votre formation et les explications répétées qui vous ont été données. Après plus de 10 mois de formation, vous ne remplissez toujours pas correctement les champs principaux de ce logiciel, les données étant donc inexploitables pour le département d'espagnol ;- Vous faites preuve d'une totale passivité lors des réunions commerciales ; Vous faites fi des process qui ont été élaborés en terme de communication clients (utilisation des scripts commerciaux, mails types, relances, etc...) ce qui nuit à l'image de notre société. » De manière plus générale, vous refusez de vous inscrire dans la dynamique de travail que nous essayons d'insuffler à la société CF1LC : vous n'adhérez pas à l'organisation mise en place et vos manifestez un comportement crique, sans justification, à l'égard de votre direction et de vos collègues de travail. Enfin au regard des rares éléments quel j'ai (retour de vos collègues, temps de présence dans les locaux de la société) vous ne réalisez visiblement pas la totalité des heures pour lesquelles vous êtes rémunéré. J'ai à plusieurs reprises tenté de vous sensibiliser sur la nécessité impérative de modifier votre comportement. Ces alertes sont restées sans effet. Votre total désinvestissement professionnel crée un malaise palpable au sein de l'équipe commerciale ce qui a des incidences sur la motivation de chacun et la bonne organisation de l'activité commerciale de notre société. » M. X... conteste ces reproches et estime son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il fait valoir qu'il est un professeur très impliqué, apprécié de ses élèves et qu'il s'est fortement investi dans le développement des activités du centre de formation. Le CFILC produit au soutien du licenciement :- cinq mails adressés à M. X... (pièces 15 à 19) entre le 4 mars 2010 et le 18 juin 2010 pour l'informer de la mise en service du CRM et de la méthodologie de travail sur cet outil.- un mail adressé à M. X... le 2 août 2010 (pièce 21) lui rappelant les points à respecter dans l'utilisation du CRM et un autre du 9 septembre (pièce 22) pour lui réclamer un rapport d'activité et un emploi du temps prévisionnel ;- un courrier de M. X... du 3 septembre refusant la modification de son contrat de travail et la réponse adressée par la directrice, Cécile A..., datée du septembre 2010, actant que lors de leur entretien du 3 septembre il avait affirmé souhaiter poursuivre son activité commerciale qui représente 12 h de travail hebdomadaire et lui demandant une implication pleine et entière sur ces fonctions administratives et commerciales qui sont les siennes ;- deux mails adressés à M. X..., le samedi 18 septembre et le dimanche 3 octobre 2010 (pièce 23 et 24 lui réclamant ses rapports d'activité ;- un mail du 19 octobre 2010 adressé par le consultant à la directrice indiquant ne pas avoir reçu de rapport de M. X... ;- des relevés des erreurs commises par M. X... courant novembre 2010 (pièces 26, 27 et 28) montrant essentiellement qu'à plusieurs reprises le consultant M. B... indique que M. X... n'utilise pas bien le logiciel CRM, n'adresse pas correctement les mails de relance aux personnes prospectées et envoie ses rapports d'activité avec retard. Force est de constater que les pièces produites par M. X..., si elles démontrent qu'il est un professeur apprécié de nombreux élèves, ne viennent pas contredire les reproches formulés par son employeur sur la partie administrative et commerciale de ses fonctions, notamment M. X... ne justifie pas avoir répondu aux demandes de rapport d'activité ni même utiliser correctement l'outil CRM. Les éléments versés par le CFILC mettent en évidence les difficultés rencontrées par M. X... comme le fait qu'il ne parvient pas à maîtriser l'outil CRM, n'opère pas correctement les relances et ne satisfait pas aux demandes de rapport d'activité empêchant ainsi tout contrôle de son travail. Dans la mesure où M. X... a refusé d'être déchargé de ses tâches administratives et où l'employeur lui avait rappelé l'ensemble de ses missions lors de l'entretien du 3 septembre puis par courrier du 16 septembre 2010, il y a lieu de constater qu'en continuant à ne pas exécuter correctement ses tâches administratives et commerciales, M. X... a manqué à ses obligations contractuelles. En conséquence, la cour constate que M. X... ne rapporte pas la preuve du bien fondé de sa demande de résiliation judiciaire et qu'il résulte des éléments visés ci-dessus que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; il s'en suit qu'il doit être débouté de toutes ses demandes. La décision de première instance est donc confirmée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
M. X... succombe en son appel, les dispositions du jugement son confirmées, sa demande formée en application de l'article 700 du Code de procédure civile doit être rejetée et il est condamné aux dépens. Au regard des situations respectives des parties, la demande du CFILC au titre des frais irrépétibles est rejetée » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur le licenciement
Monsieur Ludwig X... a été engagé par contrat à durée déterminée à temps partiel, le 11 décembre 2000, en qualité de professeur d'espagnol ; ce contrat a reçu plusieurs avenants modifiant le contrat initial et d'abord celui du 1 " juin 2001 le transformant en contrat à durée indéterminée intermittent ; Monsieur Ludwig X..., outre sa qualité d'enseignant de la langue espagnole, a souhaité s'investir davantage dans la gestion du département espagnol et remplir des missions d'ordre administratif ; cette demande a été suivie d'un avenant au contrat de travail en date du 7 janvier 2004 précisant les fonctions de Monsieur Ludwig X... qui, outre celles d'enseignement, prévoyaient diverses tâches dont la saisie des inscriptions, la réponse aux appels téléphoniques des clients, la gestion des clients potentiels, la correction des tests, la liste n'étant pas exhaustive.., cet avenant prévoyant la prise en charge d'une connexion intemet et d'un téléphone portable et la possibilité de travail à domicile de Monsieur Ludwig X... ; l'école CFILC, pour lui permettre de progresser et d'augmenter son activité, s'est attachée les services d'un consultant qui a mis en place un certain nombre de procédures de suivi des élèves, de recrutement et de prospection, et a demandé à Monsieur Ludwig X...de bien vouloir les utiliser dans le cadre de ses fonctions administratives et commerciales ; Monsieur Ludwig X... a manifesté de la réticence à cette nouvelle organisation et qu'il a apparemment semblé éprouver un certain désintérêt dans les fonctions autres que celles d'enseignant pour lesquelles il présente des attestations positives, mais qui ne concernent pas la partie administrative et commerciale dont il avait la charge ; Monsieur Ludwig X... a eu un entretien, le 3 septembre 2010, avec Madame E..., directrice, pour comprendre sa position et que, le même jour, il a adressé un courrier recommandé avec avis de réception à Madame A... pour l'informer qu'elle modifiait unilatéralement son contrat de travail ;
Madame A..., par courrier recommandé avec avis de réception du 16 septembre 2010, accusait réception du courrier de Monsieur Ludwig X... et lui rappelait que c'est à sa demande qu'on lui avait confié des tâches administratives et commerciales, reprises dans les avenants du contrat en date de 2004 et 2008, ces nouvelles attributions entraînant un " temps plein " ; au cours de cet entretien, il a indiqué souhaiter ne plus être en charge des missions administratives et commerciales ; Madame A... lui a dit que si tel était le cas, il devait l'en informer par écrit, mais que cette modification d'activité entraînerait une diminution de son temps de travail ; le 5 novembre 2010, Madame A... confirmait, par courrier recommandé avec avis de réception, les termes d'un entretien avec Monsieur Ludwig X... qui s'était déroulé le 20 octobre 2010 dans lequel elle faisait état des griefs reprochés à Monsieur Ludwig X... sur son manque d'implication et ses manquements, lui rappelant qu'il n'avait d'ailleurs jamais informé par écrit de son souhait d'être déchargé des tâches administratives et commerciales ; Monsieur Ludwig X... était convoqué à un entretien préalable le 7 mars 2011 et qu'une lettre de licenciement lui était adressée le 11 mars 2011, laquelle reprenait de manière détaillée les griefs à l'encontre de Monsieur Ludwig X... :- non respect des moyens mis en place-désintérêt pour le travail administratif et contestations permanentes-mauvaise volonté pour les actions commerciales à mettre en oeuvre refus de communiquer des comptes-rendus d'activité que Monsieur Ludwig X... avait déjà été rappelé à l'ordre, le 3 septembre 2010, au cours d'un entretien. Monsieur Ludwig X... sera débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;
1/ ALORS QUE le juge est tenu de respecter les termes du litige ; qu'en l'espèce il résulte de l'arrêt que lors de l'audience les parties ont soutenu oralement leurs conclusions et il est constant que leurs écritures invitaient la Cour d'appel à statuer sur le bien-fondé de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail demandée par M. X... aux torts de l'employeur ; qu'en se prononçant exclusivement sur le licenciement pour débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes la Cour d'appel a violé les articles 4, 12 et 16 du Code de procédure civile et les articles R. 1452-6, R1452-7, R. 1453-3, R. 1453-4 du Code du travail ;
2/ ALORS QUE en déboutant M. X...de l'ensemble de ses demandes, sans répondre à ses conclusions, développées oralement à l'audience, visant à ordonner la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3/ ALORS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande était justifiée ; que c'est seulement s'il ne l'estime pas fondée qu'il doit statuer sur le licenciement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a débouté l'exposant de sa demande de résiliation judiciaire en raison de faits de harcèlement moral en analysant d'abord et seulement le bien fondé du licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-25205
Date de la décision : 14/12/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juillet 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 déc. 2016, pourvoi n°15-25205


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.25205
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