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01/03/2017 | FRANCE | N°15-22156

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 mars 2017, 15-22156


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 mai 2015), que M. [Q] a été engagé par la société Sarp Méditerranée le 1er avril 2009 en qualité de directeur de l'agence de [Localité 1] ; qu'ayant été licencié pour faute grave le 29 septembre 2011, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture du contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement repose sur une faute gra

ve et de le débouter de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail, alors...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 mai 2015), que M. [Q] a été engagé par la société Sarp Méditerranée le 1er avril 2009 en qualité de directeur de l'agence de [Localité 1] ; qu'ayant été licencié pour faute grave le 29 septembre 2011, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives tant à l'exécution qu'à la rupture du contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement repose sur une faute grave et de le débouter de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail, alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement doit énoncer des griefs précis, objectifs et matériellement vérifiables ; que l'absence de motif précis équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, s'agissant des plaintes du personnel, la lettre de licenciement indiquait : « Par ailleurs, nous avons reçu plusieurs plaintes émanant du personnel administratif de l'agence nous alertant sur votre comportement déplacé à leurs égards. Un courrier établi par la médecine du travail en date du 8 septembre 2011 à votre destination – copie M. [J] [L] – nous alerte sur les risques psychosociaux encourus par les collaborateurs de l'agence de [Localité 1] et met en cause votre management en place sur l'agence de [Localité 1]. A toutes fins utiles, nous vous rappelons le contenu : « Mes constats cliniques et autres données concordantes me permettent de penser qu'il y a lieu d'améliorer la prise en compte des risques précités [risques psychosociaux] dans votre entreprise et de vous interroger avec votre encadrement notamment sur l'organisation du travail qui les génère, afin de les réduire (art. L. 4121-1 et suivants, R. 4121-1 et suivants du code du travail). Je tiens à préciser qu'il est important de réfléchir sur votre mode managérial, sur la charge de travail de vos salariés, votre manière de communiquer ainsi que les outils mis en place à disposition de vos salariés pour remplir leur mission professionnelle (le contenu et le sens de leurs tâches, l'environnement de travail, la gestion des compétences, les relations sociales et interpersonnelles…). En tant que médecin du travail, je faillirai à ma mission si je ne vous alertais à ce niveau. Ce courrier sera à annexer à la fiche d'entreprise actuelle qui vous a été communiquée par mon prédécesseur conformément à l'article D. 4624-37 du code du travail en juillet 2003 » » ; que la lettre de licenciement, qui se bornait à faire état d'un comportement déplacé de M. [A] [Q] à l'égard du personnel administratif de l'agence, sans autre précision et sans invoquer aucun fait précis, et d'un courrier du médecin du travail du 8 septembre 2011 soulignant la nécessité d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux dans l'entreprise, n'énonçait pas un motif précis, objectif et matériellement vérifiable ; qu'en se fondant pourtant sur ce grief imprécis relatif au management de M. [A] [Q], pour retenir qu'il avait commis une faute grave, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

2°/ qu'en tout état de cause la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement qui se bornait à faire état d'un comportement déplacé de M. [A] [Q] à l'égard du personnel administratif de l'agence, ne lui reprochait pas d'avoir proféré des injures et grossièretés ; qu'il s'ensuit qu'en retenant, pour considérer que M. [A] [Q] avait commis une faute grave, que M. [N] confirmait que ce dernier tenait des propos à caractère ordurier et injurieux sur les membres du personnel en l'absence des intéressés, mais devant le personnel présent, la cour d'appel s'est fondée sur des faits non invoqués dans la lettre de licenciement, violant ainsi l'article L. 1232-6 du code du travail ;

3°/ que l'obligation faite à l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral n'implique pas par elle-même la rupture immédiate du contrat de travail d'un salarié à l'origine d'une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral ; qu'en l'espèce, pour estimer que M. [A] [Q] avait commis une faute grave, la cour d'appel s'est fondée sur le courrier du médecin du travail faisant état de la nécessité d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux dans l'entreprise, pour retenir que les constats de ce médecin étaient de nature à justifier un licenciement pour faute grave, compte tenu des dangers potentiels encourus par les salariés victime de son comportement inadapté, et que la souffrance au travail exprimée par le personnel de l'agence de [Localité 1] répondait à une réalité que ne pouvait sous-estimer l'employeur ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la nécessité de procéder au licenciement immédiat du salarié, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant constaté que la lettre de licenciement énonçait un grief tiré d'un comportement déplacé à l'égard du personnel et de l'exposition des salariés de l'agence aux risques psycho-sociaux en résultant, la cour d'appel, qui a retenu que ce motif de licenciement était précis et matériellement vérifiable, en a exactement déduit que cette lettre répondait à l'exigence légale de motivation ;

Attendu, ensuite, que si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif ;

Attendu, enfin, qu'ayant, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, estimé que les propos à caractère ordurier et injurieux tenus sur des membres du personnel en leur absence par le salarié étaient établis, la cour d'appel a pu en déduire que le comportement du salarié avait rendu impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel, qui a estimé, sans faire peser la charge de la preuve des horaires sur le seul salarié, que les éléments produits par ce dernier n'étaient pas susceptibles d'étayer sa demande, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [Q] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour M. [Q].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. [A] [Q] reposait sur une faute grave et de l'avoir, en conséquence, débouté de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour procédure brutale et vexatoire ;

AUX MOTIFS QUE, sur la mauvaise gestion du personnel et l'exposition des salariés aux risques psycho-sociaux en résultant, la société Sarp Méditerranée soutient que l'ensemble du personnel s'est plaint de manière unanime et en des termes très accablants des propos irrespectueux, méprisants, voire orduriers de M. [A] [Q] à leur égard, de son absence de soutien ou d'aide et de son mépris à l'égard de leur travail, de leur ressenti ou de leur personne. Elle produit aux débats les attestations écartées par les premiers juges au motif que la valeur probante de ces témoignages apparaît douteuse car ils ont été établis postérieurement au licenciement de M. [Q] et apparaissent destinés à complaire à l'employeur qui les a sollicités. Or, la teneur de ces attestations dénote le climat délétère dans lequel les salariés étaient amenés à travailler, et M. [Q] n'avance aucun autre argument que de qualifier ces attestations de complaisance alors que : - Mme [O] [V], déléguée du personnel titulaire, relate : « Ce Monsieur a semble-t-il eu beaucoup de mal à s'intégrer dans notre équipe et avec le temps a souvent dénigré et mal parlé sur les anciens employés ayant décidé de quitter la société « les crétins d'avant » ainsi que le créateur de la société sans même le connaître « qu'est-ce qu'il a le vieux, il vient relever les compteurs » (…) – Mme [E] [T], secrétaire administrative, déclare : « Le 28 juillet 2011, lors d'une visite à l'agence de [Localité 1] de notre directeur administratif régional, le personnel administratif et moi-même avons éprouvé le besoin d'exprimer notre mal être, ce dernier du fait de travailler avec M. [A] [Q] » (…) – Mme [W] [K], secrétaire administrative et déléguée du personnel, relate : « Ce qui m'a étonnée, dès l'arrivée de M. [A] [Q], c'est qu'il n'a jamais posé de question sur le déroulement de mon service facturation. Pourtant dès la première semaine, Mme [O] [V] et moi-même avons demandé à le voir afin de nous présenter et d'expliquer ce que chacune d'entre nous faisait. Il n'est jamais venu nous voir pour en savoir plus. A la fin de chaque mois, il ne nous demandait jamais où en été le chiffre d'affaire » (…) – Mme [M] [G], assistance commerciale qui déclare : « M. [Q] a tenu des propos grossiers sur des membres de l'entreprise ou des personnes extérieures sans leur présence (cons, connard, connasse), à plusieurs reprises « ce photocopieur c'est de la merde, c'est comme le reste », - M. [I], technicien, « M. [Q] a dirigé la société de façon froide et méprisante. Il s'exprimait envers les salariés et les clients de façon vulgaire en leur présence ». – M. [N] confirme que M. [Q] tenait des propos à caractère ordurier et injurieux sur les membres du personnel en l'absence des intéressés mais devant le personnel présent. M. [N] se plaignait par courriel adressé le 26 juillet 2011 à M. [L] des propos injurieux tenus par M. [Q] à son encontre. Concernant la réorganisation des bureaux, M. [Q] rappelle les termes d'un courriel du 22 juillet 2010 de M. [L] qui lui indiquait qu'il fallait, avant le 20 août 2010, faire une « réorganisation de l'agencement des bureaux avec : - Constitution d'un pôle facturation/relance : regroupement des trois facturières ensemble dans un des bureaux du bas. – Constitution d'un pôle exploitation : transfert du planning dans le bureau commercial actuel. Déménagement de [N] et [C] dans le bureau de [X] [Z] ». Toutefois, cette réorganisation n'est intervenue que le 16 août 2011 en l'absence de l'essentiel du personnel administratif (7 personnes étant absentes), de sorte que chacun des salariés ignorait l'endroit où se trouvait son nouveau bureau et où allaient se trouver ses effets personnels. Enfin, le 8 septembre 2011, le médecin du travail faisait parvenir à la société Sarp Méditerranée un courrier dans lequel il exposait que « mes constats cliniques et autres données concordantes me permettent de penser qu'il y a lieu d'améliorer la prise en compte des risques [psychosociaux] dans votre entreprise et de vous interroger avec votre encadrement notamment sur l'organisation du travail qui les génère, afin de les réduire. Je tiens à préciser qu'il est important de réfléchir sur votre mode managérial, sur la charge de travail de vos salariés, votre manière de communiquer ainsi que les outils mis en place à disposition de vos salariés pour remplir leur mission professionnelle ». M. [Q] n'avance aucune explication pour contester ni même minimiser l'impact de ces différents constats qui sont de nature à justifier un licenciement pour faute grave compte tenu des dangers potentiels encourus par les salariés victimes de son comportement inadapté. Enfin, M. [I] relate que « le 22 août 2011 en rentrant après un congé maladie de 2 mois, M. [Q] m'a ordonné de rester assis et de ne rien faire. Je me suis aperçu qu'une autre personne était à mon poste… qui gérait les parties stockage, chargement et manutention tandis que d'autres employés se chargeaient de la partie administrative ; je n'ai rien fait pendant 3 jours, après j'ai trouvé quelques occupations ; cette situation a duré un mois jusqu'à ce que le responsable d'exploitation me remette à mon poste ». M. [I] avait fait l'objet d'un avertissement le 1er septembre 2011 après avoir été convoqué à un entretien préalable à une mesure pouvant aller jusqu'à un licenciement, M. [Q] ayant voulu sanctionner au-delà d'un simple avertissement d'où cette « mise à pied » de fait. L'ensemble de ces éléments conduisant à considérer que les faits reprochés à M. [Q] étaient suffisamment sérieux pour envisager un licenciement pour faute grave. En effet, la chronologie des faits telle qu'elle résulte de la lecture de pièces versées par les parties permet de constater qu'à l'occasion du départ de M. [B], lié d'amitié avec M. [Q], les salariés de l'agence de [Localité 1] se sont plaints auprès de leur employeur du traitement dont ils faisaient l'objet. M. [L], succédant à M. [B], s'est rendu le 27 juillet 2011 au sein de l'agence de [Localité 1] pour recueillir les doléances des salariés. Ceci a provoqué la décision de MM. [L] et [F], président de la société, de se rendre le 11 août 2011, sur les lieux à [Localité 1]. Les employeurs ont alors investigué sur l'activité de M. [Q] ce qui explique le courriel de Mme [Y] de la société Tokheim adressé le 10 août 2011 à M. [D] [H] qui effectuait immédiatement après (les 24 et 25 août 2011) un audit. La procédure de licenciement a été ensuite initiée. Si tous les griefs contenus dans la lettre de licenciement ne peuvent être retenus pour les raisons plus avant exposées, la souffrance au travail exprimée par le personnel de l'agence de [Localité 1] répondait à une réalité que ne pouvait sousestimer l'employeur. (…) En effet, l'attitude du salarié à l'égard du personnel de l'agence faisait obstacle au maintien de M. [Q] dans ses fonctions pendant la durée du préavis ;

1) ALORS QUE la lettre de licenciement doit énoncer des griefs précis, objectifs et matériellement vérifiables ; que l'absence de motif précis équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, s'agissant des plaintes du personnel, la lettre de licenciement indiquait : « Par ailleurs, nous avons reçu plusieurs plaintes émanant du personnel administratif de l'agence nous alertant sur votre comportement déplacé à leurs égards. Un courrier établi par la médecine du travail en date du 8 septembre 2011 à votre destination – copie M. [J] [L] – nous alerte sur les risques psychosociaux encourus par les collaborateurs de l'agence de [Localité 1] et met en cause votre management en place sur l'agence de [Localité 1]. A toutes fins utiles, nous vous rappelons le contenu : « Mes constats cliniques et autres données concordantes me permettent de penser qu'il y a lieu d'améliorer la prise en compte des risques précités [risques psychosociaux] dans votre entreprise et de vous interroger avec votre encadrement notamment sur l'organisation du travail qui les génère, afin de les réduire (art. L. 4121-1 et suivants, R. 4121-1 et suivants du code du travail). Je tiens à préciser qu'il est important de réfléchir sur votre mode managérial, sur la charge de travail de vos salariés, votre manière de communiquer ainsi que les outils mis en place à disposition de vos salariés pour remplir leur mission professionnelle (le contenu et le sens de leurs tâches, l'environnement de travail, la gestion des compétences, les relations sociales et interpersonnelles…). En tant que médecin du travail, je faillirai à ma mission si je ne vous alertais à ce niveau. Ce courrier sera à annexer à la fiche d'entreprise actuelle qui vous a été communiquée par mon prédécesseur conformément à l'article D. 4624-37 du code du travail en juillet 2003 » » ; que la lettre de licenciement, qui se bornait à faire état d'un comportement déplacé de M. [A] [Q] à l'égard du personnel administratif de l'agence, sans autre précision et sans invoquer aucun fait précis, et d'un courrier du médecin du travail du 8 septembre 2011 soulignant la nécessité d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux dans l'entreprise, n'énonçait pas un motif précis, objectif et matériellement vérifiable ; qu'en se fondant pourtant sur ce grief imprécis relatif au management de M. [A] [Q], pour retenir qu'il avait commis une faute grave, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

2) ALORS QU'en tout état de cause la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement qui se bornait à faire état d'un comportement déplacé de M. [A] [Q] à l'égard du personnel administratif de l'agence, ne lui reprochait pas d'avoir proféré des injures et grossièretés ; qu'il s'ensuit qu'en retenant, pour considérer que M. [A] [Q] avait commis une faute grave, que M. [N] confirmait que ce dernier tenait des propos à caractère ordurier et injurieux sur les membres du personnel en l'absence des intéressés, mais devant le personnel présent, la cour d'appel s'est fondée sur des faits non invoqués dans la lettre de licenciement, violant ainsi l'article L. 1232-6 du code du travail ;

3) ALORS QUE l'obligation faite à l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral n'implique pas par elle-même la rupture immédiate du contrat de travail d'un salarié à l'origine d'une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral ; qu'en l'espèce, pour estimer que M. [A] [Q] avait commis une faute grave, la cour d'appel s'est fondée sur le courrier du médecin du travail faisant état de la nécessité d'améliorer la prise en compte des risques psychosociaux dans l'entreprise, pour retenir que les constats de ce médecin étaient de nature à justifier un licenciement pour faute grave, compte tenu des dangers potentiels encourus par les salariés victime de son comportement inadapté, et que la souffrance au travail exprimée par le personnel de l'agence de [Localité 1] répondait à une réalité que ne pouvait sous-estimer l'employeur ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la nécessité de procéder au licenciement immédiat du salarié, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [A] [Q] de ses demandes afférentes au paiement des heures supplémentaires, repos compensateurs et travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE l'article 19 III de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 n'a pour objet que de sécuriser les accords collectifs conclus sous l'empire des dispositions régissant antérieurement le recours aux conventions de forfait. Les dispositions de l'article L. 3121-46 du code du travail, issues de la même loi, sont applicables aux conventions individuelles de forfait en jours en cours d'exécution lors de son entrée en vigueur (Cas. Soc. 12 mars 2014, n° 12-29141). Elles le sont a fortiori pour les conventions de forfait conclues postérieurement comme en l'espèce. Dès lors la convention de forfait incluse dans le contrat de travail ne répond pas aux prescriptions de ce texte et doit être écartée étant observé que l'employeur ne soutient pas que des entretiens individuels aient été tenus. M. [Q] soutient qu'il effectuait 9 heures par jour, 5 jours par semaine, soit 45 heures hebdomadaires ce qui découle d'un document envoyé à la direction régionale de l'équipement par le président de Sarp Méditerranée, M. [S] [B]. Or ce document, complété du reste par l'intéressé, relatif à une demande de modification d'une inscription au registre des transporteurs routiers de marchandises est sans aucun rapport avec le présent litige et exclusif de toute considération portant sur les heures de travail effectuées par l'intimé. D'ailleurs, la mention selon laquelle l'exploitant est présent 9 heures cinq jours par semaine a été apposée pour satisfaire aux exigences de cette administration afin d'obtenir la modification de l'inscription demandée, il n'en résulte nullement que M. [Q] était présent 45 heures par semaine dans l'entreprise. De même, les heures d'envoi ou de réception de courriels ne sont pas démonstratives des horaires pratiqués et d'un travail effectifs interstitiel. Il en résulte que M. [Q] ne produit strictement aucun élément probant de nature à établir qu'il aurait effectué des heures supplémentaires. Ses demandes ont été justement rejetées par les premiers juges ;

ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. [A] [Q], qui soutenait qu'il effectuait 9 heures pour jour, 5 jours par semaine, produisait un document envoyé à la direction régionale de l'équipement par le président de la société Sarp Méditerranée, M. [S] [B], qui comportait la mention selon laquelle l'exploitant est présent 9 heures cinq jours par semaine, ainsi que des courriels, ce dont il résulte que le salarié avait produit des éléments suffisamment précis pour étayer sa demande ; qu'en retenant pourtant, pour le débouter de sa demande, que M. [A] [Q] ne produisait strictement aucun élément probant de nature à établir qu'il aurait effectué des heures supplémentaires, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des horaires effectués sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-22156
Date de la décision : 01/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 27 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 mar. 2017, pourvoi n°15-22156


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.22156
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