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21/06/2017 | FRANCE | N°15-26224

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 juin 2017, 15-26224


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry 24 septembre 2015), que M. X... a été engagé dans le cadre d'un contrat à durée déterminée puis d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars 2000 par la société Cascades, en qualité de technicien en micro-informatique ; qu'à compter du 3 mars 2009, il a exercé les fonctions d'administrateur réseaux et systèmes ; qu'il a été licencié le 11 juin 2010, après autorisation de l'inspecteur du travail sollicitée en raison de la protection attachée Ã

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry 24 septembre 2015), que M. X... a été engagé dans le cadre d'un contrat à durée déterminée puis d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars 2000 par la société Cascades, en qualité de technicien en micro-informatique ; qu'à compter du 3 mars 2009, il a exercé les fonctions d'administrateur réseaux et systèmes ; qu'il a été licencié le 11 juin 2010, après autorisation de l'inspecteur du travail sollicitée en raison de la protection attachée à sa candidature à l'élection des délégués du personnel, pour avoir conservé des données confidentielles relatives à la rémunération et à la gestion du personnel sur une clé USB et avoir diffusé des informations confidentielles à un salarié investi d'un mandat représentatif ; que par arrêt du 7 novembre 2013, la cour administrative d'appel a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui, sur recours hiérarchique de M. X..., avait autorisé son licenciement ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir, notamment, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation de licenciement ; qu'il résulte de la lettre de licenciement que la rupture du contrat de travail de M. X... était motivée par deux séries de faits tirés, d'une part, de la détention et la conservation sur divers matériels informatiques de documents informatiques professionnels relatifs à la paie et à la gestion du personnel, et, d'autre part, de la diffusion d'informations à un salarié investi d'un mandat représentatif ; qu'en affirmant que l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Lyon, le 7 novembre 2013, interdisait au juge judiciaire de se prononcer sur le bien-fondé du licenciement de M. X..., quand la cour administrative d'appel de Lyon avait seulement décidé que l'autorisation de licenciement n'était pas justifiée par le seul grief tiré de la conservation par M. X... de données confidentielles relatives aux rémunérations et à la gestion du personnel sur son disque dur externe et sur une clé USB, la cour d'appel qui a omis de se prononcer sur le second grief tiré de la diffusion d'informations à un salarié investi d'un mandat représentatif, a violé l'article 1351 du code civil, ensemble la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, le principe de séparation des autorités administratives et judiciaire par fausse application et les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail par refus d'application ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la santé avait écarté le grief invoqué par l'employeur relatif à la diffusion d'informations et autorisé le licenciement du salarié au motif que la conservation de données confidentielles sans lien direct avec son activité professionnelle constituait une faute suffisamment grave pour le justifier, et que cette autorisation avait été annulée par la cour administrative d'appel pour erreur manifeste d'appréciation, ce dont il résultait que l'ensemble des manquements reprochés au salarié dans la lettre de licenciement avaient été examinés et jugés non susceptibles de justifier son licenciement, la cour d'appel a décidé à bon droit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les trois premières branches du moyen annexées qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cascades aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cascades à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Cascades

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de M. X... par la société CASCADES SAS était nul et D'AVOIR condamné la société CASCADES SAS à payer à M. X... la somme de 29 609, 28 € représentant l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 2422-4 du Code du travail, ainsi qu'une indemnité de 23 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE, si le juge administratif annule une décision de l'autorité administrative autorisant un licenciement, la rupture du contrat de travail, si elle a été prononcée, est nulle, sans qu'il y ait lieu de distinguer si l'annulation a été décidée au regard de la violation d'une règle de forme ou par appréciation de la réalité du motif du licenciement ; qu'en l'espèce, la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ayant été annulée par décision définitive de la juridiction administrative, c'est à bon droit que M. Pascal X... demande de dire que son licenciement est nul ; que, sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement, aux termes de l'article L. 2422-4 du Code du travail, « lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision./ L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement, et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration./ Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire » ; que le préjudice subi s'entend des rémunérations que le salarié aurait perçues pendant la période considérée s'il avait continué à travailler, diminuées des revenus que celui-ci a touchés par ailleurs ; que, d'une part, la période couverte par l'indemnisation susvisée s'étend du 11 juin 2010, date du licenciement de M. Pascal X..., au 14 janvier 2014, jour de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt infirmatif de la cour administrative d'appel de Lyon ; que par ailleurs l'indemnité de l'article L. 2422-4 se cumule avec les indemnités de rupture et notamment l'indemnité compensatrice de préavis ; que, d'autre part, le salarié demandant et obtenant une indemnité pour chacun des mois des années couvertes par la nullité de son licenciement, les congés payés dont il aurait bénéficié s'il n'avait pas été licencié sont ainsi indemnisés ; qu'il n'y a dès lors pas lieu de prévoir que l'indemnité allouée sera assortie des congés payés afférents ; qu'enfin, si le paiement de l'indemnité s'accompagne du versement des cotisations y afférentes, le calcul des sommes dues à M. Pascal X... s'effectuera, ainsi qu'il le sollicite, sur la base des revenus perçus nets et qu'il aurait dû percevoir dès lors que les taux de cotisations sociales sur les rémunérations qu'il aurait dû toucher et sur les allocations chômage dont il a été destinataire diffèrent ; que, s'agissant des montants dus, les parties s'accordent à reconnaître que la rémunération nette de M. Pascal X... était de 34 526, 21 € ; que, pour l'année 2010 (du 11 juin au 31 décembre), l'intéressé a perçu 3 567 € d'allocations chômage ; que, la rémunération due pour cette période étant de 18 701, 67 €, il a donc droit à un différentiel de 15 134, 67 € net ; que, pour l'année 2011, M. Pascal X... a touché 7 977, 36 € d'allocations chômage, 4 614, 02 € de salaires chez ERTT Experts et 11 443, 32 € de rémunérations auprès de la SARL Altros (le montant complémentaire avancé par la SAS Cascades correspondant à des remboursements de frais) ; qu'il a droit à un différentiel de 10 491, 51 € ; que, pour la période du 1er janvier au 9 juillet 2012, l'intimé a perçu de la SARL Altros une rémunération nette de 13 279, 98 €, soit un différentiel de 3 983, 10 € par rapport au salaire net qu'il aurait touché pour la même période de la SAS Cascades ; qu'enfin, pour la période postérieure au 9 juillet 2012 et comprise jusqu'au 14 janvier 2014, M. Pascal X... ne présente aucune réclamation dans la mesure où, embauché par la société Danieli Henschel, il n'a subi aucune perte de rémunération ; que le préjudice subi au titre de la perte de salaire s'élève dès lors à 29 609, 28 € net ; que M. Pascal X... ne justifie en revanche d'aucun préjudice moral particulier en lien avec l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement ; que, par suite, la cour fixe à 29 609, 28 € le montant net revenant à M. Pascal X... au titre de l'indemnisation prévue à l'article L. 2422-4 du Code du travail – somme sur laquelle l'employeur devra payer les cotisations afférentes ; que, sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'annulation du licenciement ; que, outre l'indemnisation du préjudice résultant de l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement, le salarié non réintégré peut prétendre à l'octroi d'une réparation complémentaire s'il établit que son licenciement, était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que, toutefois, en l'espèce la cour administrative d'appel de Lyon a retenu que la faute reprochée à M. Pascal X... n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier une mesure de licenciement, le ministre ayant ainsi commis une erreur d'appréciation ; qu'au nom du principe de la séparation des pouvoirs une telle décision s'oppose à ce que le juge judiciaire, appréciant les mêmes faits, décide qu'ils constituent une cause réelle et sérieuse ; que, par suite, M. Pascal X... est bien fondé à solliciter le paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail ; qu'au moment du licenciement M. Pascal X... avait 10 ans d'ancienneté et percevait un salaire mensuel net de 2 877 € ; qu'en juillet 2012 il a retrouvé un emploi lui procurant un revenu au moins équivalent de celui perçu au sein de la SAS Cascades ; que son préjudice a été justement évalué à la somme de 23 000 € par les premiers juges ;

1. ALORS QUE le salarié protégé qui ne demande pas ou plus sa réintégration après annulation de l'autorisation de son licenciement a droit, d'une part, à l'indemnisation de son préjudice depuis le licenciement et jusqu'à l'expiration du délai de deux mois qui suit la notification de la décision d'annulation, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et enfin au paiement de l'indemnité prévue par l'article L 1235-3 du Code du travail s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en revanche, le salarié protégé qui a été licencié en exécution d'une autorisation ultérieurement annulée, ne peut pas soutenir, pour ce seul motif, que son licenciement est nul ; qu'en constatant la nullité du licenciement de M. Pascal X..., bien qu'il soit intervenu sur le fondement d'une autorisation administrative ultérieurement annulée, la Cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation de l'article L 2422-4 du Code du travail ;

2. ALORS QUE l'indemnisation du salarié protégé est subordonnée au caractère définitif de l'annulation de la décision d'autorisation de licenciement ; qu'il ressort tant des motifs que du dispositif de l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Lyon, le 7 novembre 2013, que le juge administratif a seulement prononcé l'annulation de la décision du 17 décembre 2010 du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé à l'article 1er de son arrêt ; que la Cour administrative d'appel de Lyon, par le même arrêt, a pris soin de rejeter le surplus des conclusions de M. X..., notamment en ce qu'elles tendaient à l'annulation de la décision initiale du 3 juin 2010 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ; qu'en décidant que l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement était définitive, quand la portée de l'annulation contentieuse était expressément limitée à la décision prise sur recours hiérarchique par le ministre chargé du travail, à l'exclusion de la décision prise par l'inspecteur du travail qui était fondée sur des faits différents, la Cour d'appel a violé l'article L 2422-4 du Code du travail, ensemble l'article 1351 du Code civil ;

3. ALORS QU'il ressort tant des motifs que du dispositif de l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Lyon, le 7 novembre 2013, que le juge administratif a seulement prononcé l'annulation de la décision du 17 décembre 2010 du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé à l'article 1er de son arrêt, mais a rejeté les conclusions de M. X... tendant à l'annulation de la décision initiale du 3 juin 2010 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement, mais a rejeté le recours formé par ce salarié à l'encontre de la décision initiale du 3 juin 2010 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ; qu'en décidant que l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement était définitive, quand la portée de l'annulation contentieuse était expressément limitée à la décision prise sur recours hiérarchique par le ministre chargé du travail, à l'exclusion de la décision prise par l'inspecteur du travail qui était fondée sur des faits différents, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon rendu le 7 novembre 2013 ; qu'ainsi, elle a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

4. ALORS QUE l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement ne résulte pas, en soi, de l'annulation de l'autorisation de licenciement ; qu'il résulte de la lettre de licenciement que la rupture du contrat de travail de M. X... était motivée par deux séries de faits tirés, d'une part, de la détention et la conservation sur divers matériels informatiques de documents informatiques professionnels relatifs à la paie et à la gestion du personnel, et, d'autre part, de la diffusion d'informations à un salarié investi d'un mandat représentatif ; qu'en affirmant que l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Lyon, le 7 novembre 2013, interdisait au juge judiciaire de se prononcer sur le bien-fondé du licenciement de M. X..., quand la Cour administrative d'appel de Lyon avait seulement décidé que l'autorisation de licenciement n'était pas justifiée par le seul grief tiré de la conservation par M. X... de données confidentielles relatives aux rémunérations et à la gestion du personnel sur son disque dur externe et sur une clé USB, la Cour d'appel qui a omis de se prononcer sur le second grief tiré de la diffusion d'informations à un salarié investi d'un mandat représentatif, a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble la loi des 16 et 24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III, le principe de séparation des autorités administratives et judiciaire par fausse application et les articles L 1234-1, L 1234-5, L 1234-9, L 1235-1 et L 1235-3 du Code du travail par refus d'application.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-26224
Date de la décision : 21/06/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 24 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jui. 2017, pourvoi n°15-26224


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.26224
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