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25/09/2019 | FRANCE | N°18-12314

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 septembre 2019, 18-12314


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 23 mars 2012, la société Banque populaire Lorraine Champagne, aux droits de laquelle est venue la société Banque populaire Alsace-Lorraine Champagne (la banque), a consenti à la société Planet Dino compagny (la société) un prêt garanti par le cautionnement de M. W... souscrit le même jour ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ;

Sur le premier moyen :

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tendu que M. W... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque la somme d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 23 mars 2012, la société Banque populaire Lorraine Champagne, aux droits de laquelle est venue la société Banque populaire Alsace-Lorraine Champagne (la banque), a consenti à la société Planet Dino compagny (la société) un prêt garanti par le cautionnement de M. W... souscrit le même jour ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. W... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque la somme de 42 075,15 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, et de rejeter toutes autres demandes alors, selon le moyen, que l'engagement de caution souscrit par lui le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en vingt-quatre mensualités, accordé le 23 mars 2012, pour une durée de vingt-quatre mois ; qu'ayant relevé que si l'engagement de caution souscrit par lui le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en vingt-quatre mensualités accordé le 23 mars 2012 et si la durée du cautionnement était de vingt-quatre mois, l'acte indique expressément que le terme du cautionnement était le 28 mars 2014, qu'il résulte du descriptif du prêt n° [...] accordé à la société Planet Dino Compagny et du tableau d'amortissement que la date de réalisation du prêt, qui correspond à la date de mise à disposition des fonds, était le 28 mars 2012 et que la dernière échéance devait être remboursée par la société emprunteuse le 28 mars 2014, pour décider que dans la mesure où le contrat de prêt et l'engagement de caution concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci et en l'occurrence, le financement accordé par la Banque populaire Alsace-Lorraine Champagne, avec le cautionnement de M. W..., devait prendre fin le 28 mars 2014, qu'il s'ensuit que la période couverte par l'engagement de caution allait jusqu'au 28 mars 2014 inclus et non jusqu'au 23 mars 2014 comme le soutient à tort M. W..., la cour d'appel a dénaturé le contrat prévoyant expressément une durée de garantie de vingt-quatre mois et elle a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 8 février 2016 ;
Mais attendu qu'après avoir relevé, d'un côté, que l'engagement de caution souscrit par M. W... le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en vingt-quatre mensualités accordé le 23 mars 2012, et de l'autre, que si la durée du cautionnement était de vingt-quatre mois, l'acte indiquait cependant expressément que le terme du cautionnement était le 28 mars 2014 et que, de surcroît, il résultait du descriptif du prêt n° [...] accordé à la société et du tableau d'amortissement que la date de réalisation du prêt, qui correspondait à la date de mise à disposition des fonds, était le 28 mars 2012, la dernière échéance devant être remboursée par la société emprunteuse le 28 mars 2014, c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, des termes de l'acte de cautionnement, que leur ambiguïté rendait nécessaire, que la cour d'appel a retenu que le cautionnement venait à expiration non le 23, mais le 28 mars 2014 ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 341-6 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 ;

Attendu que pour condamner M. W... à payer à la banque la somme de 42 075,15 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, l'arrêt, après avoir énoncé que, dans la mesure où le cautionnement a été souscrit le 23 mars 2012, la banque était tenue d'informer la caution au plus tard pour la première fois le 31 mars 2013, retient que la banque justifie du respect de cette obligation pour les sommes dues au 31 décembre 2012 en produisant la copie de la lettre datée du 15 février 2013, par laquelle elle a informé M. W... du montant restant dû au titre du prêt cautionné ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le texte susvisé, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le même moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 341-6 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 ;

Attendu que pour condamner M. W... à payer à la banque la somme de 42 075,15 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, l'arrêt retient encore que, dans la mesure où la déchéance du terme est intervenue le 26 mars 2014, en raison de la liquidation judiciaire de la société, il ne peut être fait grief à la banque de ne pas avoir informé la caution avant le 31 mars 2014 pour le montant des sommes dues au 31 décembre 2013 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le créancier professionnel est tenu de fournir à la caution l'information prévue par la loi jusqu'à extinction de la dette garantie par le cautionnement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. W... à payer à la société Banque populaire Alsace-Lorraine Champagne des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, et en ce qu'il rejette toutes autres demandes, l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Banque populaire Alsace-Lorraine Champagne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. W... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. W....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR confirmé le jugement ayant condamné solidairement M. R... et M. W... à payer à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 42 075,15 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, et débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

AUX MOTIFS QUE Sur la période de couverture applicable au cautionnement souscrit par M. W... ; que selon l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que si l'engagement de caution souscrit par M. W... le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en 24 mensualités accordé le 23 mars 2012 et si la durée du cautionnement était de 24 mois, l'acte indique cependant expressément que le terme du cautionnement était le 28 mars 2014 ; que de surcroît, il résulte du descriptif du prêt n° [...] accordé à la société Planet Dino Compagny et du tableau d'amortissement que la date de réalisation du prêt, qui correspond à la date de mise à disposition des fonds, était le 28 mars 2012 et que la dernière échéance devait être remboursée par la société emprunteuse le 28 mars 2014 ; que dans la mesure où le contrat de prêt et l'engagement de caution concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci et en l'occurrence, le financement accordé par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, avec le cautionnement de M. W..., devait prendre fin le 28 mars 2014 ; qu'il s'ensuit que la période couverte par l'engagement de caution allait jusqu'au 28 mars 2014 inclus et non jusqu'au 23 mars 2014 comme le soutient à tort M. W... ; que ce moyen doit dès lors être écarté ; Sur l'exigibilité de la créance de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne : qu'il se déduit de la combinaison entre les articles 2290 du code civil et L. 643-1 du code de commerce que la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal n'a d'effet qu'à l'égard de celui-ci et est sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement, sauf en présence d'une clause contraire ; que selon l'article 9 des conditions générales du prêt accordé à la société Planet Dino Compagny, la déchéance du terme a lieu automatiquement en cas de liquidation judiciaire de l'emprunteur ; que s'il ressort de cette disposition que la déchéance du terme est survenue le 26 mars 2014, date du jugement de liquidation judiciaire, cette disposition ne vaut toutefois que dans les rapports entre la banque et le débiteur principal et ses effets ne peuvent être étendus à la caution ; que les premiers juges ont exactement relevé que l'acte de cautionnement comporte une clause (article des conditions générales du cautionnement professionnel figurant en page 4 de l'acte) qui stipule que "la caution ne saurait encore subordonner l'exécution de son engagement à une mise en demeure préalable du débiteur par la banque, l'exigibilité des créances de cette dernière à l'égard du débiteur entraînant de plein droit l'exigibilité de sa dette de caution" ; que cette disposition, qui figure nécessairement dans le débat dès lors que les premiers juges se sont fondés sur celle-ci pour motiver leur décision, s'analyse en une clause contraire au principe selon lequel la déchéance du terme résultant de la liquidation judiciaire du débiteur principal est sans incidence sur la situation de la caution poursuivie en paiement ; que la déchéance du terme du prêt accordé à la société Planet Dino Compagny étant intervenue par l'effet de la liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de grande instance de Metz le 26 mars 2014, il en résulte que le cautionnement souscrit par M. W... est devenu immédiatement exigible à cette date, et ce avant le terme de son engagement fixé au mars 2014; que M. W... doit par conséquent être débouté de sa demande principale tendant à être déchargé de toute obligation résultant de son engagement de caution et le jugement doit être confirmé de ce chef ;

ALORS QUE l'engagement de caution souscrit par l'exposant le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en 24 mensualités, accordé le 23 mars 2012, pour une durée de 24 mois ; qu'ayant relevé que si l'engagement de caution souscrit par M. W... le 23 mars 2012 était destiné à garantir un prêt remboursable en 24 mensualités accordé le 23 mars 2012 et si la durée du cautionnement était de 24 mois, l'acte indique expressément que le terme du cautionnement était le 28 mars 2014, qu'il résulte du descriptif du prêt n° [...] accordé à la société Planet Dino Compagny et du tableau d'amortissement que la date de réalisation du prêt, qui correspond à la date de mise à disposition des fonds, était le 28 mars 2012 et que la dernière échéance devait être remboursée par la société emprunteuse le 28 mars 2014, pour décider que dans la mesure où le contrat de prêt et l'engagement de caution concourent à une même opération, ils s'interprètent en fonction de celle-ci et en l'occurrence, le financement accordé par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne, avec le cautionnement de M. W..., devait prendre fin le 28 mars 2014, qu'il s'ensuit que la période couverte par l'engagement de caution allait jusqu'au 28 mars 2014 inclus et non jusqu'au 23 mars 2014 comme le soutient à tort M. W..., la cour d'appel a dénaturé le contrat prévoyant expressément une durée de garantie de 24 mois et elle a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 8 février 2016 ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR confirmé le jugement ayant condamné solidairement M. R... et M. W... à payer à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 42 075,15 euros, augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, et débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

AUX MOTIFS QUE Sur le montant de la créance de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne et sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels invoquée par M. W... : que M. W... ne critique pas le décompte présenté par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne faisant apparaître un solde de 42 075,15 euros, y compris l'indemnité exceptionnelle de 10 % sur le capital restant dû ; que selon l'article L. 341-6 devenu L. 333-2 du code de la consommation, le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie ; qu'à défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités et intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de la nouvelle information ; que cette obligation persiste pendant toute la durée de la procédure introduite contre la caution et doit être respectée jusqu'à l'extinction de la dette que dans la mesure où le cautionnement a été souscrit le 23 mars 2012, la banque était tenue d'informer la caution au plus tard pour la première fois le 31 mars 2013 ; que la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne justifie du respect de cette obligation pour les sommes dues au 31 décembre 2012 en produisant la copie de la lettre datée du 15 février 2013 par laquelle elle a informé M. W... du montant restant dû au titre du prêt cautionné ; que dans la mesure où la déchéance du terme est intervenue le 26 mars 2014 en raison de la liquidation judiciaire de la société Planet Dino Compagny, il ne peut être fait grief à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de ne pas avoir informé la caution avant le 31 mars 2014 pour le montant des sommes dues au 31 décembre 2013 ; que le moyen tiré de l'absence d'information annuelle de la caution doit dès lors être rejeté ;

ALORS D'UNE PART QUE le banquier doit rapporter la preuve de l'envoi de la lettre d'information annuelle de la caution au plus tard avant le 31 mars de chaque année et qu'elle contient l'ensemble des informations imposées par l'article L. 341-6 devenu L. 333-2 du code de la consommation ; qu'en retenant que la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne justifie du respect de cette obligation pour les sommes dues au 31 décembre 2012 en produisant la copie de la lettre datée du 15 février 2013 par laquelle elle a informé M. W... du montant restant dû au titre du prêt cautionné la cour d'appel se prononce par des motifs impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le texte susvisé, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi et elle a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'obligation faite au banquier d'informer la caution annuellement au plus tard avant le 31 mars de chaque année, en respectant les exigences imposée par l'article L. 341-6 devenu L. 333-2 du code de la consommation, perdure jusqu'à l'extinction de la dette principale garantie ; qu'en retenant que dans la mesure où la déchéance du terme est intervenue le 26 mars 2014 en raison de la liquidation judiciaire de la société Planet Dino Compagny, il ne peut être fait grief à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de ne pas avoir informé la caution avant le 31 mars 2014 pour le montant des sommes dues au 31 décembre 2013, pour confirmer le jugement ayant condamné M. W..., solidairement avec M. R..., au paiement de la somme de 42 075,15 euros, avec intérêts au taux contractuel de 5,40 % l'an à compter du 21 mai 2014, date de l'arrêté de compte, la cour d'appel qui se prononce par un motif inopérant, a violé le texte susvisé ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-12314
Date de la décision : 25/09/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 23 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 25 sep. 2019, pourvoi n°18-12314


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.12314
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