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04/06/2020 | FRANCE | N°18-18385

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 juin 2020, 18-18385


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 juin 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 523 F-D

Pourvoi n° F 18-18.385

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 JUIN 2020

M. B... N..., domicilié chez AB3E, [...], a formé le pourvoi nÂ

° F 18-18.385 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (15e chambre A), dans le litige l'opposant à Mme H... V....

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 juin 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 523 F-D

Pourvoi n° F 18-18.385

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 JUIN 2020

M. B... N..., domicilié chez AB3E, [...], a formé le pourvoi n° F 18-18.385 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (15e chambre A), dans le litige l'opposant à Mme H... V..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. N..., de la SCP Ghestin, avocat de Mme V..., et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mars 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 juin 2016), par ordonnance de non-conciliation du juge aux affaires familiales d'un tribunal de grande instance, M. N... a été condamné à payer à Mme V... la somme de 5 000 francs par mois et par enfant, au titre de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de leurs deux enfants, contribution qui a été maintenue par un jugement de divorce du 10 janvier 2000.

2. Par arrêt du 24 septembre 2002, une cour d'appel a infirmé cette dernière décision et fixé la contribution du père à la somme de 400 euros par mois et par enfant.

3. Mme V... a fait délivrer à M. N..., sur le fondement de l'ordonnance de non-conciliation, deux commandements à fin de saisie-vente, les 23 juin 2000 et 12 février 2004, pour le recouvrement des contributions impayées.

4. Par arrêt du 20 juin 2007, une cour d'appel a supprimé la contribution du père à compter du 5 mai 2004.

5. Mme V... a ensuite fait délivrer à M. N... trois nouveaux commandements de payer à fin de saisie-vente, le premier le 12 février 2009 sur le fondement de l'ordonnance de non-conciliation, le suivant, du 5 mars 2009, sur le fondement de l'arrêt du 24 septembre 2002, et le dernier, du 11 février 2014, sur le fondement de ces deux décisions.

6. M. N... a contesté la validité de ces commandements devant un juge de l'exécution.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. M. N... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à l'annulation des commandements de payer des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 alors « que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. N... ne pouvait opposer l'irrégularité des commandements visant une ordonnance de non-conciliation en date du 15 septembre 1997 qui ne lui avait pas été signifiée dès lors qu'il a lui-même fait procéder à la signification de cette décision ; que cependant, si Mme V... entendait faire procéder à l'exécution forcée de cette ordonnance, elle devait la faire signifier, même si M. N... en avait eu connaissance, sauf à établir que ce dernier avait exécuté cette décision volontairement ; qu'en se fondant ainsi, pour refuser d'annuler les commandements, sur la signification de l'ordonnance effectuée à la requête de M. N..., la cour d'appel a violé l'article 503 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 503 du code de procédure civile :

8. Selon ce texte, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire.

9. Pour débouter M. N... de sa demande de nullité des commandements et valider l'itératif commandement pour un certain montant, l'arrêt retient que si, conformément à l'article 503 du code de procédure civile, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, l'ordonnance du 15 septembre 1997 a été signifiée à la requête de M. N... par acte du 19 novembre 1997. Il ajoute que la signification préalable du jugement, que peut effectuer toute partie, a pour objet de s'assurer que le jugement est parvenu à la connaissance de l'autre partie de manière officielle avec une information effective sur ses droits et obligations et de faire courir le délai d'appel. Il en déduit que M. N..., qui avait donc bien connaissance de la décision et qui pouvait en interjeter appel puisqu'il en rappelait lui-même les modalités à Mme V... dans l'acte de signification, ne peut voir prospérer ce moyen.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'ordonnance de non-conciliation avait été signifiée à M. N..., peu important qu'il ait lui-même fait signifier la décision à Mme V..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. M. N... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à l'annulation des commandements de payer des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 alors « que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire ; que M. N... a fait valoir que les commandements de payer des 5 mars 2009 et 11 février 2014 étaient nuls dans la mesure où ils étaient fondés sur l'arrêt du 24 septembre 2004 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui ne lui avait pas été signifié à la diligence de Mme V... ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

13. Pour débouter M. N... de sa demande de nullité des commandements et valider l'itératif commandement pour un certain montant, l'arrêt retient que l'ordonnance du 15 septembre 1997 a été signifiée à la requête de M. N... par acte du 19 novembre 1997.

14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. N..., qui soulevait la nullité des commandements des 5 mars 2009 et 11 février 2014 au motif que l'arrêt du 24 septembre 2002 sur lequel ils étaient fondés ne lui avait pas été signifié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

15. M. N... fait grief à l'arrêt de juger que l'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être valablement délivré pour une créance en principal, intérêts et frais de 135 281,29 euros alors « que la cassation à intervenir du chef du dispositif ayant débouté M. N... de sa demande d'annulation des commandements des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 entraînera par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif ayant jugé que l'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être valablement délivré pour une créance en principal, intérêts et frais de 135 281,29 €, ces chefs étant liés par un lien de dépendance nécessaire, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

16. La cassation prononcée sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, entraîne la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt en ce qu'il dit que l'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être valablement délivré pour une créance en principal, intérêts et frais de 135 281,29 euros dès lors que c'est en raison de l'effet interruptif de prescription des précédents commandements que la cour d'appel a ainsi statué, et que l'éventuelle annulation de ceux-ci devant la cour d'appel de renvoi, impliquera une nouvelle appréciation du cours de la prescription par celle-ci.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du premier moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement rendu le 16 janvier 2015 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation et déclaré M. N... recevable en son action, l'arrêt rendu le 17 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne Mme V... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme V... à payer à M. N... la somme de 3 000 euros.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille vingt, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. N...

Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. B... N... de sa demande tendant à l'annulation des commandements de payer des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 ;

Aux motifs que « par ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grasse a fixé la contribution mensuelle de M. N... à l'entretien et l'éducation de chacun de ses deux enfants à la somme de 5 000 F ;
M. N... demande que soit prononcée la nullité des commandements délivrés les 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 ;
Il argue tout d'abord de ce qu'il n'est pas justifié de la signification par Mme V... de l'ordonnance du 15 septembre 1997 en vertu de laquelle ces commandements ont été délivrés ;
Mais si, conformément à l'article 503 du code de procédure civile, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés, qu'après leur avoir été notifiés, l'ordonnance du 15 septembre 1997 a été signifiée à la requête de M. N... par acte du 19 novembre 1997, or la signification préalable du jugement, que peut effectuer toute partie, a pour objet de s'assurer que le jugement est parvenu à la connaissance de l'autre partie de manière officielle avec une information effective sur ses droits et obligations et de faire courir le délai d'appel, de sorte que M. N..., qui avait donc bien connaissance de la décision et qui pouvait en interjeter appel puisqu'il en rappelait lui-même les modalités à Mme V... dans l'acte de signification, ne peut voir prospérer ce moyen ;
Et si la contestation d'un commandement n'est soumise à aucun délai, la nullité de l'acte ne peut être prononcée, si elle n'est soulevée sur une irrégularité de fond tirée de la liste limitative de l'article 117 du code de procédure civile, comme c'est le cas en l'espèce, qu'à la condition de justifier d'un grief ;
M. N... soutient que délivré uniquement en vertu de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997, le commandement du 23 juin 2000 ne pouvait porter réclamation que des échéances de septembre 1997 à décembre 1999, que le commandement du 12 février 2004 se borne à porter sur un principal de 104 884,96 € sans aucune précision ni ventilation et de ce qu'il ignore le jugement de divorce du 10 janvier 2000 tout comme l'arrêt du 24 septembre 2002, que l'itératif commandement du 12 février 2009 ne vise pas les échéances postérieures à décembre 2003 et ne comporte aucune ventilation ni précision sur le montant du principal réclamé alors qu'à tout le moins, partie de celui-ci était prescrit, que le commandement du 5 mars 2009, délivré uniquement sur la base de l'arrêt du 24 septembre 2002, ne porte que sur des intérêts acquis et un principal sur lesquels aucune explication n'est fournie et enfin, que le commandement du 11 février 2014, délivré en vertu de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997 et de l'arrêt du 24 septembre 2002, globalise encore une fois le principal, sans ventilation en fonction des trois décisions intervenues ;
Mais M. N... ne peut faire abstraction, dans l'administration de la preuve d'un grief à laquelle il est tenu, des éléments en sa possession à la date à laquelle il a décidé de contester les commandements ; c'est à cette date que doit s'apprécier le grief, or il est relevé que ce dernier n'a contesté ces commandements qu'en 2014, à savoir, par assignation du 10 juillet 2014 devant le juge de l'exécution pour les commandements délivrés les 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 et dans ses conclusions du 4 novembre 2014, dans la même instance, pour les commandements des 23 juin 2000 et 12 février 2004 ;
A ces dates, M. N... avait en main le décompte annexé à l'itératif commandement du 11 février 2014, délivré en vertu de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997 et de l'arrêt du 24 septembre 2002, qui représente la créance actualisée de Mme H... V... et qui précise, outre le détail du calcul des intérêts, la période correspondant à l'arriéré de la part contributive, seule précision utile à M. N... qui n'a en effet procédé au versement d'aucune somme à ce titre, et il n'est pas établi que le fait de ne pas en avoir eu précédemment connaissance, notamment à l'occasion de la délivrance du commandement du 23 juin 2000, comme des suivants, lui a causé grief ;
M. N... ne peut donc voir prospérer sa demande tendant à voir prononcer la nullité des commandements délivrés les 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 » (arrêt p 5, § 4 et suiv.) ;

1°) Alors que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. N... ne pouvait opposer l'irrégularité des commandements visant une ordonnance de non-conciliation en date du 15 septembre 1997 qui ne lui avait pas été signifiée dès lors qu'il a lui-même fait procéder à la signification de cette décision ; que cependant, si Mme V... entendait faire procéder à l'exécution forcée de cette ordonnance, elle devait la faire signifier, même si M. N... en avait eu connaissance, sauf à établir que ce dernier avait exécuté cette décision volontairement ; qu'en se fondant ainsi, pour refuser d'annuler les commandements, sur la signification de l'ordonnance effectuée à la requête de M. N..., la cour d'appel a violé l'article 503 du code de procédure civile ;

2°) Alors qu'est nul le commandement de payer affecté d'un vice de forme qui a causé un grief à son destinataire ; que pour rejeter la demande de M. N... tendant à l'annulation des commandements des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009 et 5 mars 2009, la cour a retenu qu'à la date où il a décidé de contester ces actes, soit à la date de l'assignation du 10 juillet 2014 devant le juge de l'exécution et de ses conclusions du 4 novembre 2014 dans la même instance, il avait en main le décompte annexé à l'itératif commandement du 11 février 2014, représentant la créance actualisée de Mme V... et précisant le calcul des intérêts, et qu'il n'est pas établi que le fait de ne pas en avoir eu précédemment connaissance à l'occasion de la délivrance des précédents commandements lui a causé grief ; qu'en statuant ainsi, sans expliquer comment à la date de délivrance de ces quatre commandements entachés de nullité dès lors qu'ils ne comportaient aucune précision ni ventilation sur la créance de Mme V..., M. N... avait pu être informé sur la réalité et la nature de sa dette lui permettant de l'éteindre, ce que M. N... contestait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 114 du code de procédure civile ;

3°) Alors que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire ; que M. N... a fait valoir que les commandements de payer des 5 mars 2009 et 11 février 2014 étaient nuls dans la mesure où ils étaient fondés sur l'arrêt du 24 septembre 2004 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui ne lui avait pas été signifié à la diligence de Mme V... ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que l'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être valablement délivré pour une créance en principal, intérêts et frais de 135 281,29 € ;

Aux motifs qu'« il convient tout d'abord de rappeler que si le créancier peut poursuivre pendant au maximum trente ans, avec la date-butoir du 19 juin 2018 par application du régime transitoire de la loi du 17 juin 2008, l'exécution d'une décision condamnant au paiement d'une somme payable à termes périodiques, il n'en demeure pas moins que les échéances échues postérieurement à cette décision demeurent soumises à la prescription quinquennale, le créancier ne pouvant obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande et il en est de même pour le recouvrement des intérêts échus postérieurement à la condamnation ;
Ainsi, si Mme V... peut exécuter le titre que constitue l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997 jusqu'au 19 juin 2018, elle reste soumise à la prescription quinquennale pour le recouvrement des parts contributives échues postérieurement, de sorte qu'elle ne pouvait prétendre, au jour du commandement délivré le 11 13 février 2014, qu'aux arriérés échus entre cette date et le 11 février 2009 et elle ne peut prétendre au recouvrement des arriérés échus depuis l'ordonnance de non-conciliation qu'à la condition de justifier d'actes interruptifs de prescription ;
Le commandement du 23 juin 2000 porte réclamation d'un principal de 190 000 F, montant arrêté au 10 mars 2000, soit 19 mensualités, outre l'arriéré d'avril 2010 pour 10 000 F ; ce commandement vaut acte interruptif de prescription pour cet arriéré d'un montant total, en principal, de 200 000 F, soit 30 489,80 € ;
M. N... soutient toutefois qu'au jour du commandement du 23 juin 2000 délivré en vertu de l'ordonnance de non-conciliation, les mesures provisoires avaient été remplacées par le jugement du 10 janvier 2000, en arguant de ce que celui-ci n'a pas été signifié ;
Mais ce jugement avait fait l'objet d'un appel général de la part de Mme V..., de sorte que les mesures provisoires fixées par l'ordonnance de non-conciliation continuaient à s'appliquer ;
Il en résulte que postérieurement au 24 septembre 2002, Mme V... ne pouvait plus agir, pour les parts contributives échues postérieurement à cette date, qu'en vertu de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Il est toutefois relevé que le commandement du 12 février 2004 a été délivré uniquement en vertu de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997 pour paiement d'un principal de 104 884,96 € arrêté au 31 décembre 2003, de sorte qu'il ne pouvait donc contenir réclamation d'un arriéré en vertu de l'arrêt du 24 septembre 2002, soit les 15 mensualités sur la période d'octobre 2002 à décembre 2003 qui représentent une créance de 24 696,75 €, prescrite entre octobre 2007 et le 31 décembre 2008, sauf à justifier d'un acte interruptif au titre de cette créance ;
Mais l'acte suivant, un itératif commandement, n'est intervenu que le 12 février 2009, date à laquelle cette créance était donc prescrite ; il est en outre relevé que cet acte, délivré pour les mêmes causes, l'a été également en vertu seulement de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997, de sorte que la prescription n'a été interrompue le 12 février 2009 que pour les sommes commandées en vertu de l'ordonnance de non-conciliation, soit une somme totale de 80 188,21 € au lieu de 104 884,96 € ;
Mme V..., qui précise que les parts contributives échues pour l'année 2003 constituent la dernière année pour laquelle le paiement d'une pension est réclamé, ne peut ainsi se prévaloir d'aucun acte interruptif de prescription pour le recouvrement de la part contributive fixée par l'arrêt du 24 septembre 2002 au titre de la période d'octobre 2002 au 31 décembre 2003 ; le commandement du 5 mars 2009, a bien été délivré en vertu de l'arrêt du 24 septembre 2002 mais uniquement pour les intérêts acquis à compter du 1er janvier 2004 au 4 mai 2004 ;
L'itératif commandement du 12 février 2009, qui porte réclamation de la même somme que le commandement du 12 février 2004, augmenté simplement du coût de l'acte, a bien été délivré dans les cinq ans et en conséquence, ledit acte a également interrompu la prescription pour le recouvrement des sommes dues en vertu de l'ordonnance de non-conciliation, soit 80 188,21 € ;
Mme V... a fait délivrer un nouvel itératif commandement le 11 février 2014, soit dans le délai de prescription, pour le paiement d'une somme en principal correspondant aux causes des commandements du 12 février 2004 et du 12 février 2009 ; cet acte a encore interrompu la prescription pour le recouvrement des sommes dues en principal en vertu de l'ordonnance de non-conciliation, soit 80 188,21 € ;
Ainsi, en vertu de l'ordonnance de non-conciliation du 15 septembre 1997, Mme V..., qui pouvait poursuivre le recouvrement des 5 premières annuités jusqu'au 15 septembre 2002, a interrompu la prescription avec le commandement du 23 juin 2000 à compter duquel les poursuites pouvaient être diligentées pour la totalité des arriérés échus jusqu'au 23 juin 2005 ; la prescription a été à nouveau interrompue par le commandement du 12 février 2004 puis par celui du 12 février 2009, de sorte qu'à l'occasion de l'itératif commandement du 11 février 2014, Mme V... ne pouvait se voir opposer aucune prescription au titre des sommes dues en principal en vertu de l'ordonnance de non-conciliation ;
Aux termes de l'itératif commandement du 11 février 2014, Mme V... réclame également une somme de 6 998,25 € correspondant à des intérêts acquis du 1er janvier 2004 au 4 mai 2004 ; cette somme a donné lieu à la délivrance d'un commandement de saisie vente du 5 mars 2009 ;
A la date de ce commandement, toutefois, les intérêts ne pouvaient être réclamés au-delà du 5 mars 2004, de sorte qu'il ne vaut acte interruptif que pour les intérêts dus du 5 mars 2004 au 4 mai 2004, soit 1 607,01 € (prorata temporis en jours pour le mois de mars 2004) ;
Par ailleurs, l'itératif commandement du 11 février 2014 porte également réclamation d'une somme de 100 031,42 € et d'une somme de 2 282,38 € au titre des intérêts acquis au 31 décembre 2013 ;
La somme de 2 282,38 € correspond aux intérêts pour la période du 5 mars 2009 au 31 décembre 2013, soit une période non prescrite à la date de l'itératif commandement du 11 février 2014 ;
Mais la somme 100 031,42 € représente les intérêts calculés depuis le 31 décembre 2003, soit au-delà du délai de prescription de cinq ans ; ces intérêts étant réclamés pour la première fois par l'itératif commandement du 11 février 2014, ils sont prescrits pour la période antérieure au 11 février 2009, or il n'est justifié d'aucun acte interruptif délivré antérieurement pour le recouvrement de ces sommes ; le commandement du 12 février 2004 ne porte pas en effet réclamation d'un arriéré d'intérêts ; ainsi, au vu du décompte des intérêts annexé au commandement de payer du 11 février 2014, la réclamation au titre des intérêts doit être cantonnée à la somme de 51 203,69 € correspondant à la période du 11 février 2009 au 31 février 2013 (prorata temporis en jours pour l'année 2009) ;
En conséquence, aucune prescription ne peut être opposée à Mme V... au titre de sa créance en principal en vertu de l'ordonnance de non-conciliation, soit 80 188,21 €, arrêtée au 30 septembre 2002, mais cette dernière ne peut prétendre au paiement des arrérages en intérêts qu'à concurrence d'une somme de 55 093,08 € (51 203,69 + 2 282,38 + 1 607,01) arrêtée également au 31 décembre 2013 ;
L'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être ainsi valablement délivré pour une créance en principal et intérêts de 135 281,29€ » (arrêt p 7 § 1er à p. 9 § 1er) ;

Alors que la cassation à intervenir du chef du dispositif ayant débouté M. N... de sa demande d'annulation des commandements des 23 juin 2000, 12 février 2004, 12 février 2009, 5 mars 2009 et 11 février 2014 entraînera par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif ayant jugé que l'itératif commandement du 11 février 2014 pouvait être valablement délivré pour une créance en principal, intérêts et frais de 135 281,29 €, ces chefs étant liés par un lien de dépendance nécessaire, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-18385
Date de la décision : 04/06/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 jui. 2020, pourvoi n°18-18385


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.18385
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