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01/09/2020 | FRANCE | N°19-80815

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 septembre 2020, 19-80815


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 19-80.815 F-D

N° 1176

SM12
1ER SEPTEMBRE 2020

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 1ER SEPTEMBRE 2020

La société Bricoman a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 5 juin 2018, qui dans la procédure

suivie contre elle du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits, en dema...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 19-80.815 F-D

N° 1176

SM12
1ER SEPTEMBRE 2020

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 1ER SEPTEMBRE 2020

La société Bricoman a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 5 juin 2018, qui dans la procédure suivie contre elle du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Bricoman, les observations de Me Brouchot, avocat de Mme Q... B... , M. O... B... et Mme U... B... , parties civiles, et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. À la suite du décès d'G... B... , employée intérimaire, la société utilisatrice Bricoman a été poursuivie devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire.

3. Les juges du premier degré l'ont relaxée, et après avoir reçu les constitutions de partie civile de M. O... B... , époux d'G... B... et de Mmes U... et Q... B... , filles de l'intéressée, ils les ont déboutés de leurs demandes.

4. Les parties civiles ont seules relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen pris en sa troisième branche

5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le premier moyen pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. Le moyen est pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 142-1, L. 142-2, L. 451-1 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale, 2, 4-1, 497, 591 et 593 du code de procédure pénale.

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Bricoman, a déclaré recevables les demandes des consorts B... , a dit que la société Bricoman avait commis une faute inexcusable et l'a condamnée à payer à M. O... B... la somme de 30 000 euros et à Mmes U... et Q... B... chacune la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors :

« 1°/ que la chambre des appels correctionnels ne peut, sauf à commettre un excès de pouvoir, statuer comme juge d'appel d'une juridiction civile ; qu'en l'espèce, saisie de l'appel d'un jugement de tribunal correctionnel, la cour d'appel ne pouvait statuer comme juridiction d'appel du tribunal des affaires de la sécurité sociale, dont elle a pourtant relevé la compétence exclusive pour connaître de la faute inexcusable reprochée à la société Bricoman ;

2°/ que l'absence de faute pénale non intentionnelle ne fait pas obstacle à l'exercice d'une action devant les juridictions civiles afin d'obtenir la réparation d'un dommage en application de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale si l'existence de la faute inexcusable prévue par ce texte est établie ; qu'ainsi, en l'espèce, la chambre des appels correctionnels ne pouvait se déclarer compétente pour apprécier l'existence d'une faute inexcusable de la société Bricoman, définitivement relaxée du chef d'homicide involontaire, quand seules les juridictions civiles étaient compétentes pour en connaître. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 520 du code de procédure pénale et L. 451-1 du code de la sécurité sociale :

8. Selon le premier de ces textes, la cour d'appel évoque et statue au fond lorsque le jugement de première instance est annulé, notamment pour violation ou omission non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité.

9. D'après le second, aucune action en réparation des conséquences dommageables d'un accident du travail ne peut, en dehors des cas prévus par ce texte, être exercée conformément au droit commun, par la victime ou ses ayants droit contre l'entreprise ou ses préposés.

10. Pour écarter l'exception d'incompétence soulevée par la société Bricoman, tirée de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale pour statuer sur les demandes des parties civiles, l'arrêt attaqué énonce que ces dernières se prévalent, au soutien de leurs demandes, de la faute inexcusable de cette société.

11. Les juges ajoutent que si les articles L. 451-1 et suivants du code de la sécurité sociale donnent compétence exclusive à la juridiction de la sécurité sociale pour en connaître en première instance, cela ne fait pas obstacle au pouvoir d'évocation de la cour d'appel en tant que juridiction d'appel du tribunal des affaires de la sécurité sociale.

12. Ils en concluent, s'agissant d'un accident du travail ayant eu lieu en 2008, qu'il apparaît d'une bonne administration de la justice d'évoquer l'affaire et de la juger.

13. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés pour les motifs qui suivent.

14. D'une part, les juges du second degré, dont l'office était de rechercher l'existence d'une faute civile commise à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite, ne pouvaient, en l'absence d'annulation du jugement, user du pouvoir d'évocation.

15. D'autre part, la chambre des appels correctionnels, saisie de la demande indemnitaire des ayants droit d'G... B... à la suite de l'accident du travail, n'était compétente que pour accueillir le cas échéant leur constitution de partie civile et ne pouvait prononcer sur le principe de la responsabilité ni sur le montant des dommages et intérêts.

16. La cassation est donc encourue.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Orléans en date du 5 juin 2018, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Orléans et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le premier septembre deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-80815
Date de la décision : 01/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 05 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 sep. 2020, pourvoi n°19-80815


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.80815
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