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17/09/2013 | FRANCE | N°12/02762

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chambre sociale, 17 septembre 2013, 12/02762


A.R



RG N° 12/02762



N° Minute :





















































































Notifié le :

Grosse délivrée le :



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU MARDI 17 SEPTE

MBRE 2013





Appel d'une décision (N° RG F 10/00523)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 01 mars 2012

suivant déclaration d'appel du 12 Avril 2012





APPELANTE :



LA SA SAMSE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représentée par Me Bernard GALL...

A.R

RG N° 12/02762

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU MARDI 17 SEPTEMBRE 2013

Appel d'une décision (N° RG F 10/00523)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 01 mars 2012

suivant déclaration d'appel du 12 Avril 2012

APPELANTE :

LA SA SAMSE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Bernard GALLIZIA, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMES :

Monsieur [L] [V]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Denis DEUR, avocat au barreau de NICE

LA SARL CIFFREO BONA, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Denis DEUR, avocat au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Hélène COMBES, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Astrid RAULY, Conseiller,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Ouarda KALAI, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 17 Juin 2013,

Madame RAULY, entendue en son rapport,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 10 Septembre 2013, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour. Le délibéré a été prorogé au 26 septembre 2012.

L'arrêt a été rendu le 17 Septembre 2013.

RG N°12/2762A.R

EXPOSE DES FAITS

[L] [V] a été embauché par la société SAMSE le 4 janvier 1989 en qualité d'agent technico-commercial. Son contrat de travail comportait une clause de non-concurrence.

Un nouvel avenant a été signé, le 4 mars 2003 qui a prévu la modification de la clause de non-concurrence.

En août 2010, le salarié a rencontré les représentants de la SARL CIFFREO BONA, dans l'activité est identique à celle de la société SAMSE. Cette rencontre a débouché sur son embauche le 8 août 2010.

La société SAMSE a fait citer le salarié en référé afin de voir ordonner la cessation de son activité au sein de cette société.

La juridiction de référé l'a débouté de sa demande.

[L] [V] auquel s'est associé la SARL CIFFREO BONA a saisi le 2 décembre 2010 les juges du fond pour voir juger qu'il n'était lié par aucune clause de non-concurrence régulière à l'égard de la société SAMSE pour obtenir sa condamnation à lui verser 15'000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et matériel et 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SAMSE a présenté des demandes reconventionnelles.

Par jugement du 1er mars 2012, le conseil des prud'hommes de VIENNE a dit que la clause de non-concurrence invoquée par la société SAMSE est nulle et de nul effet à l'encontre de [L] [V], a condamné la société SAMSE à lui verser 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et l'a débouté de ses autres demandes.

Appel de cette décision a été interjeté par la société SAMSE.

Par conclusions régulièrement déposées, la société SAMSE demande à la cour de déclarer mal fondées les demandes de [L] [V] et le la SARL CIFFREO BONA et de les en débouter, de condamner [L] [V] à lui payer 9.152,47 euros au titre de la violation de la clause de non-concurrence outre 5000 € sur l'article 700 du code de procédure civile.

Elle souligne que le salarié a passé 21 ans de sa vie professionnelle au service du même employeur, dans le même lieu géographique et dans la même fonction ; qu'au moment de son embauche il a signé une clause de non-concurrence, avec une limitation géographique de 50 kms autour de chaque dépôt de la société SAMSE, pendant une durée de deux ans ;

qu'un avenant a été signé le 23 juin 2002, qui comportent une clause de non-concurrence pendant une période d'une année à compter de son départ effectif de l'entreprise, dans un rayon de 50 km autour des établissements du groupe SAMSE dans lesquelles le salarié aura travaillé ; qu'un accord d'entreprise a été signée le 17 février 2003 s'agissant de la nouvelle rédaction de la clause de non-concurrence ; que cet accord a été régulièrement déposé au conseil des prud'hommes de Grenoble et à la direction départementale du travail.

Elle souligne que le document signé par le salarié comporte bien un accord sur la nouvelle formulation de la clause concurrence ; que cette clause de non-concurrence comporte une contrepartie financière qui n'existait pas jusque-là ;que cette clause qui porte sur une durée d'une année prévoit un rayon de 50 km autour des agences dans lesquelles le salarié aura travaillé dans les deux dernières années ; que le salarié a travaillé à [Localité 4] depuis janvier 2002 et n'a jamais quitté l'agence ; que la contrepartie financière n'est pas dérisoire.

Elle réclame condamnation de [L] [V] au paiement de la clause pénale fixée à 3 mois de salaire pour violation de la clause de non concurrence.

[L] [V] et la société CIFFREO BONA ont conclu à la confirmation du jugement, au besoin par substitution de motifs, et au débouté de la société SAMSE en toutes ses prétentions. Ils réclament la condamnation de la société SAMSE à leur payer 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.

Ils font valoir que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail signée entre [L] [V] et la société SAMSE, qui ne prévoyait aucune contrepartie financière était nulle de plein droit ; que l'avenant du 23 janvier 2002, qui ne prévoyant toujours pas de contrepartie financière, restait nulle ; que la société a tenté de régulariser la situation dans un document intitulé 'fiche individuelle de rémunération année 2003" prévoyant une contrepartie financière, sur lequel le salarié s'est contenté d'apposer sa signature sans la mention 'bon pour accord' alors que la jurisprudence exige dans le cadre de la régularisation d'une clause de non-concurrence, la signature d'un avenant en bonne et due forme ; que si la société avait souhaité exécuter de bonne foi le contrat de travail elle aurait présenté un véritable avenant à Monsieur [V].

Ils soutiennent de plus que la période de non-concurrence d'une année visée dans le document de 2003 a été portée à deux ans dans un courrier unilatéral du 14 juin 2010 accusant réception de la démission et indiquant : « je vous rappelle que vous avez signé un engagement de non-concurrence. En application de l'accord de groupe sur le sujet, nous vous rappelons que le périmètre de non-concurrence est ramené à un rayon de 50 km au départ de [Localité 4], pour une période de deux ans et nous n'entendons pas vous délier de cette clause » ; que le salarié n'a d'ailleurs fait que mentionner sur ce courrier 'reçu en mains propres' sans y porter la mention 'lu et approuvé' ; que ce courrier a tenté de modifier le périmètre de la clause de non-concurrence ; que l'employeur qui souhaite voir sa clause produire des effets doit négocier un avenant ; que si l'employeur opte pour une régularisation unilatérale, il faut que le salarié l'accepte expressément.

Ils soutiennent que l'accord de groupe auquel le courrier de dispense de préavis a fait référence par erreur, alors qu'il s'agit d'un accord d'entreprise, porte la date du 17 février 2003 et est donc postérieur à l'avenant signé le 23 janvier 2002 ; qu'il ne lui est donc pas opposable ; qu'il est par ailleurs nul puisqu'il fait référence aux établissements du groupe, qui comprend 18 enseignes, alors que les 17 autres sociétés n'ont jamais été l'employeur de Monsieur [V] ; que par ailleurs la contrepartie financière n'est pas suffisante.

Ils soulignent également que la Cour de Cassation a sanctionné une clause de non-concurrence ayant subordonné le versement de la contrepartie financière aux circonstances de la rupture.

DISCUSSION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Attendu qu'il convient de rappeler en préambule que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » ;

que l''insertion d'une clause de non-concurrence dans un contrat de travail n'est valable que si elle est indispensable à la défense des intérêts légitimes de l'entreprise et si elle ne porte pas une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail.

que pour être valable et opposable au salarié, une clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps, dans l'espace et prévoir une contrepartie financière ; qu'elle doit également :

- laisser au salarié la possibilité de travailler

- respecter un critère de proportionnalité

- protéger les intérêts légitimes de l'entreprise

Attendu qu'en l'espèce le contrat de travail tout comme l'avenant du 23 janvier 2002 stipulaient une clause de non concurrence qui ne prévoyait aucune contrepartie financière ;

qu'en l'absence de contre partie financière, la clause de non concurrence figurant au contrat de travail et dans l'avenant du 23 janvier 2002 est nulle de plein droit ;

Mais attendu que le salarié a signé un document intitulé 'fiche annuelle de rémunération année 2003 'comportant les mentions suivantes :

'Avenant au contrat de travail : contrepartie financière à la clause de non concurrence'

Les parties conviennent de la présente clause se substituant à celle du contrat de travail en cours :

le salarié s'engage en cas de résiliation de son contrat, pour quelque cause que ce soit, à ne pas faire de concurrence directe ou indirecte dans le négoce de matériaux, bois et TP pendant une année

dans un rayon de 50 kms autour des agences dans lesquelles le salarié aura travaillé dans les deux dernières années.

Contrepartie financière : 3 premiers mois 1/10 ancienne rémunération, puis 3 mois 2/10 , puis 3/ 10 enfin 3 mois 4/10 moitié de cette indemnisation si licenciement pour faute grave, 1/4 si licenciement pour faute lourde

possibilité pour l'entreprise de délier de la clause et de l'indemnité jusqu'au dernier jour d'exécution du contrat

Clause pénale en cas violation de l'engagement :3 mois, plus remboursement indemnités perçues plus indemnisation préjudice ' ;

Attendu qu'il en résulte incontestablement que le salarié qui a signé ce document a bien accepté un avenant à son contrat de travail ; que la mention 'bon pour accord ' n'est pas indispensable pour matérialiser l'accord du salarié sur la clause de non concurrence ;

Attendu par ailleurs que si l'employeur ne peut dissocier les conditions d'ouverture de l'obligation de non concurrence de celles de son indemnisation, la stipulation selon laquelle la contre-partie de la clause sera minoré en cas de faute grave ou lourde , n'entraîne pas la nullité de la clause mais est simplement réputée non écrite ;

qu'en conséquence il y a lieu de considérer que l'indemnité prévue par l'avenant au contrat de travail était de 1/10 de l'ancienne rémunération du salarié pour les trois premiers mois qui suivaient la rupture de la relation contractuelle, puis de 2/10 pour les trois mois suivants, 3/10 pour les trois autres mois ;

Mais attendu que l'indemnisation prévue pendant les 9 premiers mois apparaît manifestement dérisoire et alors qu'elle prive le salarié de toute possibilité de travailler dans son seul secteur de compétence, au terme de 21 ans de vie professionnelle dans la même fonction et ce dans un rayon de 50 km ;

Attendu que le caractère dérisoire de ces sommes équivaut à une absence de contrepartie financière et remet en cause la validité de cette clause sans qu'il y ait lieu de vérifier les autres conditions de sa validité ;

qu'il convient par conséquent de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et de débouter la société SAMSE de toutes ses demandes ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'intimé.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entreprise ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de toutes autres demandes ;

CONDAMNE la société SAMSE aux dépens.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Madame RAULY, Conseiller pour le Président empêché, et par Madame KALAI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02762
Date de la décision : 17/09/2013

Références :

Cour d'appel de Grenoble 04, arrêt n°12/02762 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-17;12.02762 ?
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