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07/03/2013 | FRANCE | N°11/07574

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 07 mars 2013, 11/07574


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 11/07574





[C]



C/

ASSOCIATION [10]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 19 Novembre 2010

RG : F 10/00013











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 07 MARS 2013













APPELANT :



[J] [C]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 1

3]

[Adresse 2]

[Adresse 12]

[Localité 4]



comparant en personne,

assisté de Me Sylvie NAUDIN-MACON, avocat au barreau de LYON



substitué par Me Malvina BOISSONNET, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



ASSOCIATION [10]

Maison de retraite

[Adresse 3]

[Loca...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 11/07574

[C]

C/

ASSOCIATION [10]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 19 Novembre 2010

RG : F 10/00013

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 07 MARS 2013

APPELANT :

[J] [C]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 13]

[Adresse 2]

[Adresse 12]

[Localité 4]

comparant en personne,

assisté de Me Sylvie NAUDIN-MACON, avocat au barreau de LYON

substitué par Me Malvina BOISSONNET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

ASSOCIATION [10]

Maison de retraite

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par la SELARL EQUIPAGE (Me Christine STAGNARA), avocats au barreau de LYON

substituée par la SELARL EQUIPAGE (Me Jérome CHOMEL DE VARAGNES), avocats au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 11 Juin 2012

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 29 Novembre 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre

Hervé GUILBERT, Conseiller

Christian RISS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Marie BRUNEL, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 07 Mars 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS

L'Association [10] gère une maison de retraite située au [Adresse 3] ;

Le 16 août 2004, elle embauchait [J] [C] en tant que directeur de la structure avec le statut de cadre dirigeant bénéficiant d'une large délégation de pouvoirs jointe au contrat

Un contrat écrit à durée indéterminée était signé le 16 novembre 2004, lequel relevait du statut collectif du personnel de l'association ;

Outre la direction générale de la structure, [J] [C] avait pour mission celle de faire appliquer progressivement la grille des rémunérations prévues à la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 ;

À partir de la fin de l'année 2005 et tout au long de 2006, des différends opposaient [J] [C] au président de l'association, [X] [U], relativement à l'administration et au fonctionnement de l'association, ce qui donnait lieu à l'échange de courriers ;

Par lettre recommandée avec avis de réception du 13 décembre 2006, l'Association [10] convoquait [J] [C] à un entretien préalable au licenciement fixé au 22 décembre 2006 et le mettait à pied à titre conservatoire ;

L'entretien avait lieu le jour prévu ;

Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 décembre 2006, l'Association [10] licenciait [J] [C] pour faute grave dans les termes suivants :

"A la suite d'un audit que vous avez pris l'initiative de mandater auprès du cabinet d'avocats de l'association, nous avons constaté un certain nombre d·irrégularité en matière de droit social, qui sont inadmissibles à votre niveau de responsabilités, compte tenu des moyens dont vous bénéficiez, en particulier l'assistance du cabinet d'avocats dont vous ne suivez pas les conseils.

De même, en dépit de notre courrier du 10 novembre 2005, de nombreuses erreurs ont à nouveau été décelées dans la présentation du budget à nos financeurs, nous obligeant à reprendre le travail derrière vous.

Au même moment, nous découvrons que vous manquez gravement à votre obligation de loyauté:

Ainsi, dans le traitement du dossier très délicat du passage à la nouvelle grille de rémunération, vous refusez d'assumer vos propres responsabilités à l'égard du Conseil d'Administration susceptibles d'engager la responsabilité de l'Association, sans concertation préalable avec le Conseil d'Administration, et contenant des contrevérités juridiques dangereuses.

En outre, vous avez manifestement utilisé la marge de man'uvre qui vous était laissée pour vous accorder ou tenter de vous accorder des avantages injustifiés:

- la rémunération que vous avez présentée pour vous-même dans le budget 2007 est sensiblement supérieure à celle qui vous est due en application de votre contrat de travail, alors que nous vous avions clairement indiqué que nos ne pouvions prévoir d'augmentation au titre de cet exercice.

- vous vous êtes versé des indemnités indues de congés et de RTT non pris ainsi que pour un événement familial (2 jours pour mariage) pour un montant brut de 4.827,55 €; vos bulletins de paie de juillet 2006 et août 2006 ont d'ailleurs été manifestement maquillés.

· l'examen de vos notes de frais a mis en évidence de graves anomalies. A titre d'exemple, vous ne vous êtes jamais conformé à l'engagement que vous avez pris, en signant votre contrat de travail, de transférer votre résidence à proximité de l'Etablissement, vous bornant à louer une chambre à [Localité 6] pendant la semaine. Or, vous vous faites payer indûment des déplacements depuis [Localité 13] (jusqu'à [Localité 5], [Localité 8], voire même [Localité 6]) ou au contraire depuis [Localité 6] (jusqu'à [Localité 13]). Vous surestimez très largement les kilomètres parcourus (par exemple 115 pour [Localité 13]-[Localité 6] au lieu de 100 maximum, 122 pour [Localité 7]-[Localité 6] au lieu de 85 kilomètres maximum; de même vous notez des kilométrages fantaisistes pour effectuer des courses, que ce soit à [Localité 13] ou à [Localité 6]). De septembre 2004 à novembre 2006, ce ;ont plus de 6.600 km qui ont ainsi été indûment facturés, soit plus de 40% de vos déplacements professionnels! A cette surfacturation de kilomètres, vous avez par ailleurs appliqué une indemnité kilométrique inacceptable, car nettement supérieure au barème officiel. Il en résulte que le tableau rectificatif fait ressortir un montant indûment perçu de 4.534.24 €.

Enfin, vous proférez des accusations mensongères à mon égard et vous mettez en cause publiquement les fonctions et la personne du Trésorier de r Association, Monsieur [W].

Dans ces conditions, et compte-tenu des responsabilités qui vous sont confiées, la poursuite de nos relations est impossible, même pendant la durée limitée du préavis.

Vous voudrez bien régler par retour à l'Association les sommes indûment perçues à savoir 4.827,55 € de salaire brut soit 3.800 € net + 4.534,24 € = 8.334,24 €. " ;

PROCÉDURE

Contestant le licenciement et la qualité de cadre dirigeant, [J] [C] saisissait le conseil de prud'hommes de Belley le 30 mai 2007 en condamnation de l'Association [10] à lui payer diverses sommes ;

L'Association [10] comparaissait et formulait une demande reconventionnelle ,

L'audience du bureau de conciliation du 26 juin 2007 se terminait sur un échec ;

Un procès-verbal était dressé et signé par les parties, le président et le greffier ;

L'affaire était renvoyée au bureau de jugement du 5 février 2008, le demandeur devant conclure pour le 17 septembre 2007 et la défenderesse pour le 30 novembre 2007 ;

Par jugement du 5 février 2008, le bureau de jugement de la section de l'encadrement radiait l'affaire pour défaut de diligences des parties ;

Par lettre recommandée avec avis de réception de son avocat en date du 4 février 2010, [J] [C] demandait le rétablissement de l'affaire au rôle du conseil de prud'hommes de Belley ;

[J] [C] concluait à la condamnation de l'Association [10] à lui payer les sommes suivantes :

- 839,74 € à titre de rappel de salaires et congés payés pour les journées des 22, 26, 27 et 28 juillet 2004,

- 82.242,67 € à titre de rappel de salaires et congés payés sur heures supplémentaires,

- 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-rémunération des astreintes,

- 19.866 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 34.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10.926,40 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 955,37 € au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement,

- 1.696,70 € au titre du salaire afférent à la mise à pied conservatoire et des congés payés correspondants,

- 5.595 € en remboursement d'indemnités kilométriques,

- 1.500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'Association [10] soulevait la péremption de l'instance pour défaut de diligences du demandeur pendant plus de deux ans et concluait subsidiairement au fond au débouté total d'[J] [C] et à sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :

- 4.827,55 € à titre de répétition de l'indu sur salaires injustifiés,

- 4.534,24 € en remboursement de frais injustifiés,

- 3.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par jugement contradictoire du 19 novembre 2010, le conseil de prud'hommes de Belley, section de l'encadrement, disait l'instance périmée et rejetait les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

[J] [C] interjetait appel du jugement le 9 décembre 2010 ;

L'affaire inscrite au rôle de la cour sous le numéro 10 / 08872 faisait l'objet d'une radiation le 14 octobre 2011 ;

Elle était rétablie au rôle le 10 novembre 2001 à la demande de l'avocat d'[J] [C] sous le numéro 11 / 07574 ;

Réfutant la péremption, niant la qualité de cadre dirigeant, se prétendant créancier d'importants rappels de salaires sur heures supplémentaires et contestant le licenciement, [J] [C] conclut à la condamnation de l'Association [10] à lui payer les sommes suivantes :

- 839,74 € à titre de rappel de salaires et congés payés pour les journées des 22, 26, 27 et 28 juillet 2004,

- 82.242,67 € à titre de rappel de salaires et congés payés sur heures supplémentaires,

- 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-rémunération des astreintes,

- 19.866 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 34.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10.926,40 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 955,37 € au titre de l'indemnité contractuelle de licenciement,

- 1.696,70 € au titre du salaire afférent à la mise à pied conservatoire et des congés payés correspondants,

- 5.595 € en remboursement d'indemnités kilométriques,

- 3.500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Comme en première instance, l'Association [10] soulève la péremption de l'instance pour défaut de diligences du demandeur pendant plus de deux ans après la non-conciliation et conclut subsidiairement au fond au débouté total d'[J] [C] et à sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :

- 4.827,55 € à titre de répétition de l'indu sur salaires injustifiés,

- 4.534,24 € en remboursement de frais injustifiés,

- 3.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la péremption de l'instance

Attendu que selon l'article 386 du code de procédure civile l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ;

Attendu que selon l'article R. 1452-8 du code du travail en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ;

Attendu que ne constituent pas de telles diligences les indications relatives à la fixation des délais données aux parties par le bureau de conciliation en application de l'article R. 1454-18 du code du travail selon lequel le bureau de conciliation peut fixer le délai de communication des pièces ou des notes que les parties comptent produire à l'appui de leurs prétentions ;

Attendu que l'audience du bureau de conciliation du 26 juin 2007 se terminait sur un échec ;

Attendu qu'un procès-verbal était dressé et signé par les parties, le président et le greffier ;

Attendu que l'affaire était renvoyée au bureau de jugement du 5 février 2008, le demandeur devant conclure pour le 17 septembre 2007 et la défenderesse pour le 30 novembre 2007 ;

Attendu qu'un bulletin de convocation portant ces mentions était remis aux parties sans autre précision ;

Attendu que ce faisant la juridiction ne mettait aucune diligence à la charge des parties et notamment du demandeur ;

Attendu que dans ces conditions l'instance n'est pas atteinte par la péremption, ce qui rend [J] [C] recevable en ses demandes ;

Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;

Sur le rappel de salaires et congés payés des 22, 26, 27 et 28 juillet 2004

Attendu que l'Association [10] embauchait [J] [C] le 16 août 2004 en tant que directeur de la maison de retraite ;

Attendu qu'elle ne conteste pas dans ses écritures que celui-ci est venu travailler les 22, 26, 27 et 28 juillet 2004 pour une passation des informations par la directrice partante ;

Attendu que ce travail doit être rémunéré ;

Attendu qu' [J] [C] percevait à l'embauche un salaire brut de 2.943,47 € par mois ;

Attendu qu'il lui est ainsi dû la somme suivante :

2.943,47 € / 30 X 4 = 392,46 €, somme à laquelle s'ajoutent 39,25 € de congés payés, soit au total celle de 431,71 € ;

Attendu que la cour condamnera l'Association [10] à payer cette somme à [J] [C] ;

Sur la qualité de cadre dirigeant

Attendu que selon l'article 1 du contrat de travail les relations entre l'employeur et le salarié relevaient du statut collectif du personnel appliqué dans l'établissement ; qu'il s'ensuit qu'[J] [C] n'était soumis à aucun régime dérogatoire ;

Attendu que selon l'article 4 de ce contrat [J] [C] avait la qualité de cadre dirigeant et n'était pas soumis aux dispositions légales sur la durée du travail ;

Attendu que les parties ne se référaient cependant pas à l'article L. 212-15-1 devenu L. 3111-2 du code du travail ;

Attendu que selon l'article 5 de l'accord d'entreprise relatif à la réduction et l'aménagement du temps de travail signé le 30 juin 1999 la durée de travail des cadres demeure fixée à 39 heures hebdomadaires avec la contrepartie de 10 jours de repos supplémentaires par année civile ; qu'il est précisé au dernier alinéa que les dispositions de cet article ne concernent actuellement que la directrice de l'association ;

Attendu que selon l'article 5 de l'avenant signé le 22 novembre 1999 les dispositions de l'article 5 de l'accord du 30 juin 1999 sont annulées et remplacées par les suivantes :

'Les dispositions du présent article sont applicables au personnel de direction tel que défini par la grille de classification et de définition des postes annexée au statut collectif du personnel.

Compte tenu de l'autonomie dont dispose le personnel de direction pour organiser son temps de frayait, il est expressément convenu par les parties signataires qu'ils ne sont pas soumis à un horaire précis, et qu'ils gèrent librement leur temps de travail et sans contrainte par rapport aux horaires collectifs en vigueur dans l'entreprise.

Cependant, afin de faire bénéficier ces salariés de la réduction du temps de travail applicable à l'ensemble de l'Association, il leur est alloué une contrepartie spécifique sous la forme de dix jours de repos supplémentaires par année civile. En tout état de cause, et compte tenu, d'une part des jours de congés légaux et conventionnels et d'autre part des jours de repos prévus au présent article, la durée du travail des cadres de direction ne devra pas dépasser 217 jours travaillés par an.

L'application du présent article sera subordonnée à la signature d'une convention individuelle de forfait avec les salariés concernés.

Attendu que l'Association [10] objecte que ces dispositions sont inapplicables, puisqu'elle les a dénoncées le 20 septembre 2004 avec effet au 31 décembre 2005 ;

Attendu que celles-ci étaient cependant applicables le 16 août 2004, jour du début du contrat de travail ;

Attendu qu'il en ressort que les parties ne pouvaient dans le contrat de travail conférer à [J] [C] la qualité de cadre dirigeant mais seulement celle de cadre au forfait de 217 jours annuels ;

Attendu qu'aucune convention en ce sens ne fut signée, ce qui renvoyait les parties à l'article 5 de l'accord du 30 juin 1999 ;

Attendu que l'article 4 du contrat est ainsi inopérant ;

Attendu que le salarié n'avait donc pas la qualité de cadre dirigeant mais celle de cadre à 39 heures hebdomadaires ;

Sur les heures supplémentaires et les congés payés y afférents

Attendu que selon l'article L. 3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu que s'il résulte des dispositions de cet article que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Attendu qu'[J] [C] présente au soutien de sa demande un tableau des heures travaillées chaque semaine à partir de ses agendas annuels ;

Attendu que l'Association [10] n'établit pas pour sa part les heures réellement travaillées ;

Attendu que la cour fera ainsi droit à la demande de 82.242,67 € à titre de rappel de salaires et congés payés sur heures supplémentaires ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour non-paiement des astreintes

Attendu qu'[J] [C] n'établit pas avoir effectivement réalisé des astreintes ;

Attendu que la cour rejettera ainsi la demande ;

Sur la demande d'une indemnité pour travail dissimulé

Attendu que selon l'article L. 8221-3 du code du travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité, l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :

1° Soit n'a pas demandé son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;

2° Soit n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur ;

Attendu que selon l'article L. 8221-5 du même code est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'Article L1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'Article L3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre premier de la troisième partie ;

Attendu que selon l'article L8221-1 du même code sont interdits :

1° Le travail totalement ou partiellement dissimulé, défini et exercé dans les conditions prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;

2° La publicité, par quelque moyen que ce soit, tendant à favoriser, en toute connaissance de cause, le travail dissimulé ;

3° Le fait de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, aux services de celui qui exerce un travail dissimulé ;

Attendu que selon l'article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du même code a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;

Attendu qu'en sa qualité de directeur de la maison de retraite [J] [C] se versait son salaire, établissait les fiches de paie et les déclarations aux organismes sociaux, et payait les charges ;

Attendu qu'il ne peut tirer un avantage de ses propres omissions ;

Attendu que la cour rejettera la demande ;

Sur le licenciement

Attendu que la faute grave visée par les articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis, qu'elle soit légale, conventionnelle ou contractuelle ;

Attendu que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ;

Attendu que la lettre de licenciement, qui circonscrit le litige, contient les motifs suivants :

"A la suite d'un audit que vous avez pris l'initiative de mandater auprès du cabinet d'avocats de l'association, nous avons constaté un certain nombre d·irrégularités en matière de droit social, qui sont inadmissibles à votre niveau de responsabilités, compte tenu des moyens dont vous bénéficiez, en particulier l'assistance du cabinet d'avocats dont vous ne suivez pas les conseils.

De même, en dépit de notre courrier du 10 novembre 2005, de nombreuses erreurs ont à nouveau été décelées dans la présentation du budget à nos financeurs, nous obligeant à reprendre le travail derrière vous.

Au même moment, nous découvrons que vous manquez gravement à votre obligation de loyauté:

Ainsi, dans le traitement du dossier très délicat du passage à la nouvelle grille de rémunération, vous refusez d'assumer vos propres responsabilités à l'égard du Conseil d'Administration susceptibles d'engager la responsabilité de l'Association, sans concertation préalable avec le Conseil d'Administration, et contenant des contrevérités juridiques dangereuses.

En outre, vous avez manifestement utilisé la marge de man'uvre qui vous était laissée pour vous accorder ou tenter de vous accorder des avantages injustifiés:

- la rémunération que vous avez présentée pour vous-même dans le budget 2007 est sensiblement supérieure à celle qui vous est due en application de votre contrat de travail, alors que nous vous avions clairement indiqué que nos ne pouvions prévoir d'augmentation au titre de cet exercice.

- vous vous êtes versé des indemnités indues de congés et de RTT non pris ainsi que pour un événement familial (2 jours pour mariage) pour un montant brut de 4.827,55 €; vos bulletins de paie de juillet 2006 et août 2006 ont d'ailleurs été manifestement maquillés.

· l'examen de vos notes de frais a mis en évidence de graves anomalies. A titre d'exemple, vous ne vous êtes jamais conformé à l'engagement que vous avez pris, en signant votre contrat de travail, de transférer votre résidence à proximité de l'Etablissement, vous bornant à louer une chambre à [Localité 6] pendant la semaine. Or, vous vous faites payer indûment des déplacements depuis [Localité 13] (jusqu'à [Localité 5], [Localité 8], voire même [Localité 6]) ou au contraire depuis [Localité 6] (jusqu'à [Localité 13]). Vous surestimez très largement les kilomètres parcourus (par exemple 115 pour [Localité 13]-[Localité 6] au lieu de 100 maximum, 122 pour [Localité 7]-[Localité 6] au lieu de 85 kilomètres maximum; de même vous notez des kilométrages fantaisistes pour effectuer des courses, que ce soit à [Localité 13] ou à [Localité 6]). De septembre 2004 à novembre 2006, ce ;ont plus de 6.600 km qui ont ainsi été indûment facturés, soit plus de 40% de vos déplacements professionnels! A cette surfacturation de kilomètres, vous avez par ailleurs appliqué une indemnité kilométrique inacceptable, car nettement supérieure au barème officiel. Il en résulte que le tableau rectificatif fait ressortir un montant indûment perçu de 4.534.24 €.

Enfin, vous proférez des accusations mensongères à mon égard et vous mettez en cause publiquement les fonctions et la personne du Trésorier de l'Association, Monsieur [W].

Dans ces conditions, et compte-tenu des responsabilités qui vous sont confiées, la poursuite de nos relations est impossible, même pendant la durée limitée du préavis.

Vous voudrez bien régler par retour à l'Association les sommes indûment perçues à savoir 4.827,55 € de salaire brut soit 3.800 € net + 4.534,24 € = 8.334,24 €. " ;

Attendu que l'Association [10] gère une maison de retraite située au [Adresse 3] ;

Attendu qu'elle embauchait le 16 août 2004 [J] [C] en tant que directeur de la structure avec le statut de cadre dirigeant bénéficiant d'une large délégation de pouvoirs ;

Attendu qu'outre la direction générale de la structure, [J] [C] avait pour mission celle de faire appliquer progressivement la grille des rémunérations prévues à la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 ;

Attendu qu' à partir de la fin de l'année 2005 et tout au long de 2006, des différends opposaient [J] [C] au président de l'association, [X] [U], relativement à l'administration et au fonctionnement de l'association, ce qui donnait lieu à l'échange de courriers ;

Attendu que le premier grief est ainsi libellé : "A la suite d'un audit que vous avez pris l'initiative de mandater auprès du cabinet d'avocats de l'association, nous avons constaté un certain nombre d·irrégularités en matière de droit social, qui sont inadmissibles à votre niveau de responsabilités, compte tenu des moyens dont vous bénéficiez, en particulier l'assistance du cabinet d'avocats dont vous ne suivez pas les conseils.' ;

Attendu que cet audit réalisé à l'automne 2006 par [J] [C] avec l'accord du président de l'Association [10], dont seulement des extraits sont versés aux débats, révélait des dysfonctionnements anciens ; que rien n'établit qu'ils soient imputables à [J] [C], qui n'était le directeur que depuis l'été 2004 et ne pouvait agir sans l'aval du président et des administrateurs, qu'il n'a jamais eu ;

Attendu que le deuxième grief est ainsi libellé : 'De même, en dépit de notre courrier du 10 novembre 2005, de nombreuses erreurs ont à nouveau été décelées dans la présentation du budget à nos financeurs, nous obligeant à reprendre le travail derrière vous.' ;

Attendu que par ce courrier le président de l'association demandait au directeur une rigueur accrue dans la préparation du budget mais ne formulait que des griefs peu précis, lesquels ne sont établis par aucune autre pièce versée aux débats ;

Attendu que le troisième grief relatif à la déloyauté est ainsi libellé : '- la rémunération que vous avez présentée pour vous-même dans le budget 2007 est sensiblement supérieure à celle qui vous est due en application de votre contrat de travail, alors que nous vous avions clairement indiqué que nos ne pouvions prévoir d'augmentation au titre de cet exercice.' ;

Attendu que ce grief ne se fonde sur aucun élément précis et matériellement vérifiable :

Attendu que la quatrième grief est ainsi libellé :'- vous vous êtes versé des indemnités indues de congés et de RTT non pris ainsi que pour un événement familial (2 jours pour mariage) pour un montant brut de 4.827,55 €; vos bulletins de paie de juillet 2006 et août 2006 ont d'ailleurs été manifestement maquillés.' ;

Attendu qu'[J] [C], qui bénéficiait du statut collectif du personnel, était fondé à obtenir cette rémunération ;

Attendu que le cinquième grief est ainsi libellé : 'l'examen de vos notes de frais a mis en évidence de graves anomalies. A titre d'exemple, vous ne vous êtes jamais conformé à l'engagement que vous avez pris, en signant votre contrat de travail, de transférer votre résidence à proximité de l'Etablissement, vous bornant à louer une chambre à [Localité 6] pendant la semaine. Or, vous vous faites payer indûment des déplacements depuis [Localité 13] (jusqu'à [Localité 5], [Localité 8], voire même [Localité 6]) ou au contraire depuis [Localité 6] (jusqu'à [Localité 13]). Vous surestimez très largement les kilomètres parcourus (par exemple 115 pour [Localité 13]-[Localité 6] au lieu de 100 maximum, 122 pour [Localité 7]-[Localité 6] au lieu de 85 kilomètres maximum; de même vous notez des kilométrages fantaisistes pour effectuer des courses, que ce soit à [Localité 13] ou à [Localité 6]). De septembre 2004 à novembre 2006, ce ;ont plus de 6.600 km qui ont ainsi été indûment facturés, soit plus de 40% de vos déplacements professionnels! A cette surfacturation de kilomètres, vous avez par ailleurs appliqué une indemnité kilométrique inacceptable, car nettement supérieure au barème officiel. Il en résulte que le tableau rectificatif fait ressortir un montant indûment perçu de 4.534.24 €.' ;

Attendu qu'il était stipulé à l'article 10 du contrat de travail qu'[J] [C] s'engageait à résider à proximité de l'établissement à compter du 1er septembre 2004 ;

Attendu que le salarié ne respectait pas cette obligation, puisqu'il conservait son domicile situé à Caluire, à une centaine de kilomètres de [Localité 6], et se limitait à passer quelques nuits sur place dans une maison dépendant du séminaire ;

Attendu qu'il facturait ainsi à l'Association [10] de nombreux déplacements entre le domicile et le lieu de travail, alors qu'aucun remboursement n'était prévu au contrat ;

Attendu que pareillement il facturait à son employeur des déplacements plus lointains, qui n'étaient pas justifiés par les nécessités du service ;

Attendu que la faute du salarié est avérée de ce chef ;

Attendu que le sixième grief est ainsi libellé : 'Enfin, vous proférez des accusations mensongères à mon égard et vous mettez en cause publiquement les fonctions et la personne du Trésorier de l'Association, Monsieur [W].' ;

Attendu qu'[J] [C] était tenu envers l'Association [10] à une obligation générale et permanente de loyauté, laquelle était rappelée et précisée à l'article 9 du contrat ;

Attendu que l'article 9.2 précisait que 'Monsieur [C] s'engage à user des pouvoirs qui lui sont conférés par sa fonction avec loyauté, intégrité et dans l'intérêt exclusif de l'association.' ;

Attendu qu'[J] [C] adressait à [X] [U], président de l'Association [10], le 16 décembre 2006 deux courriers recommandés avec avis de réception agressifs dans lesquels il mettait en cause ses méthodes et la probité du comptable, monsieur [W] ; que sa situation de mis à pied conservatoire ne l'autorisait pas à rédiger de telles correspondances ;

Attendu qu'il ressort de l'attestation de madame [N], animatrice, qu'[J] [C] avait le 12 décembre 2006 affiché dans une salle de l'établissement accessible à tout le monde un mail adressé au président de l'association, dans lequel il mettait en cause les méthodes du comptable ;

Attendu que ce faisant [J] [C] manquait gravement à son obligation de loyauté ;

Attendu qu'il ressort des cinquième et sixième griefs de la lettre de licenciement qu'[J] [C] a commis des fautes, que le contexte de différends avec le président n'excuse pas, qui relevaient d'un manquement à l'obligation de loyauté et ne permettaient pas la continuation sereine et efficace du contrat de travail pendant le délai-congé contractuel de 3 mois ;

Attendu que le licenciement se fonde ainsi sur une faute grave, ce qui rend [J] [C] mal fondé en ses demandes de dommages-intérêts, des indemnités de rupture, du salaire afférent à la mise à pied conservatoire et des congés payés correspondants ;

Sur le remboursement d'indemnités kilométriques

Attendu que comme vu précédemment [J] [C] présentait des notes de frais abusives, ce qui le rend mal fondé en sa demande ;

Sur la demande reconventionnelle de répétition de l'indu sur salaires injustifiés

Attendu que l'Association [10] ne présente aucun élément précis au soutien de sa demande ;

Attendu que la cour entrera en voie de rejet ;

Sur la demande reconventionnelle de remboursement de frais kilométriques

Attendu que l'Association [10] fonde sa demande sur des calculs précis et non contestés ;

Attendu que la cour y fera droit ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que l'instance n'est pas périmée,

Dit qu'[J] [C] n'était pas cadre dirigeant,

Déclare le licenciement fondé sur une faute grave,

Condamne l'Association [10] à payer à [J] [C] les sommes suivantes :

- 431,71 € à titre de rappel de salaires et congés payés pour les journées des 22, 26, 27 et 28 juillet 2004,

- 82.242,67 € à titre de rappel de salaires et congés payés sur heures supplémentaires,

- 2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute [J] [C] de ses autres demandes,

Condamne [J] [C] à payer à l'Association [10] les sommes suivantes :

- 4.534,24 € en remboursement de frais injustifiés,

- 2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute l'Association [10] de sa demande de condamnation d'[J] [C] au remboursement de salaires indus,

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président,

Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 11/07574
Date de la décision : 07/03/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°11/07574 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-07;11.07574 ?
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