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03/12/2009 | FRANCE | N°07MA00208

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2009, 07MA00208


Vu le recours, enregistré le 22 janvier 2007, présentée pour le MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°0205519 du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déchargé M. A des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 ;

2°) de rétablir l'imposition de M. A ;

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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fi...

Vu le recours, enregistré le 22 janvier 2007, présentée pour le MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°0205519 du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déchargé M. A des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 ;

2°) de rétablir l'imposition de M. A ;

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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisées à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2009 :

- le rapport de M. Iggert, conseiller,

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant qu'à la suite d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1996 et 1997, M. A a été regardé comme domicilié fiscalement en France et a fait l'objet de redressements à raison des revenus dont l'origine demeurait indéterminée ; que le ministre interjette appel du jugement en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déchargé M. A des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et les pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 ;

Sur les conclusions d'appel du ministre :

Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressement qui, selon l'article L. 48, marque l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un débat contradictoire avec le contribuable sur les éléments qu'il envisage de retenir ; qu'il résulte de l'instruction qu'il y a eu, entre l'administration et le contribuable plusieurs entretiens, le 19 mai 1999, le 7 juillet 1999 et le 26 octobre 1999 ; que les entretiens en cause, antérieurs à l'envoi de la notification de redressements, ont notamment porté sur la domiciliation fiscale de l'intéressé ainsi que cela résulte des comptes rendus d'entretien signés par le contribuable desquels il ressort notamment que le vérificateur a demandé au contribuable dans quel pays se situait son domicile, quels documents il pouvait présenter pour justifier que le centre de ses intérêts vitaux était situé au Bénin et a pointé les incohérences de ses déclarations concernant la réalité de son domicile au Bénin ; que, dans ces circonstances, le moyen tiré de ce que M. A n'aurait pas bénéficié d'un débat contradictoire relatif à sa domiciliation fiscale manque en fait et le tribunal devait écarter le moyen tiré de l'irrégularité de l'examen sur ce point ; qu'en conséquence, ainsi que le soutient le ministre, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé la procédure irrégulière pour ce motif ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A tant devant le tribunal administratif qu'en appel ;

Sur les autres moyens :

En ce qui concerne la domiciliation fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts applicable aux années en cause : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus ; qu'aux termes du 1 de l'article 4 B du même code : Sont considérés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée au non, à moins qu'ils ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c) celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques ; que, pour l'application des dispositions du § a du 1 de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, qui a la double nationalité française et béninoise, était locataire d'un appartement situé à Cassis jusqu'au 31 août 1996 dont il réglait les mensualités et pour lequel Mme Marull, sa compagne et la mère de ses enfants, avec laquelle il s'est par ailleurs marié postérieurement aux périodes vérifiés, avait fait installer une ligne téléphonique dont il réglait certaines factures ; que Mme Marull a ensuite résidé à La Ciotat, dans un logement pour lequel elle a également ouvert une ligne de téléphone et qu'elle a indiqué comme étant l'adresse de la fille naturelle de M. A lors de son inscription à l'école maternelle de La Ciotat ; que M. A a souscrit un abonnement à une chaîne de télévision française pour cette adresse ; que, par ailleurs, il ressort des cachets figurant sur son passeport et mentionnant les dates d'entrée et de sortie du territoire français ainsi que des opérations bancaires effectuées par l'intermédiaire de sa carte bancaire qu'il a résidé 209 jours en France en 1996 et 211 jours en 1997 ; qu'il exerçait par ailleurs les fonctions de gérant associé de deux sociétés françaises dont une filiale était implantée au Bénin, qu'il percevait des indemnités journalières versées par l'établissement national des invalides de la marine au titre d'un accident de travail, disposait de comptes bancaires régulièrement mouvementés en France et avait acquis en France au cours de chacune des années vérifiées un bateau, amarré à La Ciotat, et un véhicule automobile en France ; que si M. A fait valoir que le calcul auquel s'est livré l'administration comporterait des erreurs dès lors que des périodes durant lesquelles sa carte bancaire a été utilisée correspondraient à des voyages à l'étranger, il n'apporte pas une quelconque pièce de nature à établir et préciser l'existence des erreurs alléguées dont il se prévaut ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance qu'il se rende au Bénin pour l'exercice d'une activité professionnelle et l'éventualité que sa fille serait également scolarisée une partie de l'année à Cotonou, M. A doit être regardé comme disposant en France de son foyer ou de son lieu de séjour principal, au sens de l'article 4 A précité du code général des impôts, mais également au sens de l'article 2 de la convention signée le 27 février 1975 entre la France et le Bénin dont il se prévaut, aux termes duquel : Une personne physique est domiciliée, au sens de la présente Convention, au lieu où elle a son foyer permanent d'habitation, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer le domicile d'après l'al. qui précède, la personne physique est réputée posséder son domicile dans celui des Etats contractants où elle séjourne le plus longtemps (...) ; qu'ainsi, M. A était passible de l'impôt sur le revenu à raison de la localisation en France de son domicile fiscal ;

En ce qui la régularité de la procédure :

S'agissant de la taxation d'office :

Considérant qu'aux termes de l'article 170 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : 1. En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, toute personne imposable audit impôt est tenue de souscrire et de faire parvenir à l'administration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices et de ses charges de famille. Toutefois, dans tous les cas où le contribuable n'est pas imposable à raison de l'ensemble de ses revenus ou bénéfices, la déclaration est limitée à l'indication de ceux de ces revenus ou bénéfices qui sont soumis à l'impôt sur le revenu (...) ; qu'aux termes de l'article 170 bis du même code : Sont assujetties à la déclaration prévue au 1 de l'article 170, quel que soit le montant de leur revenu : 1° Les personnes qui possèdent (...) une voiture de tourisme destinée exclusivement au transport de personnes (...) ; 3° Les personnes qui ont à leur disposition une ou plusieurs résidences secondaires, permanentes ou temporaires, en France ou hors de France ;

Considérant que peuvent seules être soumises aux obligations déclaratives prévues aux articles 170 et 170 bis du code général des impôts les personnes qui sont passibles de l'impôt sur le revenu, soit qu'elles doivent être regardées comme ayant en France leur domicile fiscal, par application notamment des dispositions de l'article 4 B dudit code, soit qu'elles disposent de revenus de source française ou de revenus dont une convention internationale attribue l'imposition à la France ; que, toutefois, l'administration n'est pas tenue de recueillir des éléments permettant de supposer qu'une personne est domiciliée fiscalement en France préalablement à l'envoi d'une mise en demeure ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, M. A était passible de l'impôt sur le revenu à raison de la localisation en France de son domicile fiscal et était ainsi soumis aux obligations déclaratives prévues aux articles 170 et 170 bis du code général des impôts ; que l'administration l'a mis régulièrement en demeure, le 31 mars 1999, de souscrire dans un délai de trente jours une déclaration de ses revenus au titre des années 1996 et 1997, sans avoir eu à réunir d'éléments relatifs à sa domiciliation fiscale ; qu'en l'absence de réponse satisfaisante dans le délai imparti, M. A s'est placé, en vertu des dispositions combinées du 1° de l'article L. 66 et de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales, en situation de taxation d'office ;

S'agissant de la notification des redressements :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination ;

Considérant, en premier lieu, que si M. A fait valoir que la prescription au titre de l'année 1996 ne pouvait être interrompue par la notification de redressement du 15 décembre 1999 dès lors que ladite notification comportait la référence erronée à l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales, il résulte de l'instruction qu'aucune référence à cet article n'est faite dans ladite notification de redressement ; qu'ainsi, le moyen, qui manque en fait, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi que le soutient le requérant, la notification de redressement du 15 décembre 1999 se borne à mentionner que M. A n'a pas apporté la preuve de sa domiciliation fiscale au Bénin pour motiver l'imposition en France de ses revenus ; que toutefois, ce document comportait également les modalités de détermination des bases et éléments servant au calcul des impositions en litige ; que la notification de redressement en cause a pu valablement suspendre la prescription ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que si la notification de redressement du 15 décembre 1999 était incorrectement libellée aux noms de M. ou Mme A , et non du seul requérant comme elle aurait dû l'être dès lors qu'il n'était pas marié au cours de la période vérifiée, cette circonstance n'a pas été de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, ladite notification, satisfaisant ainsi aux prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, est bien parvenue au contribuable, lequel d'ailleurs ne s'est pas mépris sur ce que le service le regardait comme le seul redevable légal des impositions en cause ; que le moyen doit par suite être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que si M. A indique qu'une partie des sommes regardées comme des revenus dont l'origine est demeurée indéterminée serait constituée de salaires de la société Oceamer Bénin et de transferts de sommes du Bénin, il n'apporte pas un quelconque élément de preuve de la nature et de l'origine des sommes en cause ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a déchargé M. A des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996 et 1997, et, par suite est fondé à demander que lesdites cotisations et les pénalités y afférentes soient remises à la charge de ce dernier ; que M. A ne peut, en tout état de cause, prétendre au versement d'une quelconque somme en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Marseille du 2 octobre 2006 est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et les pénalités y afférentes auxquelles M. A a été assujetti au titre des années 1996 et 1997 sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions d'appel de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT et à M. Claude A.

Copie en sera adressée à Me Dupays et au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N°07MA00208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA00208
Date de la décision : 03/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Julien IGGERT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : DUPAYS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-12-03;07ma00208 ?
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