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18/02/2010 | FRANCE | N°09NC01206

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 18 février 2010, 09NC01206


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 août 2009, présentée pour la SA SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, dont le siège est 1 rue de la Libération à Docelles (88460), par Me Dasse ; la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600823 en date du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à condamner l'OPHLM de Saint-Dizier à lui verser une indemnité de 93 972,59 euros ;

2°) de condamner l'OPHLM de Saint-Dizier à lui verser la somme de 93 972,59 euros, au

gmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2005 ;

3°) de met...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 août 2009, présentée pour la SA SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, dont le siège est 1 rue de la Libération à Docelles (88460), par Me Dasse ; la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600823 en date du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à condamner l'OPHLM de Saint-Dizier à lui verser une indemnité de 93 972,59 euros ;

2°) de condamner l'OPHLM de Saint-Dizier à lui verser la somme de 93 972,59 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2005 ;

3°) de mettre à la charge de l'OPHLM de Saint-Dizier une somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, le courrier du 20 octobre 2005 constitue une réclamation préalable au sens de l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services ;

- la lettre du 22 février 2006 constitue un simple courrier de relance qui ne saurait être pris en compte pour apprécier un éventuel dépassement du délai de réclamation ;

- la dernière facturation du 31 décembre 2004 ne saurait également faire courir le délai de réclamation ;

- le délai de recours contentieux n'était pas épuisé dès lors que sa réclamation a donné lieu à une décision implicite de rejet ;

- elle est fondée à demander à être indemnisée à hauteur des prestations non facturées par l'OPHLM de Saint-Dizier ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2009, présenté pour l'office public de l'habitat de Saint-Dizier par Me Bernard ; l'office public de l'habitat de Saint-Dizier conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 € soit mise à la charge de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que le courrier du 20 octobre 2005 n'est pas une réclamation préalable au sens de l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales précité, puisqu'il n'a pas été adressé à la personne responsable du marché et, qu'en outre, il n'expose pas les motifs de la demande ;

- le courrier du 22 février 2006 ne constitue pas davantage un mémoire en réclamation au sens de l'article 34.1 du CCAG ;

- la requête est également irrecevable en tant qu'elle n'est dirigée contre aucune décision identifiée ou identifiable ;

- la société était forclose pour adresser un mémoire en réclamation, le courrier du 22 février 2006, à le supposer tel, étant en tout état de cause tardif ;

- subsidiairement, la requête de la société appelante était de toute façon irrecevable dès lors qu'elle n'a pas contesté le décompte définitif du marché dans le délai d'un mois imparti en application de l'article 8.2 du CCAG ;

- plus subsidiairement, la demande est infondée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 décembre 2009, présenté pour la société Deca France, venant aux droits de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE ; la société Deca France conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le courrier du 20 octobre 2005 ne constituait pas une réclamation préalable au motif qu'il n'aurait pas été adressé à la personne responsable du marché ;

- en toute hypothèse, le délai de réclamation de 30 jours n'est assorti d'aucune sanction en cas d'inobservation ;

- les factures émises en décembre 2004 ne sauraient constituer le solde du marché public, de sorte que ne sont pas irrecevables les demandes présentées plus de 30 jours après leur mandatement ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 18 janvier 2010, présenté pour l'office public de l'habitat de Saint-Dizier, qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense et soutient en outre que les moyens énoncés par la société requérante dans son mémoire en réplique ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2010 :

- le rapport de M. Vincent, président de chambre,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Carré, représentant Me Bernard, avocat de l'office public de l'habitat de Saint-Dizier ;

Vu la note en délibéré produite le 29 janvier 2010 pour l'office public de l'habitat de Saint-Dizier ;

Considérant que la société K' Propreté a conclu le 5 mai 2003 avec l'OPHLM de Saint-Dizier un marché à bons de commande d'une durée d'un an renouvelable en vue de la réalisation de prestations de nettoyage et de sortie des conteneurs des bâtiments, comportant un montant minimal de prestations de 29 000 heures ; que l'exécution du marché, qui a pris fin le 30 avril 2004, a été reprise par la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE par avenant du 5 avril 2004 ; que ladite société demande à être indemnisée à raison de la perte de chiffre d'affaires résultant du non-respect du nombre minimal d'heures prévu pendant la période du 1er mai 2003 au 30 avril 2004 ;

Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :

Considérant qu'aux termes de l'article 34-1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services, auquel les parties ont entendu se référer : Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de 30 jours compté à partir du jour où le différend est apparu ;

Considérant que, par correspondance en date du 20 octobre 2005, le conseil de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE a adressé au Cabinet d'avocats Freche et Associés à l'attention de Me Bernard, une correspondance par laquelle il lui demandait de bien vouloir transmettre à l'OPHLM de Saint-Dizier par votre intermédiaire une facture jointe représentant, selon elle, le solde des sommes qui lui sont dues en exécution du marché ; qu'il ressort des termes mêmes de cette correspondance, qui manifestait ainsi un différend entre les parties, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, que celle-ci était destinée à être portée à la connaissance du représentant légal de l'OPHLM de Saint-Dizier ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué que le Cabinet Freche et Associés, dont il est constant qu'il représentait les intérêts de l'OPHLM de Saint-Dizier dans une instance en cours devant le conseil de prud'hommes opposant la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE à certains de ses salariés, aurait fait connaître à celle-ci qu'il ne s'estimait pas mandaté pour transmettre cette correspondance au représentant légal de cet organisme ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour rejeter comme irrecevables les conclusions indemnitaires de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a estimé que le courrier précité du 20 octobre 2005 ne pouvait être regardé comme un mémoire en réclamation régulièrement déposé dès lors qu'il avait été adressé à l'avocat de l'OPHLM de Saint-Dizier et non à la personne responsable du marché ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les autres fins de non-recevoir opposées par l'OPHLM de Saint-Dizier devant le tribunal administratif et devant la Cour ;

Considérant, en premier lieu, que, par la correspondance précitée, le conseil de la société requérante précisait à l'avocat de l'OPHLM de Saint-Dizier avoir reçu pour instruction de poursuivre le recouvrement de la créance revendiquée d'un montant de 93 972,59 € faute de mandatement de celle-ci dans un délai de trois semaines ; que, comme il a été dit ci-dessus, cette correspondance précisait en outre que la créance dont le règlement était revendiqué était due en exécution du marché, le calcul de cette somme effectué au bas du document joint faisant par ailleurs apparaître qu'elle correspondait à la différence entre le montant résultant selon elle du contrat annuel, soit 502 224,32 €, et le montant facturé, sous déduction de deux avoirs ; que cette correspondance doit ainsi être regardée, au regard de son contenu, comme constituant un mémoire en réclamation au sens des dispositions précitées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8.2 du cahier des clauses administratives générales susrappelé : La personne responsable du marché accepte ou rectifie le décompte, la facture ou le mémoire. Elle le complète éventuellement en faisant apparaître les avances à rembourser, les pénalités, les primes et les réfactions imposées. Le montant de la somme à régler au titulaire est arrêté par la personne responsable du marché. Il est notifié au titulaire si le décompte, la facture ou le mémoire a été modifié ou s'il a été complété... Passé un délai de 30 jours à compter de cette notification, le titulaire est réputé, par son silence, avoir accepté ce montant ;

Considérant que l'OPHLM de Saint-Dizier fait valoir que la réclamation susrappelée du 20 octobre 2005 serait en tout état de cause tardive dès lors que les deux dernières factures afférentes à l'exécution du marché sont datées du 31 décembre 2004 et qu'il en a assuré le règlement le 31 janvier 2005 ; que, toutefois, la seule circonstance que ces deux factures soient chronologiquement les dernières à avoir été adressées à ce titre ne saurait, en l'absence de toute mention sur celles-ci ou de tout autre élément faisant apparaître qu'elles auraient le caractère d'un projet de décompte final, les faire regarder comme traduisant l'intention de la société requérante d'arrêter ce faisant les comptes entre les parties ; que, par suite, l'expiration d'un délai de 30 jours à compter du règlement de ces factures ne saurait tout au plus valoir acceptation tacite de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE qu'à concurrence du règlement des prestations mentionnées sur celles-ci ; qu'en tout état de cause, il ressort des stipulations précitées que le délai de trente jours au terme duquel le titulaire est réputé avoir accepté le règlement ne court qu'à compter de la notification par la personne responsable du marché du montant de la somme à régler, notification qui n'est elle-même prévue que si ce dernier entend modifier ou compléter ce montant ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué que la somme réglée aurait fait l'objet d'une notification en application des stipulations précitées ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée du chef de l'expiration du délai de 30 jours suivant le règlement des deux factures du 31 décembre 2004 doit être écartée ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 34.2 du CCAG susrappelé : La personne publique dispose d'un délai de deux mois compté à partir de la réception du mémoire de réclamation pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation ; qu'aucune tardiveté ne saurait être opposée à la demande de première instance de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE tendant à la condamnation de l'OPHLM de Saint-Dizier à lui verser la somme précitée de 93 972,59 €, enregistrée le 19 avril 2006 au greffe du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, dès lors que le délai de recours contentieux de deux mois ne court pas, en matière de plein contentieux, à l'encontre des décisions implicites de rejet, conformément aux dispositions de l'article R 421-3 du code de justice administrative, et qu'il est constant que la réclamation précitée du 20 octobre 2005 n'a donné lieu à aucune décision expresse de rejet ; qu'il résulte de ce qui précède que l'office public de l'habitat de Saint-Dizier n'est par ailleurs pas fondé à soutenir que la demande susrappelée de la société requérante ne serait dirigée contre aucune décision, contrairement aux dispositions de l'article R 421-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme irrecevable la requête de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE ; qu'ainsi, ledit jugement doit être annulé ;

Sur le bien-fondé des conclusions indemnitaires :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer au Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le jugement des conclusions indemnitaires de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande l'office public de l'habitat de Saint-Dizier au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'office public de l'habitat de Saint-Dizier une somme de 1 500 € à verser à la SOCIETE DECA FRANCE, venant aux droits de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 11 juin 2009 est annulé.

Article 2 : L'office public de l'habitat de Saint-Dizier versera à la société DECA FRANCE, venant aux droits de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE, une somme de 1 500 € (mille cinq cents) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l'office public de l'habitat de Saint-Dizier tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les parties sont renvoyées devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne afin qu'il soit statué sur le bien-fondé des conclusions indemnitaires de la SOCIETE MAINTENANCE ET PROPRETE.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE DECA FRANCE et à l'office public de l'habitat de Saint-Dizier.

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09NC01206


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01206
Date de la décision : 18/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DASSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-02-18;09nc01206 ?
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