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07/03/2019 | FRANCE | N°17LY00198

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 07 mars 2019, 17LY00198


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 février 2014 par laquelle le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a mis fin à son contrat à compter du 3 mars 2014.

Par un jugement n° 1404580 du 16 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 janvier et 9 novembre 2017, M. A..., représenté par la SCP Fabiani, Luc-Thaler,

Pinatel, avocat au Conseil d'État, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 février 2014 par laquelle le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a mis fin à son contrat à compter du 3 mars 2014.

Par un jugement n° 1404580 du 16 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 janvier et 9 novembre 2017, M. A..., représenté par la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat au Conseil d'État, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 novembre 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée du 27 février 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué, qui ne mentionne pas le nom des magistrats qui l'ont rendu, est irrégulier ;

- le jury qui a apprécié son aptitude professionnelle, qui ne comprenait pas de personne compétente en matière d'insertion professionnelle, était irrégulièrement composé ;

- la décision litigieuse constituant un licenciement en cours de stage, son dossier aurait dû lui être communiqué ;

- la commission de formation de l'Infoma et la commission administrative paritaire se sont irrégulièrement fondées, pour rendre leurs avis défavorables, sur les seuls éléments censés être intervenus au cours de la période initiale du stage probatoire ;

- le ministre ne pouvait légalement prononcer la fin de son contrat sans avoir, durant la période de prolongation du stage initial, ni procédé à son évaluation personnelle, ni adopté la moindre mesure destinée à favoriser son intégration professionnelle ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il a fait l'objet de mesures discriminatoires.

Par des mémoires enregistrés le 9 novembre 2017 et le 26 novembre 2018, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement, présenté au-delà du délai d'appel, n'est pas recevable ;

- le licenciement de l'intéressé est intervenu en fin de stage et l'administration n'était tenue à aucune communication de son dossier ;

- l'intéressé a réalisé sa prolongation de stage dans un service adapté à son handicap et l'administration a mis en oeuvre des moyens permettant son intégration ;

- la commission de formation de l'Institut national de formation des personnels du ministère chargé de l'agriculture (Infoma) et la commission administrative paritaire se sont prononcées également sur des éléments correspondant à la période de renouvellement de stage de l'intéressé ;

- compte tenu du comportement professionnel de l'intéressé, incompatible avec l'exercice des fonctions de technicien, le refus de le titulariser n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il n'a fait l'objet d'aucune discrimination.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- le décret n° 95-979 du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- le décret n° 97-270 du 19 mars 1997 portant création et organisation de l'Institut national de formation des personnels du ministère de l'agriculture ;

- l'arrêté du 12 mai 1997 relatif aux modalités d'enseignement professionnel et de titularisation des techniciens stagiaires des services du ministère chargé de l'agriculture ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., travailleur handicapé, a été recruté, en application des dispositions relatives à l'emploi des personnes handicapées dans la fonction publique de l'État, par contrat du 20 septembre 2011, pour une durée de deux ans afin d'effectuer un stage en qualité de technicien supérieur des services du ministère de l'agriculture. Il a été affecté à ce titre à l'Institut national de formation des personnels du ministère chargé de l'agriculture (Infoma). A l'issue de cette période, l'administration ne l'a pas jugé apte à être titularisé et a renouvelé son contrat jusqu'au 3 mars 2014, par un avenant du 24 janvier 2014. Au terme de cette prolongation de stage, par décision du 27 février 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a refusé de titulariser M. A... et a mis fin à son contrat à compter du 3 mars 2014. M. A... relève appel du jugement du 16 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 février 2014.

2. Aux termes de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'État : " (...) II. - Les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du corps dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. (...) ".

3. Aux termes de l'article 8 du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l'article 27 de la loi précitée : " A l'issue du contrat, l'appréciation de l'aptitude professionnelle de l'agent par l'autorité disposant du pouvoir de nomination est effectuée au vu du dossier de l'intéressé et après un entretien de celui-ci avec un jury organisé par l'administration chargée du recrutement. (...) II. - Si l'agent, sans s'être révélé inapte à exercer ses fonctions, n'a pas fait la preuve de capacités professionnelles suffisantes, l'autorité administrative ayant pouvoir de nomination prononce le renouvellement du contrat pour la période prévue à l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, après avis de la commission administrative paritaire du corps au sein duquel l'agent a vocation à être titularisé /. Une évaluation des compétences de l'intéressé est effectuée de façon à favoriser son intégration professionnelle /. Si l'appréciation de l'aptitude de l'agent ne permet pas d'envisager qu'il puisse faire preuve de capacités professionnelles suffisantes dans le corps dans lequel il a vocation à être titularisé, le renouvellement du contrat peut être prononcé, après avis de la commission administrative paritaire de ce corps, en vue d'une titularisation éventuelle dans un corps de niveau hiérarchique inférieur. / III. - Si l'appréciation de l'aptitude de l'agent ne permet pas d'envisager qu'il puisse faire preuve de capacités professionnelles suffisantes, le contrat n'est pas renouvelé, après avis de la commission administrative paritaire du corps concerné. L'intéressé peut bénéficier des allocations d'assurance chômage en application de l'article L. 351-12 du code du travail ".

4. Aux termes de l'article 9 de ce texte : " La situation de l'agent dont le contrat a fait l'objet d'un renouvellement dans les conditions posées soit par l'article 7 soit par le II ou par l IV de l'article 8 ou par le II de l'article 8 du présent décret est examinée à l'issue de cette période : / s'il a été déclaré apte à exercer les fonctions, l'agent est titularisé dans les conditions posées au I ou au IV de l'article 8. La prise en compte de l'ancienneté acquise s'effectue dans les conditions prévues par le statut particulier. Cette prise en compte est limitée à la durée initiale du contrat avant renouvellement une année pour les agents mentionnés au II de l'article 8 ; / si l'agent n'est pas déclaré apte à exercer les fonctions, le contrat ne pouvant être renouvelé, l'intéressé peut bénéficier des allocations d'assurance chômage mentionnées au III de l'article 8 du présent décret ".

5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, si un agent recruté sur le fondement de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 et dont le contrat a été renouvelé sur le fondement du II de l'article 8 du décret du 25 août 1995 peut faire l'objet, à l'issue de la période complémentaire d'exécution de son contrat, d'un refus de titularisation et, par suite, d'un licenciement, c'est seulement dans le cas où, malgré les mesures prises pour favoriser son intégration professionnelle après qu'il a été procédé à une évaluation de ses compétences, il apparaît en définitive inapte à exercer ses fonctions.

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... ait bénéficié, lors du renouvellement de son contrat, d'une évaluation de ses compétences sur la base de laquelle des mesures adaptées à son handicap et destinées à favoriser son intégration professionnelle auraient été définies. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation soutient que les motifs qui ont fondé la prolongation du stage de l'intéressé relevaient uniquement de difficultés relationnelles et comportementales ne justifiant ni procédure d'évaluation spécifique de ses compétences ni mesure particulière de nature à favoriser son intégration. Toutefois, cette circonstance, à supposer même qu'elle ait pu être établie en l'absence de l'évaluation des compétences susmentionnée, n'était pas de nature à dispenser l'administration de faire application des dispositions du II de l'article 8 précité du décret du 25 août 1995.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 février 2014 par laquelle le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a mis fin à son contrat.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1404580 du 16 novembre 2016 du tribunal administratif de Lyon et la décision du 27 février 2014 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sont annulés.

Article 2 : L'État versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 14 février 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

Mme Beytout, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 mars 2019.

5

N° 17LY00198


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY00198
Date de la décision : 07/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Nominations. Titularisation.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : AVOCATS OUEST CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-03-07;17ly00198 ?
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