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26/03/2012 | FRANCE | N°340466

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 26 mars 2012, 340466


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juin et 10 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Joyce A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA03654 du 8 avril 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement n° 0313815 du 17 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assu

jettie au titre des années 1994, 1995 et 1996 ;

2°) réglant l'affaire a...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juin et 10 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Joyce A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA03654 du 8 avril 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement n° 0313815 du 17 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994, 1995 et 1996 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 62 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la décision n° 2010-88 QPC du 21 janvier 2011 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de Mme A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1994 et 1995 et d'un contrôle sur pièces au titre de l'année 1996, à l'issue desquels ses revenus imposables au titre de ces trois années ont été évalués forfaitairement d'après certains éléments de son train de vie par application de l'article 168 du code général des impôts ; que Mme A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 8 avril 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement du 17 juin 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994, 1995 et 1996 en conséquence de ces redressements ;

Considérant qu'aux termes de l'article 168 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. En cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu est portée à une somme forfaitaire déterminée en appliquant à certains éléments de ce train de vie le barème ci-après (...) / Les éléments dont il est fait état pour la détermination de la base d'imposition sont ceux dont ont disposé, pendant l'année de l'imposition, les membres du foyer fiscal (...) / 2 bis. La disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus est établie lorsque la somme forfaitaire qui résulte de l'application du barème et de la majoration prévus au 1 et 2 excède d'au moins un tiers, pour l'année de l'imposition et l'année précédente, le montant du revenu net global déclaré y compris les revenus exonérés ou taxés selon un taux proportionnel ou libérés de l'impôt par l'application d'un prélèvement. / 3. Le contribuable peut apporter la preuve que ses revenus ou l'utilisation de son capital ou les emprunts qu'il a contractés lui ont permis d'assurer son train de vie " ;

Considérant, en premier lieu, que si les dispositions du 3 de l'article 168 du code général des impôts ne font pas obstacle à ce que le contribuable, pour contester les bases d'imposition retenues par l'administration, apporte la preuve que le financement des éléments de train de vie qui ont été retenus pour l'application du barème n'implique pas la perception des revenus définis forfaitairement, ainsi qu'il résulte de la réserve d'interprétation dont la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-88 QPC du 21 janvier 2011 a assorti la déclaration de conformité à la Constitution des dispositions litigieuses, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation en ne répondant pas au moyen de la requérante, qui était inopérant, tiré de ce que l'administration n'établissait pas elle-même que les éléments de train de vie retenus pour l'évaluation forfaitaire de ses revenus avaient été financés par d'autres moyens que ceux qu'elle invoquait ;

Considérant, en second lieu, que le contribuable dont les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu ont été évaluées forfaitairement d'après certains éléments de son train de vie peut, s'il entend contester ces bases, apporter la preuve, prévue par les dispositions du 3 de l'article 168 du code général des impôts, de la manière dont, au cours de chaque année d'imposition concernée, il a pu financer, en tout ou partie, le train de vie correspondant à cette évaluation ; que, pour apporter une telle preuve, qui porte nécessairement sur les ressources dont le contribuable a disposé et qu'il a effectivement utilisées pour assurer son train de vie au cours des années d'imposition litigieuses, il doit justifier non seulement de l'existence des ressources qu'il invoque mais aussi de leur nature et de leur origine ; que, dès lors, la cour n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que Mme A n'apportait pas la preuve qui lui incombait en se bornant à produire un état cumulant les dépenses qu'elle aurait exposées au cours de cette même période ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Joyce A et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 340466
Date de la décision : 26/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCÉDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGÉE - RÉSERVES D'INTERPRÉTATION DONT UNE DÉCISION PRISE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL STATUANT SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 61-1 DE LA CONSTITUTION ASSORTIT LA DÉCLARATION DE CONFORMITÉ D'UNE DISPOSITION LÉGISLATIVE - PORTÉE (SOL - IMPL - ) [RJ1].

54-06-06 Les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient le juge administratif pour l'application et l'interprétation de cette disposition (sol. impl.).

PROCÉDURE - RÉSERVES D'INTERPRÉTATION DONT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ASSORTIT LA DÉCLARATION DE CONFORMITÉ À LA CONSTITUTION - AUTORITÉ DE CHOSE JUGÉE - EXISTENCE (SOL - IMPL - ) [RJ1].

54-10 Les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient le juge administratif pour l'application et l'interprétation de cette disposition (sol. impl.).


Références :

[RJ1]

Rappr., pour l'autorité reconnue aux réserves assortissant une décision du Conseil constitutionnel statuant sur le fondement de l'article 61 de la Constitution, CE, Assemblée, 11 mars 1994, S.A. « La Cinq », n° 115052, p. 117.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 mar. 2012, n° 340466
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Romain Victor
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:340466.20120326
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