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22/11/2010 | FRANCE | N°C3764

France | France, Tribunal des conflits, 22 novembre 2010, C3764


Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 janvier 2010, l'expédition de la décision du 28 décembre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi de la requête de la société Brasserie du Théâtre tendant à l'annulation de l'article 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 22 décembre 2005 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant sa demande visant à l'annulation de la décision du 3 mai 2000 par laquelle le maire de Reims a refusé le reno

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Vu, enregistrée à son secrétariat le 7 janvier 2010, l'expédition de la décision du 28 décembre 2009 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi de la requête de la société Brasserie du Théâtre tendant à l'annulation de l'article 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 22 décembre 2005 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant sa demande visant à l'annulation de la décision du 3 mai 2000 par laquelle le maire de Reims a refusé le renouvellement du bail commercial dont elle estimait être titulaire par convention du 17 mai 1991 pour l'exploitation d'un fonds de commerce de café, restaurant dans des locaux faisant partie de l'immeuble abritant le théâtre municipal, d'autre part, à l'annulation de cette décision, a, ayant retenu que les locaux occupés par la société Brasserie du Théâtre relevaient du domaine privé communal, renvoyé au Tribunal, par application de l'article 35 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la compétence ;

Vu, enregistré le 13 avril 2010, le mémoire présenté pour la société Brasserie du Théâtre, qui fait valoir que la juridiction de l'ordre judiciaire est seule compétente pour connaître de la décision du maire de refuser le renouvellement de son titre d'occupation de locaux relevant du domaine privé de la commune, aux motifs que les actes de la personne publique, qui gère son domaine privé de la même manière que tout propriétaire soucieux de le valoriser, ne mettent en oeuvre à cette fin aucune prérogative de puissance publique et sont, dès lors qu'ils ne peuvent s'analyser en des actes de disposition, des actes de droit privé ;

Vu, enregistré le 30 avril 2010, le mémoire présenté pour la commune de Reims qui conclut à la compétence du juge administratif pour apprécier la légalité de la décision du maire refusant à la société Brasserie du Théâtre le renouvellement de son titre d'occupation, aux motifs que l'acte unilatéral, délibération du conseil municipal ou décision du maire, est détachable de la gestion du domaine privé et a le caractère d'une décision administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié et, notamment, ses articles 35 et suivants ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Franck Terrier, membre du Tribunal,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau pour la SARL Brasserie du Théâtre,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire pour la commune de Reims,

- les conclusions de M. Pierre Collin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par convention du 17 mai 1991, la commune de Reims a mis pour neuf ans à la disposition de la société Brasserie du Théâtre des locaux dépendant de l'immeuble abritant le théâtre municipal, pour l'exploitation d'un commerce de café, restaurant ; qu'au terme de la période, l'exploitant, soutenant être titulaire d'un bail commercial, a demandé à la commune le renouvellement de son titre pour neuf ans ; que par lettre du 3 mai 2000, le maire a notifié à la société Brasserie du Théâtre sa décision de ne pas lui reconnaître le bénéfice de la propriété commerciale, faisant valoir que les locaux relevaient du domaine public communal ; que cette dernière a contesté cette décision devant la juridiction administrative ;

Considérant que par décision du 28 décembre 2009, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a retenu que la convention du 17 mai 1991 ne se rapportait pas à l'occupation du domaine public ;

Considérant que la contestation par une personne privée de l'acte, délibération ou décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu'en soit la forme, dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève, à ce titre, de la compétence du juge judiciaire ; qu'il en va de même de la contestation concernant des actes s'inscrivant dans un rapport de voisinage ;

Considérant que l'acte par lequel le maire a refusé à la société Brasserie du Théâtre le renouvellement d'un titre d'occupation consenti par une convention ne comportant aucune clause exorbitante, n'est pas détachable de la gestion du domaine privé et relève de la compétence du juge judiciaire ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant la société Brasserie du Théâtre à la commune de Reims.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé d'en assurer l'exécution.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C3764
Date de la décision : 22/11/2010
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - DOMAINE - DOMAINE PRIVÉ - 1) CONTESTATION PAR UNE PERSONNE PRIVÉE DE L'ACTE PAR LEQUEL UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE INITIE - CONDUIT OU TERMINE AVEC ELLE UNE RELATION CONTRACTUELLE AYANT POUR OBJET LA VALORISATION OU LA PROTECTION DU DOMAINE PRIVÉ - SANS AFFECTER SON PÉRIMÈTRE NI SA CONSISTANCE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE - NATURE DE L'ACTE - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE [RJ1] - EXCEPTION - CONVENTION COMPORTANT DES CLAUSES EXORBITANTES DU DROIT COMMUN [RJ2] - 2) CONTESTATION DES ACTES S'INSCRIVANT DANS UN RAPPORT DE VOISINAGE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE [RJ3].

17-03-02-02-01 1) La contestation par une personne privée de l'acte, qu'il s'agisse d'une délibération du conseil municipal ou d'une décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu'en soit la forme, dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève donc de la compétence du juge judiciaire. Le juge administratif est toutefois compétent lorsque la convention d'occupation litigieuse comporte une ou plusieurs clauses exorbitantes du droit commun. 2) La contestation des actes s'inscrivant dans un rapport de voisinage avec le gestionnaire du domaine privé relève du juge judiciaire.

DOMAINE - DOMAINE PRIVÉ - CONTENTIEUX - COMPÉTENCE DE LA JURIDICTION JUDICIAIRE - 1) CONTESTATION PAR UNE PERSONNE PRIVÉE DE L'ACTE PAR LEQUEL UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE INITIE - CONDUIT OU TERMINE AVEC ELLE UNE RELATION CONTRACTUELLE AYANT POUR OBJET LA VALORISATION OU LA PROTECTION DU DOMAINE PRIVÉ - SANS AFFECTER SON PÉRIMÈTRE NI SA CONSISTANCE - NATURE DE L'ACTE - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE [RJ1] - EXCEPTION - CONVENTION COMPORTANT DES CLAUSES EXORBITANTES DU DROIT COMMUN [RJ2] - 2) CONTESTATION DES ACTES S'INSCRIVANT DANS UN RAPPORT DE VOISINAGE [RJ3].

24-02-03-02 1) La contestation par une personne privée de l'acte, qu'il s'agisse d'une délibération du conseil municipal ou d'une décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu'en soit la forme, dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève donc de la compétence du juge judiciaire. Le juge administratif est toutefois compétent lorsque la convention d'occupation litigieuse comporte une ou plusieurs clauses exorbitantes du droit commun. 2) La contestation des actes s'inscrivant dans un rapport de voisinage avec le gestionnaire du domaine privé relève du juge judiciaire.


Références :

[RJ1]

Ab. jur., en tant qu'elles fondent la compétence du juge administratif sur la nature de l'acte, délibération du conseil municipal ou arrêté municipal, TC, 14 février 2000, Commune de Baie-Mahault et société Rhoddlams, n° 3138, p. 747 ;

CE, 5 décembre 2005, Commune de Pontoy, n° 270948, p. 548 ;

CE, 17 mai 2006, Commune de Jonquières, n° 281509, T. p. 784.

Cf., neutralisant ce critère organique, CE, 6 mai 1996, Formery, n° 151818, p. 150 ;

CE, 3 juin 1998, Commune de Saint-Palais-sur-Mer, n° 173186, T. p. 773 ;

reconnaissant la compétence du juge administratif pour connaître des actes de disposition, CE, 22 novembre 2002, Commune de Gennevilliers, n° 229192, T. p. 653.,,

[RJ2]

Cf. TC, 15 novembre 1999, Commune de Bourisp, n° 3144, p. 478.,,

[RJ3]

Cf. TC, 24 octobre 1994, Duperray et SCI « les Rochettes », n° 2922, p. 606 ;

CE, 20 avril 1988, Guaisnon, n° 76929, p. 147; Cass. 2ème civ., 29 avril 1998, n° 96-17286, Bull. civ. II, n° 144.


Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Franck Terrier
Rapporteur public ?: M. Collin

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:2010:C3764
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