Vu la requête enregistrée le 15 février 1980 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la Société anonyme GRANDES DISTILLERIES "LES FILS D'AUGUSTE X...", dont le siège est à Fougerolles 70220 , représentée par son président-directeur général et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 décembre 1979 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'agriculture sur le recours gracieux formé par la société contre ses décisions en date du 11 janvier 1974 et 6 juin 1975 suspendant le versement de la prime d'orientation agricole accordée à la société ;
2° annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le décret du 17 mars 1964 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Maître des requêtes,
- les observations de Me Coutard, avocat de la Société GRANDES DISTILLERIES "LES FILS D'AUGUSTE X...",
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que, par un arrêté en date du 30 octobre 1973, pris en application des dispositions du décret du 17 mars 1964 instituant une prime d'orientation pour les entreprises de stockage, de transformation et de commercialisation des produits agricoles et alimentaires, le ministre de l'agriculture et du développement rural a attribué à la société anonyme GRANDE DISTILLERIES "LES FILS D'AUGUSTE X..." une "contribution financière de l'Etat" en vue de la construction d'un entrepôt ; que, par décisions des 11 janvier 1974 et 6 juin 1975, le ministre de l'agriculture a approuvé et maintenu une décision du directeur départemental de l'agriculture de la Haute-Saône "suspendant le versement" de cette contribution, en raison des poursuites pénales engagées contre la société ;
Considérant que l'arrêté du 30 octobre 1973 constitue une décision individuelle à caractère pécuniaire qui, prise dans l'exercice du pouvoir d'appréciation dont dispose en la matière le ministre de l'agriculture, a créé des droits au profit de son bénéficiaire ; qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires permettant au ministre de revenir sur une telle décision, la circonstance que la société faisait l'objet de poursuites pénales n'autorisait pas, par elle-même, le ministre à en suspendre le versement de la prime qui lui avait été accordée ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces poursuites aient placé la société dans une situation l'empêchant de poursuivre l'exécution du projet en vue duquel elle avait obtenu la contribution financière de l'Etat ; qu'il suit de là que la société GRADES DISTILLERIES "LES FILS D'AUGUSTE X..." est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions susmentionnées du ministre de l'agriculture, en date des 11 janvier 1974 et 6 juin 1975 et de la décision implicite formée par la société contre ces décisions ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 18 décembre 1979, les décisions du ministre de l'agriculture, en date des 11 janvier 1974 et 6 juin 1975 et la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre pendant plus de quatre mois sur le recours gracieux formé contre ces décisions sont annulées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société GRANDES DISTILLERIES "LES FILS D'AUGUSTE X..." et au ministre de l'agriculture.