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05/02/1988 | FRANCE | N°54534

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 05 février 1988, 54534


Vu la requête enregistrée le 4 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 8 juillet 1983 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 28 décembre 1978 de l'inspecteur du travail du département de l'Allier autorisant son licenciement par la compagnie fermière des eaux de Vichy confirmée le 14 mai 1979 par le ministre du travail,
°2) annule pour excès de pouvoir ces décisions,
Vu les

autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le déc...

Vu la requête enregistrée le 4 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 8 juillet 1983 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 28 décembre 1978 de l'inspecteur du travail du département de l'Allier autorisant son licenciement par la compagnie fermière des eaux de Vichy confirmée le 14 mai 1979 par le ministre du travail,
°2) annule pour excès de pouvoir ces décisions,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Ancel, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Robineau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article D. 241-1 du code du travail encore en vigueur à la date des décisions autorisant et confirmant le licenciement du Dr X... "les établissements mentionnés à l'article L. 241-1 du code du travail doivent disposer d'un service médical du travail agréé par le ministre chargé du travail ou par son délégué" ; qu'aux termes de l'article D. 241-3 du même code en vigueur à la même date : "Lorsque le temps que doit consacrer le médecin du travail à un établissement déterminé est au moins de cent soixante treize heures par mois cet établissement doit disposer d'un service médical autonome comprenant un médecin à temps complet. Au dessous de cette limite, les employeurs doivent organiser soit un service autonome, soit un service médical inter-entreprises ..." ; qu'aux termes de l'article D. 241-11 alors applicable du même code : "Le médecin du travail est lié par un contrat passé avec l'employeur ou le président du service inter-entreprises. Ce contrat est conclu dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article 49 du décret °n 55-1591 du 28 novembre 1955 portant code de déontologie médicale. Le médecin du travail ne peut être nommé ou licencié qu'avec l'accord soit du comité d'entreprise ou du comité d'établissement soit du comité inter-entreprises ou de la commission de contrôle du service inter-entreprises. Dans les services inter-entreprises administrés paritairement, le médecin du travail ne peut être nommé ou révoqué qu'avec l'accord du conseil d'administration. Le comité ou la commission de contrôle doit se prononcer à la majorité de ses membres, présents ou non, par un vote à bulletins secrets et après que l'intéressé aura été mis en mesure de présenter ses moyens de défense. A défaut d'accord, la décision est prise par l'inspecteur du travail après avis du médecin inspecteur du travail ; qu'il résulte des dispositions ci-dessus rappelées que les médecins du travail bénéficient, dans l'intérêt des travailleur et sous le contrôle du juge, d'une protection particulière en cas de licenciement ; que lorsque le licenciement d'un de ces médecins est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec l'exercice normal par l'intéressé des fonctions de médecin du travail que les dispositions susrappelées ont pour objet de protéger ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la compagnie fermière de Vichy, a sollicité l'autorisation de licencier le Dr X... son médecin de travail, qui lui consacrait moins de 173 heures par mois, en se fondant sur la faculté que lui offraient les dispositions susrappelées de l'article D.241-3 du code du travail de supprimer le service médical autonome qu'elle avait précédemment fait agréer et d'adhérer à un service médical inter-entreprises ; que, après le refus du comité d'entreprise de donner son accord à la révocation du Dr X... elle a saisi l'inspecteur du travail en application de l'article D.241-11 précité ; que par décision en date du 28 décembre 1978, confirmée par le ministre du travail et de la participation le 14 mai 1979, l'inspecteur du travail du département de l'Allier a autorisé la compagnie fermière de Vichy à licencier le Dr X... ; que celui-ci fait appel du jugement en date du 8 juillet 1983 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que l'inspecteur du travail et le ministre ont estimé que la décision de l'employeur de supprimer son service médical autonome et d'adhérer à un service médical inter-entreprises ne permettait à l'autorité administrative saisie de la demande d'autorisation de licencier le Dr X... que de constater la nouvelle situation ; que, en ne recherchant pas si le licenciement était en rapport avec l'exercice normal des fonctions de médecin du travail l'autorité administrative a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

Considérant que, de ce qui précède, il résulte que le Dr X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 28 décembre 1978 de l'inspecteur du travail de l'Allier autorisant son licenciement et contre la décision du 14 mai 1979 du ministre du travail et de la participation la confirmant et à demander l'annulation de celles-ci ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, la décision du 28 décembre 1978 de l'inspecteur du travail de l'Allier et la décision du 14 mai 1979 du ministre du travail et de la participation sont annulées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à la compagnie fermière de Vichy et au ministre des affaires sociales et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 54534
Date de la décision : 05/02/1988
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR DE DROIT - EXISTENCE - Travail - Autorisation de licenciement d'un médecin du travail - Autorité administrative n'ayant pas recherché si le licenciement était en rapport avec l'exercice normal des fonctions de médecin du travail (1).

01-05-03-01, 66-03-04-01, 66-07-01-01 Il résulte des dispositions des articles D.241-1, D.241-3 et D.241-11 du code du travail, encore en vigueur à la date des décisions du 28 décembre 1978 de l'inspecteur du travail du département de l'Allier autorisant la Compagnie fermière de Vichy à licencier le Dr B., son médecin du travail, et de la décision du ministre du travail du 14 mai 1979 confirmant celle de l'inspecteur, que les médecins du travail bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs et sous le contrôle du juge, d'une protection particulière en cas de licenciement. Lorsque le licenciement d'un de ces médecins est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec l'exercice normal par l'intéressé des fonctions de médecin du travail que les dispositions des articles susmentionnés ont pour objet de protéger. En l'espèce, en ne recherchant pas si le licenciement du Dr B. était en rapport avec l'exercice normal des fonctions de médecin du travail, l'autorité administrative a entaché sa décision d'une erreur de droit.

- RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - MEDECINE DU TRAVAIL - STATUT DES MEDECINS DU TRAVAIL DANS L'ENTREPRISE - Licenciement - Protection particulière - Obligation pour l'autorité administrative de rechercher si le licenciement n'est pas en rapport avec l'exercice normal des fonctions de médecin du travail (1).

- RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - BENEFICE DE LA PROTECTION - Existence de la protection - Médecins du travail - Protection particulière en cas de licenciement (1).


Références :

Code du travail D241-1, D241-3, D241-11

1. Ab. Jur. Assemblée, 1957-07-12, Goulène, p. 480 ;

Rappr. Assemblée, 1976-05-05, Safer d'Auvergne c/ Bernette, p. 232


Publications
Proposition de citation : CE, 05 fév. 1988, n° 54534
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. de Bellescize
Rapporteur public ?: M. Robineau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:54534.19880205
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