Vu, 1°), sous le numéro 77 603 la requête, enregistrée le 12 avril 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme X..., demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement, en date du 18 février 1986 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande dirigée contre les décisions des 17 août et 24 septembre 1985, du président du conseil général de la Guyane, en tant qu'elles portent refus de renouveler le contrat qui la liait à ce département ;
- annule, pour excès de pouvoir, ces décisions ;
Vu, 2°), sous le numéro 78 121, la requête enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 30 avril 1986, présentée par le préfet, commissaire de la République de la région Guyane ; le préfet, commissaire de la République de la région Guyane demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement, en date du 18 février 1986, en tant qu'il a rejeté son intervention à l'appui de la demande présentée par Mme X..., devant le tribunal administratif, contre les décisions, en date des 17 août et 24 septembre 1985, du président du conseil général de la Guyane en tant qu'elles portent refus de renouveler le contrat qui la liait à ce département ;
- annule, pour excès de pouvoir, ces décisions ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Goulard, Auditeur,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de Mme X... et du préfet, commissaire de la République de la région Guyane sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article 126 de la loi du 26 janvier 1984 : "Les agents non titulaires qui occupent un emploi présentant des caractéristiques définies à l'article 3 du titre Ier du statut général ont vocation à être titularisés sur leur demande, ... sous réserve : 1° d'être en fonction à la date de la publication de la présente loi ... ; 2° d'avoir accompli, à la date du dépôt de leur candidature, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de service à temps complet dans un des emplois susindiqués ; 3° de remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre Ier du statut général" ; et qu'aux termes de l'article 136 de la même loi : "Les agents non titulaires qui peuvent se prévaloir des dispositions des articles 126 à 135 ne peuvent être licenciés que pour insuffisance professionnele et pour motif disciplinaire jusqu'à l'expiration des délais d'option qui leurs sont ouverts par les décrets prévus à l'article 128" ;
Considérant qu'en édictant les dispositions précitées de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, le législateur a entendu donner aux agents non titulaires ayant vocation à être titularisés en vertu de l'article 126 de la loi la garantie qu'il ne pourrait, sous réserve des hypothèses d'insuffisance professionnelle ou de faute disciplinaire, être mis fin avant l'expiration des délais d'option par les collectivités publiques qui les emploient au lien contractuel qui les unissait à elles ; qu'ainsi ces dispositions font obstacle à ce que soient décidés, à l'égard de ces agents, avant l'expiration desdits délais, sauf dans les cas susmentionnés, tant une mesure de licenciement que, dans le cas des agents servant en vertu d'un contrat à durée déterminée, le non renouvellement de ce contrat ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... a été recrutée le 1er septembre 1982 par le département de la Guyane pour exercer les fonctions d'agent de bureau et occupait ainsi, alors même qu'elle avait été recrutée en qualité d'agent temporaire, un emploi permanent d'un département, c'est-à-dire l'un des emplois visés à l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, laquelle constitue, à l'exception de son article 31, le titre 1er du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales ; qu'il n'est contesté ni que Mme X... avait accompli, à la date à laquelle il a été mis fin à ses fonctions, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet, ni qu'elle remplissait les conditions prévues aux 1° et 3° de l'article 126 précité de la loi du 26 janvier 1984 ; que les décisions du président du conseil général de la Guyane, en date des 17 août et 24 septembre 1985, par lesquelles il a été mis fin aux fonctions de Mme X... au terme de la dernière période de renouvellement du contrat à durée déterminée qui l'unissait au département ne sont motivées ni par l'insuffisance professionnelle ni par une faute disciplinaire de l'intéressée ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ces décisions sont entachées d'illégalité ; que, par suite, Mme X... et le préfet, commissaire de la République de la région Guyane sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 18 février 1986, le tribunal administratif de Cayenne a refusé d'en prononcer l'annulation ;
Article 1er : Le jugement en date du 18 février 1986, du tribunal administratif de Cayenne et les décisions, en date des 17 août et 24 septembre 1985, du président du conseil général de la Guyane sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X..., au département de la Guyane, au préfet de la Guyane et au ministre de l'intérieur.