Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 août 1988, présentée par le MINISTRE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE ; le MINISTRE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 19 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé, à la demande du centre médico-chirurgical de Tronquière, sa décision du 5 avril 1985 rejetant la demande d'autorisation de ce dernier d'installer un scanographe dans son établissement ;
2°) rejette la demande présentée par le centre médico-chirurgical de Tronquière devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 modifiée portant réforme hospitalière ;
Vu le décret n° 72-923 du 28 septembre 1972 relatif aux autorisations auxquelles sont soumis en vertu de l'article 31 de la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 les établissements sanitaires privés et aux commissions nationales et régionales de l'hospitalisation ;
Vu le décret n° 84-247 du 5 avril 1984 fixant la liste des équipements matériels lourds prévue à l'article 46 de la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 modifiée portant réforme hospitalière ;
Vu le décret n° 84-248 du 5 avril 1984 fixant la liste des établissements prévue à l'article 34, alinéa 2, de la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 modifiée portant réforme hospitalière ;
Vu l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 9 avril 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Devys, Auditeur,
- les observations de Me Blanc, avocat du centre médico-chirurgical de Tronquière,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 31 et 33-1°) de la loi du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière, l'autorisation d'installer des équipements matériels lourds dans tout établissement privé contribuant aux soins médicaux ne peut être légalement accordée que si elle répond aux besoins de la population ; qu'en vertu de l'article 1er du décret n° 84-247 du 5 avril 1984, les scanographes à utilisation médicale figurent sur la liste des équipements matériels lourds prévus par l'article 46 de la loi du 31 décembre 1970 ; que, selon les articles 1er et 2 du décret n° 84-248 du 5 avril 1984, l'autorisation d'installer de tels équipements est donnée par le ministre de la santé qui évalue les besoins dans le cadre de chaque région sanitaire ; que l'arrêté du 9 avril 1984 ixe l'indice des besoins afférents aux scanographes à un appareil pour un nombre d'habitants compris entre 300 000 et 550 000 ;
Considérant que, par une décision du 5 avril 1985, confirmée sur recours gracieux le 21 juin 1985, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a refusé d'autoriser le centre médico-chirurgical de Tronquière à installer un appareil du type susmentionné ; qu'aucun texte législatif ou réglementaire ne prévoit d'indice de besoins spécifique pour les scanographes "corps entier" ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 5 avril 1985, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand s'est fondé sur la circonstance que les besoins de la région Auvergne en scanographes "corps entier" n'étaient pas satisfaits ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le centre médico-chirurgical de Tronquière devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, le nombre de scanographes installés dans la région Auvergne était de trois pour une population de 1 330 000 habitants, soit un scanographe pour 443 000 habitants ; qu'ainsi, en estimant au vu des données ci-dessus et compte tenu des indices fixés par l'arrêté du 9 avril 1984, que les besoins de la région Auvergne en scanographes étaient satisfaits, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a faite de la situation existante ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1970, la décision du ministre chargé de la santé sur une demande d'installation d'un équipement matériel lourd dans un établissement privé contribuant aux soins médicaux "est notifiée au demandeur dans un délai maximum de six mois suivant la date de dépôt de la demande. A défaut de décision dans ce délai, l'autorisation est réputée acquise" ; qu'en vertu de l'article 10 du décret du 28 septembre 1972, pris pour l'application de la loi précitée, la décision du ministre est "notifiée sous pli recommandé avec demande d'accusé de réception" ;
Considérant qu'il ressort de l'instruction que la lettre recommandée avec demande d'accusé de réception contenant une ampliation de l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 5 avril 1985 rejetant la demande du centre médico-chirurgical de Tronquière a été notifiée au docteur X..., président du conseil d'administration dudit centre, le 10 avril 1985 ; qu'en son absence, un deuxième avis a été notifié le 19 avril 1985 ; que cette notification est intervenue dans le délai de six mois imparti par la loi précitée ; qu'ainsi aucune décision implicite d'autorisation ne s'est trouvée acquise ;
Considérant qu'en relevant, dans les motifs de sa décision du 5 avril 1985, que "les besoins en scanographes peuvent être tenus pour satisfaits dans la région Auvergne, compte tenu du nombre d'appareils installés ou autorisés", le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a satisfait à l'obligation qui lui incombait de motiver sa décision en vertu de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970 ;
Considérant que, si le docteur X... soutient que la décison du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 5 avril 1985 porte mention de l'installation d'un modèle CE 10000, alors que sa demande était relative à un modèle CE 9000, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision ;
Considérant que la circonstance, alléguée par le docteur X..., que le centre hospitalier d'Aurillac aurait au même moment bénéficié d'une autorisation d'installer un scanographe est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé sa décision en date du 5 avril 1985 ;
Article 1er : Le jugement en date du 19 mai 1988 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le centre médico-chirurgical de Tronquière devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au centre médico-chirurgical de Tronquière et au ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité, chargé de la santé.