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28/01/1991 | FRANCE | N°84586

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 28 janvier 1991, 84586


Vu le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 23 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande du syndicat CFTC auprès du comité d'entreprise du "Crédit du Nord", la décision du directeur régional du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais en date du 2 mars 1984, confirmant la décision de l'inspecteur du travail de Lille en date du 7 octobre 1983 refusant implicitement d'ord

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Vu le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 23 janvier 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 novembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande du syndicat CFTC auprès du comité d'entreprise du "Crédit du Nord", la décision du directeur régional du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais en date du 2 mars 1984, confirmant la décision de l'inspecteur du travail de Lille en date du 7 octobre 1983 refusant implicitement d'ordonner la suppression de la sanction de la mise à pied dans l'échelle des sanctions disciplinaires énoncées dans l'article 6 du règlement intérieur établi par la société "Crédit du Nord" ;
2°) de rejeter la demande présentée pour le syndicat CFTC auprès du comité d'entreprise du "Crédit du Nord" devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 82-689 du 4 août 1982 ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Gosselin, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Desaché, Gatineau avocat du syndicat CFTC auprès du comité d'entreprise du Crédit du Nord,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article L.122-34 du code du travail, le règlement intérieur fixe notamment, "la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur ..." et qu'aux termes de l'article L.122-35 du même code : "Le règlement intérieur ne peut contenir de clause contraire aux lois et règlements, ainsi qu'aux dispositions des conventions et accords collectifs de travail applicables dans l'entreprise ou l'établissement ..." ; qu'aux termes de l'article L.122-37 du code du travail : "L'inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L.122-34 et L.122-35" ;
Considérant que l'article 6 du règlement intérieur, établi par la société "Crédit du Nord", dispose que "les mesures disciplinaires appliquées par la direction sont, suivant la gravité de la faute : l'avertissement, le blâme, la mise à pied dans la limite de trois jours, la rétrogradation, la révocation" ;
Considérant, d'une part, que, pour vérifier que le règlement intérieur respecte les prescriptions de l'article L.122-35 du code du travail, l'inspecteur du travail doit tenir compte des stipulations des conventions et accords collectifs de travail qui sont applicables dans l'entreprise à la date à laquelle il prend sa décision, alors même que lesdites conventions et accords auraient été conclus avant l'entrée en vigueur de la loidu 4 août 1982 d'où est issue la rédaction précitée dudit article L.122-35 ;
Considérant, d'autre part, que la mise à pied ne figure pas parmi les sanctions disciplinaires prévues par l'article 32 de la convention collective de travail du 20 août 1952, applicable dans les établissements du Crédit du Nord à la date à laquelle l'inspecteur du travail de la 4ème section de Lille a pris la décision contestée par le représentant syndical CFTC au comité d'entreprise du Crédit du Nord ; que, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI, l'introduction de cette sanction dans l'échelle des mesures disciplinaires fixée par le règlement intérieur litigieux ne constitue pas une disposition nécessairement plus favorable aux salariés de l'entreprise ; que, par suite, en tant qu'elles mentionnent la mise à pied, les dispositions précitées de l'article 6 du règlement intérieur établi par la société "Crédit du Nord" sont contraires aux stipulations de la convention collective de travail et, de ce fait, aux prescriptions de l'article L.122-35 du code du travail ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 2 mars 1984 par laquelle le directeur régional du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a confirmé la décision de l'inspecteur du travail de Lille du 7 octobre 1983 en tant qu'elle n'exigeait pas la modification de l'article 6 du règlement intérieur établi par la société "Crédit du Nord" ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, au représentant syndical CFTC auprès du comité d'entreprise du Crédit duNord et à la société "Crédit du Nord".


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 84586
Date de la décision : 28/01/1991
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

66-03-01 TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REGLEMENT INTERIEUR -Contenu - Dispositions contraires aux lois et règlements ou apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles des restrictions qui ne sont pas justifiées par la nature des tâches à accomplir ni proportionnées au but recherché - Sanction disciplinaire n'étant pas prévue par les conventions collectives - Légalité - Conditions.

66-03-01 Article du règlement intérieur d'une entreprise disposant que "les mesures disciplinaires appliquées par la direction sont, suivant la gravité de la faute : l'avertissement, le blâme, la mise à pied dans la limite de trois jours, la rétrogradation, la révocation". Pour vérifier que le règlement intérieur respecte les prescriptions de l'article L.122-35 du code du travail, l'inspecteur du travail doit tenir compte des stipulations des conventions et accords collectifs de travail qui sont applicables dans l'entreprise à la date à laquelle il prend sa décision, alors même que lesdites conventions et accords auraient été conclus avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 1982 d'où est issue la rédaction précitée dudit article L.122-35. La mise à pied ne figure pas parmi les sanctions disciplinaires prévues par la convention collective de travail applicable à l'entreprise à la date à laquelle l'inspecteur du travail a pris sa décision et l'introduction de cette sanction dans l'échelle des mesures disciplinaires fixée par le règlement intérieur litigieux ne constituant pas une disposition nécessairement plus favorable aux salariés de l'entreprise, les dispositions du règlement intérieur sont contraires aux stipulations de la convention collective de travail et, de ce fait, aux prescriptions de l'article L.122-35 du code du travail.


Références :

Code du travail L122-34, L122-35, L122-37
Loi 82-689 du 04 août 1982


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jan. 1991, n° 84586
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Gosselin
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:84586.19910128
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