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13/02/1991 | FRANCE | N°101949

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 13 février 1991, 101949


Vu le recours du ministre de l'agriculture et de la forêt, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 14 septembre 1988 ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande des consorts X..., la décision du 14 novembre 1985 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Manche, relative aux opérations de remembrement de Meautis ;
2°) de rejeter la demande présentée par les consorts X... devant le tribunal administratif de Caen ;
Vu les autr

es pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 67-809 du 22 septembre 196...

Vu le recours du ministre de l'agriculture et de la forêt, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 14 septembre 1988 ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande des consorts X..., la décision du 14 novembre 1985 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Manche, relative aux opérations de remembrement de Meautis ;
2°) de rejeter la demande présentée par les consorts X... devant le tribunal administratif de Caen ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 67-809 du 22 septembre 1967 ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Maugüé, Auditeur,
- les observations de Me Vuitton, avocat de M. Yves X... et autres,
- les conclusions de M. Stirn, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 22 septembre 1967, modifiée par la loi du 11 juillet 1975 : "Dans toute commune où un remembrement rural a été ordonné, les terrains ... nécessaires à l'exécution ultérieure des équipements communaux pourront, à la demande du conseil municipal, être attribués à la commune dans le plan de remembrement dans les conditions définies aux articles suivants, et sous réserve de justifier des crédits afférents à cette acquisition" et, qu'aux termes de l'article 2 de la même ordonnance : "I. Sont affectés en priorité aux aménagements visés à l'article 1er les droits résultant des apports de la commune. II. Si ces apports ne constituent pas une superficie suffisante pour l'assiette de ces aménagements et équipements, la commission communale peut décider de prélever le complément nécessaire, moyennant indemnité à la charge de la commune, sur les terrains inclus dans le périmètre de remembrement. Le prélèvement ne peut dépasser le cinquantième de la superficie comprise à l'intérieur du périmètre" ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Caen, ni la circonstance que les apports de la commune étaient suffisants pour constituer la "réserve d'urbanisme" souhaitée par le conseil municipal et destinée à une exécution ultérieure d'équipements communaux publics ni le fait qu'ils auraient permis d'attribuer une parcelle aux consorts X... en échange de leur terrain d'apport n'interdisaient à la commission départementale de compenser, au moins pour partie, par une indemnité fixée par le juge de l'expropriation, le prélèvement d'une de leurs parcelles au profit de la commune ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a annulé la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de la Manche, en date du 14 novembre 1985, concernant les biens de la succession de M. Georges X... ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les consorts X..., soit à l'appui de leur demande devant le tribunal administratif de Caen, soit devant le Conseil d'Etat ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le remembrement de la commune de Meautis a été ordonné par arrêté préfectoral du 26 janvier 1983 et que le projet de remembrement établi par la commission communale a été mis à l'enquête une première fois du 14 au 28 mai 1985 puis, après que la commission communale ait, dans sa séance du 18 juin 1985, remanié un projet pour tenir compte des réclamations des intéressés, une seconde fois du 19 juillet au 19 août 1985 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la délibération du 4 otobre 1984, par laquelle le conseil municipal a demandé qu'en application de l'ordonnance du 22 septembre 1967, la parcelle C 466, de 1 ha 08 a 89 ca, soit attribuée à la commune afin de constituer une réserve foncière en vue de la réalisation d'équipements communaux, serait intervenue après que la commission communale ait arrêté le plan de remembrement, manque en fait ;
Considérant que si les consorts X... ont soutenu devant la commission départementale et soutiennent devant le Conseil d'Etat que la parcelle C 466 avait le caractère d'un terrain à bâtir, il ressort des dispositions combinées de l'article 1er précité de l'ordonnance du 22 septembre 1967, de l'article 20, troisième alinéa, du code rural, aux termes duquel "doivent être réattribués à leur propriétaire ... 4°) Les terrains qui ... présentent le caractère de terrains à bâtir ..." et de l'article 21 du même code, qui dispose que : "Lorsque des terrains ne peuvent être réattribués conformément aux dispositions de l'article 20 ... en raison de la création des aires nécessaires aux ouvrages collectifs communaux, il peut être attribué une valeur d'échange tenant compte de leur valeur vénale" ; que le remembrement peut permettre à une commune de s'assurer de l'assiette foncière nécessaire à l'exécution ultérieure d'équipements communaux, nonobstant le fait qu'il s'agit de terrains présentant le caractère de terrains à bâtir ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles attribuées aux consorts X... seraient plus éloignées du centre de l'exploitation que les parcelles d'apport ; que les intéressés, qui possédaient deux parcelles avant remembrement et en ont reçu deux, ne sont pas fondés à soutenir que le remembrement a aggravé les conditions de leur exploitation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'agriculture et de la forêt est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision, en date du 14 novembre 1985, de la commission départementale de réorganisation foncière de la Manche relative aux biens de la succession de M. Georges X... ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler cet article du jugement et de rejeter les conclusions de la demande présentée par les consorts X... devant le tribunal administratif de Caen concernant les biens de la succession de M. Georges X... ;
Article 1er : L'article 1er du jugement en date du 21 juin 1988 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par les consorts X... devant le tribunal administratif de Caen concernant les biens de la succession de M. Georges X... sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'agriculture et de la forêt et à M. Jacques X..., Mme Geneviève X..., M. Claude X..., M. Yves X..., M. Jean-Pierre X... et M. Roland X....


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 101949
Date de la décision : 13/02/1991
Sens de l'arrêt : Annulation rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

AGRICULTURE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - ATTRIBUTIONS ET COMPOSITION DES LOTS - EQUIVALENCE DES LOTS - TERRAINS NECESSAIRES A L'EXECUTION D'EQUIPEMENTS COMMUNAUX - Prélèvement du complément nécessaire sur les terrains inclus dans le périmètre de remembrement (article 2-II de l'ordonnance du 22 septembre 1967 modifiée) - (1) Conditions - (2) - RJ1 Qualité de terrain à bâtir ne faisant pas obstacle au prélèvement (1) - (3) Fixation de l'indemnité compensatrice - Autorité compétente - Juge de l'expropriation.

03-04-02-01-05(1) Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 22 septembre 1967, modifiée par la loi du 11 juillet 1975 : "Dans toute commune où un remembrement rural a été ordonné, les terrains ... nécessaires à l'exécution ultérieure des équipements communaux pourront, à la demande du conseil municipal, être attribués à la commune dans le plan de remembrement dans les conditions définies aux articles suivants, et sous réserve de justifier des crédits afférents à cette acquisition" et aux termes de l'article 2 de la même ordonnance : "I. Sont affectés en priorité aux aménagements visés à l'article 1er les droits résultant des apports de la commune. II. Si ces apports ne constituent pas une superficie suffisante pour l'assiette de ces aménagements et équipements, la commission communale peut décider de prélever le complément nécessaire, moyennant indemnité à la charge de la commune, sur les terrains inclus dans le périmètre de remembrement. Le prélèvement ne peut dépasser le cinquantième de la superficie comprise à l'intérieur du périmètre". Ni la circonstance que les apports de la commune étaient suffisants pour constituer la "réserve d'urbanisme" souhaitée par le conseil municipal et destinée à une exécution ultérieure d'équipements communaux publics ni le fait qu'ils auraient permis d'attribuer une parcelle aux consorts D. en échange de leur terrain d'apport n'interdisaient à la commission départementale de compenser, au moins pour partie, par une indemnité fixée par le juge de l'expropriation, le prélèvement d'une de leurs parcelles au profit de la commune.

03-04-02-01-05(2) Il ressort des dispositions combinées de l'article 1er de l'ordonnance du 22 septembre 1967, de l'article 20, troisième alinéa, du code rural, aux termes duquel "doivent être réattribués à leur propriétaire ... 4°) Les terrains qui ... présentent le caractère de terrains à bâtir ..." et l'article 21 du même code, qui dispose que : "Lorsque des terrains ne peuvent être réattribués conformément aux dispositions de l'article 20 ... en raison de la création des aires nécessaires aux ouvrages collectifs communaux, il peut être attribué une valeur d'échange tenant compte de leur valeur vénale" que le remembrement peut permettre à une commune de s'assurer de l'assiette foncière nécessaire à l'exécution ultérieure d'équipements communaux, nonobstant le fait qu'il s'agit de terrains présentant le caractère de terrains à bâtir (1).

03-04-02-01-05(3) Il appartient au juge de l'expropriation de fixer le montant de l'indemnité mise à la charge de la commune et destinée à compenser, en tout en partie, les prélèvements de parcelles sur les terrains inclus dans le périmètre de remembrement.


Références :

Code rural 20, 21
Loi 75-621 du 11 juillet 1975
Ordonnance 67-809 du 22 septembre 1967 art. 1 AL. 2, art. 2

1.

Cf. 1986-12-05, Ministre de l'agriculture c/ Vely, n° 52040


Publications
Proposition de citation : CE, 13 fév. 1991, n° 101949
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Maugüé
Rapporteur public ?: M. Stirn
Avocat(s) : Me Vuitton, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:101949.19910213
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