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08/03/1991 | FRANCE | N°96208

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 08 mars 1991, 96208


Vu le recours du ministre de l'éducation nationale enregistré le 18 mars 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision, en date du 19 novembre 1987, par laquelle la commission départementale des handicapés de l'Hérault a annulé la décision de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel "académique" de Montpellier déclarant M. X... inapte à l'exercice de fonctions d'enseignement,
2°) renvoie l'affaire devant la commission départementale des handicapés de l'Hérault,
Vu

les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret du 1...

Vu le recours du ministre de l'éducation nationale enregistré le 18 mars 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision, en date du 19 novembre 1987, par laquelle la commission départementale des handicapés de l'Hérault a annulé la décision de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel "académique" de Montpellier déclarant M. X... inapte à l'exercice de fonctions d'enseignement,
2°) renvoie l'affaire devant la commission départementale des handicapés de l'Hérault,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret du 17 mars 1978 et le décret du 19 juin 1979 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schneider, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête :
Considérant que le recours du ministre de l'éducation nationale tend à l'annulation de la décision par laquelle la commission départementale des handicapés de l'Hérault a annulé, à la demande de M. X..., la décision du 26 février 1986 par laquelle la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel instituée dans l'Académie de Montpellier a déclaré le handicap de M. X... incompatible avec l'exercice des emplois auxquels donnent accès les concours du certificat d'aptitude professionnelle à l'enseignement technique et de l'agrégation, section biochimie, auxquels il était candidat ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975 : "Un décret en Conseil d'Etat détermine la composition de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel prévue à l'article L. 323-11 du code du travail lorsqu'elle examine la candidature d'une personne handicapée à un emploi de l'Etat ou d'une des collectivités ou établissements visés à l'article L. 323-12 4°) du code du travail ; ce décret peut également attribuer compétence à une commission spéciale pour certaines catégories d'agent" ; qu'il résulte de ces dispositions que seul un décret pris le Conseil d'Etat entendu peut instituer une commission spéciale pour certaines catégories d'agents ; qu'ainsi l'article 3 du décret du 17 mars 1978 pris pour l'application desdites dispositions, n'a pu, sans les méconnaître, renvoyer à un décret simple la création de commissions spéciales compétentes pour apprécier l'aptitude des candidats à un emploi ..."d'inspection, de direction, d'enseignement, d'éducation, d'orientation, d'information et de surveillance relevant du ministère de l'éducation nationale" et la fixation de leur composition ; que, dès lors, les articles 1er et 2 du décret du 19 juin 1979, lequel, pris sur le fondement de cette disposition, n'a pas été soumis au Conseil d'Etat, n'ont pu légalement instituer une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale dans chaque département pour apprécier l'aptitude de certains candidats aux emplois énumérés ci-dessus et en fixer la composition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commission départementale des handicapés de l'Hérault, compétente pour connaître du recours formé par M. X... contre la décision susanalysée de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel instituée dans l'Académie de Montpellier, laquelle concernait l'orientation d'une personne handicapée et les mesures propres à assurer son reclassement, devait relever, même d'office, l'illégalité dont cette décision, émanant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, d'un organisme incompétemment créé, était entachée ; que, faute de l'avoir fait, la décision attaquée, en date du 19 novembre 1987, de la commission départementale des handicapés de l'Hérault doit être annulée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant que la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel instituée dans l'Académie de Montpellier, qui a pris la décision du 26 février 1986 contestée par M. X..., a été créée par le décret du 19 juin 1979, qui n'a pas été soumis au Conseil d'Etat alors qu'en vertu de l'article 27 précité de la loi du 30 juin 1975 elle ne pouvait être instituée que par décret en Conseil d'Etat ; que la décision du 26 février 1986 est par suite entachée d'incompétence ; que M. X... est, dès lors, fondé à en demander l'annulation ;
Article 1er : La décision de la commission départementale des handicapés de l'Hérault, en date du 19 octobre 1987, est annulée.
Article 2 : La décision du 26 février 1986 de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel instituée dans l'Académie de Montpellier est annulée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et au secrétaire d'Etat auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité, chargé des handicapés et des accidentés de la vie.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 96208
Date de la décision : 08/03/1991
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - MESURES A PRENDRE PAR DECRET - DECRET EN CONSEIL D'ETAT - MESURE A PRENDRE EN CONSEIL D'ETAT - MESURES A CARACTERE STATUTAIRE - Création de commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel spéciales pour apprécier l'aptitude à certains emplois publics (article 27 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975).

01-02-02-02-01-01-01 En vertu de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975, un décret en Conseil d'Etat peut attribuer compétence à une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale pour examiner la candidature de personnes handicapées à certains emplois publics. L'article 3 du décret n° 78-392 du 17 mars 1978 pris en application de cet article a méconnu ces dispositions en renvoyant à un décret simple la création de commissions spéciales chargées d'apprécier l'aptitude des candidats à un emploi ..."d'inspection, de direction, d'enseignement, d'éducation nationale". Exception d'illégalité soulevée d'office, par voie de conséquence, à l'encontre des articles 1 et 2 du décret du 19 juin 1979 qui ont institué une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale dans chaque département.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - LOI - VIOLATION - Loi n° 75-534 du 30 juin 1975 renvoyant à un décret en Conseil d'Etat la création de commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel spéciales pour apprécier l'aptitude à certains emplois publics - Création par décret simple prévue par l'article 3 du décret n° 78-392 du 17 mars 1978 - Illégalité (décret du 19 juin 1979 pris en application de l'article 3 du décret n° 78-392 du 17 mars 1978).

01-04-02-02 En vertu de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975, un décret en Conseil d'Etat peut attribuer compétence à une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale pour examiner la candidature de personnes handicapées à certains emplois publics. Illégalité au regard de cette disposition de l'article 3 du décret du 17 mars 1978 renvoyant à un décret simple la création de commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel spéciales pour apprécier l'aptitude de certains candidats à un emploi "d'inspection .... nationale" et la fixation de leur composition. Illégalité, par voie de conséquence, des articles 1 et 2 du décret du 29 juin 1979 qui ont institué une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale dans chaque département.

TRAVAIL ET EMPLOI - REGLEMENTATIONS SPECIALES A L'EMPLOI DE CERTAINES CATEGORIES DE TRAVAILLEURS - EMPLOI DES HANDICAPES - COMMISSION DEPARTEMENTALE DES HANDICAPES - PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION DEPARTEMENTALE - Incompétence d'une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale - Moyen d'ordre public.

66-032-02-02-01 Une commission départementale des handicapés est tenue de relever, même d'office, l'illégalité d'une décision émanant d'un organisme incompétemment créé. Cas en l'espèce d'une commission technique d'orientation et de reclassement professionnel spéciale chargée d'apprécier l'aptitude des candidats à certains emplois, créée par décret simple alors que seul un décret en Conseil d'Etat pouvait instituer une commission spéciale pour certains agents.


Références :

Décret 78-392 du 17 mars 1978 art. 3
Décret 79-479 du 19 juin 1979 art. 1, art. 2
Loi 75-534 du 30 juin 1975 art. 27
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 18


Publications
Proposition de citation : CE, 08 mar. 1991, n° 96208
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Schneider
Rapporteur public ?: M. Toutée

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1991:96208.19910308
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