Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 avril 1991, présentée par LE PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE demande au Président de la section du Contentieux :
1°) d'annuler le jugement du 29 mars 1991 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté en date du 26 mars 1991 décidant la reconduite à la frontière de M. Badi X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Badi X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989 et la loi du 10 janvier 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- les observations de Me Barbey, avocat de M. Badi X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a reçu notification de l'arrêté du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ordonnant sa reconduite à la frontière le 26 mars 1991 alors qu'il était placé sous mandat de dépôt à la maison d'arrêt de Rennes ; qu'il n'est pas contesté qu'il a déposé dans le délai de 24 heures institué par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, auprès de l'autorité pénitentiaire, un recours contre cet arrêté ; qu'eu égard à l'incapacité où il se trouvait alors d'assurer lui-même l'acheminement de son recours la circonstance que celui-ci ne soit parvenu au tribunal administratif que le 28 mars 1991, soit après l'expiration du délai ci-dessus mentionné, ne permet pas de le regarder comme tardif ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif tendait expressément à l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Sur la légalité de l'arrêté du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE en date du 26 mars 1991 :
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X... s'est maintenu en France pendant plus d'un mois après que lui ait été notifiée la décision du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE refusant de lui accorder un titre de séjour et qu'il se trouvait, dès lors, dans le cas prévu par l'article 22-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Mais considérant que M. X..., entré en France à l'âge de quatorze ans et qui n'était âgé que de dix-neuf ans à la date à laquelle est intervenu l'arrêté attaqué, vit avec sa mère, mariée à un ressortissant français et ses deux soeurs dotées de titres de séjour réguliers ; qu'il allègue sans être contredit n'avoir conservé aucune attache familiale dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, en prenant l'arrêté attaqué, a porté au respect dû à la vie familiale de M. X... une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a pris cette mesure et commis une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé ledit arrêté ;
Article 1er : La requête susvisée du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.