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04/06/1993 | FRANCE | N°138672;138878;138952

France | France, Conseil d'État, Assemblee, 04 juin 1993, 138672, 138878 et 138952


Vu 1°) sous le n° 138 672, la requête, enregistrée le 25 juin 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'Association des anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration, dont le siège est situé ...université à Paris (75007) ; l'association demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision de transférer l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg prise le 7 novembre 1991, ensemble le rejet implicite par le Premier ministre du recours gracieux formé contre ladite décision ;
Vu 2°) sous le n° 138 878, la requête enregistrée le 2 juillet

1992 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. J...

Vu 1°) sous le n° 138 672, la requête, enregistrée le 25 juin 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'Association des anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration, dont le siège est situé ...université à Paris (75007) ; l'association demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision de transférer l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg prise le 7 novembre 1991, ensemble le rejet implicite par le Premier ministre du recours gracieux formé contre ladite décision ;
Vu 2°) sous le n° 138 878, la requête enregistrée le 2 juillet 1992 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Michel Z..., demeurant ... ; M. Z... demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision de transférer l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg prise le 7 novembre 1991 ensemble le rejet implicite par le Premier ministre du recours gracieux formé contre ladite décision ;
Vu 3°) sous le n° 138 952, la requête enregistrée le 6 juillet 1992 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par MM. Yannick X..., Jean-François Y..., Christophe D..., Mme Marianne A..., MM. Pierre-Emmanuel B..., Pierre C..., Mme Anne E..., M. Jean-Hugues F... ayant désigné comme mandataire unique Mme A... demeurant ... ; les requérants demandent au Conseil d'Etat l'annulation de la décision de transférer l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg prise le 7 novembre 1991, ensemble le rejet implicite par le Premier ministre du recours gracieux formé contre ladite décision ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu l'ordonnance n° 45-2283 du 9 octobre 1945 ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le décret n° 60-1219 du 19 novembre 1960 modifié portant création d'un comité interministériel permanent pour les problèmes d'action régionale et d'aménagement du territoire ;
Vu le décret n° 72-791 du 23 août 1972 relatif au fonctionnement administratif et financier de l'Ecole nationale d'administration ;
Vu le décret n° 82-819 du 27 septembre 1982 modifié relatif aux conditions d'accès à l'Ecole nationale d'administration et au régime de la scolarité ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stasse, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de l'association des anciens élèves de l'Ecole Nationale d'Administration,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre la même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le Premier ministre et par le ministre d'Etat, ministre de la fonction publique et des réformes administratives :
Considérant que si le décret susvisé du 19 novembre 1960 ne donne compétence au comité interministériel pour l'aménagement du territoire que pour préparer les décisions du Gouvernement en matière d'aménagement du territoire, il ressort des pièces du dossier et notamment tant du compte rendu du comité interministériel qui s'est tenu le 7 novembre 1991 que du communiqué publié par le Premier ministre que celui-ci, à l'issue de ce comité interministériel, a entendu décider le transfert de l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg ; qu'il n'a pas subordonné la réalisation effective de cette décision à une autre décision du Gouvernement ; qu'ainsi cette décision ne constituait pas une simple mesure préparatoire, mais avait le caractère d'un acte susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le Premier ministre et le ministre d'Etat ministre de la fonction publique et des réformes administratives doit être écartée ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'ordonnance susvisée du 9 octobre 1945 : "L'Ecole nationale d'administration est un établissement public. Elle relève du président du Gouvernement provisoire de la République française, en sa qualité de président du conseil des ministres. Elle est administrée par un directeur, assisté d'un conseil d'administration (...). Un décret pris après avis du Conseil d'Etat règlera le fonctionnement administratif et financier de l'Ecole" ; et qu'aux termes de l'article 7 de ladite ordonnance : "Les conditions d'entrée à l'Ecole, l'organisation de la scolarité et des stages, les règles d'affectation des élèves à la sortie de l'Ecole seront déterminées par un décret en Conseil d'Etat" ; que les décrets prévus par ces deux dispositions étaient, à la date de la décision attaquée respectivement le décret du 23 août 1972 et le décret du 27 septembre 1982 susvisés ;

Considérant qu'aucune disposition de l'ordonnance précitée du 9 octobre 1945, ni des décrets pris sur son fondement ne donnent compétence au Premier ministre pour prendre, en qualité d'autorité de tutelle de l'Ecole nationale d'administration, la décision de transférer le siège de cet établissement public de Paris à Strasbourg ; que s'il appartient au Premier ministre de faire usage du pouvoir réglementaire qu'il tient de l'article 21 de la Constitution pour prendre une telle décision qui concerne tant le fonctionnement de cette Ecole que l'organisation de sa scolarité, il ne peut exercer ce pouvoir qu'en respectant les règles de forme et de compétence résultant de l'article 22 de la Constitution du 4 octobre 1958 et des dispositions des articles 6 et 7 de l'ordonnance du 9 octobre 1945 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation de la décision du Premier ministre en date du 7 novembre 1991 ;
Article 1er : La décision de transférer le siège de l'Ecole nationale d'administration à Strasbourg prise par le Premier ministre le 7 novembre 1991 est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association des anciens élèves de l'Ecole Nationale d'Administration, à M. Jean-Michel Z..., à Mlle Mariane A..., au Premier ministre et au ministre de la fonction publique.


Synthèse
Formation : Assemblee
Numéro d'arrêt : 138672;138878;138952
Date de la décision : 04/06/1993
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - PREMIER MINISTRE - Incompétence du Premier ministre - Décision de transférer le siège de l'Ecole nationale d'administration - Décision subordonnée à l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat (1).

01-02-02-01-02, 01-02-02-02-01-01-03, 33-02-02, 33-02-03, 68-05-02 Aucune disposition de l'ordonnance du 9 octobre 1945 ni des décrets pris sur son fondement ne donnent compétence au Premier ministre pour prendre, en qualité d'autorité de tutelle de l'Ecole nationale d'administration, la décision de transférer le siège de cet établissement public de Paris à Strasbourg. Le Premier ministre ne peut exercer le pouvoir réglementaire qu'il tient de l'article 21 de la Constitution pour prendre une telle décision qu'en respectant les règles de forme et de compétence résultant de l'article 22 de la Constitution du 4 octobre 1958 et des dispositions des articles 6 et 7 de l'ordonnance du 9 octobre 1945 (obligation de prendre un décret en Conseil d'Etat).

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - MESURES A PRENDRE PAR DECRET - DECRET EN CONSEIL D'ETAT - MESURE A PRENDRE EN CONSEIL D'ETAT - DELOCALISATIONS - Fixation du siège de l'Ecole nationale d'administration - en application des articles 6 et 7 de l'ordonnance n° 45-2283 du 9 octobre 1945 (1).

- RJ1 ETABLISSEMENTS PUBLICS - REGIME JURIDIQUE - ORGANISATION - Siège de l'établissement - Ecole nationale d'administration - Compétence pour le fixer - Incompétence du Premier ministre (1).

- RJ1 ETABLISSEMENTS PUBLICS - REGIME JURIDIQUE - TUTELLE - Absence de tutelle sans texte - Ecole nationale d'administration - Ordonnance n° 45-2283 du 9 octobre 1945 ne prévoyant pas la compétence du Premier ministre pour fixer le siège de l'Ecole - Incompétence du Premier ministre pour prendre lui-même une telle décision (1).

- RJ2 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - IMPLANTATION DES ACTIVITES - Etablissements publics - Transfert de Paris à Strasbourg de l'Ecole nationale d'administration - Décision prise par le Premier ministre en comité interministériel pour l'aménagement du territoire - Incompétence - Mesure à prendre par décret en Conseil d'Etat (2).


Références :

Constitution du 04 octobre 1958 art. 21, art. 22
Décision du 07 novembre 1991 Premier ministre décision attaquée annulation
Décret 60-1219 du 19 novembre 1960
Décret 72-791 du 23 août 1972
Décret 82-819 du 27 septembre 1982
Ordonnance 45-2283 du 09 octobre 1945 art. 6, art. 7

1.

Cf. pour une société commerciale : Assemblée 1993-03-03, Comité central d'entreprise de la Société d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA), p. 41 ;

pour une association régie par la loi du 1er juillet 1901 : 1993-05-14, Comité d'établissement (métropole/outre-mer) de la Caisse centrale de coopération économique, p. 151 ;

pour d'autres établissements publics : 1993-05-14, Comité d'établissement de la Caisse centrale de coopération économique, p. 151 et Assemblée 1993-06-04, Union des groupements d'achats publics, p. 166. 2.

Cf. pour une société commerciale : Assemblée 1993-03-03, Comité central d'entreprise de la Société d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA) ;

pour une association régie par la loi du 1er juillet 1901 : 1993-05-14, Comité d'établissement de la caisse centrale de coopération économique


Publications
Proposition de citation : CE, 04 jui. 1993, n° 138672;138878;138952
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Stasse
Rapporteur public ?: M. Schwartz
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:138672.19930604
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