Vu, enregistrée le 29 mai 1992 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordonnance en date du 18 mai 1992 par laquelle le président du tribunal administratif de Paris transmet au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le dossier de la demande présentée à ce tribunal par la COMPAGNIE REMBRANDT INVESTISSEMENT ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 avril 1991 et 26 juillet 1991 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentés pour la COMPAGNIE REMBRANDT INVESTISSEMENT, ayant son siège ..., représentée par son président en exercice ; la COMPAGNIE REMBRANDT INVESTISSEMENT demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 21 août 1990 portant classement parmi les monuments historiques des façades et toitures, de la grande salle et de son décor de l'immeuble "la Pagode", sis à ...
... ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la lettre du 27 février 1991 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, lui notifiant ledit décret ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques modifiée ;
Vu le décret du 18 mars 1924 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Seban, Auditeur,
- les observations de Me Capron, avocat de la SOCIETE FOCH-DAUPHINE,
- les conclusions de M. du Marais, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la loi modifiée du 31 décembre 1913 : "L'immeuble appartenant à toute personne autre que celles énumérées aux articles 3 et 4 est classé par arrêté du ministre des beaux-arts s'il y a consentement du propriétaire. (...) A défaut du consentement du propriétaire, le classement est prononcé par un décret en Conseil d'Etat" ; qu'il est constant que, la COMPAGNIE REMBRANDT INVESTISSEMENT, propriétaire de l'immeuble "La Pagode", ayant refusé son consentement au classement de cet immeuble, ce classement a été prononcé par décret en Conseil d'Etat ; que si la société requérante prétend que le décret n° 81-648 du 5 juin 1981 donnait compétence au seul ministre de la culture pour prononcer le classement, le moyen est inopérant dès lors que ledit décret, relatif aux attributions du ministre de l'environnement, est sans rapport avec la réglementation relative aux monuments historiques ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le décret attaqué a été signé par le Premier ministre et contresigné par le ministre de la culture, conformément à l'article 22 de la Constitution ;
Considérant que d'éventuelles irrégularités entachant la notification du décret attaqué au propriétaire sont sans influence sur la légalité de ce décret ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les façades et la toiture de l'immeuble dit "la Pagode", sis ...
..., édifié en 1896 sur les plans de l'architecte Alexandre X..., constitue un témoignage de l'intérêt pour l'art japonais qui s'est manifesté à la fin du siècle dernier ; qu'il en va de même de la grande salle et de son riche décor de stucs et de peintures d'inspiration orientalisante ; que, dans ces conditions, la préservation des façades et toitures de cet édifice, de sa grande salle et du décor de celle-ci, présente un intérêt public de nature à justifier le classement de ces immeubles parmi les monuments historiques en application de la loi modifiée du 31 décembre 1913 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE FOCH-DAUPHINE n'est pas fondée à soutenir que le décret attaqué est entaché d'excès de pouvoir et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Sur les conclusions dirigées contre la lettre du préfet de Paris notifiant le décret attaqué à la société requérante :
Considérant que cette lettre ne constitue pas une décision administrative faisant grief ; que, dès lors, lesdites conclusions sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE FOCH-DAUPHINE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE FOCH-DAUPHINE, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la francophonie.