Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE DE PARIS ; le PREFET DE POLICE DE PARIS demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 mai 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 29 avril 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ramazan X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'article 31-2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 que les Etats parties ne peuvent appliquer aux déplacements des réfugiés en situation irrégulière que les restrictions nécessaires "en attendant que le statut de ces réfugiés dans le pays d'accueil ait été régularisé ou qu'ils aient réussi à se faire admettre dans un autre pays" ; qu'en vertu de la loi du 25 juillet 1952 portant création de l'office français de protection des réfugiés et apatrides il appartient à cet office de statuer, sous le contrôle de la commission des recours, sur les demandes tendant à ce que soit reconnue à un étranger la qualité de réfugié au sens de l'article 1er de la convention du 28 juillet 1951 précitée ;
Considérant que ces dispositions impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, par la commission des recours des réfugiés ;
Considérant que si le délai de pourvoi en cassation contre une décision de la commission de recours des réfugiés ne court qu'à compter de sa notification régulière à la partie en litige, une telle décision produit ses effets juridiques à compter de sa lecture en séance publique ;
Considérant que, par décision du 26 février 1992, produite devant le Conseil d'Etat par le PREFET DE POLICE DE PARIS, la commission de recours des réfugiés a confirmé le refus d'admission au statut de réfugié opposé à M. X... par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 19 avril 1990 ; qu'ainsi, et alors même que M. X... n'en avait pas encore régulièrement reçu notification, le PREFET DE POLICE DE PARIS n'a pas commis d'erreur de droit en se fondant sur cette décision juridictionnelle pour refuser dès le 26 février 1992, par une décision notifiée le même jour, le renouvellement de l'autorisation provisoire de séjour dont avait bénéficié M. X... en qualité de demandeur d'asile et l'inviter à quitter le territoire ; qu'il suit de là que le PREFET DE POLICE DE PARIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son arrêté de reconduite à la frontière du 29 avril 1992, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'illégalité de la décision d'invitation à quitter le territoire français en date du 26 février 1992 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... ;
Considérant, d'une part, que la circonstance que M. X... ait formé le 3 mars 1992 un recours gracieux, dépourvu d'effet suspensif, contre le refus de titre de séjour en date du 26 février 1992 dont, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait été illégal, ne faisait pas par elle-même obstacle à l'intervention le 29 avril 1992 d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant, d'autre part, que si M. X... a fait valoir qu'il vit chez un cousin et qu'il a une promesse d'embauche, il ne résulte pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué ait porté atteinte à sa vie familiale ou que le PREFET DE POLICE DE PARIS ait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences d'une mesure de reconduite sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE DE PARIS est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 23 mai 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE DE PARIS, à M. X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.