Vu le recours enregistré le 13 décembre 1991 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de la culture et de la communication ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 octobre 1991 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de M. Y..., l'arrêté du 20 mai 1986 par lequel le préfet de la région Rhône-Alpes, préfet du Rhône, a inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques la maison de Max Ernst au lieu-dit "Les Alliberts" à Saint-Martin d'Ardèche ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi du 31 décembre 1913 modifiée sur les monuments historiques ;
Vu le décret du 18 mars 1924 modifié portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Seban, Auditeur,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1913 : "Les immeubles dont la conservation présente, au point de vue de l'histoire ou de l'art, un intérêt public, sont classés monuments historiques en totalité ou en partie (...). A compter du jour où l'administration des beaux-arts notifie au propriétaire sa proposition de classement, tous les effets du classement s'appliquent de plein droit à l'immeuble visé. Ils cessent de s'appliquer si la décision de classement n'intervient pas dans les douze mois de cette notification" ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : "Les immeubles ou parties d'immeubles publics ou privés qui, sans justifier une demande de classement immédiat, présentent un intérêt d'histoire ou d'art suffisant pour en rendre désirable la préservation pourront, à toute époque, être inscrits, par arrêté du commissaire de la République de région, sur un inventaire supplémentaire" ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'un immeuble placé sous le régime transitoire de l'instance de classement fasse l'objet d'une mesure d'inscription à l'inventaire supplémentaire, dès lors que ladite mesure peut intervenir à toute époque ; qu'ainsi c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon s'est fondé, pour annuler l'arrêté attaqué, sur la circonstance que celui-ci concernait un immeuble placé sous le régime de l'instance de classement ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y..., devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 5 du décret modifié du 18 mars 1924 : "Lorsque les différentes parties d'un immeuble font à la fois l'objet, les unes, d'une procédure de classement, les autres, d'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, les arrêtés correspondants sont pris par le ministre chargé de la culture" ; que par l'arrêté attaqué, le préfet de la région Rhône-Alpes a décidé l'inscription à l'inventaire supplémentaire de la totalité de la maison dite de Max X... à Saint-Martin d'Ardèche, au lieu dit "les Alliberts" ; que par suite les dispositions précitées ne trouvaient pas à s'appliquer, nonobstant la circonstance qu'ultérieurement certains éléments du décor de cette maison ont fait l'objet d'un classement par décret en Conseil d'Etat ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que l'inscription d'un immeuble soit précédée d'une visite sur place de l'administration des affaires culturelles ; que l'administration n'était pas tenue d'informer M. Y... de sa volonté de poursuivre l'inscription de l'immeuble lui appartenant à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; que la commission régionale du patrimoine historique, archéologique et ethnologique n'était pas tenue d'entendre M. Y... ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la maison dite de Max X..., à Saint-Martin d'Ardèche, constitue un témoignage significatif d'une période importante de la vie et de l'oeuvre du peintre Max X..., qui l'a enrichie de divers éléments de décor peints ou sculptés ; qu'elle présente, dès lors, un intérêt d'histoire et d'art suffisant pour en rendre désirable la préservation, de nature à justifier légalement la mesure d'inscription sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques prononcée par l'arrêté litigieux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la culture et de la communication est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 20 mai 1986 par lequel le préfet de la région Rhône-Alpes a inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques la maison dite de Max X..., située à Saint-Martin d'Ardèche au lieu-dit "Les Alliberts" ;
Article 1er : Le jugement en date du 3 octobre 1991 du tribunal administratif de Lyon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de la culture et de la francophonie et à M. Y....