Vu 1°) sous le n° 146 445, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 mars 1993 et 12 mai 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Syndicat des greffiers de France dont le siège est ... ; le Syndicat des greffiers de France demande que le Conseil d'Etat annule :
1°) l'arrêté interministériel en date du 16 mars 1993 relatif aux spécialités des greffiers en chef et des greffiers des services judiciaires ;
2°) l'arrêté interministériel en date du 16 mars 1993 relatif à la prise en compte des spécialités des greffiers des services judiciaires et aux modalités transitoires de leur attribution ;
3°) l'arrêté interministériel du 16 mars 1993 relatif à la prise en compte des spécialistés des greffiers en chef des services judiciaires et aux modalités transitoires de leur attribution ;
Vu 2°) sous le n° 146 756, la requête, enregistrée le 2 avril 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'Union syndicale autonome Justice (U.S.A.J) dont le siège est sis ... au Roi à Paris (75011) représentée par son secrétaire général à ce dûment habilité ; l'Union syndicale autonome Justice (U.S.A.J) demande que le Conseil d'Etat annule :
1°) l'arrêté interministériel en date du 16 mars 1993 relatif aux spécialités des greffiers en chef et des greffiers des services judiciaires ;
2°) l'arrêté interministériel en date du 16 mars 1993 relatif à la prise en compte des spécialités des greffiers des services judiciaires et aux modalités transitoires de leur attribution ;
3°) l'arrêté interministériel du 16 mars 1993 relatif à la prise en compte des spécialités des greffiers en chef des services judiciaires et au modalités transitoires de leur attribution ;
4°) la condamnation de l'Etat à verser 20 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu 3°) sous le n° 152 546, la requête, enregistrée le 5 octobre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le Syndicat des greffiers de France dont le siège est ... représenté par son secrétaire général ; le Syndicat des greffiers de France demande que le Conseil d'Etat annule la décision implicite par laquelle le garde des sceaux ministre de la justice a rejeté sa demande en date du 10 mai 1993 tendant à l'abrogation des dispositions des articles 19, 21 et 38 du décret n° 92-413 du 30 avril 1992 portant statut particulier des greffiers en chef des services judiciaires ainsi que des articles 15, 17 et 31 du décret n° 92-414 du 30 avril 1992 portant statut particulier des greffiers des services judiciaires ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'organisation judiciaire ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 82-452 du 28 mai 1982 ;
Vu le décret n° 85-607 du 14 juin 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Ronteix, Conseiller d'Etat,- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Syndicat des greffiers de France,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 146 445 et 152 546 du Syndicat des greffiers de France et 146 756 de l'Union syndicale autonome Justice présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et dirigée contre la requête n° 152 546 du Syndicat des greffiers de France :
Sur la légalité des articles 19, 21 et 38 du décret n° 92-413 et des articles 15, 17 et 31 du décret n° 92-414 du 30 avril 1992 :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : "Le droit à la formation permanente est reconnu aux fonctionnaires. Ceux-ci peuvent être tenus de suivre des actions de formation professionnelle dans les conditions fixées par les statuts particuliers" ;
Considérant, d'une part, que les articles 19 du décret n° 92-413 et 15 du décret 92-414, après avoir prévu la possibilité d'une formation permanente pour les greffiers et greffiers en chef dans une des quatre spécialités qu'ils annoncent, renvoient pour chacun de ces corps à un arrêté du garde des sceaux la détermination de ces quatre spécialités ; que les articles 21 et 17 de ces deux mêmes décrets renvoient à l'arrêté la détermination de la validation de l'évaluation des connaissances acquises grâce à l'enseignement de ces spécialités ; qu'eu égard à leur objet, de telles subdélégations ne sont pas entachées d'illégalités ;
Considérant, d'autre part, que le premier alinéa des articles 38 du décret n° 92-413 et 31 du décret n° 92-414 dispose que "la spécialité obtenue dans le cadre de la formation constitue, sous réserve de l'intérêt du service, l'un des critères pris en compte pour les changements d'affectation" ; que le dernier alinéa de ces deux arrêtés a pu, alors que ce premier alinéa fixe avec une précision suffisante l'influence de l'acquisition d'une spécialité sur les changements d'affectation, renvoyer à un arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice et du ministre de la fonction publique le soin de fixer les modalités d'application de ce premier alinéa ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Syndicat des greffiers de France n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté sa demande du 10 mai 1993 tendant à l'abrogation des dispositions des articles 19, 21 et 38 du décret n° 92-413 et 15, 17 et 31 du décret n° 92-414 ;
Sur les conclusions dirigées contre les trois arrêtés interministériels en date du 16 mars 1993 :
Considérant que les articles 3 de chacun des arrêtés relatifs à la prise en compte des spécialités et aux modalités de leur attribution prévoient l'un pour les greffiers, l'autre pour les greffiers en chef des services judiciaires, que leurs changements d'affectation peuvent être subordonnés à la détention d'au moins une spécialité ; que de telles dispositions, qui ne contraignent pas l'administration à refuser à ces agents un changement d'affectation dès lors qu'ils ne seraient pas titulaires d'au moins une spécialité mais se bornent à lui en laisser la possibilité, ne sont pas en contradiction avec les dispositions du premier alinéa de l'article 31 du décret du 30 avril 1992 portant statut particulier des greffiers ou du premier alinéa de l'article 38 du décret du même jour portant statut particulier des greffiers en chef, qui disposent l'un et l'autre que la spécialité est l'un des critères pris en compte pour les changements d'affectation ;
Considérant que les arrêtés litigieux ont été pris en application des décrets susvisés du 30 avril 1992 portant statut particulier respectivement des greffiers et des greffiers en chef ; que, dès lors, les dispositions du décret du 14 juin 1985 relatif à la formation professionnelle des fonctionnaires de l'Etat, dont le champ d'application est étranger à ces décrets, ne peuvent être utilement invoquées par les requérants ; que ceux-ci ne peuvent davantage se prévaloir de la méconnaissance du document d'orientation élaboré en application de ce dernier décret, ce document se bornant à convenir de plans de formation professionnelle et n'ayant pas de caractère réglementaire ;
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 13 du décret susvisé du 28 mai 1982, le comité technique paritaire central institué auprès du directeur des services judiciaires était compétent pour examiner, comme il l'a fait le 12 mars 1993, les arrêtés attaqués qui traitent de "questions intéressant les services placés sous l'autorité de ce directeur", mais ne modifient pas les règles statutaires régissant ces personnels, lesquelles ont été arrêtées par les décrets du 30 avril 1992 ;
Considérant que, si en application de l'article R.812-16 du code de l'organisation judiciaire, le greffier en chef fixe l'affectation des fonctionnaires placés sous son autorité à l'intérieur des divers services du siège et du parquet, après avoir éventuellement recueilli l'avis du magistrat intéressé, les arrêtés attaqués ne portent pas atteinte aux prérogatives du greffier en chef prévues par cet article ;
Considérant quil ressort des pièces du dossier que les textes litigieux ont été examinés par le comité technique paritaire compétent le 12 mars, signés le 16 mars et publiés au Journal officiel le 19 mars 1993 ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le décret aurait été pris avant la consultation du comité n'est pas fondé ;
Considérant, enfin, que comme il a été dit ci-dessus, les décrets statutaires susvisés ont pu, sans excès de pouvoir, renvoyer à un arrêté la fixation des quatre spécialités qu'ils annoncent pour chacun des corps concernés ; que l'arrêté relatif aux spécialités des greffiers en chef et des greffiers pris dans le cadre de cette délégation, qui se borne à fixer la liste des quatre spécialités que peuvent détenir les greffiers d'une part, les greffiers en chef, d'autre part, ne méconnaît aucune disposition du décret applicable à ces agents ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Syndicat des greffiers de France et l'Union syndicale autonome Justice ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du garde des sceaux, ministre de la justice et du ministre d'Etat, ministre de la fonction publique et des réformes administratives ;
Sur les conclusions de l'Union syndicale autonome Justice tendant à la condamnation de l'Etat au titre de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 "Dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou à défaut la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'Union syndicale autonome Justice la somme de 20 000 F qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de l'Union syndicale autonome Justice et du Syndicat des greffiers de France sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union syndicale autonome Justice, au Syndicat des greffiers de France, au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de la fonction publique.