Vu le recours du ministre de la défense, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 10 mai 1989 ; le ministre de la défense demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 janvier 1989 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. Corentin X..., sa décision implicite par laquelle il a rejeté la demande présentée par M. X... tendant à ce que lui soit versée l'allocation d'assurance pour perte involontaire d'emploi ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret n° 57-288 du 9 mars 1957 ;
Vu l'arrêté du 11 décembre 1985 portant agrément de la convention du 19 novembre 1985 relative à l'assurance-chômage et du règlement annexé à cette convention ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Méda, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 351-12 du code du travail : "Ont droit aux allocations d'assurance-chômage dans les conditions prévues à l'article L. 351-3 : 1°) les agents non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs ..." ; qu'aux termes du règlement annexé à la convention du 19 novembre 1985 relative à l'assurance-chômage, agréée par arrêté du 11 décembre 1985 du ministre du travail, sont regardés comme travailleurs involontairement privés d'emplois et définis comme bénéficiaires d'allocations constituant un revenu de remplacement "les salariés licenciés, les salariés arrivés en fin de contrat à durée indéterminée et les salariés démissionnaires pour un motif reconnu légitime ..." ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 9 mars 1957 relatif aux limites d'âge des ouvriers de la défense nationale : "L'âge au-delà duquel les ouvriers de la défense nationale ne peuvent être maintenus en service est, en principe, fixé à soixante ans. Cependant, cet âge limite est reculé d'année en année jusqu'à soixante-cinq ans, sur la demande des intéressés s'ils satisfont à un examen médical, professionnel et, éventuellement, psychotechnique" et qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret : "Le recul de l'âge limite des ouvriers de la défense nationale peut ne pas être accordé en cas de réduction d'effectif, résorption de surnombre, fermeture ou changement d'implantation de l'établissement employeur" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la limite d'âge applicable aux ouvriers de la défense nationale est fixée, en principe, à soixante ans ; que ces agents n'ont droit au bénéfice d'un recul de cette limite qu'à la condition d'avoir obtenu l'accord de l'autorité administrative ; qu'ainsi, lorsque celle-ci refuse de reculer la limite d'âge applicable à un ouvrier de la défense nationale, celui-ci doit être regardé comme ayant perdu son emploi, non du fait d'une décision de licenciement, mais par la seule application des dispositions fixant à soixante ans la limite d'âge applicable aux ouvriers de la défense nationale ; que, par suite, il ne peut prétendre au bénéfice des allocations d'assurance-chômage prévues à l'article L. 351-12 du code du travail ;
Considérant que M. X..., technicien à statut ouvrier à la direction des constructions et armes navales à Lorient, a été mis à la retraite lorsqu'il a atteint l'âge de soixante ans, la demande qu'il avait présentée en vue de bénéficier du recul d'une année de la limite d'âge ayant été rejetée ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que son admission à la retraite n'a pas constitué une décision de licenciement ; que, par suite, M. X... ne pouvait prétendre à l'attribution des allocations d'assurance-chômage prévues par les prescriptions précitées du code du travail ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la défense est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite de rejet de la demande d'allocation d'assurance-chômage présentée par M. X... ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Rennes en date du 23 janvier 1989 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... au tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de la défense et à M. Corentin X....