Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Solange Y..., demeurant ... et par Mlle Mireille X..., demeurant au lieu dit "Les Clouis" à Grandchamps des Fontaines (44119) ; Mme Y... et Mlle X... demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 5 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 25 février 1986 du conseil général de la Loire-Atlantique attribuant des subventions à des établissements privés d'enseignement ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette délibération ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 30 octobre 1886 ;
Vu la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 ;
Vu le code de l'enseignement technique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gervasoni, Auditeur,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la circonstance que le tribunal administratif n'a admis la recevabilité de la demande commune que lui avaient présentée Mlle X... et Mme Y... qu'en ce qu'elle émanait de cette dernière n'est, en tout état de cause, pas de nature à entacher le jugement attaqué d'irrégularité, dès lors que ladite demande a fait l'objet d'un examen au fond ;
Sur la légalité de la délibération du 25 février 1986 du conseil général de la Loire-Atlantique :
En ce qui concerne les subventions de fonctionnement à l'enseignement professionnel, le plan d'équipement en machines-outils et l'équipement des établissements du second degré :
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la délibération attaquée que si le conseil général de la Loire-Atlantique a entendu accorder diverses subventions de fonctionnement et d'équipement à des établissements techniques et secondaires privés pour des montants de 1 956 210 F, 2 500 000 F et 2 288 000 F, il n'a ni désigné les établissements bénéficiaires ni fixé le montant des subventions accordées à chacun d'eux mais a laissé à la direction diocésaine de l'enseignement catholique le soin de répartir entre les établissements les subventions dont il a arrêté le montant global ;
Considérant que si le conseil général à la faculté d'accorder, dans les conditions prévues par la loi certaines subventions à des établissements d'enseignement privés, il lui appartient de désigner lui-même les établissements bénéficiaires et de fixer le montant de chaque subvention en fonction tant des règles fixées par les dispositions applicables aux différentes catégories d'établissement que de l'intérêt que chaque opération pour laquelle une subvention est accordée présente pour le département ; qu'en s'en remettant à une personne privée du soin d'exercer cette compétence et, alors même que la délibération prévoit que des justificatifs des subventions accordées à chaque établissement devront être fournis au conseil général à la fin de l'exercice, le conseil général a entaché sa délibération d'illégalité ;
En ce qui concerne les prêts aux écoles primaires privées :
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés éclairée par les travaux préparatoires, que le législateur a entendu définir limitativement les conditions dans lesquelles des fonds publics pouvaient, par dérogation à la loi du 30 octobre 1886 qui demeure en vigueur, être utilisés au bénéfice des écoles primaires privées ; qu'aucune disposition de cette loi n'autorise les départements à consentir une aide financière sous quelque forme que ce soit à des écoles primaires privées ni à prendre en charge, même partiellement et de façon temporaire, en cas de carence des communes, les dépenses de fonctionnement d'écoles primaires privées sous contrat d'association que la loi met à la charge de celles-ci ; qu'il suit de là que la délibération attaquée, en tant qu'elle décide d'accorder des prêts d'un montant total de 1 062 553 F à des écoles primaires privées est entachée d'excès de pouvoir ;
En ce qui concerne la subvention accordée au collège Saint-Paul à Rezé :
Considérant que Mme Y... et Mlle X... n'articulent aucun moyen à l'encontre de cette disposition de la délibération attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y... et Mlle X... sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs conclusions dirigées contre la délibération du 25 février 1986 en tant qu'elle attribue des subventions d'équipement et de fonctionnement à des établissements techniques et secondaires privés et des prêts à des écoles primaires privées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 5 octobre 1988 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de Mme Y... et de Mlle X... dirigées contre la délibération du conseil général de la Loire-Atlantique en date du 25 février 1986 accordant des subventions de fonctionnement et d'équipement à des établissements privés d'enseignement secondaire et technique et des prêts à des écoles primaires privées.
Article 2 : La délibération du 25 février 1986 est annulée en tant qu'elle accorde des subventions de fonctionnement et d'équipement à des établissements privés d'enseignement secondaire et technique et des prêts à des écoles primaires privées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande et de la requête de Mme Y... et de Mlle X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Solange Y..., à Mlle Mireille X..., au département de la Loire-Atlantique, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et au ministre de l'éducation nationale.