Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 30 octobre 1992 et 25 février 1993, présentés pour le DEPARTEMENT DE PARIS par Me Foussard, avocat au Conseil d'Etat ; le DEPARTEMENT DE PARIS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 15 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme X..., la décision en date du 24 juillet 1990 par laquelle l'attaché des services extérieurs de la direction de l'action sociale, de l'enfance et de la santé du DEPARTEMENT DE PARIS a opposé un refus à sa demande de consultation du dossier de pupille de l'Etat de sa mère, Mme Y... ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives ;
Vu le décret n° 79-1038 du 3 décembre 1979 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Colmou, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Foussard, avocat du Conseil de Paris,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que pour refuser à Mme X..., par sa décision du 24 juillet 1990, la possibilité de consulter le dossier de pupille de l'Etat de sa mère née le 20 février 1909 et décédée le 18 janvier 1985, le président du Conseil de Paris s'est fondé sur le motif que la communication de ce document était régie par les dispositions de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives et ne pouvait intervenir que dans des délais de 100 à 120 ans après la naissance de l'intéressée ;
Considérant d'une part qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 3 janvier 1979 : "Les documents dont la communication était libre avant leur dépôt aux archives publiques continueront à être communiqués sans restriction d'aucune sorte à toute personne qui en fera la demande. - Les documents visés à l'article 1er de la loi du 17 juillet 1978 susvisée portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal demeurent communicables dans les conditions fixées par cette loi. - Tous les autres documents d'archives publiques pourront être librement consultés à l'expiration d'un délai de trente ans ou dans des délais spéciaux prévus à l'article 7 de ladite loi" ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives : "Le délai au-delà duquel les documents d'archives publiques peuvent être librement consultés est porté à ... 5°) soixante ans à compter de la date de l'acte pour les documents qui contiennent des informations mettant en cause la vie privée ou intéressant la sûreté de l'Etat ou la défense nationale, et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat." ;
Considérant que, si les dossiers de pupille de l'Etat n'ont pas été expressément cités dans la liste des documents relatifs à la vie privée, fixée par le décret susvisé du 3 décembre 1979, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce qu'une application directe puisse être faite du délai prévu à l'article 7-5° de la loi du 3 janvier 1979 précité aux demandes de communication de dossiers qui mettent en cause la vie privée ; que le dossier de pupille de l'Etat dont Mme X... demande communication et dont il n'est pas établi qu'il comporterait des documents relevant d'autres exceptions prévues à l'article 7 de la loi, était ainsi communicable dans un délai de soixante ans à compter de la date des actes ; que, par suite, le président du Conseil de Paris n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 24 juillet 1990 opposant un refus à la demande de Mme X... tendant à la communication du dossier de pupille de l'Etat de sa mère ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE PARIS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE PARIS, à Mme X... et au ministre du travail et des affaires sociales.