Vu la requête enregistrée le 15 mai 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le département de Loire-Atlantique, représenté par le président en exercice du conseil général ; le département de Loire-Atlantique demande que le Conseil d'Etat annule la décision du 17 mai 1994 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a, sur recours de Mme Annick X..., annulé la décision du président du conseil général maintenant à un taux réduit le montant de son allocation compensatrice et la décision de la commission départementale d'aide sociale en date du 16 mai 1992 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 et notamment son article 39 ;
Vu le décret n° 77-1549 du 31 décembre 1977 et notamment son article 10 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-905 du 2 septembre 1988 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévy, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe II de l'article 39 de la loi susvisée du 30 juin 1975 : "Les dispositions du paragraphe III de l'article 35 (...) sont applicables à l'allocation" (compensatrice), le plafond de ressources étant augmenté du montant de l'allocation accordée". / Toutefois les ressources provenant de son travail ne sont prises en compte que partiellement pour le calcul des ressources de l'intéressé" ; que selon l'article 35 de la même loi, codifié à l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale : "L'allocation aux adultes handicapés peut se cumuler avec les ressources personnelles de l'intéressé et, s'il y a lieu, de son conjoint dans la limite d'un plafond fixé par décret, qui varie selon qu'il est marié et a une ou plusieurs personnes à sa charge" ; que l'article 10 du décret du 31 décembre 1977 pris pour l'application de l'article 39 précité de la loi du 30 juin 1975 dispose que : "Le revenu dont il est tenu compte pour l'application de la condition de ressources (...) est évalué selon les modalités fixées à l'article 3 du décret du 16 décembre 1975 modifié par le décret du 15 mars 1978", soit le revenu net fiscal de la période de référence ; que, toutefois, l'article 10 du décret du 31 décembre 1977 prévoit que : "Le quart seulement des ressources provenant du travail de la personne handicapée est pris en compte dans cette évaluation. Sont considérés comme ressources provenant du travail de la personne handicapée les rémunérations versées aux stagiaires de la formation professionnelle" ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'elles font expressément référence, pour déterminer le champ d'application de la règle de prise en compte partielle des ressources du travail qu'elles prévoient, aux ressources provenant du travail de la seule personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation compensatrice ; que, lorsque le conjoint de la personne handicapée qui sollicite l'allocation est également handicapé et susceptible de bénéficier lui-même de l'allocation, il y a lieu de prendre en compte, pour déterminer si les ressources du demandeur sont inférieures au plafond fixé pour un couple, le revenu net fiscal du couple, mais que le montant de l'abattement sur les ressources provenant du travail, qui vient en déduction dudit revenu, ne peut porter que sur les seules ressources provenant du travail de la personne handicapée, qui demande à bénéficier de l'allocation ; que la circonstance dont fait état Mme X... selon laquelle son époux qui percevait des ressources supérieures aux siennes bénéficierait de l'allocation à taux plein, alors qu'elle n'en bénéficierait qu'à taux partiel, dans l'hypothèse où l'ensemble des ressources provenant du travail des deux conjoints handicapés ne se verrait pas affecté de l'abattement litigieux pour la détermination des droits de chacun d'entre eux à l'allocation compensatrice, ne peut, en toute hypothèse, faire obstacle à l'application de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le département de LoireAtlantique est fondé à soutenir que c'est par une inexacte application des dispositions précitées que la commission centrale d'aide sociale a fait droit à la requête de Mme X... dirigée contre la décision de la commission départementale d'aide sociale de Loire-Atlantique du 16 mars 1992 en tant qu'elle porte sur la période courant du 1er juillet 1991, au motif que le revenu net fiscal d'un couple de personnes handicapées comprenant l'ensemble de leurs ressources provenant du travail, il y a lieu d'appliquer l'abattement portant sur ces ressources non seulement à celles du demandeur, mais encore à celles de son conjoint ; que, dès lors, la décision de la commission centrale doit être, dans cette mesure, annulée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 juillet 1987 le Conseil d'Etat s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander que ne soit pris en compte pour la détermination des ressources à comparer au plafond applicable pour l'appréciation de son droit à l'allocation compensatrice que le quart des ressources provenant du travail de son époux ;
Considérant, d'autre part, que si Mme X... fait valoir devant le Conseil d'Etat qu'une procédure de divorce est en cours devant le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nantes et qu'elle vit avec ses enfants séparée de son époux depuis février 1996, ces circonstances, survenues dans une période postérieure à celle qui est en litige, ne peuvent être utilement invoquées ;
Article 1er : L'article 1er de la décision de la commission centrale d'aide sociale en date du 13 septembre 1994 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de Mme X... dirigées contre la décision de la commission départementale d'aide sociale de Loire-Atlantique en date du 16 mars 1992 en tant qu'elle porte sur la période courant du 1er juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Annick X..., au président du conseil général de Loire-Atlantique et au ministre de l'emploi et de la solidarité.