Vu le recours du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme et son mémoire complémentaire, enregistrés le 7 septembre 1994 et le 5 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 29 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a, à la demande de la S.C.I. de la Faucherie, de Mme Y... et de Mme X..., d'une part, annulé sa décision du 28 février 1992 décidant la mise en oeuvre sur certaines parcelles du plan de servitudes aéronautiques de dégagement sur l'aéorodrome de La Rochelle-Laleu, d'autre part, condamné l'Etat à verser à la S.C.I. de la Faucherie et autres une somme globale de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
2°) rejette les conclusions de la demande présentée par la S.C.I. de la Faucherie, Mme Y... et Mme X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'expropriation ;
Vu le décret du 7 décembre 1984 instituant des servitudes aéronautiques pour la protection des dégagements de l'aérodrome de La Rochelle-Laleu ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Auditeur,
- les observations de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de la S.C.I. de la Faucherie et autres,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article R. 241-1 du code de l'aviation civile relatif à l'institution de servitudes aéronautiques, dispose que celles-ci comprennent : "1°) Des servitudes aéronautiques de dégagement comportant l'interdiction de créer ou l'obligation de supprimer les obstacles susceptibles de constituer un danger pour la circulation aérienne ..." ; que l'article R. 242-1 du même code prévoit qu'il est établi pour chaque aérodrome un plan de servitudes aéronautiques de dégagement et que les servitudes définies par ce plan grèvent les fonds intéressés au jour de la publication de ce dernier ; qu'en vertu du même article ce plan "est approuvé et rendu exécutoire par décret en Conseil d'Etat, à moins que les conclusions du rapport d'enquête, les avis des services et des collectivités publiques intéressés ne soient favorables, auquel cas il est statué par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile ..." ; qu'aux termes de l'article D. 242-11 du même code : "Lorsque les servitudes instituées par le plan de dégagement impliquent soit la suppression ou la modification de bâtiments constituant des immeubles par nature, soit une modification de l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain, la mise en application des mesures correspondantes est subordonnée dans chaque cas à une décision du ministre chargé de l'aviation civile ... Cette décision est notifiée aux intéressés conformément à la procédure appliquée en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique" ;
Considérant que, par la décision litigieuse du 28 février 1992, prise sur le fondement de l'article D. 242-11 précité et qui présente le caractère d'un acte individuel, le ministre chargé de l'aviation civile a ordonné la suppression, par les propriétaires de quatre parcelles sises dans le parc de la Faucherie à La Rochelle (Charente-Maritime), "des obstacles gênants (arbres) dépassant les cotes limites de dégagement" fixées dans le plan de servitudes aéronautiques de dégagement de l'aérodrome de La Rochelle-Laleu approuvé par le décret à caractère réglementaire du 7 décembre 1984 ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au regard notamment des perspectives d'évolution du trafic aérien et du développement des autres moyens de desserte de la région de La Rochelle, les circonstances de fait n'étaient pas, à la date de la décision attaquée du 28 février 1992, de nature à rendre nécessaire l'abattage de la plupart des arbres du parc paysager, ancien et de qualité, de la Faucherie ; qu'une telle mesure n'était pas non plus exigée par des impératifs de sécurité ; que la décision litigieuse de mettre en application les prescriptions du décret du 7 décembre 1984 relatives au parc de la Faucherie n'était, par suite, pas légalement justifiée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a, à la demande de la S.C.I. de la Faucherie et autres, annulé sa décision en date du 28 février 1992 ;
Sur les conclusions présentées par la S.C.I. de la Faucherie, Mme Y... et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à la S.C.I. de la Faucherie, à Mme Y... et à Mme X... une somme totale de 15 000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'équipement, des transports et du tourisme est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la S.C.I. de la Faucherie, à Mme Y... et à Mme X... une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.C.I. de la Faucherie, à Mme Y..., à Mme X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.