Vu la requête enregistrée le 5 novembre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Amara X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 24 avril 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 avril 1996 par lequel le préfet de police a décidé de le reconduire à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête :
Considérant que les dispositions du 2 de l'article 31 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et celles de la loi du 25 juillet 1952 modifiée impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; que, par suite, les documents qui sont délivrés aux personnes qui sollicitent le titre de réfugié doivent être regardés comme autorisant le séjour régulier des intéressés ; qu'ainsi, après le rejet par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la commission des recours d'une demande présentée par un étranger qui a bénéficié à ce titre d'autorisations provisoires de séjour, le préfet, s'il peut faire usage des dispositions de l'article 22-I, 6° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, ne peut sans erreur de droit se fonder, pour ordonner la reconduite à la frontière de l'intéressé sur les dispositions de l'article 22-I, 1° et 22-I, 2° aux termes duquel : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré" ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X..., de nationalité malienne, a sollicité la reconnaissance de la qualité de réfugié le 16 février 1988 ; que l'office français de protection des réfugiés et apatrides s'est prononcé sur cette demande le 24 mars 1988 et la commission des recours le 15 avril 1989 ; qu'à la suite de ce rejet, le préfet du Val-de-Marne l'a invité à quitter le territoire, par une décision notifiée le 2 juillet 1992 ; qu'interpellé le 22 avril 1996, ce dernier a fait l'objet le même jour d'un arrêté de reconduite à la frontière pris par le préfet de police ; que cet arrêté est exclusivement fondé sur les dispositions de l'article 22-I, 1° et 22-I, 2° de l'ordonnance de 1945 ; qu'il est ainsi entaché d'erreur de droit ; qu'il en résulte que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 22 avril 1996 ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 24 avril 1996 et l'arrêté du préfet de police du 22 avril 1996 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. AMARA X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.