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30/12/1998 | FRANCE | N°182783

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 30 décembre 1998, 182783


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 octobre 1996 et 28 janvier 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE dont le siège est à Cusset, B.P. 93 (03303) ; le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 2 du décret du 30 juillet 1996 relatif à l'appellation d'origine contrôlée "Miel de sapin des Vosges", en tant qu'il oblige les producteurs à réaliser les opérations d'extraction et de décantation à l'intérieur de la zone

d'appellation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlemen...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 octobre 1996 et 28 janvier 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE dont le siège est à Cusset, B.P. 93 (03303) ; le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 2 du décret du 30 juillet 1996 relatif à l'appellation d'origine contrôlée "Miel de sapin des Vosges", en tant qu'il oblige les producteurs à réaliser les opérations d'extraction et de décantation à l'intérieur de la zone d'appellation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement CEE n° 2081/92 du Conseil du 14 juillet 1992 ;
Vu le code de la consommation, notamment ses articles L. 115-6 et L. 115-20 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stefanini, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Parmentier, avocat de l'Institut national des appellations d'origine,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE conteste le décret du 30 juillet 1996 relatif à l'appellation d'origine contrôlée "Miel de sapin des Vosges" en tant qu'il oblige les bénéficiaires de cette appellation à réaliser les opérations d'extraction et de décantation du miel à l'intérieur de la zone qu'il délimite ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'Institut national des appellations d'origine :
Considérant que l'article 2 du règlement CEE du 14 juillet 1992 du Conseil définit l'appellation d'origine comme "Le nom d'une région, d'un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, d'un pays, qui sert à désigner un produit agricole ou une denrée alimentaire : / originaire de cette région, de ce lieu déterminé ou de ce pays et / - dont la qualité ou les caractères sont dus essentiellement ou exclusivement au milieu géographique comprenant les facteurs naturels et humains, et dont la production, la transformation et l'élaboration ont lieu dans l'aire géographique délimitée" ; qu'aux termes de l'article L. 115-20 du code de la consommation : "Après avis des syndicats de défense intéressés, l'Institut national des appellations d'origine propose la reconnaissance des appellations d'origine contrôlées, laquelle comporte la délimitation des aires géographiques de production et d'agrément de chacune de ces appellations d'origine contrôlée" ; qu'aux termes de l'article L. 115-6 du même code, l'appellation d'origine contrôlée des produits agricoles ou alimentaires "est définie par décret sur proposition de l'Institut national des appellations d'origine ( ...)/ Le décret délimite l'aire géographique de production et détermine les conditions de production et d'agrément du produit" ;
Sur la légalité externe du décret attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les syndicats professionnels intéressés ont pu faire valoir leur point de vue lors de l'enquête portant sur la définition de l'appellation "Miel de sapin des Vosges" et sur la délimitation de l'aire géographique concernée ; que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, l'Institut national des appellations d'origine s'est entouré, lors de l'instruction du dossier, de l'avis d'experts apicoles ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les avis émis par ces experts auraient été modifiés à leur insu ; que le syndicat requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le décret attaqué aurait été pris à la suite d'une procédure irrégulière ;
Sur la légalité interne :
Considérant que le miel est produit par extraction et décantation par l'homme après son élaboration par les abeilles ; que par suite, le décret attaqué n'a pas méconnu les usages de la profession d'apiculteur en considérant que ces opérations faisaient partie de la production du miel au sens des dispositions précitées du règlement du 14 juillet 1992 et de l'article L. 115-6 du code de la consommation et en prévoyant par voie de conséquence que seuls les exploitants qui les réaliseraient dans l'aire géographique délimitée pourraient bénéficier de l'appellation contrôlée ;

Considérant que les dispositions précitées du règlement du 14 juillet 1992 et del'article L. 115-6 du code de la consommation ont pour objet de réserver le bénéfice de l'appellation contrôlée aux exploitants qui réalisent toutes les étapes de la production dans la zone délimitée ; que le décret attaqué s'est borné à faire application de ces dispositions ; qu'eu égard à l'objet même du régime légal des appellations d'origine contrôlée, le syndicat requérant ne saurait utilement se prévaloir de la circonstance que le décret attaqué aurait pour effet de porter atteinte au principe d'égalité en créant une discrimination au détriment des apiculteurs qui réalisent certaines phases de la production en dehors de cette zone ; qu'ainsi, la légalité de ce décret ne peut, sur ce point, être contestée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'article 2 du décret du 30 juillet 1996 en tant qu'il oblige les bénéficiaires de l'appellation à réaliser les opérations d'extraction et de décantation du miel à l'intérieur de l'aire géographique qu'il détermine ;
Sur les conclusions de l'Institut national des appellations d'origine tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner le syndicat requérant à payer à l'Institut national des appellations d'origine la somme de 15 000 F que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE est rejetée.
Article 2 : Le SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE est condamné à payer à l'Institut national des appellations d'origine une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DES PRODUCTEURS DE MIEL DE FRANCE, à l'Institut national des appellations d'origine, au Premier ministre et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 182783
Date de la décision : 30/12/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 AGRICULTURE - CHASSE ET PECHE - PRODUITS AGRICOLES - GENERALITES - Appellations d'origine contrôlée - Définition des opérations de production - de transformation et d'élaboration du produit - Contrôle du juge - Contrôle normal (1).

03-05-01, 14-02-01-03, 54-07-02-03 Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la définition des opérations de production, de transformation et d'élaboration d'un produit agricole ou alimentaire, lesquelles doivent avoir lieu dans l'aire géographique délimitée pour bénéficier de l'appellation d'origine contrôlée, en application du règlement CEE n° 2081/92 du Conseil du 14 juillet 1992 et de l'article L. 115-6 du code de la consommation.

- RJ1 COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REGLEMENTATION DES ACTIVITES ECONOMIQUES - ACTIVITES SOUMISES A REGLEMENTATION - REGLEMENTATION DE LA PROTECTION ET DE L'INFORMATION DES CONSOMMATEURS - Appellations d'origine contrôlée - Définition des opérations de production - de transformation et d'élaboration du produit - Contrôle du juge - Contrôle normal (1).

- RJ1 PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTROLE DU JUGE DE L'EXCES DE POUVOIR - APPRECIATIONS SOUMISES A UN CONTROLE NORMAL - Appellations d'origine contrôlée - Définition des opérations de production - de transformation et d'élaboration du produit (1).


Références :

Code de la consommation L115-20, L115-6
Décret du 14 juillet 1992
Décret du 30 juillet 1996 décision attaquée confirmation
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1. Comp. décision du même jour retenant un contrôle restreint pour la définition des caractéristiques que doit présenter un produit pour bénéficier d'une appellation d'origine contrôlée, Le Jan, ci-dessous


Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 1998, n° 182783
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Stefanini
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:182783.19981230
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