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28/07/1999 | FRANCE | N°200094

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 28 juillet 1999, 200094


Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 août 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande de M. Véli X..., l'arrêté du 5 août 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la

convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamen...

Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 août 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande de M. Véli X..., l'arrêté du 5 août 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Boissard, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. Véli X...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant que, pour ordonner, en application des dispositions précitées de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la reconduite à la frontière de M. X..., ressortissant turc, le PREFET DE L'ESSONNE s'est fondé sur ce que l'intéressé s'était maintenu sur le territoire français plus d'un mois après que lui eut été notifié, le 25 mai 1998, le refus opposé, le 23 décembre 1997, à sa demande de régularisation ; que cette dernière décision, qui a fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, n'était pas devenue définitive à la date à laquelle M. X... a saisi le tribunal administratif de Versailles d'un pourvoi dirigé contre l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre ;
Considérant que, pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce que la décision du 23 décembre 1997 rejetant sa demande de régularisation avait été édictée "sans qu'un examen particulier de l'affaire ait eu lieu" ; que, toutefois, il ressort des énonciations de ladite décision, qui font état d'éléments de fait propres à la situation de l'intéressé, que l'autorité administrative a procédé, ainsi qu'elle y était tenue, à l'examen du dossier dont elle était saisie ; que, par suite, le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur l'irrégularité dont la décision de refus de séjour prise à l'encontre de M. X... serait entachée, faute d'avoir été précédée d'un examen particulier de l'affaire, pour annuler son arrêté du 5 août 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;

Considérant que la décision du 23 décembre 1997 par laquelle le PREFET DE L'ESSONNE a rejeté la demande d'octroi d'un titre de séjour présentée par M. X... indique que ce dernier a été reçu dans les services de la préfecture le 22 décembre 1997 pour un "entretien au cours duquel il a pu faire valoir tous arguments de droit et de fait" ; que, si M. X... soutient, sans être contredit sur ce point par le PREFET DE L'ESSONNE, que cet entretien n'a pas eu lieu, cette circonstance est cependant sans incidence sur la légalité de la décision de refus de séjour dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, l'autorité administrative a procédé, ainsi qu'elle y était tenue, à l'examen du dossier dont elle était saisie ; que la décision de refus de titre de séjour ne repose pas sur des faits matériellement inexacts ; que M. X... ne peut par ailleurs utilement seprévaloir des dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1997, qui n'ont pas de caractère réglementaire, pour contester la légalité de ladite décision ; qu'ainsi, M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté de reconduite à la frontière aurait été pris sur le fondement d'une décision de refus de régularisation elle-même illégale ;
Considérant que, si M. X... soutient que la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre porte une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît de ce fait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'assortit pas ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 5 août 1998, en tant qu'elle fixe la Turquie comme pays de renvoi :
Considérant que, si M. X... fait valoir qu'il serait exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des risques de persécution liés à son appartenance à la communauté kurde et à ses activités politiques passées au sein du parti communiste kurde, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ces risques ; qu'ainsi, ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du PREFET DE L'ESSONNE en tant qu'il fixe la Turquie comme pays de renvoi ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 5 août 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles du 19 août 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ESSONNE, à M. Véli X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 200094
Date de la décision : 28/07/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - Forme - Mention erronée par la décision de la tenue d'un entretien - non prévu par les textes - entre l'administration et le demandeur - Circonstance sans influence sur la légalité de la décision.

01-03-01, 335-01-03-02 La circonstance que la décision par laquelle a été rejetée la demande d'octroi d'un titre de séjour présentée par le requérant indique que ce dernier a été reçu dans les services de la préfecture pour un "entretien au cours duquel il a pu faire valoir tous arguments de droit et de fait", alors qu'il soutient sans être contredit que cet entretien n'a pas eu lieu, est sans incidence sur la légalité de la décision de refus de séjour, dès lors que l'autorité administrative a procédé, ainsi qu'elle y était tenue, à l'examen du dossier dont elle était saisie.

ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - REFUS DE SEJOUR - PROCEDURE - Mention erronée par la décision de la tenue d'un entretien - non prévu par les textes - entre les services de la préfecture et le demandeur - Circonstance sans influence sur la légalité de la décision.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 1999, n° 200094
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: Mme Boissard
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:200094.19990728
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