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05/07/2000 | FRANCE | N°200622;203356

France | France, Conseil d'État, 6 / 4 ssr, 05 juillet 2000, 200622 et 203356


Vu 1°) sous le n° 200622 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 octobre 1998 et 28 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Louis-Frédéric X... demeurant Gruère à Saint-Paul-les-Monestier (38650) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir :
1°) le refus implicite opposé à sa demande de titularisation comme préfet en date du 2 juin 1997 ;
2°) le décret du Président de la République en date du 27 mai 1998 mettant fin à ses fonctions de préfet délégué pour la sécurit

é et la défense auprès du préfet de la zone de défense Ouest, préfet de la région ...

Vu 1°) sous le n° 200622 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 octobre 1998 et 28 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Louis-Frédéric X... demeurant Gruère à Saint-Paul-les-Monestier (38650) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir :
1°) le refus implicite opposé à sa demande de titularisation comme préfet en date du 2 juin 1997 ;
2°) le décret du Président de la République en date du 27 mai 1998 mettant fin à ses fonctions de préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la zone de défense Ouest, préfet de la région Bretagne, préfet d'Ille-et-Vilaine et le réintégrant dans son corps d'origine ;
3°) l'arrêté du ministre de l'intérieur en date du 17 juin 1998 l'affectant à la direction générale de l'administration de ce ministère à compter du 15 juillet 1998 ;
4°) l'arrêté du Premier ministre en date du 9 juillet 1998, le réintégrant à compter du 15 juillet 1998 dans le corps des administrateurs civils et l'affectant au ministère de l'intérieur, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux contre cet arrêté ;
Vu, 2°) sous le n° 203356, la requête enregistrée comme ci-dessus le 8 janvier 1999, présentée par M. X... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du Premier ministre en date du 9 novembre 1998 rejetant son recours gracieux du 19 septembre 1998 contre l'arrêté en date du 9 juillet 1998 le réintégrant dans le corps des administrateurs civils et l'affectant au ministère de l'intérieur ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, notamment son article 9 bis, ensemble la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, notamment son article 14 ;
Vu le décret n° 64-781 du 29 juillet 1964 modifié ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Bonnat, Auditeur,
- les observations de Me Garaud, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables, qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 juin 1998 affectant M. X... à la direction générale de l'administration du ministère de l'intérieur :
Considérant que l'arrêté du 17 juin 1998 l'affectant à la direction générale de l'administration du ministère de l'intérieur a été notifié à M. X... le 29 juin 1998 ; que la requête de M. X... a été enregistrée le 16 octobre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; que, par suite, les conclusions de M. X... dirigées contre l'arrêté du 17 juin 1998 sont tardives et donc irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées contre le décret du 27 mai 1998 mettant fin aux fonctions de M. X... en qualité de préfet délégué et le réintégrant dans son corps d'origine :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant que la nomination à un emploi de préfet est au nombre de celles qui sont laissées à la décision du Gouvernement en raison de la nature même des fonctions exercées ; qu'une telle nomination est essentiellement révocable comme le rappelle l'article 25, alinéa 3, de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; que le décret du 29 juillet 1964 modifié fixant les dispositions réglementaires applicables aux préfets, maintenu en vigueur par l'effet de l'article 93 de la loi précitée, énonce qu'en ce qui concerne les préfets, il est dérogé aux dispositions du statut général relatives à l'exercice du pouvoir disciplinaire y compris en celles de ces dispositions qui sont relatives à la communication du dossier lorsqu'elle est exigée en vertu de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ;
Considérant toutefois, qu'en vertu d'un principe général du droit, une sanction ne peut être légalement prononcée à l'égard d'un agent public sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense ; que les dispositions du décret susmentionné du 29 juillet 1964 ne sauraient avoir pour objet ou pour effet de déroger, en ce qui concerne les préfets, au principe rappelé ci-dessus ;

Considérant que M. X... exerçait les fonctions de préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la zone Ouest, préfet de la région Bretagne, préfet d'Ille-et-Vilaine ; que le décret du 27 mai 1998 a mis fin à ces fonctions et a réintégré M. X... dans son corps d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que le Gouvernement s'est essentiellement fondé, pour mettre fin aux fonctions de préfet délégué de M. X..., sur un rapport de l'inspection générale de l'administration faisant état de fautes que M. X... aurait commises dans ses précédentes fonctions de sous-préfet d'Istres, et a entendu, par cette décision, sanctionner les griefs relevés à l'encontre de M. X... par ce rapport ; que si ce rapport, à l'état de projet, a été communiqué le 15 décembre 1997 à M. X... qui a pu présenter ses observations, le Gouvernement n'a ensuite à aucun moment, averti M. X... des conséquences qu'il entendait en tirer, ni de son intention de mettre fin à ses fonctions de préfet délégué en se fondant sur ses conclusions ; que M. X... est dès lors fondé à soutenir que le décret attaqué du 27 mai 1998 a été pris au terme d'une procédure irrégulière et à demander, par voie de conséquence, son annulation ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 9 juillet 1998 réintégrant M. X... dans le corps des administrateurs civils et l'affectant au ministère de l'intérieur et contre la décision du Premier ministre en date du 9 novembre 1998 rejetant son recours gracieux contre l'arrêté du 9 juillet 1998 :
Considérant que l'arrêté du Premier ministre en date du 9 juillet 1998 réintégrant M. X... dans le corps des administrateurs civils et l'affectant au ministère de l'intérieur a été pris à la suite du décret précité du 27 mai 1998 ; que l'annulation dudit décret doit, par voie de conséquence, entraîner l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 1998 et de la décision du Premier ministre en date du 9 novembre 1998 ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision de refus implicite de titularisation de M. X... dans le corps préfectoral :
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur :
Considérant, d'une part, que l'annulation du décret du 27 mai 1998 est sans incidence sur la légalité de la décision antérieure rejetant implicitement la demande de titularisation dans le corps préfectoral présentée par M. X... le 2 juin 1997 ;
Considérant, d'autre part, que, si M. X... soutient que ce refus de titularisation serait intervenu en méconnaissance des droits de la défense, il ne ressort pas des pièces du dossier que, par ce refus de titularisation, l'administration ait entendu sanctionner des faits précis à l'encontre de M. X... ;
Article 1er : Le décret du 27 mai 1998 mettant fin aux fonctions de M. X... en tant que préfet délégué, l'arrêté du 9 juillet 1998 le réintégrant dans le corps des administrateurs civils et l'affectant au ministère de l'intérieur et la décision du Premier ministre rejetant son recours gracieux contre l'arrêté du 9 juillet 1998, sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Louis-Frédéric X..., au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 6 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 200622;203356
Date de la décision : 05/07/2000
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - PRINCIPES INTERESSANT L'ACTION ADMINISTRATIVE - RESPECT DES DROITS DE LA DEFENSE - CADécret du 29 juillet 1964 modifié fixant les dispositions réglementaires applicables aux préfets - Portée - Dérogation - en ce qui concerne les préfets - au principe du respect des droits de la défense - Absence - Conséquences - Obligation de mettre un préfet sanctionné en mesure de présenter utilement sa défense (1).

01-04-03-07-03, 36-09-05 Le décret du 29 juillet 1964 modifié fixant les dispositions réglementaires applicables aux préfets, maintenu en vigueur par l'effet de l'article 93 de la loi du 11 janvier 1984, énonce qu'en ce qui concerne les préfets, il est dérogé aux dispositions du statut général relatives à l'exercice du pouvoir disciplinaire y compris à celles de ces dispositions qui sont relatives à la communication du dossier lorsqu'elle est exigée en vertu de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905. Toutefois, en vertu d'un principe général du droit, une sanction ne peut être légalement prononcée à l'égard d'un agent public sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense. Les dispositions du décret du 29 juillet 1964 ne sauraient avoir pour objet ou pour effet de déroger en ce qui concerne les préfets, au principe rappelé ci-dessus.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - PROCEDURE - CADécret du 29 juillet 1964 modifié fixant les dispositions réglementaires applicables aux préfets - Portée - Dérogation - en ce qui concerne les préfets - au principe du respect des droits de la défense - Absence - Conséquences - Obligation de mettre un préfet sanctionné en mesure de présenter utilement sa défense (1).


Références :

Arrêté du 17 juin 1998
Arrêté du 09 juillet 1998
Décret du 27 mai 1998
Décret 64-781 du 29 juillet 1964
Loi du 22 avril 1905
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 25, art. 93

1.

Cf. Assemblée, 1945-10-26, Sieur Aramu, p. 213


Publications
Proposition de citation : CE, 05 jui. 2000, n° 200622;203356
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: Mlle Bonnat
Rapporteur public ?: M. Seban
Avocat(s) : Me Garaud, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:200622.20000705
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