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26/02/2001 | FRANCE | N°207661

France | France, Conseil d'État, 3 / 8 ssr, 26 février 2001, 207661


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 mai 1999 et 10 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Léopold X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'arrêt du 9 mars 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les décisions des 22 mars et 3 août 1994 du ministre de la défense rejetant sa demande d'homo

logation d'une blessure de guerre ;
2°) d'annuler lesdites décision...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 mai 1999 et 10 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Léopold X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'arrêt du 9 mars 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les décisions des 22 mars et 3 août 1994 du ministre de la défense rejetant sa demande d'homologation d'une blessure de guerre ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Delion, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêt du 9 mars 1999, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de M. X... tendant à l'annulation du jugement du 4 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les décisions des 22 mars et 3 août 1994 du ministre de la défense lui refusant l'homologation d'une blessure comme blessure de guerre ;
Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, doivent être motivées les décisions qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ;
Considérant que, pour demander en appel l'annulation du jugement du 4 juin 1996 du tribunal administratif de Paris, M. X... soutenait notamment que les deux décisions attaquées du ministre de la défense étaient insuffisamment motivées ; que la cour a rejeté sa requête, sans se prononcer sur ce moyen qui n'était pas inopérant, s'agissant de décisions de la nature de celles soumises à l'obligation de motivation en application des dispositions sus rappelées ; que, dès lors, le requérant est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 9 mars 1999 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les allégations relatives à l'absence de communication régulière des mémoires adverses par le tribunal administratif n'étant pas assorties de précisions de nature à permettre d'en apprécier le bien fondé, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle ne peut être accueilli ;
Considérant qu'en relevant dans les motifs de son jugement que M. X... n'était pas en service commandé, le tribunal administratif n'a pas soulevé d'office un moyen qui n'aurait pas été formé en défense par l'administration mais s'est borné à répondre au moyen articulé par le requérant selon lequel il remplissait, s'étant trouvé en service commandé lors des faits, les conditions prescrites pour pouvoir bénéficier de l'homologation des lésions subies comme blessures de guerre ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait "dénaturé les termes du litige et méconnu le principe de contradiction des débats" doit être écarté ;
Sur la légalité des décisions attaquées :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 36 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et de celles de l'instruction du 1er janvier 1917, reprises par l'instruction du 8 mai 1963, il faut entendre par blessure de guerre au sens de la réglementation applicable à l'homologation des blessures de guerre toute lésion présentant un certain degré de gravité résultant d'une action extérieure, se rattachant directement à la présence de l'ennemi, c'est-à-dire au combat, ou s'y rattachant indirectement en constituant une participationeffective à des opérations de guerre, préparatoires ou consécutives au combat ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., qui possédait alors la nationalité polonaise, a été incorporé le 12 juin 1940 dans une formation militaire de l'armée polonaise en France ; qu'il a été arrêté en octobre 1942 par les autorités espagnoles alors qu'il franchissait la frontière et interné dans le camp de Miranda del Ebro dont il a été libéré au printemps de 1943 ; qu'à l'appui de sa demande d'homologation de blessures de guerre, M. X... soutient qu'il a été frappé par des militaires espagnols à la suite d'une rixe survenue début 1943 entre des détenus belges et polonais ;
Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions ministérielles en date des 22 mars et 3 août 1994 portant rejet de la demande d'homologation de blessures de guerre présentée par M. X... doit être écarté, par adoption des motifs des premiers juges ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne peut être regardé comme ayant éprouvé des blessures au cours d'une tentative d'évasion du camp espagnol où il était interné en vue de reprendre le combat contre l'ennemi ; que, par suite, les blessures de M. X... ne se rattachent ni directement à la présence de l'ennemi, c'est-à-dire au combat, ni indirectement en constituant une participation effective à des opérations de guerre, préparatoires ou consécutives au combat ;
Considérant, enfin, que les circonstances que M. X... se soit vu reconnaître le bénéfice des statuts d'invalide de guerre et d'interné-résistant et qu'il ait obtenu la médaille des évadés pour avoir franchi en octobre 1942 la frontière entre la France et l'Espagne, sont sans incidence sur la légalité du refus d'homologation qui lui a été opposé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions des 22 mars et 3 août 1994 du ministre de la défense ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, repris à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme de 10 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 9 mars 1999 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi et la requête présentée en cause d'appel par M. X... sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Léopold X... et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 3 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 207661
Date de la décision : 26/02/2001
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

01-03-01-02-01-01-04 ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - MOTIVATION OBLIGATOIRE EN VERTU DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DECISION REFUSANT UN AVANTAGE DONT L'ATTRIBUTION CONSTITUE UN DROIT -Refus d'homologation d'une blessure comme blessure de guerre.

01-03-01-02-01-01-04 La décision par laquelle le ministre de la défense refuse l'homologation d'une blessure comme blessure de guerre est au nombre de celles qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979.


Références :

Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre 36
Instruction du 01 janvier 1917
Instruction du 08 mai 1963
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 26 fév. 2001, n° 207661
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Delion
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:207661.20010226
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