Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 5 octobre 1998 et le 5 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Nabil X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 18 juin 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du 27 juin 1996 du tribunal administratif de Marseille ayant annulé une décision du ministre de l'éducation nationale refusant de prendre en compte, pour son reclassement dans le corps des professeurs agrégés, la période pendant laquelle il avait enseigné à la faculté des sciences de l'université de Beyrouth ;
2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951, notamment son article 3 alinéa 2 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dumortier, Auditeur,
- les observations de la SCP Bouzidi, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 5 décembre 1951 relatif à la détermination de l'ancienneté du personnel nommé dans les corps de fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministre de l'éducation nationale : " Entrent en compte, dans l'ancienneté d'échelon, pour la promotion éventuelle à l'échelon supérieur dans la limite de trois ans, les services accomplis par les agrégés en qualité de membres de l'école française de Rome, de l'école française d'Athènes, de pensionnaires de l'institut français d'archéologie orientale du Caire. Peuvent également entrer en compte sans limitation de durée, après avis du ministre des affaires étrangères et de la commission administrative paritaire compétente, les services accomplis en qualité de professeur, de lecteur ou d'assistant dans un établissement d'enseignement à l'étranger " ;
Considérant que ces dispositions ne limitent pas la faculté de prendre en compte les services accomplis en qualité de professeur, de lecteur ou d'assistant dans un établissement d'enseignement à l'étranger, aux seuls services qui l'ont été dans un établissement français ; qu'ainsi, en estimant que ces dispositions ne sauraient concerner que les établissements français situés à l'étranger ou les établissements spécifiquement désignés en application du décret du 5 décembre 1951, la cour administrative d'appel a entaché sa décision d'erreur de droit ; que M. X... est dès lors fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation nationale à la demande de M. X... devant le tribunal administratif de Marseille :
Considérant que M. X... a formé, le 7 juin 1994, un recours gracieux contre le refus ministériel de rapporter les dispositions de l'arrêté du 26 mars 1993 relatif à son reclassement dans le corps des professeurs agrégés ; que le silence gardé par le ministre sur ce recours gracieux a fait naître une décision implicite de rejet ; que, dans ces conditions, la demande présentée par M. X... le 5 décembre 1994 devant le tribunal administratif de Marseille n'était pas tardive ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant que pour refuser, par la décision attaquée, la prise en compte des services accomplis par l'intéressé à la faculté des sciences de l'université de Beyrouth, le ministre s'est fondé sur ce que les " établissements d'enseignement à l'étranger " mentionnés au deuxième alinéa de l'article 3 du décret du 5 décembre 1951, étaient des établissements français ou des établissements dont le ministre des affaires étrangères assure la tutelle, ou tout au moins, le contrôle ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que le ministre a méconnu la portée de ces dispositions ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision contestée relative au reclassement de M. X... ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt en date du 18 juin 1998 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : Le recours présenté par le ministre de l'éducation nationale devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejeté.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X... la somme de 15 000 F.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Nabil X... et au ministre de l'éducation nationale.