La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2002 | FRANCE | N°214901

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 28 octobre 2002, 214901


Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG ; la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 30 septembre 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 décembre 1995 accordant à Mme Ginette X... décharge de la somme de 23 038,25 F qui lui était réclamée au titre de la taxe de trottoirs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu

le code des communes ;
Vu le code général des impôts et le livre des...

Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG ; la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 30 septembre 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 décembre 1995 accordant à Mme Ginette X... décharge de la somme de 23 038,25 F qui lui était réclamée au titre de la taxe de trottoirs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG et de Me Le Prado, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 233-52 du code des communes en vigueur à la date de la décision administrative litigieuse, et aujourd'hui reprises à l'article L. 2333-58 du code général des collectivités territoriales : "Lorsque l'établissement des trottoirs des rues et places figurant sur les plans d'alignement a été reconnu d'utilité publique, la dépense de construction est répartie entre les communes et les propriétaires riverains, dans la proportion et, après accomplissement des formalités déterminées par les articles de la présente sous-section" ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 233-53 du code des communes, aujourd'hui reprises à l'article L. 2333-59 du code général des collectivités territoriales : "La délibération du conseil municipal qui provoque la déclaration d'utilité publique désigne en même temps les rues et places où les trottoirs seront établis, arrête le devis des travaux, selon les matériaux entre lesquels les propriétaires sont autorisés à faire un choix, et répartit la dépense entre la commune et les propriétaires. La portion de la dépense à la charge de la commune ne peut être inférieure à la moitié de la dépense totale. Il est procédé à une enquête de commodo et incommodo" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération du 19 mars 1982, la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG a décidé de procéder, dans les conditions prévues aux articles précités, à la construction d'un trottoir le long des bâtiments d'une usine appartenant à la société "Les Fils d'Oscar Bongard et Cie" ; qu'après que ces travaux ont été déclarés d'utilité publique, un titre de recettes a été émis à l'encontre de la société ; que celle-ci ayant été déclarée en règlement judiciaire, la Communauté urbaine, qui n'avait pu obtenir le règlement de sa créance, transféra sur Mme X..., propriétaire du terrain d'assiette de l'usine, la charge de la contribution aux frais d'établissement du trottoir, à hauteur de 23 038,25 F ; qu'après avoir indiqué à celle-ci en mars 1988, les sommes dont elle était redevable, le trésorier principal a émis à son encontre, le 8 novembre 1988, un commandement de payer ; que Mme X..., ayant demandé au tribunal administratif de Strasbourg, par une requête enregistrée le 20 août 1990, l'annulation du titre de recettes, de la décision de changement de débiteur et du commandement susmentionnés, a été déchargée par ce tribunal de la taxe de trottoirs qui lui était ainsi réclamée ; que la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG demande l'annulation de l'arrêt du 30 septembre 1999, par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre cette décision ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 233-52 et L. 233-53 du code des communes, alors applicables, que la contribution dite "taxe de trottoirs" qu'ils instituent, et qui est classée par l'article L. 231-6 du même code parmi les recettes non fiscales de la section de fonctionnement, doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi, dans les limites qu'elle définit, autorise la commune à percevoir sur le propriétaire riverain d'une voie publique, à raison du coût de création d'un trottoir le long de sa propriété ; que, si l'article L. 233-4 du code des communes, prévoit que le recouvrement de cette participation s'effectue comme en matière d'impôts directs, ces dispositions ont pour seul objet d'étendre à son recouvrement les modalités d'exercice des voies d'exécution prévues pour les impôts directs ; qu'ainsi, aucune disposition n'imposait Mme X... de présenter une réclamation préalable à l'administration avant de contester devant le juge administratif le bien-fondé de la contribution aux dépenses de construction d'un trottoir ;
Considérant que la contribution dite "taxe de trottoirs" est destinée au financement de travaux publics ; qu'aux termes de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, applicable à la date de l'enregistrement de la requête de Mme X... devant le tribunal administratif de Strasbourg : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois de la notification ou de la publication de la décision attaquéeà" ; qu'il résulte de cette disposition que le délai de deux mois qu'elle fixe ne s'applique pas aux demandes présentées en matière de travaux publics, même si ces demandes sont dirigées contre une décision administrative notifiée au demandeur ; que constituent de telles demandes celles qui sont dirigées contre les actes tendant à percevoir tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics, lorsque ces demandes ne sont pas régies par des dispositions spéciales ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en n'opposant pas d'irrecevabilité à la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que Mme X..., dont il n'est pas contesté qu'elle était, lors de la mise en .uvre de la procédure définie à l'article L. 233-53 précité du code des communes, propriétaire du terrain d'assiette de l'usine appartenant à la société "Les Fils d'Oscar Bongard et Cie", avait la qualité de propriétaire-riverain au sens de cet article ; qu'il résulte de ces mêmes dispositions que les propriétaires doivent être mis à même de contribuer au choix des matériaux utilisés pour la construction du trottoir, en fonction, notamment, de leur prix ; que la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que faute que cette formalité substantielle ait été accomplie, l'intéressée devait être déchargée de la participation financière qui lui était réclamée à raison de la construction d'un trottoir le long de son terrain ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG doit être rejeté ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG à payer à Mme X... une somme de 2 200 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG est rejetée.
Article 2 : La COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG paiera à Mme X... une somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG, à Mme Ginette X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 214901
Date de la décision : 28/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - Notion d'imposition - Absence - "Taxe de trottoirs" (1).

19-01 Il résulte des dispositions des articles L. 233-52 et L. 233-53 du code des communes, alors applicables, que la contribution dite "taxe de trottoirs" qu'ils instituent, et qui est classée par l'article L. 231-6 du même code parmi les recettes non fiscales de la section de fonctionnement, doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi, dans les limites qu'elle définit, autorise la commune à percevoir sur le propriétaire riverain d'une voie publique, à raison du coût de création d'un trottoir le long de sa propriété.

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - AUTRES TAXES OU REDEVANCES - "Taxe de trottoirs" - a) Contribution n'ayant pas le caractère d'une imposition (1) - b) Conséquence - Absence d'obligation de présentation d'une réclamation préalable avant la contestation devant le juge du bien-fondé de la contribution - c) Association du propriétaire riverain au choix des matériaux de construction du trottoir - Formalité substantielle.

19-03-06 a) Il résulte des dispositions des articles L. 233-52 et L. 233-53 du code des communes, alors applicables, que la contribution dite "taxe de trottoirs" qu'ils instituent, et qui est classée par l'article L. 231-6 du même code parmi les recettes non fiscales de la section de fonctionnement, doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi, dans les limites qu'elle définit, autorise la commune à percevoir sur le propriétaire riverain d'une voie publique, à raison du coût de création d'un trottoir le long de sa propriété. b) Si l'article L. 233-4 du code des communes prévoit que le recouvrement de cette participation s'effectue comme en matière d'impôts directs, ces dispositions ont pour seul objet d'étendre à son recouvrement les modalités d'exercice des voies d'exécution prévues pour les impôts directs. Ainsi, aucune disposition n'impose de présenter une réclamation préalable à l'administration avant de contester devant le juge administratif le bien-fondé de la contribution aux dépenses de construction d'un trottoir. c) Il résulte des dispositions de l'article L. 233-53 du code des communes que le propriétaire doit être mis à même de contribuer au choix des matériaux utilisés pour la construction du trottoir, en fonction, notamment, de leur prix. En l'absence d'accomplissement de cette formalité substantielle, l'intéressé doit être déchargé de la participation financière qui lui a été réclamée à raison de la construction d'un trottoir le long de son terrain.


Références :

Code des communes L233-52, L233-53, L231-6, L233-4
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102
Code général des collectivités territoriales L2333-58, L2333-59

1.

Rappr. Section 1999-03-26 Vincent, p. 109.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 oct. 2002, n° 214901
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Ménéménis
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP Roger, Sevraux. Me Le Prado, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:214901.20021028
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award