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30/12/2002 | FRANCE | N°245739

France | France, Conseil d'État, 1ere et 2eme sous-sections reunies, 30 décembre 2002, 245739


Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Claude X, demeurant à ..., M. Jean Y, demeurant ... et M. Daniel Z, demeurant ... ; M. X et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 27 mars 2002 par laquelle le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à être autorisés au nom du département des Côtes d'Armor, à déposer plainte avec constitution de partie civile ou à se constituer partie civile dans le cadre de l'instruction ouverte par le procureur de la Républiq

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Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Claude X, demeurant à ..., M. Jean Y, demeurant ... et M. Daniel Z, demeurant ... ; M. X et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 27 mars 2002 par laquelle le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à être autorisés au nom du département des Côtes d'Armor, à déposer plainte avec constitution de partie civile ou à se constituer partie civile dans le cadre de l'instruction ouverte par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc notamment des chefs d'abus de confiance, d'abus de biens sociaux, de soustraction et de détournement de biens par une personne exerçant une fonction publique, de prise illégale d'intérêts, de défaut de surveillance, d'atteinte à l'administration par des personnes exerçant une fonction publique ;

2°) de les autoriser à exercer cette action au nom du département ;

3°) de condamner le département à leur verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités locales ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. X et autres et de la SCP Parmentier, Didier, avocat du conseil général des Côtes d'Armor,

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales : Tout contribuable inscrit au rôle du département a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir au département et que celui-ci, préalablement appelé à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer (...) ; qu'il appartient au tribunal administratif statuant comme autorité administrative, et au Conseil d'Etat saisi d'un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu'ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l'action, et au vu des éléments qui leur sont fournis, que l'action envisagée présente un intérêt suffisant pour le département et qu'elle a une chance de succès ;

Considérant que M. X et les autres requérants demandent à être autorisés à déposer, au nom du département des Côtes d'Armor, plainte avec constitution de partie civile ou à se constituer partie civile dans le cadre de l'instruction ouverte par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc afin d'obtenir réparation des préjudices causés notamment par des abus de confiance, abus de biens sociaux, soustractions et détournements de biens par une personne exerçant une fonction publique, prises illégale d'intérêts, défauts de surveillance et atteintes à l'administration par des personnes exerçant une fonction publique ; que, saisi par M. X, le département des Côtes d'Armor a refusé d'exercer l'action en cause ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction, au vu des éléments fournis pas les requérants, que les subventions versées par le département des Côtes d'Armor à diverses associations au cours des années couvertes par le contrôle de la gestion de ce département par la chambre régionale des comptes de Bretagne pour les années 1994 à 1999 auraient été détournées de leur objet ou affectées à des dépenses non conformes aux statuts de ces associations ; que si les requérants soutiennent que des violations du code des marchés publics ont été commises, notamment dans l'utilisation du procédé des travaux en régie et l'achat de carburant, il ne résulte ni de l'instruction, ni du rapport de la chambre régionale des comptes que ces irrégularités auraient causé un préjudice au département des Côtes d'Armor ; que l'utilisation à des fins personnelles par certains élus du département de véhicules, ainsi que de cartes d'autoroutes et de carburant appartenant à celui-ci a donné lieu à des remboursements par les intéressés pour un montant total de 13 882,80 euros ; qu'il n'est pas allégué que le préjudice subi par le département aurait été supérieur à ce montant ; que, par suite, en l'absence de préjudice établi pour le département, l'action envisagée à ces différents titres ne présente pas pour celui-ci un intérêt suffisant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1994 à 1999, les présidents successifs du conseil général des Côtes d'Armor ont bénéficié, en application de délibérations adoptées en 1994 et 1999 par le conseil général, de la mise à disposition d'un logement de fonction dont le loyer, ainsi que certaines des dépenses liées à son occupation, ont été réglés par le département ; qu'eu égard au montant des sommes en cause et à la circonstance qu'elles ont été exposées en vue de faciliter l'exercice de leurs fonctions par deux présidents du conseil général dont la résidence n'était pas située au chef-lieu du département, l'action envisagée à ce titre ne présente pas un intérêt suffisant pour le département ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et les autres requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision, qui est suffisamment motivée, du 27 mars 2002 par laquelle le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à être autorisés, au nom du département des Côtes d'Armor, à déposer plainte avec constitution de partie civile ou à se constituer partie civile dans le cadre de l'instruction ouverte par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc des chefs mentionnés ci-dessus ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées en ce sens par le département des Côtes d'Armor en application des dispositions susmentionnées, qui font obstacle à ce que ce département soit condamné à verser à MM. X, Y et Z la somme qu'ils demandent à ce titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête MM. X, Y et Z est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département des Côtes d'Armor tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Claude X, à M. Jean Y, à M. Jean Z et au département des Côtes d'Armor.


Synthèse
Formation : 1ere et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 245739
Date de la décision : 30/12/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-03 COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - DÉPARTEMENT - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALE - EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT AU DÉPARTEMENT - CONDITIONS DE FOND - INTÉRÊT SUFFISANT - ABSENCE - MISE À DISPOSITION, PENDANT CINQ ANNÉES, D'UN LOGEMENT DE FONCTION AUX PRÉSIDENTS SUCCESSIFS DU CONSEIL GÉNÉRAL, EU ÉGARD AU MONTANT DES SOMMES EN CAUSE ET À LA CIRCONSTANCE QU'ELLES ONT ÉTÉ EXPOSÉES EN VUE DE FACILITER L'EXERCICE DE LEURS FONCTIONS PAR DEUX PRÉSIDENTS DU CONSEIL GÉNÉRAL DONT LA RÉSIDENCE N'ÉTAIT PAS SITUÉE AU CHEF-LIEU DU DÉPARTEMENT.

135-03 Il résulte de l'instruction que, pendant cinq années, les présidents successifs du conseil général ont bénéficié, en application de délibérations adoptées par le conseil général, de la mise à disposition d'un logement de fonction dont le loyer, ainsi que certaines des dépenses liées à son occupation, ont été réglés par le département. Eu égard au montant des sommes en cause et à la circonstance qu'elles ont été exposées en vue de faciliter l'exercice de leurs fonctions par deux présidents du conseil général dont la résidence n'était pas située au chef-lieu du département, l'action envisagée à ce titre ne présente pas un intérêt suffisant pour le département.


Références :



Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2002, n° 245739
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: M. Nicolas Boulouis
Rapporteur public ?: M. Stahl
Avocat(s) : SCP GATINEAU ; SCP PARMENTIER, DIDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:245739.20021230
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