Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 28 février 2002 et 20 mars 2002, présentés pour M. Mohamed X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler, sans renvoi, l'arrêt en date du 22 janvier 2002, par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 25 janvier 2001 qui avait rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite, acquise le 26 juillet 1996, par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 mars 1992 ayant ordonné son expulsion et de l'arrêté du 8 juillet 1993 ayant abrogé l'arrêté du 24 mars 1992 l'ayant assigné à résidence, avec toutes conséquences de droit ;
2°) d'annuler cette décision implicite ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 763 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fanachi, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Bouthors, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;
Considérant d'une part qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé. Lorsque la demande d'abrogation est présentée à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de l'exécution effective de l'arrêté d'expulsion, elle ne peut être rejetée qu'après avis de la commission prévue à l'article 24 devant laquelle l'intéressé peut se faire représenter ;
Considérant qu'en l'espèce, l'arrêté d'expulsion, en date du 24 mars 1992, pris à l'encontre de M. X, ressortissant algérien, a été exécuté le 18 février 1998 et la demande d'abrogation de cet arrêté a été présentée le 19 avril 1999 soit moins de cinq ans après la mise à exécution de cet arrêté ; que, dès lors, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit, en écartant, comme non fondé, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, pour défaut de consultation préalable de la commission prévue à l'article 24 de ce texte ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : En cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, l'expulsion peut être prononcée par dérogation aux articles 24 et 25 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que l'arrêté d'expulsion, en date du 24 mars 1992, a été notifié à M. X, le 6 avril 1992, avec la mention des voies et délais de recours ; que s'agissant d'une décision individuelle, l'exception d'illégalité à l'encontre de cet arrêté n'était recevable que jusqu'à l'expiration du délai de recours contentieux qui, en l'espèce, était expiré ; que, par suite, la cour administrative n'a pas commis d'erreur de droit en écartant pour irrecevabilité l'exception d'illégalité présentée contre cet arrêté ;
Considérant qu'après avoir relevé que M. X a été condamné, le 19 octobre 1981, à quinze ans de réclusion criminelle pour vol qualifié et homicide volontaire, qu'après son élargissement, intervenu le 7 juillet 1989, il s'est rendu coupable de cession ou offre de stupéfiants, infraction qui lui a valu une peine d'emprisonnement de trois ans (...) ; qu'assigné à résidence par arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 10 avril 1992, il a été interpellé, le 6 mai 1992, en infraction avec cet arrêté, alors qu'il était porteur d'héroïne, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que compte tenu de la gravité des faits commis par M. X et de leur caractère de récidive, les décisions implicites de refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion et de l'arrêté d'abrogation de l'arrêté d'assignation à résidence ne portaient pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ainsi ne méconnaissaient pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même que M. X est né en France, qu'il y a toujours résidé, que ses frères et sours vivent en France et qu'il y est lui-même marié à une ressortissante française et père d'un enfant français ; qu'en statuant ainsi, et compte tenu notamment de la méconnaissance par l'intéressé des prescriptions de l'arrêté qui l'assignait à résidence et de la nouvelle infraction relevée à son encontre au cours de la période d'assignation à résidence, la cour dont l'arrêt est suffisamment motivé, a donné de l'ensemble des faits sur lesquels elle s'est fondée une exacte qualification juridique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 22 janvier 2002 ;
Sur les conclusions aux fins de condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. X, la somme que demande celui-ci, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.