La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2003 | FRANCE | N°231964

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 07 mai 2003, 231964


Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement en date du 29 janvier 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 24 février 2000 en tant qu'il a fixé le Pakistan comme pays de destination de la reconduite a la frontière de M. Mohammad Zaman X ;

2°) de rejeter l'ensemble des conclusions de la demande de M.

X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauv...

Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement en date du 29 janvier 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 24 février 2000 en tant qu'il a fixé le Pakistan comme pays de destination de la reconduite a la frontière de M. Mohammad Zaman X ;

2°) de rejeter l'ensemble des conclusions de la demande de M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des citoyens ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un même arrêté en date du 24 février 2000, le PREFET DE POLICE a ordonné la reconduite à la frontière de M. X, de nationalité pakistanaise, entré en France en novembre 1997, à destination du pays dont il a la nationalité ; que, par jugement en date du 29 janvier 2001, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. X en tant qu'elle tendait à l'annulation de la mesure de reconduite à la frontière mais a annulé la décision fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;

Sur l'appel incident de M. X tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement qui rejette ses conclusions dirigées contre l'arrêté en date du 24 février 2000 par lequel le PREFET DE POLICE a ordonné sa reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il est constant qu'à la date de la décision attaquée, M. X s'était maintenu plus d'un mois après la notification de la décision du PREFET DE POLICE en date du 5 mars 1999 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; qu'ainsi, il se trouvait dans le cas où, en application des dispositions précitées de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet pouvait ordonner sa reconduite à la frontière ;

Considérant que si M. X conteste, par la voie de l'appel incident, l'arrêté du PREFET DE POLICE ordonnant sa reconduite à la frontière, les seuls moyens qu'il développe dans ses écritures ont trait aux risques auxquels il serait exposé dans son pays d'origine et sont, dès lors, inopérants à l'encontre de la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière du PREFET DE POLICE en date du 24 février 2000 ;

Sur l'appel principal du préfet :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par M. X :

Considérant que la requête du PREFET DE POLICE en date du 29 mars 2001, a été signée en son nom par M. Pascal Bouniol, administrateur civil adjoint au chef des affaires juridiques et du contentieux ; que, par un arrêté en date du 1er mars 2001, publié au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris le 9 mars suivant, M. Massoni, maintenu dans ses fonctions de préfet de police après avoir été admis à faire valoir ses droits à la retraite par arrêtés du ministre de l'intérieur en date des 12 janvier et 1er mars 2001, a donné délégation à M. Bouniol pour signer notamment les requêtes présentées devant le Conseil d'Etat en cas d'absence ou d'empêchement du directeur général du personnel et du chef du service des affaires juridiques et du contentieux ; que si M. Massoni a été irrégulièrement maintenu dans ses fonctions au-delà du 14 janvier 2001, date à laquelle il a atteint la limite d'âge applicable aux fonctionnaires titulaires du grade de préfet, un fonctionnaire irrégulièrement nommé aux fonctions qu'il occupe doit être regardé comme légalement investi de ces fonctions tant que sa nomination n'a pas été annulée ; que, dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par M. X et tirée de l'incompétence de M. Bouniol pour signer cette requête sur le fondement de la délégation de signature consentie par M. Massoni le 1er mars 2001 ne peut qu'être écartée ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays à destination duquel M. X doit être reconduit :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant que si, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'article 2 de l'arrêté prévoyant qu'il sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité, M. X soutient qu'en raison des poursuites engagées contre lui dans son pays depuis l'arrivée au pouvoir du parti de la ligue musulmane en février 1997, pour sa participation à une manifestation des membres de son parti, le parti populaire pakistanais (PPP), devant un commissariat de police en 1992, il craint pour sa liberté en cas de retour au Pakistan, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié politique a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 juin 1998 confirmé par la commission des recours des réfugiés le 17 décembre 1998 et qui avait obtenu le renouvellement de son passeport en juillet 1997 alors qu'il prétend qu'il était alors recherché, n'apporte pas d'éléments suffisamment probants à l'appui de ses allégations ; qu'il suit de là que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, accueillant l'unique moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le Pakistan comme pays à destination duquel l'arrêté de reconduite à la frontière en date du 24 février 2000 doit être exécuté, et tiré de ce qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a annulé cette décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 1er du jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 29 janvier 2001 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation de la décision fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'appel incident de M. X et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Mohammad Zaman X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 231964
Date de la décision : 07/05/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2003, n° 231964
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme de Salins
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:231964.20030507
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award