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30/12/2003 | FRANCE | N°255761

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 30 décembre 2003, 255761


Vu la requête enregistrée le 4 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mongi Ben Brahim X demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 4 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2003 par lequel le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière, la décision du 13 février 2003 par laquelle le préfet a fixé la Tunisie comme pays d

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Vu la requête enregistrée le 4 avril 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mongi Ben Brahim X demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 4 avril 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2003 par lequel le préfet du Var a décidé sa reconduite à la frontière, la décision du 13 février 2003 par laquelle le préfet a fixé la Tunisie comme pays de destination et l'arrêté de mise en rétention administrative du 13 février 2003 ;

2°) d'annuler ces deux arrêtés ainsi que cette décision pour excès de pouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 2001-236 du 19 mars 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de la notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Mongi Ben Brahim X, de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 23 décembre 2002, de la décision du préfet du Var du 10 décembre 2002 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, le préfet du Var a procédé à un examen individuel de sa situation ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision du 10 décembre 2002 refusant à M. X un titre de séjour :

Considérant qu'en vertu des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est, sous réserve que sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à l'étranger qui, ne vivant pas en état de polygamie, justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant, et, qu'en vertu des dispositions du 7° du même article, cette carte est également délivrée de plein droit à l'étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

Considérant d'une part qu'il ressort des pièces du dossier que M. X n'établit pas qu'il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date à laquelle a été prise la décision de refus de séjour, et qu'il est célibataire et sans enfant ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet du Var ne pouvait légalement lui refuser le titre de séjour qu'il sollicitait sans méconnaître les dispositions sus-rappelées ; que, d'autre part, dès lors que M. X n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions des 3° et 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et qu'il n'allègue pas relever d'une catégorie de ressortissants tunisiens auxquels un titre de séjour est délivré de plein droit en vertu de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, il ne peut se prévaloir de la méconnaissance de la formalité de consultation de la commission consultative du titre de séjour prévue par l'article 12 quater de la même ordonnance ; qu'il en résulte que les moyens tirés de ce que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait intervenu en violation des articles 12 bis et 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 doivent être écartés ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le préfet du Var n'aurait pu fonder sa décision de refus de séjour sur les stipulations de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et de son avenant du 19 décembre 1991, dès lors que ceux-ci n'auraient pas été régulièrement approuvés faute d'avoir fait l'objet d'une autorisation par la loi, ne peut être utilement invoqué, ladite décision n'étant pas fondée sur ces stipulations ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant que si M. X soutient qu'il n'aurait pu faire légalement l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière dès lors qu'il remplissait les conditions requises pour se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, il ressort des pièces du dossier que d'une part, il n'établit pas être entré régulièrement en France et ne peut donc prétendre que le préfet du Var n'aurait pu se fonder sur les dispositions des articles 7 et 11 du décret du 30 juin 1946 qui subordonnent la délivrance d'un titre de séjour à la justication de la régularité de l'entrée en France pour lui dénier tout droit à un tel titre ; que, d'autre part, à la date de l'arrêté attaqué, M. X ne justifiait pas résider habituellement en France depuis au moins dix ans et que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Var ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les stipulations du d) de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 résultant de l'avenant du 8 septembre 2000 selon lesquelles les ressortissants tunisiens qui justifient résider habituellement en France depuis plus de dix ans reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est célibataire, sans enfant, et qu'il ne se prévaut d'aucun lien familial en France ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination de la reconduite :

Considérant que cette décision, qui précise que M. X n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, est suffisamment motivée ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, et notamment des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ce recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés ; que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, M. X ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

Considérant que le moyen tiré de ce que cette décision méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur la légalité de la décision de maintien en rétention administrative :

Considérant que cette décision, qui énonce les considérations de droit et de fait présidant au placement de M. X en rétention administrative, est suffisamment motivée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Peut être maintenu, s'il y a nécessité, par décision écrite motivée du représentant de l'Etat dans le département, dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pendant le temps strictement nécessaire à son départ, l'étranger qui : (..) 3°(..) devant être reconduit à la frontière, ne peut quitter immédiatement le territoire français ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le préfet du Var a ordonné le placement en rétention administrative de M. X, ce dernier ne présentait pas de garanties de représentation ; que, par suite le préfet du Var a pu légalement décider que M. X serait placé en rétention administrative ;

Considérant que M. X ne saurait utilement se prévaloir de ce que l'Etat n'aurait pas conclu dans le département du Var une convention ayant pour objet la défense des étrangers placés en rétention administrative avec une association à caractère national, en méconnaissance des dispositions de l'article 5 du décret du 19 mars 2001 relatif aux centres et locaux de rétention ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté et des décisions du 13 février 2003 par lesquels le préfet du Var a ordonné sa reconduite à la frontière, a fixé la Tunisie comme pays de destination de la reconduite et l'a placé en rétention administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mongi Ben Brahim X, au préfet du Var et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 255761
Date de la décision : 30/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2003, n° 255761
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Vestur
Rapporteur ?: M. XX
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:255761.20031230
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